La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/02/2022 | FRANCE | N°21NT00641

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 04 février 2022, 21NT00641


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Agence immobilière du Pays Goëlo a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 27 janvier 2020 par laquelle le directeur départemental de la protection des populations des Côtes-d'Armor lui a infligé une amende administrative d'un montant total de 4000 euros.

Par une ordonnance n° 2002223 du 27 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête et u

n mémoire, enregistrés le 9 mars 2021 et le 12 août 2021, la société Agence immobilière du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Agence immobilière du Pays Goëlo a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 27 janvier 2020 par laquelle le directeur départemental de la protection des populations des Côtes-d'Armor lui a infligé une amende administrative d'un montant total de 4000 euros.

Par une ordonnance n° 2002223 du 27 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 mars 2021 et le 12 août 2021, la société Agence immobilière du Pays Goëlo, représentée par Me Delest, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2002223 du tribunal administratif de Rennes du 27 janvier 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 27 janvier 2020 par laquelle le directeur départemental de la protection des populations des Côtes-d'Armor lui a infligé une amende administrative d'un montant total de 4000 euros ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'amende infligée ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande devant le tribunal administratif de Rennes, enregistrée le 25 mai 2020, était recevable en application des dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative :

o son recours hiérarchique parvenu auprès du ministre de l'économie le 20 mars 2020 a prorogé le délai de recours contentieux ; il n'a été explicitement rejeté que le 18 août 2020 ;

o les délais de recours avaient été prorogés pendant l'état d'urgence sanitaire en application de l'ordonnance du 25 mars 2020 ;

- l'auteur de la décision du 27 janvier 2020 est incompétent seule l'autorité chargée de la concurrence et de la consommation étant compétent en application des dispositions de l'article L. 522-1 du code de la consommation ; la délégation accordée à M. A... ne définit pas avec une précision suffisante les limites de la délégation ; l'administration ne justifie pas les attributions confiées à M. A... ;

- il n'est pas démontré que les agents ayant dressé le procès-verbal de constat appartiennent à un corps d'agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et qu'ils ont été valablement habilités en application de l'article L. 511-3 du code de la consommation ;

- le contrôle effectué était irrégulier :

o les dispositions de l'article L. 512-7 du code de consommation ont été méconnus dès lors que les agents n'ont pas décliné leur qualité au moment de la visite de l'agence de Binic ;

o les dispositions de l'article L. 512-12 du code de la consommation ont été méconnues dès lors qu'il n'existe pas de procès-verbal de prise d'échantillon pour l'agence de Binic ;

- la décision du 27 janvier 2020 est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions des articles L 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- les manquements aux articles 2-III et 3 de l'arrêté du 10 janvier 2017 relatif à l'information des consommateurs par les professionnels intervenant dans une transaction immobilière ne sont pas établis :

- elle a été sanctionnée deux fois pour un même manquement constaté en vitrine et sur le site internet ;

- à titre subsidiaire, elle sollicite la réformation du montant de l'amende puisqu'elle n'a pas eu de volonté d'induire le client en erreur et l'erreur présente un caractère très ponctuel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Agence immobilière du Pays Goëlo quant à la légalité de la décision du 27 janvier 2020 ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 13 juillet 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;

- l'ordonnance n°2020-666 du 3 juin 2020 ;

- le code de la consommation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 10 janvier 2017 relatif à l'information des consommateurs par les professionnels intervenant dans une transaction immobilière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère,

- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,

- et les observations de Me Delest, représentant la société Agence immobilière du Pays Goëlo.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Agence immobilière du Pays Goëlo, qui a son siège à Pordic (Côtes-d'Armor), exploite plusieurs agences immobilières dans ce département, dont une située à Pordic et l'autre à Binic. Le 10 juillet 2019, deux agents de la direction départementale de la protection des populations se sont rendus pour un contrôle dans les agences de Pordic et de Binic et ont relevé certaines méconnaissances de la réglementation, consignées dans un procès-verbal daté du 3 septembre 2019. Par un courrier du 31 décembre 2019, la direction départementale de la protection des populations a porté à la connaissance de la société Agence immobilière du Pays Goëlo les manquements relevés et l'a informée qu'il était envisagé de prononcer à son encontre quatre sanctions administratives d'un montant total de 1 000 euros chacune en application des dispositions de l'article L. 522-1 du code de la consommation. La société a présenté ses observations par des courriers des 29 et 30 novembre 2019, auxquels il a été répondu par une lettre de l'administration du 17 décembre 2019. Par une décision du 27 janvier 2020, le directeur départemental de la protection des populations des Côtes-d'Armor a infligé à la société Agence immobilière du Pays Goëlo une sanction administrative d'un montant total de 4 000 euros, en raison de quatre manquements. La société Agence immobilière du Pays Goëlo a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de cette sanction administrative. Par une ordonnance du 27 janvier 2021, le président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande en raison de sa tardiveté.

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) ". Par ailleurs, l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période dispose, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 3 juin 2020 : " I. ' Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus (...) ". L'article 2 de cette ordonnance dispose que : " Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que la décision du 27 janvier 2020 infligeant une sanction administrative à la société Agence immobilière du Pays Goëlo, qui comportait l'indication des voies et délais de recours ouverts à son encontre, a été notifiée à sa destinataire le 29 janvier 2020. Le recours contentieux ouvert à son encontre expirait donc, en l'absence d'application des dispositions de l'ordonnance du 25 mars 2020, le 30 mars 2020. Néanmoins, en premier lieu, il résulte de l'instruction que par un courrier du 16 mars 2020 parvenu le 20 mars suivant auprès des services du ministère, la société Agence immobilière du Pays Goëlo a exercé un recours hiérarchique devant le ministre de l'économie, des finances et de la relance. Un tel recours hiérarchique, introduit dans le délai de recours contentieux, est de nature à proroger ce même délai. En second lieu, en application des dispositions combinées des articles 1er et 2 de l'ordonnance du 25 mars 2020, le délai de recours ouvert à la société Agence immobilière du Pays Goëlo à l'encontre de la sanction du 27 janvier 2020, qui devait expirer postérieurement au 12 mars 2020, a été prorogé jusqu'au 24 août 2020. Dans ces conditions, la demande de la société appelante, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Rennes le 25 mai 2020, a été introduite dans le délai de recours contentieux. Il suit de là que la société Agence immobilière du Pays Goëlo est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté.

4. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Rennes pour qu'il statue sur la demande de la société Agence immobilière du Pays Goëlo.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1000 euros à verser à la société Agence immobilière du Pays Goëlo en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2002223 du tribunal administratif de Rennes du 27 janvier 2021 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Rennes.

Article 3 : L'Etat versera à la société Agence immobilière du Pays Goëlo la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Agence immobilière du Pays Goëlo et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Une copie sera adressée pour information au préfet des Côtes-d'Armor.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2022.

La rapporteure,

M. BERIA-GUILLAUMIELe président,

L. LAINÉ

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au préfet des Côtes-d'Armor en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT00641


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00641
Date de la décision : 04/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : DELEST

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-02-04;21nt00641 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award