Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine du 11 janvier 2016 opposant un refus à sa demande tendant à ce que l'Etat prenne en charge le financement de l'accompagnant des élèves en situation de handicap recruté pour assister sa fille à l'occasion de sa scolarisation en école maternelle, lorsque ce dernier intervient en dehors du temps scolaire et de la pause méridienne et d'enjoindre à l'Etat de faire droit à sa demande
Par un jugement n° 1600150 du 30 juin 2016, le tribunal administratif de Rennes a annulé cette décision (article 1er), mis à la charge de l'Etat une somme de 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et rejeté le surplus des conclusions de sa demande (article 3).
Procédure devant la cour avant cassation :
Par une requête, enregistrée le 25 août 2016, le ministre de l'éducation nationale demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Rennes du 30 juin 2016 ;
2°) de rejeter l'ensemble des demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Rennes.
Il soutient que :
- l'article L. 551-1 du code de l'éducation définit les activités périscolaires comme facultatives à la fois pour les enfants des écoles et pour les communes susceptibles de les organiser ; ces activités périscolaires ne sauraient donc être regardées comme une composante nécessaire à la scolarisation des enfants et au droit à l'éducation proclamé par les articles
L. 111-1 et 112-1 du code de l'éducation ;
- à supposer que les activités périscolaires, qui se déroulent pendant la pause méridienne ou entre deux périodes d'enseignement, rentrent dans le champ des activités nécessaires à la scolarisation de l'enfant, tel n'est pas le cas des activités périscolaires organisées en début ou en fin de journée, avant ou après la classe, lesquelles ne contribuent pas directement à la scolarisation de l'enfant ;
- les textes prévoient la mise à disposition des assistants d'éducation auprès des communes pour participer aux activités complémentaires, sans pour autant prévoir la prise en charge par l'Etat des moyens financiers correspondants dès lors que ces activités n'entrent pas dans son champ de compétence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 août 2017, M. C... B..., représenté par Me Blanquet, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à ce que ses conclusions à fin d'injonction rejetées par le tribunal administratif de Rennes soient accueillies, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat au versement de la somme de 2 000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 9 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le ministre n'est fondé.
Par un arrêt n° 16NT02951 du 15 mai 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par le ministre de l'éducation nationale contre ce jugement en tant qu'il annule la décision du 11 janvier 2016 et, sur appel incident de M. B..., a enjoint à l'Etat de permettre à la fille de M. B... d'être suivie par un accompagnant des élèves en situation de handicap pendant l'ensemble des périodes prévues par la décision de la commission départementale des droits et de l'autonomie des personnes handicapées d'Ille-et-Vilaine.
Par une décision n° 422248 du 20 novembre 2020, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et a renvoyé à la cour administrative d'appel de Nantes l'affaire, qui porte désormais le n° 20NT03661.
Procédure devant la cour après cassation :
Par des mémoires, enregistrés les 18 décembre 2020 et 14 avril 2021, le ministre de l'éducation nationale conclut à l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 30 juin 2016 du tribunal administratif de Rennes et au rejet des demandes présentées par M. B... devant le tribunal.
Il soutient qu'il reprend ses observations présentées dans son mémoire du 25 août 2016 et que l'Etat a satisfait à son obligation d'information et de concertation avec la commune concernée s'agissant de la mise en place d'un accompagnement de l'enfant sur le temps périscolaire.
En application de l'article R. 611-7-3 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par lettre du 13 janvier 2022, que l'arrêt à intervenir paraît susceptible d'impliquer le prononcé d'office d'une injonction, assortie le cas échéant d'une astreinte, à l'Etat, de déterminer avec la collectivité territoriale qui organise le service de restauration et/ou les activités complémentaires ou périscolaires dans son établissement si et, le cas échéant, comment la personne déjà recrutée par les services académiques pour accompagner l'enfant concerné peut intervenir auprès de cet enfant durant ce service et/ou ces activités, de façon à assurer, dans l'intérêt de l'enfant, la continuité de l'aide qui lui est apportée, cette injonction étant conditionnée par la situation actuelle de l'enfant concerné au regard de sa scolarisation.
Le ministre de l'éducation nationale a répondu à cette lettre par un mémoire enregistré le 26 janvier 2022.
