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10/12/2021 | FRANCE | N°20NT02388

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 10 décembre 2021, 20NT02388


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Bivimax a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2014.

Par un jugement n° 1801777 du 3 juin 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2020 la SAS Bivimax, représentée par

Me Cleach, demande à

la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Bivimax a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2014.

Par un jugement n° 1801777 du 3 juin 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2020 la SAS Bivimax, représentée par

Me Cleach, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, le fait générateur de la plus-value étant fixé au 31 décembre 2011, elle se rattache donc à un exercice prescrit ;

- la plus-value doit être exonérée compte tenu du délai de détention de 15 ans ;

- à titre subsidiaire, la valorisation des parts de la société civile immobilière (SCI) VM doit être réalisée sur la base de la valeur vénale à la fin de l'année 2012 qui doit être distinguée de la valeur actuelle qui a servi de référence pour déterminer la réévaluation du bilan au 31 décembre 2011.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2021 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SAS Bivimax ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique,

- et les observations de Me François, représentant la SAS Bivimax.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière (SCI) VM, créée en 1994, est détenue par Mme A... et par M. B..., son frère, chacun pour moitié. Cette société est propriétaire de biens qu'elle met en location. Par trois résolutions du 31 décembre 2011, les associés de la SCI VM ont décidé de procéder à la réévaluation des immobilisations figurant à l'actif de la société, avec effet au 31 décembre 2011, et ont décidé l'affectation de l'écart de réévaluation, s'élevant à 908 577,99 euros, dans leurs comptes courants respectifs, à raison de la moitié chacun. Le 4 décembre 2012, Mme A... et M. B... ont cédé les 6 000 parts de la SCI VM qu'ils détenaient chacun, respectivement à la société par actions simplifiée (SAS) Bivimax et à la société à responsabilité limitée (SARL) Bimax, au prix de 91 470 euros chacun.

La SAS Bivimax, dont Mme C... est présidente et actionnaire à 92 %, a fait l'objet du 6 octobre au 15 décembre 2015 d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. A l'issue de ce contrôle, l'administration a, par une proposition de rectification du 16 décembre 2015, notamment procédé à la réévaluation de la valeur des parts sociales de la SCI VM cédées par Mme C... à la SAS Bivimax, qu'elle a estimée inférieure à la valeur réelle, et augmenté d'autant l'actif net de la société Bivimax. Les suppléments d'impôt sur les sociétés en résultant ont été mis en recouvrement le 29 septembre 2017 pour un montant total de 23 806 euros. La SAS Bivimax, dont la réclamation du 24 octobre 2017 a été rejetée par une décision du 30 mars 2018, a demandé au tribunal administratif d'Orléans la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2014. Par un jugement du

3 juin 2020, le tribunal a rejeté sa demande. La SAS Bivimax relève appel de ce jugement.

2. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. ". Aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III à ce code : " 1. Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / a. Pour les immobilisations acquises à titre onéreux, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat minoré des remises, rabais commerciaux et escomptes de règlement obtenus et majoré des coûts directement engagés pour la mise en état d'utilisation du bien et des coûts d'emprunt dans les conditions prévues à l'article 38 undecies. / (...) ; / b. Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale ; / (...). ".

3. La valeur vénale des titres d'une société non admise à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue. L'évaluation des titres d'une telle société doit être effectuée, par priorité, par référence au prix d'autres transactions intervenues dans des conditions équivalentes et portant sur les titres de la même société ou, à défaut, de sociétés similaires. En l'absence de telles transactions, celle-ci peut légalement se fonder sur la combinaison de plusieurs méthodes alternatives.

4. Aux termes de l'article 150 VA du code général des impôts : " I. - Le prix de cession à retenir est le prix réel tel qu'il est stipulé dans l'acte. Lorsqu'une dissimulation de prix est établie, le prix porté dans l'acte doit être majoré du montant de cette dissimulation (...). ".

