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28/09/2021 | FRANCE | N°20NT02663

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 28 septembre 2021, 20NT02663


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Danger de tempête sur le patrimoine rural, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), Mmes O..., J..., P..., E..., B..., K..., S..., I..., G..., L..., N..., D..., H..., F..., A.... Crépey, Eulterban, Gabory, Galopin, Jahandier, Lefevre, Lemens, Boy, Médina, Michel, Daniel et Gérard Morchoisne, Pasquier, Picault, Valuet, M. et Mme C..., M. et Mme Q..., M. et Mme T..., M. et Mme M... et M. et Mme R... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annu

ler l'arrêté du 18 mars 2016 par lequel le préfet de la région Centre-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Danger de tempête sur le patrimoine rural, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), Mmes O..., J..., P..., E..., B..., K..., S..., I..., G..., L..., N..., D..., H..., F..., A.... Crépey, Eulterban, Gabory, Galopin, Jahandier, Lefevre, Lemens, Boy, Médina, Michel, Daniel et Gérard Morchoisne, Pasquier, Picault, Valuet, M. et Mme C..., M. et Mme Q..., M. et Mme T..., M. et Mme M... et M. et Mme R... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 18 mars 2016 par lequel le préfet de la région Centre-Val de Loire a autorisé la société Enertrag AG, établissement France, à exploiter cinq éoliennes d'une hauteur de 150 mètres et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé (Eure-et-Loir).

Par un jugement avant dire droit n° 1602358 du 24 avril 2018, le tribunal administratif d'Orléans a transmis le dossier de la demande au Conseil d'Etat pour l'examen des questions de droit définies dans les motifs de sa décision, a sursis à statuer sur la demande jusqu'à l'avis du Conseil d'Etat, et réservé jusqu'à la fin de l'instance tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'a pas statué par ce même jugement.

Le Conseil d'Etat a rendu son avis le 27 septembre 2018, sous le n° 420119.

Par un jugement n° 1602358 du 8 février 2019, le tribunal administratif d'Orléans, faisant application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, a sursis à statuer sur la demande pour permettre la régularisation du vice entachant l'avis de l'autorité environnementale.

Par un jugement n° 1602358 du 23 juin 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 25 août 2020, 4 février 2021 et 10 mars 2021 (ce dernier non communiqué), l'association Danger de tempête sur le patrimoine rural, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), Mmes O..., J..., P..., E..., B..., K..., S..., I..., G..., L..., N..., D..., H..., F..., A.... Crépey, Eulterban, Gabory, Galopin, Jahandier, Lefevre, Lemens- Boy, Médina, Michel, Daniel et Gérard Morchoisne, Pasquier, Picault, Valuet, M. et Mme C..., M. et Mme Q..., M. et Mme T..., M. et Mme M... et M. et Mme R..., représentés par Me Monamy, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1602358 du 24 avril 2018 du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) d'annuler le jugement n° 1602358 du 8 février 2019 du tribunal administratif d'Orléans ;

3°) d'annuler le jugement n° 1602358 du 23 juin 2020 du tribunal administratif d'Orléans ;

4°) d'annuler l'arrêté du 18 mars 2016 par lequel le préfet de la région Centre-Val de Loire a autorisé la société Enertrag AG, établissement France, à exploiter cinq éoliennes d'une hauteur de 150 mètres et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé ;

5°) d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2019 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a modifié et complété l'autorisation délivrée le 18 mars 2016 à la société Enertrag AG, établissement France ;

6°) de mettre à la charge de la société Enertrag AG, établissement France le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête d'appel est recevable, y compris en tant qu'elle est dirigée contre les jugements des 24 avril 2018 et 8 février 2019 ;

- les jugements attaqués sont irréguliers, en ce qu'il n'est pas établi qu'ils comportent les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience ;

- les jugements attaqués sont irréguliers, en ce qu'ils n'ont pas répondu aux moyens tirés de l'incompétence du préfet de région pour délivrer l'autorisation, de l'absence d'indication dans la demande d'autorisation d'exploiter de la nature des garanties financières, de la composition irrégulière du dossier d'enquête publique, de la consultation irrégulière des communes au cours de l'enquête publique, de l'insuffisance des capacités financières du pétitionnaire, de la méconnaissance du plan local d'urbanisme de Marville-Moutiers-Brûlé, ainsi que de l'insuffisance des mesures de démantèlement ;