Il fait valoir que l'enfant de M. B... n'est pas inscrite dans un établissement d'enseignement public pour l'année scolaire 2021-2022 et que lors d'une réunion du 15 mai 2019, M. B... a indiqué qu'il opterait pour un établissement d'enseignement privé hors contrat ne proposant pas d'activités extrascolaires, voire pour une instruction dans la famille.
Par une décision du 24 novembre 2016, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de l'éducation ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2003-400 du 30 avril 2003 ;
- la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 ;
- la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Picquet,
- les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique,
- et les observations de M. A... représentant le ministre de l'éducation nationale.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées d'Ille-et-Vilaine a décidé le 23 juillet 2015 que la scolarisation de l'enfant Sama Maxo à l'école maternelle de Bruz durant l'année scolaire 2015-2016 requiert, compte tenu de sa situation de handicap, tant pour le temps scolaire que pour le temps périscolaire, une aide individuelle, c'est-à-dire un accompagnement par une personne chargée de l'assister. La direction des services départementaux de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine de l'académie de Rennes a ainsi recruté un auxiliaire de vie scolaire, puis, son contrat ayant pris fin, un accompagnant d'élève en situation de handicap, afin qu'il apporte une aide individuelle à cet enfant durant le temps scolaire et la pause méridienne. M. B..., père de l'enfant, a demandé que l'accompagnant recruté par l'Etat assiste également sa fille durant le temps d'accueil que la commune de Bruz organise dans l'école maternelle le matin ou l'après-midi avant ou après le temps scolaire ainsi que durant le temps des activités périscolaires que cette collectivité propose le jeudi après-midi aux enfants scolarisés dans cette école. Par une décision du 11 janvier 2016, le directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine a opposé un refus à sa demande, au motif que l'ensemble des temps périscolaires relève de la responsabilité exclusive de la collectivité territoriale qui les organise et qu'il lui appartient d'en supporter la charge financière. Par un jugement du 30 juin 2016, le tribunal administratif de Rennes a annulé pour excès de pouvoir cette décision. Le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt du 15 mai 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel dirigé contre les articles 1er et 2 de ce jugement et lui a enjoint de permettre à l'enfant de M. B... d'être suivi par un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) pendant les périodes scolaires et périscolaires, telles que préconisées par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) d'Ille-et-Vilaine.
Par une décision n° 422248 du 20 novembre 2020, statuant au contentieux, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé à la cour administrative d'appel de Nantes l'affaire pour y être jugée.
Sur le cadre juridique :
En ce qui concerne l'accès des enfants en situation de handicap à l'éducation :
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) Le service public de l'éducation (...) veille à l'inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction. (...) ". Aux termes de l'article L. 111-2 du même code dans sa rédaction alors applicable: " Tout enfant a droit à une formation scolaire qui, complétant l'action de sa famille, concourt à son éducation. / (...) / Pour favoriser l'égalité des chances, des dispositions appropriées rendent possible l'accès de chacun, en fonction de ses aptitudes et de ses besoins particuliers, aux différents types ou niveaux de la formation scolaire. / (...) ". Aux termes de l'article L. 112-1 de ce code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Pour satisfaire aux obligations qui lui incombent en application des articles L. 111-1 et L. 111-2, le service public de l'éducation assure une formation scolaire (...) aux enfants (...) présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant. Dans ses domaines de compétence, l'Etat met en place des moyens financiers et humains nécessaires à la scolarisation en milieu ordinaire des enfants (...) handicapés. / (...) ". Aux termes de l'article L. 112-2 du code de l'éducation, dans sa rédaction applicable : " Afin que lui soit assuré un parcours de formation adapté, chaque enfant (...) handicapé a droit à une évaluation de ses compétences, de ses besoins et des mesures mises en œuvre (...). Cette évaluation est réalisée par l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article L. 146-8 du code de l'action sociale et des familles. (...) En fonction des résultats de l'évaluation, il est proposé à chaque enfant (...) handicapé, ainsi qu'à sa famille, un parcours de formation qui fait l'objet d'un projet personnalisé de scolarisation assorti des ajustements nécessaires en favorisant, chaque fois que possible, la formation en milieu scolaire ordinaire. Le projet personnalisé de scolarisation constitue un élément du plan de compensation visé à l'article L. 146-8 du code de l'action sociale et des familles. Il propose des modalités de déroulement de la scolarité coordonnées avec les mesures permettant l'accompagnement de celle-ci figurant dans le plan de compensation ".
3. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, d'une part, le droit à l'éducation étant garanti à chacun quelles que soient les différences de situation, et, d'autre part, que le caractère obligatoire de l'instruction s'appliquant à tous, les difficultés particulières que rencontrent les enfants en situation de handicap ne sauraient avoir pour effet ni de les priver de ce droit, ni de faire obstacle au respect de cette obligation. Il incombe à cet égard à l'Etat, au titre de sa mission d'organisation générale du service public de l'éducation, de prendre l'ensemble des mesures et de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que ce droit et cette obligation aient, pour les enfants en situation de handicap, un caractère effectif.
En ce qui concerne l'aide individuelle susceptible d'être allouée aux enfants en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire :
4. Aux termes de l'article L. 351-1 du code de l'éducation dans sa rédaction alors applicable : " Les enfants et adolescents présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant sont scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires (...), si nécessaire au sein de dispositifs adaptés, lorsque ce mode de scolarisation répond aux besoins des élèves. (...) ". Ainsi que le précise ce même article L. 351-1, la décision est prise, en accord avec les parents ou le représentant légal, par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée par l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles. Cette commission est constituée au sein de chaque maison départementale des personnes handicapées et composée de représentants du département, des services et établissements publics de l'Etat, des organismes de protection sociale, des organisations syndicales, des associations de parents d'élèves et des représentants des personnes handicapées et de leurs familles et d'un membre du conseil départemental consultatif des personnes handicapées. En outre, ainsi que l'indique le même article L. 351-1, " dans tous les cas et lorsque leurs besoins le justifient, les élèves bénéficient des aides et accompagnements complémentaires nécessaires ". Aux termes de l'article L. 351-3 du code de l'éducation, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque la commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles constate que la scolarisation d'un enfant dans une classe de l'enseignement public ou d'un établissement mentionné à l'article L. 442-1 du présent code requiert une aide individuelle dont elle détermine la quotité horaire, cette aide peut notamment être apportée par un accompagnant des élèves en situation de handicap recruté conformément aux modalités définies à l'article L. 917-1. / (...) / L'aide individuelle mentionnée au premier alinéa du présent article peut, après accord entre l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation et la famille de l'élève, lorsque la continuité de l'aide est nécessaire à l'élève en fonction de la nature particulière de son handicap, être assurée par une association ou un groupement d'associations ayant conclu une convention avec l'Etat (...) ". Aux termes de l'article L. 917-1 du code de l'éducation, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Des accompagnants des élèves en situation de handicap peuvent être recrutés pour exercer des fonctions d'aide à l'inclusion scolaire de ces élèves, y compris en dehors du temps scolaire. Ils sont recrutés par l'Etat, par les établissements d'enseignement mentionnés au chapitre II du titre Ier et au titre II du livre IV de la deuxième partie ou par les établissements mentionnés à l'article L. 442-1. (...) / (...) / Ils peuvent exercer leurs fonctions dans l'établissement qui les a recrutés, dans un ou plusieurs autres établissements ainsi que, compte tenu des besoins appréciés par l'autorité administrative, dans une ou plusieurs écoles. (...) / Ils peuvent être mis à la disposition des collectivités territoriales dans les conditions prévues à l'article L. 916-2 du présent code. (...) ".
5. Il résulte des dispositions qui viennent d'être citées, éclairées par leurs travaux préparatoires, notamment ceux de la loi du 30 avril 2003 relative aux assistants d'éducation et de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, que lorsque la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées constate qu'un enfant en situation de handicap scolarisé en milieu ordinaire doit bénéficier d'une aide humaine, elle lui alloue l'aide individuelle prévue à l'article L. 351-3 du code de l'éducation, à hauteur d'une quotité horaire qu'il lui revient de déterminer et qui, eu égard à son objet, ne peut concerner que le temps dédié à la scolarité. A ce titre, lorsque l'inscription de l'enfant est prévue dans une école maternelle ou une école élémentaire relevant de l'enseignement public, il appartient à l'Etat de prendre en charge, pour le temps scolaire, l'organisation et le financement de cette aide individuelle, le cas échéant en recrutant un accompagnant des élèves en situation de handicap selon les modalités prévues à l'article L. 917-1 du code de l'éducation.