Sur le moyen tiré de la prescription :

5. Le fait générateur de l'imposition est constitué non pas par la réévaluation de l'actif du bilan effectué par la SCI VM le 31 décembre 2011 mais par la cession à titre onéreux des parts de cette SCI, le 4 décembre 2012. Aucune conséquence fiscale ne s'attache à la réévaluation libre pratiquée par la SCI VM, qui n'est pas soumise à la tenue d'une comptabilité commerciale. A supposer même que la société requérante entende se prévaloir du principe d'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, l'administration n'a pas rectifié la réévaluation des immobilisations figurant à l'actif du bilan effectuée le 31 décembre 2011 par la SCI VM mais, au contraire, s'est fondée sur cette réévaluation pour déterminer la valeur réelle des parts sociales cédées. En tout état de cause, il ressort du procès-verbal de l'assemblée générale de la SCI VM du 31 décembre 2011 que la réévaluation des immobilisations figurant à l'actif du bilan de la société prenait effet à cette même date, dans le but de modifier le bilan d'ouverture au 1er janvier 2012, et l'administration soutient sans être contredite que cette décision de réévaluation s'est traduite comptablement par une écriture inscrite au journal des opérations diverses au 1er janvier 2012, donc au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012. Dès lors le moyen tiré de ce que, le fait générateur de la réévaluation de l'actif étant fixé au 31 décembre 2011, l'opération serait prescrite doit être écarté.

Sur l'exonération de la plus-value :

6. Si la requérante soutient que l'exonération des plus-values de cession était accordée après quinze années de détention, elle n'apporte aucune précision, et notamment aucune référence textuelle, à l'appui de ce moyen, alors que l'administration soutient que les parts en cause ont été détenues par Mme A... pendant dix-huit ans et que la plus-value bénéficiait donc d'un abattement de 2 % par année de détention au-delà de la cinquième et de 4 % par année au-delà de la dix-septième, soit 28 %, conformément à l'article 150 VC du code général des impôts.

Sur la méthode d'évaluation des parts sociales :

7. Il est constant que, pour évaluer les biens immobiliers détenus par la SCI à la date de la cession des parts le 4 décembre 2012, l'administration s'est fondée sur la réévaluation faite par la SCI VM elle-même au 31 décembre 2011, ainsi que sur une méthode par termes de comparaison et une évaluation par la rentabilité des biens. L'administration a considéré que les deux méthodes utilisées confortaient les montants retenus par la SCI elle-même dans le cadre de la réévaluation faite le 31 décembre 2011. Elle s'est donc fondée sur ces montants pour estimer que le prix de cession des parts de la SCI était trop faible et qu'il y avait ainsi eu une dissimulation du prix réel, la différence de 36 793 euros constituant une libéralité consentie à la SAS BIVIMAX.

En ce qui concerne la réévaluation des actifs pratiquée par la SCI VM :

8. Si, à cet égard, la SAS Bivimax soutient que l'administration ne pouvait pas prendre en compte les montants mentionnés dans le cadre de la réévaluation faite le

31 décembre 2011 par la SCI VM, qui se fonde sur une valeur d'usage, elle n'apporte aucun élément de nature à établir qu'en l'espèce, la valeur d'usage serait différente de la valeur vénale, alors que la société VM est une SCI de gestion dont les immeubles sont loués en vue de générer un profit. Si la société requérante soutient que les prix immobiliers ont fortement baissé en 2012, elle ne l'établit pas en se fondant sur des articles de presse non probants. Enfin, il est constant que l'administration a recouru, pour confirmer la réévaluation des biens immobiliers telle qu'effectuée par la SCI VM en décembre 2011, a utilisé deux autres méthodes permettant de déterminer une valeur vénale.

En ce qui concerne la méthode par comparaison :

9. L'administration a appliqué une méthode par comparaison pour vérifier si cette dernière confirmait les montants retenus dans la méthode de réévaluation des actifs pratiquée par la SCI VM. Le local commercial situé 4 rue du Bois Paris à Nogent-le-Phaye était en 2012 un restaurant asiatique. Aucun terme de comparaison pertinent n'a été trouvé par le service. La valeur des six places de parking a été comparée au prix de cession de trois places situées à la même adresse et vendues le 3 février 2012 pour 13 000 euros, le 16 juin 2012 et le 4 octobre 2012 pour 12 500 euros. Un abattement de 20 % a été appliqué en considération du fait que les parkings cédés étaient libres alors que les parkings détenus par la SCI sont occupés.