- la demande de première instance était recevable.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 18 mars 2016 :

- les avis des propriétaires des parcelles cadastrées OV nos 26 et 77 et de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé n'ont pas été recueillis, en méconnaissance de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ; l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 est illégal, de sorte qu'il convient d'en écarter l'application ;

- l'arrêté contesté été pris au vu d'un dossier incomplet, dès lors que le pétitionnaire n'a pas précisé dans sa demande la nature de la garantie financière pour laquelle il avait décidé d'opter ;

- l'étude d'impact comporte des insuffisances substantielles en ce qui concerne l'étude paysagère ;

- l'étude d'impact est également insuffisante, en ce qui concerne les chiroptères et l'étude acoustique ;

- le dossier de l'enquête publique était irrégulièrement composé au regard de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ;

- les communes ont été irrégulièrement consultées au cours de l'enquête publique ;

- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, en ce que la demande ne fait pas suffisamment état des capacités financières de la société pétitionnaire ;

- l'arrêté contesté méconnait le plan local d'urbanisme de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé ;

- le montant des garanties de démantèlement et de remise en état du site est insuffisant ;

- les mesures de démantèlement et de remise en état du site sont insuffisantes ;

- l'arrêté contesté méconnait les dispositions combinées des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement, en ce que les éoliennes portent atteinte aux paysages et au patrimoine culturel.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 11 décembre 2019 :

- l'autorité environnementale a été irrégulièrement saisie car le " porter à connaissance " du 7 juin 2016, concernant un changement du modèle d'éolienne utilisée, ne lui a pas été transmis ;

- l'implication des services de l'Etat dans la préparation du dossier de régularisation pour la mission régionale d'autorité environnementale ne garantit pas l'indépendance de cette dernière ;

- le rapport du commissaire-enquêteur est insuffisant, en ce qu'il n'a pas répondu à toutes les observations formulées par le public ;

- l'autorisation environnementale est illégale en l'absence de demande de dérogation à l'interdiction de destructions des espèces protégées, au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 décembre et 24 février 2021, la société Enertrag AG, établissement France, représentée par Me Guiheux, conclut :

- à titre principal, au rejet de la requête ;

- à titre subsidiaire, à ce que le tribunal fasse usage de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

- à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête, en tant qu'elle est dirigée contre le jugement avant-dire droit du 24 avril 2018, est irrecevable ; la décision par laquelle un tribunal administratif transmet au Conseil d'Etat le dossier de l'affaire afin d'examiner, pour avis, une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse, et se posant dans de nombreux litiges, n'est pas susceptible de recours ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé ;

- la question de la modulation des effets dans le temps d'une annulation se pose au regard des enjeux financiers majeurs et de la contribution du projet à un objectif national.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 février 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- la requête, en tant qu'elle est dirigée contre le jugement avant-dire droit du 24 avril 2018, est irrecevable ; la décision par laquelle un tribunal administratif transmet au Conseil d'Etat le dossier de l'affaire afin d'examiner, pour avis, une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse, et se posant dans de nombreux litiges, n'est pas susceptible de recours ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par un courrier du 3 septembre 2021, la cour a informé les parties de ce qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, dans l'attente de la délivrance d'une autorisation modificative régularisant le vice tiré de ce que le public et l'administration n'ont pas été suffisamment informés quant aux capacités financières de la société pétitionnaire.