En ce qui concerne la participation des élèves en situation de handicap au service de restauration scolaire et aux activités complémentaires et périscolaires pouvant être organisées par une collectivité territoriale :
6. Aux termes de l'article L. 114-1 du code de l'action sociale et des familles : " Toute personne handicapée a droit à la solidarité de l'ensemble de la collectivité nationale, qui lui garantit, en vertu de cette obligation, l'accès aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté ". Aux termes de l'article L. 114-1-1 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " La personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie. / Cette compensation consiste à répondre à ses besoins, qu'il s'agisse de l'accueil de la petite enfance, de la scolarité, de l'enseignement, de l'éducation (...) ". Aux termes de l'article L. 114-2 de ce code : " Les familles, l'Etat, les collectivités locales, les établissements publics (...) associent leurs interventions pour mettre en œuvre l'obligation prévue à l'article L. 114-1, en vue notamment d'assurer aux personnes handicapées toute l'autonomie dont elles sont capables. / A cette fin, l'action poursuivie vise à assurer l'accès de l'enfant, de l'adolescent ou de l'adulte handicapé aux institutions ouvertes à l'ensemble de la population et son maintien dans un cadre ordinaire de scolarité, de travail et de vie (...) ".
7. Aux termes de l'article L. 216-1 du code de l'éducation : " Les communes, départements ou régions peuvent organiser dans les établissements scolaires, pendant leurs heures d'ouverture et avec l'accord des conseils et autorités responsables de leur fonctionnement, des activités éducatives, sportives et culturelles complémentaires. Ces activités sont facultatives et ne peuvent se substituer ni porter atteinte aux activités d'enseignement et de formation fixées par l'Etat. Les communes, départements et régions en supportent la charge financière. Des agents de l'Etat, dont la rémunération leur incombe, peuvent être mis à leur disposition. / (...) / L'organisation des activités susmentionnées est fixée par une convention, conclue entre la collectivité intéressée et l'établissement scolaire, qui détermine notamment les conditions dans lesquelles les agents de l'Etat peuvent être mis à la disposition de la collectivité ". Aux termes de l'article L. 551-1 du même code : " Des activités périscolaires prolongeant le service public de l'éducation, et en complémentarité avec lui, peuvent être organisées dans le cadre d'un projet éducatif territorial associant notamment aux services et établissements relevant du ministre chargé de l'éducation nationale d'autres administrations, des collectivités territoriales, des associations et des fondations, sans toutefois se substituer aux activités d'enseignement et de formation fixées par l'Etat. (...) / Le projet éducatif territorial vise notamment à favoriser, pendant le temps libre des élèves, leur égal accès aux pratiques et activités culturelles et sportives et aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. Les établissements scolaires veillent, dans l'organisation des activités périscolaires à caractère facultatif, à ce que les ressources des familles ne constituent pas un facteur discriminant entre les élèves ".
8. Lorsqu'une collectivité territoriale organise un service de restauration scolaire ou des activités complémentaires aux activités d'enseignement et de formation pendant les heures d'ouverture des établissements scolaires ou encore des activités périscolaires sur le fondement des dispositions citées au point précédent, il lui incombe, ainsi qu'il résulte, notamment, des dispositions du code de l'action sociale et des familles citées au point 6, de veiller à assurer que, sans préjudice du respect des conditions prévues pour l'ensemble des élèves, les élèves en situation de handicap puissent, avec, le cas échéant, le concours des aides techniques et des aides humaines dont ces élèves bénéficient au titre de leur droit à compensation en application du code de l'action sociale et des familles et du code de la sécurité sociale, y avoir effectivement accès.
9. A cet égard, en vertu de l'article L. 917-1 du code de l'éducation, cité au point 4, les accompagnants des élèves en situation de handicap recrutés par l'Etat sur le fondement d'une décision d'une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ayant alloué l'aide individuelle prévue à l'article L. 351-3 du code de l'éducation, peuvent intervenir " y compris en dehors du temps scolaire ". A ce titre, ils peuvent notamment être mis à la disposition de la collectivité territoriale dans les conditions prévues à l'article L. 916-2 du code de l'éducation, c'est-à-dire sur le fondement d'une convention conclue entre la collectivité intéressée et l'employeur dans les conditions prévues à l'article L. 216-1 du même code, lequel précise qu'il revient à la collectivité territoriale d'assurer la charge financière de cette mise à disposition. Ils peuvent également être directement employés par la collectivité territoriale pour ces heures accomplies " en dehors du temps scolaire ". Enfin, ils peuvent être recrutés conjointement par l'Etat et par la collectivité territoriale ainsi que le prévoient désormais les dispositions de l'article L. 917-1 du code de l'éducation, dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, non applicable au présent litige.