Il ressortait de cette comparaison un prix de 10 000 euros par place de parking. La valeur des 145 m² de bureaux a été comparée au prix de cession de locaux à usage de bureaux vendus le 29 mars 2011 pour 2 447 euros le m², le 22 novembre 2011 pour 3 487 euros le m² et le

15 novembre 2012 pour 1 759 euros le m². Un abattement de 20 % a également été appliqué. Le service a retenu un prix au m² de 2 790 euros. Si, s'agissant des bureaux, la requérante conteste le fait que le prix le plus élevé ait été retenu par l'administration, cette dernière soutient sans être contredite que ce prix correspond au bien le plus proche des locaux à évaluer, distant de 220 mètres et également dans l'hyper centre. La requérante soutient que les prix immobiliers ont baissé de 20% entre 2011 et 2012 mais les articles de presse sur lesquels elle se fonde ne l'établissent pas. Si elle se prévaut également d'un rapport d'expertise réalisé en juillet 2019, ce dernier, pour deux des biens immobiliers en cause, exclut la méthode par comparaison sans en préciser la raison.

En ce qui concerne la méthode par la rentabilité des biens :

10. L'administration a également appliqué la méthode par la rentabilité des biens pour vérifier si cette dernière confirmait les montants retenus dans la méthode de réévaluation des actifs pratiquée par la SCI VM. Le service a divisé le montant des loyers hors charges perçus en 2012, soit 85 188 euros, par un taux de rentabilité situé entre 7 % et 8 %. Contrairement à ce que soutient la requérante, s'agissant d'une cession de titres du

4 décembre 2012, l'administration a pu ne prendre en compte que les loyers de 2012 et non pas également ceux de 2011. Le rapport d'expertise réalisé en juillet 2019 dont la SAS Bivimax se prévaut n'explique pas l'origine du taux retenu pour calculer une valeur de rendement. S'agissant des bureaux, les experts ont retenu le peu d'attractivité commerciale du lieu où les biens sont situés alors que ce critère paraît peu pertinent pour les biens en cause. De même, l'expertise n'explique pas pourquoi il est plus pertinent de choisir le taux de rendement en fonction de la population de la commune de Chartres plutôt que celle de la communauté d'agglomération. Pour le local commercial occupé par un restaurant à Nogent-le-Phaye, l'expert a retenu une surface utile de 862 m², alors que le service a constaté que l'immeuble à évaluer comportait un bâtiment de 980 m², un espace de stockage de 490 m² et 200 m² d'espace de stationnement et la parcelle occupée par le local commercial ne semble pas avoir été valorisée par l'expert. Enfin, avant d'évaluer le bien, l'expert a consulté l'acte de cession de fonds de commerce du 17 décembre 2013. Il fait état des modifications du bail du 10 juin 2015 et du 1er décembre 2017 alors qu'il s'agit d'éléments postérieurs à la cession litigieuse. Dès lors, le rapport d'expertise ne suffit pas à remettre en cause la méthode de calcul retenue par l'administration. La requérante ne saurait utilement se prévaloir de ce qu'en 2012, un des locataires de la SCI " envisageait de donner congé pour déménager dans un bâtiment public " et a effectivement donné congé le 22 mai 2014 et de ce que, pour l'immeuble de Nogent-Le-Phaye, le bail a été cédé en 2013 à la suite d'importants retards de loyers car il ne s'agissait pas de développements économiques déjà prévisibles et entamés à la date de la cession en cause.

11. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 10 que le moyen tiré de ce que la valorisation des parts de la SCI VM effectuée par l'administration à la date du 4 décembre 2012 ne serait pas pertinente doit être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède que la SAS Bivimax n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande de décharge. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Bivimax est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Bivimax et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2021.

La rapporteure

P. PicquetLa présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20NT02388

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02388
Date de la décision : 10/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : PATRICK FRANCOIS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-12-10;20nt02388 ?
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