Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 26 juin 2018 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune de Saint-André-des-Eaux, en totalité ou en partie, en ce qu'il prévoit la réalisation d'une aire d'accueil des gens du voyage sur un terrain classé en zone agricole.
Par un jugement n° 1810655 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 mai 2021, 15 juillet 2021 et 23 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Bernard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 mars 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 26 juin 2018 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune de Saint-André-des-Eaux et le rejet implicite de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la CARENE, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable dès lors que la délibération contestée prévoit l'implantation d'une aire d'accueil des gens du voyage sur une parcelle dont il est le propriétaire ;
- la concertation précédant l'adoption de la délibération a été insuffisante et méconnaît le principe de participation du public reconnu à l'article 7 de la charte de l'environnement annexée à la constitution et l'article L. 110-1 II 5° du code de l'environnement ; les erreurs, lacunes et omissions du projet de révision générale du PLU ont nui à l'information et à la participation du public ;
- la procédure d'enquête publique est irrégulière en raison de l'absence de chiffrage des dépenses induites par le projet d'aire d'accueil des gens du voyage, notamment les mesures compensatoires des effets de l'accès à l'aire qui traversera une zone humide ;
- le classement de la zone de Tétras en zone Ab et non AUe et la possibilité d'y réaliser une aire d'accueil des gens du voyage apparaissent incohérentes ;
- l'aire d'accueil et son accès sont situés dans une zone régulièrement inondée, ce qui pose un problème de sécurité.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 juillet 2021 et le 26 août 2021, la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable car elle se borne à reprendre exactement les mêmes moyens que devant le tribunal administratif et ne soulève aucun moyen de régularité du jugement attaqué ;
- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Douet,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- et les observations de Me Bernard, représentant M. B..., et les observations de Me Léon, substituant Me Marchand, représentant la Communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 26 juin 2018, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-André-des-Eaux, qui avait été initialement approuvé par une délibération du 14 septembre 2007 du conseil municipal de la commune de Saint-André-des-Eaux. Les principales évolutions du plan local d'urbanisme sont la suppression de la zone 2AUe C... au profit d'une zone Ab, accompagnée d'une modification du règlement pour la réalisation d'une aire d'accueil des gens du voyage et des modifications du règlement au regard de la définition des destinations. Le 25 juillet 2018, M. B..., propriétaire de plusieurs parcelles situées sur le territoire de la commune, a introduit un recours gracieux contre cette délibération. Ce recours a fait l'objet d'un refus implicite de la part de la CARENE. Il relève appel du jugement du 16 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si M. B... soutient que le tribunal a commis des erreurs de raisonnement et des erreurs de droit, de tels moyens, qui se rattachent au bien-fondé du jugement attaqué, sont sans incidence sur sa régularité.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les moyens susceptibles d'entraîner l'annulation totale de la délibération du 26 juin 2018 :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " I - Le conseil municipal (...) délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : / a) Toute élaboration ou révision (...) du plan local d'urbanisme (...) / Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux a, b et c ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la délibération prévue au premier alinéa ont été respectées. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la légalité d'une délibération approuvant un plan local d'urbanisme ne saurait être contestée au regard des modalités de la procédure de concertation qui l'a précédée dès lors que celles-ci ont respecté les modalités définies par la délibération prescrivant l'élaboration de ce document d'urbanisme.
4. M. B... soutient que la commune n'a pas mis en place un registre dématérialisé pour recueillir les observations du public et que la concertation précédant l'adoption de la délibération a été de ce fait insuffisante. Toutefois, d'une part, il ne conteste pas le respect des modalités définies par la délibération prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme, et, d'autre part, un tel registre n'était nullement obligatoire, la délibération du 22 septembre 2014 qui a fixé les modalités de la concertation ayant notamment prévu, au titre des moyens offerts au public pour s'exprimer, la mise à disposition d'un registre de concertation, la création d'une adresse courriel dédiée et la mise en place de permanences par les élus en charge du dossier. Enfin, la circonstance alléguée que les documents soumis au public comportaient des erreurs, lacunes et omissions est sans incidence sur les modalités de la procédure de concertation.