10. Il s'ensuit que lorsque l'Etat, sur le fondement de la décision d'une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées allouant l'aide prévue à l'article L. 351-3 du code de l'éducation, recrute une personne pour accompagner un enfant en situation de handicap durant le temps scolaire et qu'en outre, cet enfant recourt au service de restauration scolaire ou participe à tout ou partie des activités complémentaires ou périscolaires organisées dans son établissement scolaire, il appartient à l'Etat de déterminer avec la collectivité territoriale qui organise ce service et ces activités si et, le cas échéant, comment cette même personne peut intervenir auprès de l'enfant durant ce service et ces activités, de façon à assurer, dans l'intérêt de l'enfant, la continuité de l'aide qui lui est apportée.
Sur le moyen retenu par le tribunal :
11. Il ressort des pièces du dossier que l'Etat a pris en charge, comme il était tenu de le faire, et pour le temps scolaire, le recrutement et la rémunération d'un accompagnant des élèves en situation de handicap pour l'enfant Sama Maxo, scolarisée à l'école maternelle de Bruz. En revanche, ainsi qu'il a été dit au point 8, l'Etat n'avait pas à prendre en charge financièrement le coût de l'accompagnant chargé d'assister cet enfant durant le temps d'accueil que la commune de Bruz organise dans l'école maternelle le matin ou l'après-midi avant ou après le temps scolaire ainsi que durant le temps des activités périscolaires que cette collectivité propose le jeudi après-midi aux enfants scolarisés dans cette école, cette charge financière incombant à la seule collectivité organisatrice. Par suite, le ministre de l'éducation nationale est fondé à soutenir qu'en refusant implicitement la prise en charge financière de l'accompagnement de la fille de M. B... en dehors du temps scolaire, le directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine n'a pas méconnu les dispositions citées aux points 2 à 7.
12. En revanche, ainsi qu'il a été dit au point 10, lorsque l'Etat, comme dans le cas litigieux, recrute une personne pour accompagner un enfant en situation de handicap durant le temps scolaire et qu'en outre, cet enfant participe au service de restauration scolaire ou à tout ou partie des activités complémentaires ou périscolaires organisées dans l'établissement scolaire, il appartient à l'Etat de déterminer avec la collectivité territoriale qui organise ce service et ces activités si et, le cas échéant, comment cette même personne peut intervenir auprès de l'enfant durant ce service et ces activités, de façon à assurer, dans l'intérêt de l'enfant, la continuité de l'aide qui lui est apportée. Ainsi, en laissant à M. B... le soin de se rapprocher de la commune de Bruz pour organiser l'accompagnement de sa fille durant le temps d'accueil que la commune organise dans l'école maternelle le matin ou l'après-midi avant ou après le temps scolaire ainsi que durant le temps des activités périscolaires que cette collectivité propose le jeudi après-midi aux enfants scolarisés dans cette école, sans intervenir activement, lui-même ou par ses services, le directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine a méconnu les obligations dont il avait la charge. Le ministre de l'éducation nationale ne peut pas se prévaloir de l'existence de conventions conclues entre l'Etat et la commune de Bruz dès lors que la convention du 6 novembre 2015 a pour objet le temps de la pause méridienne, qui n'est pas en litige, et que les deux autres conventions, qui sont postérieures à la décision contestée du 11 janvier 2016, présentent, en tout état de cause, un caractère provisoire dans la mesure où elles ont été conclues en exécution d'une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rennes du 1er février 2016.
13. Il suit de là que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 351-3 et L. 917-1 du code de l'éducation pour annuler, dans sa totalité, la décision du directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine du 11 janvier 2016, alors qu'il aurait dû l'annuler partiellement pour ce motif.
14. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal et la cour.
