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29/04/2022 | FRANCE | N°21NT03690

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 29 avril 2022, 21NT03690


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2020 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 2011181 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2021, M. C..., représenté par M

e Le Floch, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 novembre 2021 du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2020 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 2011181 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2021, M. C..., représenté par Me Le Floch, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 novembre 2021 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2020 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la date de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour dans le même délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

en ce qui concerne la décision de refus de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant le séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant le séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2022, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. C... n'est fondé.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guéguen, premier conseiller,

- et les observations de Me Le Floch, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant géorgien né le 12 avril 1973, et Mme D... B..., son épouse, ressortissante géorgienne née le 17 mars 1983, sont entrés irrégulièrement en France le 14 novembre 2017, accompagnés de l'enfant de Mme B..., né en 2009 d'une précédente relation, et de l'enfant du couple né le 21 avril 2014, Mme C... ayant ensuite donné naissance à un troisième enfant, né le 5 octobre 2018 à Nantes. Ils ont sollicité leur admission au séjour au titre de l'asile. Leur demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 novembre 2018, confirmée le 26 août 2019 par un arrêt de la Cour nationale du droit d'asile. M C... a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° ou du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des dispositions de l'article L. 313-14 du même code. Par un arrêté du 29 septembre 2020, le préfet de la Loire-Atlantique a pris à son encontre une décision de refus de titre de séjour, qu'il a assortie d'une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et d'une décision fixant son pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 23 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 septembre 2020 du préfet de la Loire-Atlantique.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision contestée et de l'absence d'examen de sa situation avant l'édiction de cette décision, que M. C... réitère en appel, sans apporter de précisions nouvelles.

3. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale... ". Enfin, les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable à la date de la décision, disposent que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Pour l'application de ces dernières dispositions et stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

4. S'il soutient que la décision contestée méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant précités, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige M. C... résidait en France depuis moins de trois années et que son séjour y était ainsi très récent. Les circonstances que deux de ses enfants sont scolarisés dans ce pays, que l'un d'eux y est né et qu'il justifie avec son épouse participer aux activités d'un centre socio-culturel de sa commune de résidence ne suffisent pas à établir l'existence de liens stables et d'une particulière intensité sur le territoire français, alors que l'intéressé ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales en Géorgie, où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans. Par ailleurs, l'épouse du requérant fait également l'objet d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, de sorte que la cellule familiale de M. C... a vocation à se reconstituer en Géorgie. Dans ces conditions, la décision lui refusant le séjour au requérant ne portant pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés. Enfin, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'ayant ni pour objet ni pour effet de séparer M. C... des enfants mineurs dont il assure la charge, l'entretien et l'éducation avec son épouse, le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant doit également, en tout état de cause, être écarté.

5. En troisième et dernier lieu, aux termes des dispositions, alors applicables, de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311 7. (...) ". Si le requérant soutient que le préfet de la Loire-Atlantique aurait dû l'admettre au séjour à titre exceptionnel dès lors qu'à la date de la décision contestée, il résidait en France depuis bientôt trois ans, entouré de sa cellule familiale, ces seules circonstances ne relèvent pas de considérations humanitaires et ne constituent des motifs exceptionnels d'admission au séjour au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, ainsi qu'il a été dit dans un arrêt du même jour concernant l'arrêté pris à l'encontre de son épouse, M. C... n'est pas fondé à invoquer la circonstance que celle-ci ne pourrait bénéficier de soins adaptés en cas de renvoi en Géorgie. Dans ces conditions, la décision par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions.

En ce qui concerne la décision faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français :

6. Eu égard à ce qui a été dit quant à la légalité de la décision portant refus de titre de séjour, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de celle-ci.

7. Pour les mêmes motifs que ceux relevés au point 4, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". La décision contestée n'a ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants de leur mère ni de M. C..., leur beau-père et père, dès lors que les deux parents font également l'objet d'une décision de refus de séjour avec obligation de quitter le territoire français à destination de la Géorgie, pays où tous les membres de la famille sont légalement admissibles dès lors qu'ils en ont tous la nationalité. Elle n'expose pas davantage les deux enfants du requérant ni son beau-fils à un risque particulier pour leur santé, leur sécurité, leur éducation ou leur moralité. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut également qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

9. Eu égard à ce qui a été dit aux points 6 à 8, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant son pays de destination serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :

11. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. C...(/nom)(ano)X(/ano), n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou de réexaminer sa demande doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me Le Floch et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 5 avril 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- M. Guéguen, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2022.

Le rapporteur,

J.-Y. GUÉGUEN

Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT03690


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03690
Date de la décision : 29/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Jean-Yves GUEGUEN
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : LE FLOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-04-29;21nt03690 ?
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