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08/10/2021 | FRANCE | N°21NT01604

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 08 octobre 2021, 21NT01604


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... et Mme C... A... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 juillet 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste à Rabat rejetant implicitement la demande de visa de long séjour présentée en qualité de conjoint d'une ressortissante française par M. D....

Par un jugement n° 2009975 du 19 avri

l 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... et Mme C... A... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 juillet 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste à Rabat rejetant implicitement la demande de visa de long séjour présentée en qualité de conjoint d'une ressortissante française par M. D....

Par un jugement n° 2009975 du 19 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. D... un visa de long séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification de son jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 juin 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 avril 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D... et Mme A... devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- en ne tenant pas compte, du fait de sa production tardive, de son mémoire en défense, le tribunal a entaché sa décision d'irrégularité ;

- le mariage de M. D... et Mme A... est une union d'opportunité dont le seul objet est de faciliter l'installation du premier sur le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2021, M. D... et Mme A..., représentés par Me Zambo Mveng, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat du versement à leur conseil d'une somme de 2 300 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils font valoir que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.

Mme A... a été maintenue au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 17 août 2021.

Vu :

- l'arrêt 21NT01605 du 29 juillet 2021 statuant sur la demande de sursis à exécution du jugement attaqué ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- et les observations de Me Zembo Mveng, représentant M. D... et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., de nationalité française, a épousé le 1er juillet 2019 à Somain (Nord), M. D..., ressortissant marocain. Ce dernier a sollicité la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Par une décision du 30 juillet 2020, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a estimé que le mariage avait été contracté à des fins étrangères à l'union matrimoniale dans le seul but de faciliter l'établissement de M. D... en France et maintenu le refus de visa que lui avaient implicitement opposé les autorités consulaires françaises en poste à Rabat. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 19 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission et enjoint la délivrance du visa sollicité.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. A supposer que le ministre de l'intérieur ait entendu soutenir que le tribunal n'aurait pas tenu compte de son mémoire en défense, enregistré au greffe de cette juridiction le 23 février 2021, il ressort tant des visas que des motifs du jugement attaqué que ce moyen manque en fait.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article. ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire afin que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir, par des éléments précis et concordants, que le mariage est entaché d'une telle fraude de nature à légalement justifier le refus de visa.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a bénéficié à compter d'octobre 2016 de visas de circulation. Après avoir célébré son mariage en France le 1er juillet 2019, il est retourné au Maroc où il a déposé une demande de visa de long séjour auprès des autorités consulaires françaises en poste à Rabat. Il a regagné la France en décembre 2019 puis s'y est maintenu depuis lors alors pourtant que la durée de validité de son dernier visa expirait le 5 février 2020. En revanche, les affirmations du ministre selon lesquelles les pièces produites par l'intéressé pour justifier de sa situation professionnelle à l'appui de précédentes demandes de visa ne seraient pas authentiques et qu'il n'aurait pas honoré " l'invitation professionnelle " au regard de laquelle son dernier visa de circulation lui a été délivré ne sont étayées d'aucun commencement de preuve. Par ailleurs, si, ainsi que le fait valoir le ministre, le divorce de M. D... a été prononcé deux mois avant son mariage avec Mme A..., les intimés soutiennent sans être contredits que la séparation de M. D... avait été officiellement actée le 14 novembre 2017. Dans ces conditions, le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère frauduleux du mariage.

6. Au surplus, M. D... et Mme A... ont produit la copie de nombreux messages qui, bien qu'échangés au cours de quelques mois seulement, témoignent de la réalité du projet matrimonial tant avant qu'après la célébration du mariage. Il est également justifié d'une vie commune, révélée par des quittances, des factures et diverses pièces en provenance ou à destination de l'administration fiscale et de la caisse d'allocations familiales. Les intéressés sont titulaires d'un compte bancaire joint. Il est versé aux débats des attestations des médecins suivant Mme A... ou encore du conseiller financier de cette dernière faisant état de la présence à ses côtés de son époux.

7. Il suit de là que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions citées au point 3.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission du 30 juillet 2020.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. D... et de Mme A... E... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera au conseil de M. D... et de Mme A... la somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... D... et Mme C... A... épouse D....

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pérez, président de chambre,

Mme Douet, présidente-assesseure,

Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 octobre 2021.

La rapporteure,

K. BOUGRINE

Le président,

A. PEREZLa greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 21NT01604


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01604
Date de la décision : 08/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : ZAMBO MVENG JEAN-CLAUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-10-08;21nt01604 ?
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