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06/05/2022 | FRANCE | N°21NT01466

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 06 mai 2022, 21NT01466


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. L... F... et Mme C... F..., agissant en leur nom propre et en qualité de représentants légaux des jeunes H... et K... F..., ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre les décisions du 24 février 2020 par lesquelles les autorités consulaires françaises à Dakar ont rejeté les demandes de visas de long séjour présentées en faveur des e

nfants H... et K... F... en qualité de membres de famille de réfugié.

Par un ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. L... F... et Mme C... F..., agissant en leur nom propre et en qualité de représentants légaux des jeunes H... et K... F..., ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre les décisions du 24 février 2020 par lesquelles les autorités consulaires françaises à Dakar ont rejeté les demandes de visas de long séjour présentées en faveur des enfants H... et K... F... en qualité de membres de famille de réfugié.

Par un jugement no 2009324 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mai 2021 et le 24 février 2022, M. L... F... et Mme C... F..., agissant en leur nom propre et en qualité de représentants légaux du jeune K... F..., et M. H... F..., représentés par Me Le Floch, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités ou, à défaut, de réexaminer les demandes, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ne s'est pas réunie dans une composition régulière ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G...,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Floch, représentant M. F... et autres.

Considérant ce qui suit :

1. M. L... F..., ressortissant mauritanien né le 3 février 1980, s'est vu reconnaître le statut de réfugié par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 26 septembre 2014. Le 30 avril 2019, deux de ses enfants allégués, H... et K... F..., respectivement nés le 22 novembre 2002 et le 4 avril 2008 de son union avec Mme C... F..., entrée en France en 2018, ont sollicité des visas de long séjour au titre de la réunification familiale auprès des autorités consulaires françaises à Dakar (Sénégal). Ces dernières ont rejeté les demandes par des décisions du 24 février 2020. Le recours formé le 26 mars 2020 contre ces décisions devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été implicitement rejeté. M. et Mme F..., ainsi que M. H... F..., relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de cette décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.

2. Il ressort du mémoire en défense produit par le ministre de l'intérieur en première instance que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dont elle était saisi en raison du caractère partiel de la réunification familiale.

3. En premier lieu, le moyen tiré de ce qu'aucun élément ne permet de démontrer que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est effectivement réunie pour examiner son recours dans une composition régulière ne peut être utilement invoqué à l'encontre d'une décision implicite.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint (...) / (...) / 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. / (...) / II. - Les articles L. 411-2 à L. 411-4 et le premier alinéa de l'article L. 411-7 sont applicables. / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / (...) ".

5. Aux termes de l'article L. 411-4 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) / Le regroupement familial est sollicité pour l'ensemble des personnes désignées aux articles L. 411-1 à L. 411-3. Un regroupement partiel peut être autorisé pour des motifs tenant à l'intérêt des enfants ".

6. A... ressort des pièces du dossier, notamment de la note de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 4 juin 2019 produite par le ministre de l'intérieur, que M. F..., qui s'est initialement déclaré célibataire à l'office, a déclaré en 2017 être le père de cinq enfants, dont l'un est placé sous la protection de l'OFPRA et né d'une union avec Mme I... J..., tandis que les quatre autres enfants, à savoir les deux demandeurs de visas et Mme E... F..., née le 11 novembre 2001, et le jeune D... F..., né le 5 octobre 2005, sont nés de son union avec Mme F.... Dans leur demande de visa, les jeunes H... et K... n'ont pas précisé pour quelles raisons la réunification familiale n'avait pas été demandée pour l'ensemble de la famille. Si les requérants soutiennent que Mme E... F... n'était pas éligible à la réunification familiale dès lors qu'elle a contracté mariage en 2016, ils n'établissent pas la réalité de cette allégation en se bornant à produire un livret de famille sénégalais, qui n'est pas un acte d'état civil et ne comporte, au surplus, aucune précision quant à la date et au lieu de naissance ainsi qu'à la filiation des époux. Au demeurant, ce livret de famille ne permet pas de tenir pour établie l'existence d'un mariage entre Mme E... F... et un dénommé " Amelli B... ", dès lors que celui-ci aurait été " célébré le 30 septembre 2016 ", à une date à laquelle Mme E... F... était âgée de seulement 14 ans, et que, dans une attestation versée au dossier, une " Mme B... née E... F... " se présente comme la tante des jeunes H... et K... et la sœur de Mme C... F..., et non comme la sœur des premiers et la fille de la seconde. Par ailleurs, et en tout état de cause, si les requérants soutiennent que le jeune D... résidait au Mali lors du dépôt des demandes de visa et à la date de la décision contestée de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, ils n'apportent aucun élément de nature à établir la réalité de cette allégation. Quant à la circonstance que le jeune D... était dépourvu de carte d'identité à la date de la demande de visa, elle n'est pas de nature à justifier qu'il était dans l'intérêt des enfants d'être séparés par l'effet d'un regroupement familial partiel. Dès lors, le moyen tiré de ce que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait fait une inexacte application des dispositions des articles L. 752-1 et L. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté

7. En dernier lieu, les requérants ne se prévalent d'aucun élément de nature à établir que la venue de seulement deux de leurs enfants à leurs côtés justifierait de rompre l'unité de la fratrie en vue de garantir leur droit au respect de leur vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'est pas davantage établi que l'intérêt supérieur des enfants, tel qu'il est protégé par le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant, serait de les séparer de leurs frère et sœur, alors que l'ensemble de la fratrie est séparé des parents depuis plusieurs années. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces stipulations doivent être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Dès lors, leur requête doit être rejetée, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. F... et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... F..., à Mme C... F..., à M. H... F... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 26 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Douet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 mai 2022.

Le rapporteur,

F.-X. G...Le président,

A. Pérez

La greffière,

K. Bouron

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 21NT01466


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01466
Date de la décision : 06/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : LE FLOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-05-06;21nt01466 ?
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