Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B..., a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 14 septembre 2021 du préfet de la Sarthe l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 2009900 du 20 avril 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe le pays à destination duquel Mme B... pourra être reconduite et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 mai 2021, le préfet de la Sarthe demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes du 20 avril 2021 en tant qu'il annule partiellement son arrêté du 14 septembre 2021 ;
2°) de rejeter la demande de Mme B... dirigée contre la décision fixant le pays de renvoi.
Il soutient que le premier juge a estimé à tort que la décision fixant le pays de renvoi était insuffisamment motivée.
La requête a été communiquée le 24 juin 2021 à Mme B..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante russe née le 5 juillet 1996, est entrée irrégulièrement en France le 2 février 2017, selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 26 novembre 2019 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 8 septembre 2020 de la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 14 septembre 2021, le préfet de la Sarthe a obligé Mme B... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet de la Sarthe relève appel du jugement du 20 avril 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe le pays de renvoi.
Sur le bien-fondé du motif d'annulation retenu par le premier juge :
2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ". Aux termes de l'article L. 513-2 du même code : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné :
/ 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".
3. Pour annuler la décision litigieuse par laquelle le préfet de la Sarthe a fixé le pays à destination duquel Mme B... pourrait être reconduite, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur la circonstance que, alors même que le préfet n'était pas tenu de préciser en quoi sa vie ou sa liberté ne serait pas menacée ni en quoi elle ne serait pas exposée à des peines ou traitements inhumains et dégradants, cette décision ne comportait cependant pas les considérations de fait en constituant le fondement. Toutefois, l'arrêté contesté du 14 septembre 2021, qui vise notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 511-1 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indique que l'intéressée est de nationalité russe, que sa demande d'asile a été rejetée par les instances compétentes, qu'elle pourra être reconduite d'office à destination notamment du pays dont elle a la nationalité, pays qu'elle n'établit pas ne pas pouvoir regagner et que son éloignement ne contrevient pas aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La décision fixant le pays de renvoi comporte ainsi les considérations tant de droit que de fait qui en constituent le fondement. Par suite, c'est à tort que, pour annuler cette décision fixant le pays de renvoi contenu dans l'arrêté du 14 septembre 2021 du préfet de la Sarthe, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur le motif tiré d'une insuffisance de sa motivation.
4. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... en première instance au soutien de sa demande dirigée contre la décision fixant le pays de renvoi.
Sur les autres moyens invoqués par Mme B... :
5. En premier lieu, il ne ressort pas de la motivation de la décision fixant le pays de renvoi, telle qu'exposée au point 3, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme B....
6. En deuxième lieu, ainsi que l'a jugé à bon droit le premier juge, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, la décision du 14 septembre 2021 obligeant Mme B... à quitter le territoire français n'est entachée ni d'une insuffisance de motivation, ni d'un défaut d'examen de sa situation et n'a été prise en méconnaissance ni des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni des dispositions du 6° du I de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
7. En dernier lieu, si Mme B... fait valoir, sans autre précision, que sa sœur, également de nationalité russe, bénéficie du statut de réfugié, cette seule circonstance n'est pas de nature à elle seule à établir que la décision fixant le pays de renvoi porterait une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Sarthe est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 14 septembre 2021 en tant qu'il fixe le pays à destination duquel Mme B... pourra être reconduite.
D E C I D E
Article 1er : L'article 1er du jugement n° 2009900 du 20 avril 2021 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Nantes aux fins d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du 14 septembre 2021 est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme A... B....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- M. L'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 4 février 2022.
La rapporteure,
C. BRISSON
Le président,
D. SALVI
La greffière
A. MARTIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21NT014092