Sur les autres moyens :
15. En premier lieu, M. B... ne saurait utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision du directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine du 11 janvier 2016, de la méconnaissance de l'article R. 241-31 du code de l'action sociale et des familles, ce dernier ne portant que sur les décisions de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. En tout état de cause, la décision contestée du 11 janvier 2016 mentionne notamment que " les activités périscolaires sont de la responsabilité des collectivités locales, qui en supportent la charge financière. Ce sont les collectivités territoriales qui doivent veiller à l'accessibilité des activités périscolaires et s'assurer de la présence humaine lorsque la mise en accessibilité de ces activités le nécessite (article L. 212-15 du code de l'éducation). A ce titre, il convient de souligner que l'article L. 917-1 du code de l'éducation prévoit désormais que les AVS-AESH peuvent être mis à disposition des collectivités territoriales par voie de convention. Il appartient alors aux collectivités territoriales de prendre en charge leur rémunération (art. L. 916-2, L. 216-1 et L. 212-15 du code de l'éducation). ". Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision contestée n'est pas suffisamment motivée doit être écarté.
16. En second lieu, si M. B... soutient qu'en fixant le nombre d'heures de travail hebdomadaire de l'AVS de sa fille, pendant le temps scolaire et la pause méridienne, le directeur académique a limité arbitrairement le temps de travail de sa fille dans l'école, en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, il y a lieu d'écarter ce moyen pour les mêmes motifs que ceux indiqués aux points 2 à 10.
17. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé, dans sa totalité, la décision du directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine du 11 janvier 2016 rejetant la demande de M. B... tendant à accorder à Sama Maxo un assistant de vie scolaire durant le temps d'accueil que la commune de Bruz organise dans l'école maternelle le matin ou l'après-midi avant ou après le temps scolaire ainsi que durant le temps des activités périscolaires que cette collectivité propose le jeudi après-midi aux enfants scolarisés dans cette école, alors que cette décision ne devait être annulée qu'en tant qu'elle laisse aux seuls parents de Sama Maxo le soin de se rapprocher de la commune de Bruz pour organiser l'accompagnement de leur enfant lors des temps d'accueil ou des activités périscolaires.
Sur l'injonction :
18. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".
19. Pour les motifs indiqués au point 11, les conclusions présentées par M. B... à fin d'enjoindre à l'Etat de prendre en charge le financement de l'accompagnant des élèves en situation de handicap recruté pour assister sa fille à l'occasion de sa scolarisation en école maternelle, lorsque ce dernier intervient en dehors du temps scolaire et de la pause méridienne, doivent être rejetées.
20. Compte tenu des éléments d'information produits par le ministre, le présent arrêt, en ce qu'il censure les décisions contestées en tant qu'elles ont laissé à M. B... le soin d'organiser seul l'accompagnement de son enfant pour la période périscolaire, n'implique aucune nouvelle mesure d'exécution.
Sur les frais liés au litige de première instance et au litige d'appel :
21. Contrairement à ce que soutient le ministre, M. B... n'étant pas la partie perdante, il n'y a pas lieu d'annuler l'article 2 du jugement attaqué mettant à la charge de l'Etat la somme de 100 euros, au bénéfice de M. B..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me Blanquet, avocat de M. B..., dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement n°1600150 du tribunal administratif de Rennes du
30 juin 2016 en tant qu'il annule la décision du directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine du 11 janvier 2016 en tant qu'elle refuse implicitement la prise en charge financière de l'accompagnement de la fille de M. B... en dehors du temps scolaire est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Rennes et dirigées contre la décision du directeur académique des services de l'éducation nationale d'Ille-et-Vilaine du 11 janvier 2016 en tant qu'elle refuse implicitement la prise en charge financière de l'accompagnement de la fille de M. B... en dehors du temps scolaire, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction, sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du ministre de l'éducation nationale est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Me Blanquet, conseil de M. B..., au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative, dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Article 5 : Le surplus des conclusions en appel de M. B... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et à M. C... B....
Une copie sera transmise, pour information, au recteur de l'académie de Rennes et à la commune de Bruz.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Geffray, président,
- M. Brasnu, premier conseiller,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2022.
La rapporteure
P. PicquetLe président
J-E. Geffray
La greffière
A. Marchais
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT03661
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