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26/11/2021 | FRANCE | N°20NT02355

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 novembre 2021, 20NT02355


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 1802984 du 3 juin 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 31 juillet 2020 et 5 mars 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Delayat, d

emandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 1802984 du 3 juin 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 31 juillet 2020 et 5 mars 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Delayat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le licenciement de M. A... par la société Cofiroute est sans cause réelle et sérieuse ; aucun des reproches formulés à son encontre par son employeur n'est justifié ; par suite, bien qu'il s'agisse d'une indemnité transactionnelle, la somme de 150 000 euros qui lui a été versée est exonérée d'impôt ;

- à titre subsidiaire, l'indemnité transactionnelle imposable doit être fixée à

114 851 euros, soit 57,14 % de 201 000 euros.

Par des mémoires en défense enregistrés les 3 février et 7 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision du Conseil constitutionnel du 20 septembre 2013 n°2013-340-QPC ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., salarié de la société Cofiroute depuis le 1er août 1979 et alors responsable de la communication Réseau au sein de la direction de la communication, a été licencié le 18 août 2014. Pour mettre un terme au litige les opposant, que M. A... avait soumis au conseil des prud'hommes, la société Cofiroute et son salarié ont conclu, le 5 novembre 2014, un accord transactionnel prévoyant le versement à ce dernier des sommes lui étant dues en application du code du travail ainsi qu'une indemnité globale et forfaitaire d'un montant de 150 000 euros. A la suite d'un contrôle sur pièces de la déclaration de revenus de M. et Mme A..., l'administration a réintégré cette indemnité, à hauteur de 115 448 euros, dans leurs revenus imposables au titre de l'année 2014. Par un jugement du 3 juin 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de M. et Mme A... tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis en conséquence de ce redressement. M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement.

2. D'une part, aux termes du 1 de l'article 80 duodecies du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année 2014 : " 1. Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve des dispositions suivantes. / Ne constituent pas une rémunération imposable : / 1° Les indemnités mentionnées aux articles L. 1235-1, L. 1235-2, L. 1235-3 et L. 1235-11 à L. 1235-13 du code du travail ; (...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail : " Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ".

3. Pour déterminer si une indemnité versée en exécution d'une transaction conclue à l'occasion de la rupture d'un contrat de travail est imposable, il appartient à l'administration et, lorsqu'il est saisi, au juge de l'impôt, de rechercher la qualification à donner aux sommes qui font l'objet de la transaction. Ces dernières ne sont susceptibles d'être regardées comme une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mentionnée à l'article L. 1235-3 du code du travail que s'il résulte de l'instruction que la rupture des relations de travail est assimilable à un tel licenciement. Dans ce cas, les indemnités accordées au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse sont exonérées. Il appartient à l'administration et, lorsqu'il est saisi, au juge de l'impôt, au vu de l'instruction, de rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction, en recherchant notamment si elles ont entendu couvrir, au-delà des indemnités accordées au titre du licenciement, la réparation de préjudices distincts, afin de déterminer dans quelle proportion ces sommes sont susceptibles d'être exonérées.

4. Il résulte de l'instruction que, pour licencier M. A..., la société Cofiroute lui a reproché le défaut de réalisation de plusieurs objectifs de travail au titre de l'année 2013. Toutefois, ces critiques, qui n'avaient suscité aucune remarque auprès de l'intéressé avant son licenciement, n'ont pas davantage fait obstacle à ce que M. A... perçoive en février 2014 une " prime sur objectif 2013 " d'un montant de 3 800 euros.

5. La société Cofiroute a également retenu comme grief le retard de communication de la part de M. A... ou son inertie après un accident survenu le 18 juillet 2014 à 23 heures 11 dans le cadre de sa permanence, alors que, selon les procédures prévues en cas d'accident, un communiqué de presse doit intervenir dans les quatre-vingt-dix minutes suivant un événement. Toutefois, la réalité des consignes opposées à l'intéressé en termes de délai de réactivité n'apparaît dans aucune des pièces du dossier, en particulier l'instruction de permanence, et une seule défaillance isolée, dont les conséquences pratiques n'ont pas été exposées et qui a été relevée alors que l'état de santé de M. A... était en, cours d'évaluation médicale en vue d'un reclassement.

6. Il résulte des points 4 et 5 que le licenciement de M. A... ne peut être regardé comme reposant sur une cause réelle et sérieuse et qu'en conséquence, l'indemnité transactionnelle d'un montant de 150 000 euros qui a été versée à l'intéressé n'était, en vertu de l'article 80 duodecies du code général des impôts, pas imposable.

7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1802984 du tribunal administratif d'Orléans du 3 juin 2020 est annulé.

Article 2 : Il est prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire, en droits et pénalités, d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2014.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2021.

Le rapporteur

J.E. GeffrayLa présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 20NT02355


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02355
Date de la décision : 26/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : DELAYAT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-11-26;20nt02355 ?
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