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28/09/2021 | FRANCE | N°20NT02842

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 28 septembre 2021, 20NT02842


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... et M. D... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours, dirigé contre la décision du 19 août 2019 par laquelle les autorités consulaires françaises à C... (République du Congo) ont refusé de délivrer un visa de long séjour à M. D... B..., au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 1914322 du 15 juillet 2020,

le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... et M. D... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours, dirigé contre la décision du 19 août 2019 par laquelle les autorités consulaires françaises à C... (République du Congo) ont refusé de délivrer un visa de long séjour à M. D... B..., au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 1914322 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 septembre 2020, Mme E... B... et M. D... B..., représentés par Me Mahieu, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 15 juillet 2020 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours dirigé contre la décision du 19 août 2019 par laquelle les autorités consulaires françaises à C... (République du Congo) ont refusé de délivrer un visa de long séjour à M. D... B... ;

3°) d'enjoindre aux autorités consulaires françaises à C... de délivrer le visa sollicité dans le délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article 47 du code civil ; l'identité de M. D... B... ainsi que le lien de filiation l'unissant avec Mme E... B... sont établis par les actes de naissance produits ainsi que par les éléments de possession d'état ; Mme B... bénéficie d'une autorisation de regroupement familial délivrée par le préfet des Yvelines ;

- la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle comporte sur la situation personnelle de chacun des requérants ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Un mémoire en défense a été déposé par le ministre de l'intérieur le 26 février 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction, intervenue le 12 février 2021, et n'a pas été communiqué.

Des pièces ont été produites par M. et Mme B... les 16 avril et 6 mai 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction, et n'ont pas été communiquées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frank,

- et les observations de Me Guilbaud, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... B..., ressortissante angolaise entrée en France en 2009, a obtenu le bénéfice du regroupement familial pour son fils allégué, M. D... B..., né le 3 août 2001. Par une décision du 19 août 2019, les autorités consulaires françaises à C... (République du Congo) ont refusé de délivrer à M. D... B... un visa de long séjour. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre cette décision. Mme E... B... et M. D... B... relèvent appel du jugement du 15 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande d'annulation de la décision de la commission de recours.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur (...) ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 du même code : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour (...) ". Si la venue en France de ressortissants étrangers a été autorisée au titre du regroupement familial, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que l'autorité consulaire use du pouvoir qui lui appartient de refuser leur entrée en France en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur des motifs d'ordre public. Figure au nombre de ces motifs l'absence de caractère authentique des actes d'état civil produits. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du mémoire en défense produit par le ministre en première instance, que pour rejeter la demande de visa, la commission de recours s'est fondée sur ce que l'identité de l'enfant et le lien familial allégué avec Mme B... n'étaient pas établis, faute de caractère probant des actes d'état civil produits et en l'absence d'éléments suffisants de possession d'état.

4. D'une part, à l'appui de la demande de visa de l'enfant Josué Exaucé B..., ont été respectivement présentées une copie du volet n°1 de l'acte de naissance n°2346/2001/18, établi le 20 août 2001 par l'officier d'état civil de l'arrondissement de Makélékélé de la municipalité de C..., ainsi qu'une copie intégrale de l'acte légalisé, établi à Paris le 10 novembre 2016 par les services consulaires congolais en France. Pour remettre en cause le caractère probant de ces documents le ministre de l'intérieur a relevé, en première instance, qu'ils n'ont pas été signés par le déclarant, en méconnaissance de l'article 36 du code de la famille congolaise, lequel dispose que " Etablissement des actes. L'officier d'état-civil donne lecture aux comparants ; il les invite à en prendre directement connaissance avant de les signer. (...) Si l'un des comparants ne sait signer, il en est fait mention dans l'acte. ". Le ministre fait en outre valoir que le document établi en 2016 ne peut, eu égard au pouvoir des autorités consulaires en matière d'état civil, lequel est limité aux ressortissants de leur circonscription, établir l'état civil et l'identité de M. D... B.... Le ministre produit au surplus une liste des femmes ayant accouché à l'hôpital de base de Makélékélé du 2 au 3 août 2001, sur laquelle ne figure pas la requérante. En l'absence d'explications apportées par M. et Mme B..., ces circonstances sont de nature à remettre en cause l'authenticité des documents produits en dépit de ce que les mentions de l'acte établi en 2001 sont reprises dans l'ordonnance de délégation d'autorité parentale du père de l'enfant à Mme B..., rendue par le tribunal pour enfants F... C... le 24 janvier 2018.

5. D'autre part, la production de photographies représentant un bébé en présence de Mme B..., de bordereaux d'envois de fonds par la requérante, adressés à des tiers, des pages de messages téléphoniques, non datés et non nominatifs, une attestation de scolarité au titre de l'année 2017/2018 ainsi que des attestations peu circonstanciées de quelques proches, ne suffisent à établir, ni l'identité du demandeur de visa, ni l'existence du lien de filiation allégué par la possession d'état, alors que la requérante réside en France depuis plus de dix ans.

6. Dans ces conditions, en estimant que l'identité et le lien de filiation unissant Mme B... et M. B... n'étaient pas établis, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées.

7. En second lieu, à défaut d'établir un lien de filiation entre Mme B... et M. B..., les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... et M. B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... et M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente-assesseure,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.

Le rapporteur,

A. FRANKLe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT02842


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02842
Date de la décision : 28/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-09-28;20nt02842 ?
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