La société Enertrag AG, établissement France, a présenté ses observations le 7 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 ;

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'aviation civile ;

- l'arrêté du 26 août 2011, modifié par l'arrêté du 6 novembre 2014, relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;

- l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frank,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me Monamy, représentant l'association Danger de tempête sur le patrimoine rural et autres, et de Me Guiheux, représentant la société Enertrag AG, établissement France.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Danger de tempête sur le patrimoine rural, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), Mmes O..., J..., P..., E..., B..., K..., S..., I..., G..., L..., N..., D..., H..., F..., A.... Crépey, Eulterban, Gabory, Galopin, Jahandier, Lefevre, Lemens, Boy, Médina, Michel, Daniel et Gérard Morchoisne, Pasquier, Picault, Valuet, M. et Mme C..., M. et Mme Q..., M. et Mme T..., M. et Mme M... et M. et Mme R... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 18 mars 2016 par lequel le préfet de la région Centre-Val de Loire a autorisé la société Enertrag AG, établissement France, à exploiter cinq éoliennes d'une hauteur de 150 mètres et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé. Par un jugement n°1602358 du 24 avril 2018, le tribunal administratif d'Orléans a transmis le dossier de la demande au Conseil d'Etat pour l'examen des questions de droit définies dans les motifs de sa décision, a sursis à statuer sur la demande jusqu'à l'avis du Conseil d'Etat, et réservé jusqu'à la fin de l'instance tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'avait pas été statué. Le Conseil d'Etat a rendu son avis le 27 septembre 2018, sous le n° 420119. Par un jugement n°1602358 du 8 février 2019, le tribunal administratif d'Orléans, faisant application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, a sursis à statuer sur la demande pour permettre la régularisation du vice entachant l'avis de l'autorité environnementale. Par un arrêté du 11 décembre 2019 le préfet d'Eure-et-Loir a modifié et complété l'autorisation délivrée le 18 mars 2016. Par un jugement n° 1602358 du 23 juin 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande. L'association Danger de tempête sur le patrimoine rural et les autres requérants à la présente instance relèvent appel de ces trois jugements.

Sur la recevabilité de la requête d'appel en tant qu'elle est dirigée contre le jugement du 24 avril 2018 :

2. Le jugement par lequel un tribunal administratif, sans trancher expressément aucune question de droit, décide, avant de statuer sur une requête soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, de transmettre le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat par application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative n'est, selon les termes mêmes de cet article " susceptible d'aucun recours ". Eu égard tant à son objet qu'à l'impossibilité d'en contester les énonciations, un tel jugement constitue en réalité une mesure d'administration de la justice. Une telle mesure est dépourvue d'autorité de chose jugée.

3. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 que les requérants ne sont pas recevables à demander l'annulation du jugement du 24 avril 2018 du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a transmis le dossier de l'affaire par application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative afin que le Conseil d'Etat examine les questions de droit posées dans les motifs de sa décision et a sursis à statuer sur la demande. Toutefois, par le même jugement, le tribunal administratif a également réservé jusqu'à la fin de l'instance tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'a pas été statué. Par suite, et dès lors que le tribunal tranche ce faisant expressément des questions de droit, la requête d'appel est recevable en tant qu'elle est dirigée contre le jugement du 24 avril 2018, en tant qu'il statue sur certains droits et moyens de la demande.

Sur la régularité des jugements attaqués :

4. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ". Il résulte de ces dispositions qu'avant de faire usage du pouvoir qu'il tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, et de surseoir à statuer pour permettre la régularisation éventuelle d'un vice entachant la légalité d'une autorisation environnementale, il appartient au juge de constater qu'aucun des autres moyens soulevés n'est fondé et d'indiquer, dans la décision avant-dire droit par laquelle il sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi, pour quels motifs ces moyens doivent être écartés.

