La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/04/2022 | FRANCE | N°21NT01361

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 05 avril 2022, 21NT01361


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan (Morbihan) approuvant le plan local d'urbanisme de cette commune.

Par un jugement n° 1803945 du 19 mars 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 mai, 6 décembre et 20 décembre 2021 M. et Mme B... et M. A... B..., représentés par le

cabinet Antigone, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan (Morbihan) approuvant le plan local d'urbanisme de cette commune.

Par un jugement n° 1803945 du 19 mars 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 mai, 6 décembre et 20 décembre 2021 M. et Mme B... et M. A... B..., représentés par le cabinet Antigone, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan ;

3°) de condamner la commune de Damgan au versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la délibération du 21 juin 2018 a été prise en méconnaissance des dispositions des articles L. 2121-10 et L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales ;

- le classement des parcelles cadastrées à la section AB sous les nos 70 et 73 en zone Nl est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'institution de l'emplacement réservé n° 4 sur la parcelle AB n° 70 pour la création d'une aire de stationnement sur la parcelle AB n° 70 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement d'une partie de la parcelle AB 66 en zone Ac est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'institution de l'emplacement réservé n° 5 sur la parcelle AB 66 est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement des parcelles AB nos 66 et 73 en zone Nds est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 octobre et 15 décembre 2021, la commune de Damgan, représentée par Me Prieur, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme B... et de M. A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... et M. A... B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 2 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée ce même jour en application des dispositions des l'article R. 611-1-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire présenté pour M. et Mme B... et M. A... B... a été enregistré le 28 février 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Buffet,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me Diversay, pour M. et Mme B... et M. A... B..., et de Me Guil, pour la commune de Damgan.

Une note en délibéré, enregistrée le 28 mars 2022, a été présentée pour la commune de Damgan.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 19 mars 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les demandes de M. et Mme B... et de M. A... B... tendant à l'annulation de la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan approuvant le plan local d'urbanisme de la commune. M. et Mme B... et M. C... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe de la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan portant approbation du plan local d'urbanisme :

2. Aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée. ". Aux termes de l'article L. 2121-11 du même code : " Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion. ".

3. Il ressort des mentions du registre des délibérations du conseil municipal de Damgan, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que les dix-huit membres du conseil municipal ont été régulièrement convoqués le 15 juin 2018 à la séance du 21 juin 2018 du conseil au cours de laquelle a été approuvée le plan local d'urbanisme, soit dans les délais requis, la commune justifiant, en outre, que les convocations ont été transmises aux conseillers municipaux, par voie dématérialisée, le 15 juin 2018, à 14 h 56. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions des articles L. 2121-10 et L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales ont été méconnues doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne du plan local d'urbanisme :

4. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ".

S'agissant du classement en zone Nl de la parcelle AB 70 et d'une partie de la parcelle AB 73 :

5. Aux termes de l'article R. 151-24 du même code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3°) Soit de leur caractère d'espaces naturels / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ".

6. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

7. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Damgan connait une activité touristique importante, notamment durant la période estivale, en raison de l'attractivité de certains sites tels que les plages, la presqu'île de Penerf et la " Tour des anglais " et de la pratique de certaines activités telles que la pêche à pied, la baignade et les sports nautiques. Ainsi qu'il ressort du rapport de présentation, les auteurs de plan local d'urbanisme ont souhaité, dans le but de " gérer les fluctuations de population " sur certaines parties du territoire communal, dont la presqu'île de Penerf, " gérer l'encombrement estival en organisant le report des stationnements estivaux et un transfert du stationnement sur des sites adaptés ". Ils ont ainsi créé un secteur Nl destiné " à recevoir des équipements d'intérêt collectif et les aménagements liés aux loisirs (activités de plein-air, de détente et du stationnement) ". Sont autorisées, dans ce secteur, " Les aires de stationnement indispensables à la maîtrise de la fréquentation automobile et à la prévention de la dégradation de ces espaces par la résorption du stationnement irrégulier, sans qu'il en résulte un accroissement des capacités effectives de stationnement, à condition que ces aires ne soient ni cimentées ni bitumées et qu'aucune autre implantation ne soit possible (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles AB nos 70 et 73, non bâties, qui sont la propriété des requérants, se situent, sur la presqu'ile de Penerf, à l'extrémité de l'enveloppe agglomérée de la commune mais également à proximité du rivage. Elles s'ouvrent, à l'ouest, sur un vaste espace naturel, constitué par la parcelle AB 66, également propriété des requérants, comportant un cheminement jusqu'au domaine public maritime. Elles disposent, à l'est, d'un accès direct à la rue Benoni Thébault qui mène à la mer. Elles permettent ainsi le stationnement des véhicules puis la circulation des piétons soit vers le littoral, soit vers les commerces et services du centre-ville. Par suite, eu égard à leurs caractéristiques et à leur localisation, et alors même qu'elles sont voisines, au sud, de parcelles construites, qu'elles sont raccordées aux réseaux, le classement en zone Nl de la parcelle AB 70 et d'une partie de la parcelle AB 73 n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du parti d'urbanisme retenu.

S'agissant du classement en zone Ac de la partie nord de la parcelle AB 66 :

9. Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ".

10. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation, que les auteurs du plan ont également souhaité maintenir " les activités conchylicoles, garantes de l'identité de Penerf ". Ils ont ainsi créé, le long du rivage, une zone Ac, dans laquelle est classée la partie nord de la parcelle AB 66, voisine des exploitations conchylicoles existantes, zone définie comme correspondant " aux parties du territoire situées sur le domaine terrestre de la commune affectées exclusivement aux activités aquacoles (...) " qui jouxte la zone Ao, exclusivement affectée aux activités aquacoles telles que l'ostréiculture, la mytiliculture ou la pisciculture, situées sur le domaine public maritime. Ces deux zones forment un espace maritime et terrestre d'un seul tenant propre à favoriser la continuité des opérations d'exploitation et de la circulation des engins nécessaires à la pratique de ces cultures et, par suite, à assurer le maintien et le développement des activités aquacoles. Dans ces conditions, et alors même que, depuis l'adoption du plan, le nombre d'exploitations conchylicoles aurait diminué, le classement de cette partie de la parcelle en cause dans la zone Ac n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant du classement, en zone Nds, pour partie, des parcelles AB 66 et AB 73 :

11. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles AB n°s 66 et 73, situées sur la presqu'ile de Penerf et demeurées à l'état naturel, s'étendent jusqu'au domaine public maritime et s'ouvrent sur une vaste zone Natura 2000 référencée FR5300030, dénommée " Rivière de Penerf, marais de Suscinio ". Dans ces conditions, le classement, pour partie, de la parcelle AB 66 et de la parcelle 73 dans la zone Nds " délimitant les espaces terrestres et marins (Domaine Public Maritime), sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentant un intérêt écologique (...) ", n'est pas entaché d'illégalité.

S'agissant de l'emplacement réservé n° 4 :

12. Aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : / 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; / 2° Des emplacements réservés aux installations d'intérêt général à créer ou à modifier (...) ".

13. L'intention d'une commune de réaliser un aménagement sur une parcelle suffit à justifier légalement son classement en tant qu'emplacement réservé, sans qu'il soit besoin pour la collectivité de faire état d'un projet précisément défini. Toutefois, le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle restreint sur le caractère réel de l'intention de la commune. Enfin, il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier l'opportunité du choix de la localisation d'un emplacement réservé par rapport à d'autres localisations possibles.

14. Il ressort du rapport de présentation du plan, dans sa partie intitulée " Penerf une entité patrimoniale à préserver " (page 28) que les auteurs de plan ont souhaité " conforter Penerf, pointe de la presqu'ile, en tant qu'entité maritime patrimoniale " notamment " en confortant le port et les activités qui lui sont liées (pêche, plaisance ...) ". Il ressort des pièces du dossier que le port de Penerf, qui comporte une soixantaine de mouillages, est un lieu de départ de croisières en bateaux et de pratique d'activités liées à la mer. Il constitue également un lieu de festivités estivales. En outre, il ressort des pièces du dossier que la commune a pour projet de rénover le port et de l'adapter aux enjeux touristiques et saisonniers en vue de renforcer l'attractivité de la presqu'ile.

15. Les auteurs du plan ont institué un emplacement réservé n° 4 (de 3 337 m2) sur la parcelle AB 70 en vue de la réalisation " d'une aire de stationnement permettant de répondre aux besoins en la matière dans le secteur de Pénerf, notamment générés par l'activité du port. ", ce dernier étant situé à 50 mètres environ. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'offre de stationnement dans ce secteur serait suffisante, en dépit de la création, sur un site au demeurant plus éloigné, d'un autre emplacement réservé n° 25 dédié au stationnement. La seule circonstance que l'aménagement en aire de stationnement de ces parcelles n'ait pas été réalisé depuis sa création par le précédent plan approuvé le 28 janvier 2014 ne suffit pas à faire regarder l'intention de la commune comme dépourvue de réalité. Par suite, l'institution de cet emplacement réservé n° 4 n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de l'emplacement réservé n°5 :

16. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans et photographies produits à l'instance, que l'emplacement réservé n° 5 emprunte le tracé d'un chemin de terre existant qui longe, au nord de la parcelle AB 66, la zone Ac dédiée aux activités aquacoles, permettant d'assurer, depuis la rue Benoni Thébault, le désenclavement par voie terrestre des exploitations marines situées sur le rivage et d'éviter ainsi le passage des engins sur le domaine public maritime, notamment sur les plages de Pénerf. Dans ces conditions, l'institution de cet emplacement réservé n° 5 pour " la création d'une voie de desserte pour les chantiers ostréicoles pour éviter le passage des engins sur le domaine public maritime " n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

17. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Damgan, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme B... et des consorts B... le versement à la commune de Damgan d'une somme de 1 000 euros au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... et de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme B... et M. A... B... verseront à la commune de Damgan une somme globale de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B..., à M. A... B... et à la commune de Damgan.

Délibéré après l'audience du 18 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente-assesseure,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 avril 2022.

La rapporteure,

C. BUFFETLe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT01361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01361
Date de la décision : 05/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SARL ANTIGONE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-04-05;21nt01361 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award