5. En second lieu, il ne résulte d'aucun texte législatif ou réglementaire que le dossier soumis à enquête publique, dans le cas d'une révision du plan local d'urbanisme, doive comprendre une évaluation sommaire des dépenses. Par suite, le moyen tiré par M. B... d'un vice de procédure affectant l'enquête publique doit être écarté.
En ce qui concerne les moyens susceptibles d'entraîner l'annulation partielle de la délibération du 26 juin 2018 :
6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions. / A ce titre, le règlement peut : / (...) / 8° Fixer les emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d'intérêt général ainsi qu'aux espaces verts ; / (...) Dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, le règlement peut délimiter des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels des constructions peuvent être autorisées à la condition qu'elles ne portent atteinte ni à la préservation des sols agricoles et forestiers ni à la sauvegarde des sites, milieux naturels et paysages. Le règlement précise les conditions de hauteur, d'implantation et de densité des constructions permettant d'assurer leur insertion dans l'environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. ". Aux termes de l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : 1° Des constructions ;/ 2° Des aires d'accueil et des terrains familiaux locatifs destinés à l'habitat des gens du voyage au sens de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage (...) ".
7. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de fixer la liste des emplacements réservés notamment pour la création d'installations d'intérêt général. Leur appréciation ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
8. Le requérant soutient que l'aire d'accueil des gens du voyage est prévue sur une surface de 15 000 m², soit cinq fois plus que les préconisations du schéma départemental d'accueil des gens du voyage, et que le projet " pose une difficulté pour la préservation de la zone agricole ". Il soutient également qu'il conviendrait de " s'interroger sur un classement en zone humide de cette zone " et que l'aire aurait pu être localisée " à un endroit autre ". Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme ont, sur les parcelles cadastrées section BN nos133, 134, 50, 53 et 54, réservé un emplacement à fin de réalisation d'une aire d'accueil des gens du voyage, dont la création était prévue, sur le territoire de la commune de Saint-André-des-Eaux, par le schéma départemental d'accueil des gens du voyage. Il ressort de ces mêmes pièces, notamment du rapport de présentation du PLU, que les réseaux passent à proximité des parcelles concernées et que celles-ci sont situées à l'extérieur mais à proximité du bourg et de la route départementale D47, dans une zone agricole. L'impact allégué de cet emplacement réservé sur la zone agricole environnante, au sujet duquel M. B... n'apporte aucune précision, n'est pas établi par les pièces du dossier. Enfin, s'il ressort des pièces du dossier que le projet d'aire d'accueil des gens du voyage nécessitera des travaux d'aménagement de la voirie, par la création d'un accès par la route de Taubry, afin de tenir compte de l'interdiction émise par le département de la Loire-Atlantique de créer un nouvel accès direct sur la RD 47, ainsi que la création d'un bassin de rétention pour compenser l'inondabilité de certaines parties des parcelles, M. B... n'établit pas, par les photos produites, que la totalité de l'emplacement réservé serait inondable ni que les mesures de compensation envisagées seraient insuffisantes. Par suite, le moyen tiré de ce que la création de l'emplacement réservé dans ce secteur serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
9. En second lieu, il résulte des articles L. 151-5, L. 151-9, R. 151-22 et R. 151-23 du code de l'urbanisme qu'une zone agricole, dite "zone A", du plan local d'urbanisme (PLU) a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables (PADD), un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.
10. Il ressort des pièces du dossier que la délibération du 26 juin 2018 supprime le classement en zone 2AUe du secteur dit C... au profit d'une zone Ab. La zone 2AUe correspond à la zone d'urbanisation future à vocation économique et la zone Ab est le secteur agricole de transition entre la zone agglomérée et la zone agricole, dans lequel est interdite toute nouvelle construction. En se bornant à soutenir que le classement de la zone de Tétras et la possibilité d'y réaliser sur un emplacement réservé une aire d'accueil des gens du voyage apparaissent incohérentes, M. B... n'assortit pas son moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la CARENE à la requête d'appel, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 1 500 euros à verser à la CARENE au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire.
Copie en sera adressé, pour information, à la commune de Saint-André-des-Eaux.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Douet, présidente-assesseure,
- Mme Bougrine, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2022.
La rapporteure,
H. DOUET
Le président,
A. PÉREZ
La greffière,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités locales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT01337