5. Il résulte des écritures de première instance qu'à l'appui de leur demande, les requérants de première instance ont soulevé des moyens tirés de l'incompétence du préfet de région pour délivrer l'autorisation initiale, de l'absence d'indication dans la demande d'autorisation de la nature des garanties financières, de la composition irrégulière du dossier d'enquête publique, de la consultation irrégulière des communes au cours de l'enquête publique, de l'insuffisance des capacités financières du pétitionnaire, de la méconnaissance du plan local d'urbanisme de Marville-Moutiers-Brûlé ainsi que de l'insuffisance des mesures de démantèlement. Le tribunal administratif a visé ces moyens mais, alors qu'ils n'étaient pas inopérants, il n'y a répondu de manière précise dans aucun des trois jugements attaqués, le jugement du 24 avril 2018 se limitant, après l'examen du surplus de l'argumentation de la demande, à relever au point 21 qu'"en l'état du dossier aucun des autres moyens n'est de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté attaqué ". Dès lors, le jugement du 24 avril 2018, en tant qu'il statue sur les droits et moyens de la demande, est entaché d'insuffisance de motivation. Il a ainsi été rendu dans des conditions irrégulières et doit, par suite, être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité invoqué. En outre, et ainsi qu'il a été dit, les jugements du 8 février 2019 et du 23 juin 2020 n'ont pas mieux répondu aux moyens soulevés dans la demande et sont irréguliers. En tout état de cause, dès lors que les motifs du premier jugement du 24 avril 2018 sont au nombre de ceux qui constituent le soutien nécessaire du dispositif des jugements du 8 février 2019 et du 23 juin 2020, ces derniers jugements rendus par le tribunal administratif d'Orléans doivent être annulés en conséquence de l'annulation du jugement du 24 avril 2018 en tant qu'il statue sur les droits et moyens de la demande.

6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'association Danger de tempête sur le patrimoine rural et autres devant le tribunal administratif d'Orléans.

Sur la recevabilité de la demande :

7. En premier lieu, en application des dispositions de l'article R. 514-3-1 du code de l'environnement, il appartient au juge administratif d'apprécier si les tiers personnes physiques qui contestent une décision prise au titre de la police des installations classées justifient d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour en demander l'annulation, compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour eux l'installation en cause, appréciés notamment en fonction de la situation des intéressés et de la configuration des lieux.

8. D'une part, il résulte de l'instruction que l'Association Danger de tempête sur le patrimoine rural a pour objet, aux termes de ses statuts, de " protéger l'environnement, le paysage [...], le patrimoine [...], la santé publique, lutter, y compris par toute action en justice, contre les projets d'installations industrielles qui mettent en péril directement ou indirectement des intérêts de la nature, des gens, du patrimoine paysager et bâti, notamment contre les parcs éoliens ". Son action s'exerce " sur l'ensemble du territoire de l'Eure-et-Loir ". Par ailleurs, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF) a été agréée au niveau national sur le fondement de dispositions aujourd'hui codifiées à l'article L. 141-1 du code de l'environnement, et a " a pour but particulier : (...) 2°- d'empêcher que les sites naturels ou urbains qui font la beauté du visage de la France, ne soient dégradés ou détruits par des spéculations des industries, des constructions, des travaux publics, conçus, installés, exécutés sans aucun souci de l'aspect de la région et des intérêts matériels mêmes qui sont attachés à cet aspect. / (...) ". Eu égard à leur objet statutaire, suffisamment circonscrit matériellement et géographiquement, les associations requérantes justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté du 18 mars 2016 par lequel le préfet de la région Centre-Val de Loire a autorisé la société Enertrag AG, établissement France, à exploiter cinq éoliennes d'une hauteur de 150 mètres et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé, ainsi que contre l'arrêté du 11 décembre 2019 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a modifié et complété l'autorisation délivrée le 18 mars 2016 à la société Enertrag AG, établissement France.

9. D'autre part, les personnes physiques, auteurs de la requête, résident à Marville-Moutiers-Brûlé, à Boullay-les-Deux-Églises, à Tréon, ou à Puiseux, dans des hameaux proches du projet, situées à moins de quelques kilomètres de l'éolienne la plus proche. Eu égard à la taille des éoliennes et à la topographie des lieux, le parc en projet sera visible depuis leurs propriétés respectives. Le projet entraînera également, dans certaines conditions, des émergences sonores sensibles. Par ailleurs, si le préfet se prévaut de l'article L. 514-6 bis du code de l'environnement, qui dispose que les " Les tiers qui n'ont acquis ou pris à bail des immeubles ou n'ont élevé des constructions dans le voisinage d'une installation classée que postérieurement à l'affichage ou à la publication de l'acte portant autorisation ou enregistrement de cette installation ou atténuant les prescriptions primitives ne sont pas recevables à déférer ledit arrêté à la juridiction administrative ", il ne conteste pas sérieusement l'allégation selon laquelle les maisons d'habitation des requérants ont été édifiées antérieurement aux arrêtés attaqués. Dès lors, compte tenu des inconvénients que le projet est susceptible de présenter pour eux, ces requérants justifient d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour agir contre l'autorisation contestée.

