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03/12/2021 | FRANCE | N°21NT02142

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 03 décembre 2021, 21NT02142


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... demande au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 2101097 du 8 février 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enr

egistrée le 29 juillet 2021, Mme C..., représentée par Me Pasteur, demande à la cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... demande au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 2101097 du 8 février 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2021, Mme C..., représentée par Me Pasteur, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 8 février 2021 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de Maine-et-Loire du 25 janvier 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de prendre en charge sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demandeur d'asile en procédure normale, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision à intervenir, et, en tout état de cause, de lui remettre une attestation de demandeur d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision de remise aux autorités espagnoles :

- elle n'est pas suffisamment motivée en droit et en fait ;

- il n'est pas établi que l'entretien prévu à l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 a été mené conformément à ces dispositions ni à celles de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision a été prise en l'absence d'un examen personnalisé avant la remise aux autorités espagnoles et n'a pas été précédée des prises de garanties nécessaires auprès de l'Espagne, eu égard notamment aux conditions d'accès aux soins pour les demandeurs d'asile dans ce pays et aux difficultés de traitement des demandes d'asile par cet Etat membre ;

- l'autorité administrative a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement n° 604/ 2013 du 26 juin 2013, d'un défaut d'examen de sa situation et de sa particulière vulnérabilité et d'une méconnaissance des dispositions de l'articles 3 du règlement n° 604/ 2013 du 26 juin 2013 ; la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 de ce règlement aurait en effet dû lui être appliquée, la décision en litige contrevenant manifestement à l'objectif de célérité dudit règlement ;

Sur la décision portant assignation à résidence :

- elle a été signée par une autorité dont la compétence n'est pas établie ;

- elle n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant transfert aux autorités espagnoles ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle constitue une violation de son droit à un recours effectif.

Par un courrier du 23 août 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête à fin d'annulation de la décision de transfert en raison de l'expiration du délai de six mois prévu au 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.

En réponse au moyen d'ordre public soulevé, le préfet de Maine-et-Loire a produit des pièces, enregistrées le 25 août 2021, aux termes desquelles le délai de transfert a été reporté jusqu'au 8 août 2022.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2021, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guéguen, premier conseiller,

- et les observations de Me Pasteur, représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante guinéenne née le 4 août 1997, relève appel du jugement du 8 février 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant transfert auprès des autorités espagnoles :

2. Il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge, les moyens tirés de ce que la décision contestée serait entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation, méconnaîtrait les stipulations de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et les dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et méconnaîtrait l'article 3 de ce règlement, moyens que la requérante réitère en appel, dans ses écritures, avec les mêmes arguments à peine modifiés, sans apporter de précisions nouvelles.

En ce qui concerne l'arrêté d'assignation à résidence :

3. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ; (...) ". Par ailleurs, l'article R. 561-2 du même code dispose que " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application des articles L. 561-1, L. 561-2, L. 744-9-1 ou L. 571-4 ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5 est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés. ".

4. En premier lieu, par un arrêté du 6 janvier 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 8 janvier 2021, le préfet de Maine-et-Loire a accordé à Mme A..., directrice de l'immigration et des relations avec les usagers, une délégation à l'effet de signer, notamment, les décisions d'application du règlement dit " Dublin III " tels que les arrêtés de transfert et d'assignation à résidence. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté en litige manque en fait et doit être écarté.

5. En deuxième lieu, l'arrêté contesté, contrairement à ce qui est soutenu, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement permettant à l'intéressée de connaître, à sa seule lecture, les raisons pour lesquelles elle fait l'objet d'une assignation à résidence. Ainsi, l'arrêté précise que Mme C... répond aux conditions du I - 1° bis de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles permettent à l'autorité administrative de prendre une mesure d'assignation à résidence à l'encontre de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire, mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation manque en fait et doit être écarté.

6. En troisième lieu, pour les motifs exposés au point 2, le moyen tiré de l'illégalité de la décision de transfert aux autorités espagnoles, soulevé par la voie de l'exception, ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, en se bornant à faire valoir qu'elle présente des garanties propres à prévenir le risque de se soustraire à la mesure d'éloignement dont elle fait l'objet, qu'elle s'est présentée à toutes les convocations qui lui ont été adressées et que rien ne justifie l'assignation à résidence prononcée contre elle, la requérante ne conteste pas utilement qu'elle ne peut quitter immédiatement le territoire français mais que son éloignement demeure une perspective raisonnable. Par ailleurs, Mme C... ne fait état d'aucun élément de nature à démontrer le caractère excessif de la mesure d'assignation, ni son incompatibilité avec sa situation personnelle. Par suite, alors qu'il n'est pas sérieusement contesté qu'elle remplit toutes les conditions prévues par l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'assignation à résidence serait entachée d'erreur d'appréciation ou que ses modalités présenteraient un caractère disproportionné.

8. En cinquième et dernier lieu, Mme C... ne peut utilement contester la légalité de l'arrêté contesté en se prévalant des conséquences contentieuses de l'application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que la mesure d'assignation à résidence en litige l'aurait privée d'un délai de recours contentieux de quinze jours à l'encontre de la mesure d'éloignement et aurait ainsi méconnu son droit à un recours effectif ne peut qu'être écarté, Mme C... ayant pu, en tout état de cause, faire valoir ses droits devant la juridiction administrative, par l'intermédiaire de son conseil, tant lors d'une procédure en référé-suspension ayant donné lieu à une ordonnance du 14 juin 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Nantes qu'à l'occasion de la présente procédure au fond.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 25 janvier 2021 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert aux autorités espagnoles et l'a assignée à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de transfert et les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté portant assignation à résidence de Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ne peuvent être accueillies.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la partie perdante bénéficie du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Dès lors, les conclusions présentées par la requérante sur le fondement de ces dispositions doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., à Me Pasteur et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président,

- M. Rivas, président-assesseur,

- M. Guéguen, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 décembre 2021.

Le rapporteur,

J .-Y. GUEGUENLe président,

L. LAINÉ

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°21NT02142 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02142
Date de la décision : 03/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Jean-Yves GUEGUEN
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : PASTEUR

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-12-03;21nt02142 ?
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