Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 9 mars 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours contre la décision du 19 décembre 2016 du préfet des Bouches du Rhône déclarant irrecevable sa demande de naturalisation.
Par un jugement n° 1706858 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 août 2021, M. C..., représenté par Me Chartier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 octobre 2020 ;
2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 9 mars 2017 et la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 19 décembre 2016 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation car il a transféré ses intérêts matériels et ses attaches familiales en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Douet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né le 29 août 1947, de nationalité moldave et entré en France en 2006, a déposé une demande de naturalisation. Par une décision du 19 décembre 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône a, sur le fondement de l'article 21-16 du code civil, déclaré sa demande irrecevable. Par une décision du 9 mars 2017, le ministre de l'intérieur a rejeté son recours formé contre cette décision et confirmé l'irrecevabilité de sa demande de naturalisation. M. C... relève appel du jugement du 2 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 mars 2017 du ministre de l'intérieur et celle du 19 décembre 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision préfectorale :
2. En application des dispositions de l'article 45 du décret du 30 décembre 1993 visé ci-dessus, les décisions par lesquelles le ministre statue sur les recours préalables obligatoires se substituent à celles des autorités préfectorales qui lui sont déférées. Les conclusions du requérant dirigées contre la décision préfectorale et renouvelées en appel sont, ainsi que l'a jugé le premier juge, irrecevables, sans que le requérant conteste cette irrecevabilité.
En ce qui concerne la décision du ministre de l'intérieur du 9 mars 2017 :
3. D'une part, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " Hors le cas prévu à l'article 21-14-1, l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " et aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993: " (...) / Lorsque les conditions requises par la loi sont remplies, le ministre chargé des naturalisations propose, s'il y a lieu, la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, il déclare la demande irrecevable (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 21-17 du code civil : " (...) la naturalisation ne peut être accordée qu'à l'étranger justifiant d'une résidence habituelle en France pendant les cinq années qui précèdent le dépôt de la demande ".
5. Il résulte de ces dispositions qu'une demande d'acquisition de la nationalité française n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France, de manière stable, le centre de ses intérêts. Pour apprécier si cette dernière condition est remplie, l'administration peut notamment se fonder, sous le contrôle du juge, sur la durée de la présence du demandeur sur le territoire français, sur sa situation familiale et sur le caractère suffisant et durable des ressources qui lui permettent de demeurer en France.
6. Pour déclarer irrecevable la demande de naturalisation présentée par M. C..., le ministre de l'intérieur a estimé, dans sa décision du 9 mars 2017, que l'intéressé ne pouvait être regardé comme ayant fixé en France, de manière stable, le centre de ses intérêts matériels et de ses attaches familiales, dès lors que sa conjointe, Mme B... A..., résidait à l'étranger.
7. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté qu'à la date de la décision en litige la conjointe de M. C..., Mme A..., résidait à l'étranger. Si le requérant soutient être séparé de fait de son épouse et ne plus entretenir de liens avec cette dernière, la seule déclaration de Mme A..., rédigée le 1er février 2019, postérieurement à la décision attaquée, ne permet pas de l'établir. Il est par ailleurs constant qu'aucune procédure de divorce ou de séparation n'a été entamée par les conjoints. Il ressort également du certificat médical établi le 8 février 2017 par le psychiatre qui le suit en France que M. C... voit à l'occasion son épouse lors de " petits voyages en Roumanie ". Si M. C... soutient qu'il est matériellement empêché de demander le divorce en Moldavie car il ne peut s'y rendre en raison d'un mandat d'arrêt international le concernant, délivré par la cour suprême moldave le 25 octobre 1999, cette impossibilité ne peut être tenue pour établie, faute de précisions sur une éventuelle prescription de l'action publique, alors qu'il ressort au contraire de l'ordonnance du 16 mai 2016 par laquelle le tribunal de Budapest a refusé d'extrader M. C... vers la Moldavie, que l'action publique serait prescrite depuis le 24 octobre 2007. En outre, M. C... ne fait valoir aucune attache familiale en France. Dans ces conditions, alors même qu'il réside en France depuis 2006, souffre de problèmes psychiatriques et justifie de cinq années de résidence sous couvert de titres de séjour en qualité d'étranger malade, en déclarant irrecevable la demande de naturalisation de M. C... le ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 21-16 du code civil.
8. Il résulte de ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Douet, présidente-assesseure,
- M. Bréchot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 avril 2022.
La rapporteure,
H. DOUET
Le président,
A. PÉREZ
La greffière,
A. LEMEE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT02449