10. En second lieu, les statuts de l'association SPPEF prévoient que cette association est représentée en justice par son président ou par un autre membre du conseil d'administration spécialement désigné à cet effet. Contrairement à ce que soutient le préfet de la région Centre-Val de Loire, l'association SPPEF est représentée dans le cadre de la présente instance par son président en exercice. Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de ce que cette association ne justifierait pas de la qualité de son représentant pour agir en justice doit être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 18 mars 2016 :

En ce qui concerne les dispositions applicables :

11. Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance no 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance no 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, ainsi que les permis de construire en cours de validité à cette même date autorisant les projets d'installation d'éoliennes terrestres sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont (...) contestées (...) ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance no 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance no 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; / (...). "

12. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'autorisation l'unique l'était avant elle ainsi que les autres autorisations mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

13. Cependant, il résulte des dispositions citées au point 11 que les demandes d'autorisation au titre du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, régulièrement déposées avant le 1er mars 2017, sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017, c'est-à-dire au 1er mars 2017.

14. En l'espèce, l'arrêté contesté du 18 mars 2016 a été pris sur la demande déposée le 17 août 2012, puis complété les 8 mars, 4 avril et 5 septembre 2013, ainsi que le 19 février 2014, par la société Enertrag Aktiengesellschaft, établissement France. Le préfet d'Eure-et-Loir, qui a estimé que le dossier était complet, a prescrit l'ouverture par un arrêté du 25 avril 2014, de l'enquête publique, laquelle s'est tenue du 26 mai au 27 juin 2014. Dès lors, en application des dispositions précitées du 2° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017, les règles de procédure régissant la demande d'autorisation sont les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, le 1er mars 2017.

En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'arrêté attaqué :

15. En vertu de l'article 2 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, le préfet de région peut " évoquer, par arrêté, et pour une durée limitée, tout ou partie d'une compétence à des fins de coordination régionale " et prendre dès lors " les décisions correspondantes en lieu et place des préfets de département ". Si les requérants soutiennent que l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente, en ce que le préfet de la région Centre ne pouvait faire usage de ce pouvoir d'évocation et délivrer l'autorisation litigieuse sans méconnaître les dispositions précitées, il ne résulte pas de l'instruction que le préfet de la Région Centre aurait excédé les limites de sa compétence en décidant de faire usage de son pouvoir d'évocation pour délivrer les autorisations de construire relatives aux parcs éoliens, eu égard à la nécessité de coordonner l'appréciation des projets éoliens à l'échelle régionale dans le cadre du Schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie du Centre " jusqu'à l'atteinte de l'objectif de production de 2 600 mégawatts " arrêté par ce schéma, alors même que cette coordination, ainsi qu'indiqué à l'arrêté du préfet de la région Centre du 20 novembre 2015 portant droit d'évocation en matière d'éolien terrestre, prendra fin au plus tard le 28 juin 2017. Si les requérants invoquent, par voie d'exception, l'illégalité de ce dernier arrêté, un tel moyen apparaît, en tout état de cause, inopérant à l'encontre de la décision contestée, celle-ci n'ayant pas été prise pour son application et l'arrêté du 20 novembre 2015 n'en constituant pas la base légale.

En ce qui concerne l'avis de l'autorité environnementale du 25 novembre 2013 :

16. Il résulte de l'instruction qu'un premier avis environnemental a été rendu, le 25 novembre 2013, par le préfet de région, en tant qu'autorité environnementale sur la demande d'autorisation présentée par la société Enertrag AG, Etablissement France. À la suite du jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 avril 2018, le préfet d'Eure-et-Loir a sollicité, le 4 avril 2019, un nouvel avis environnemental auprès de la mission régionale d'autorité environnementale (MRAe), qui a rendu son avis le 10 mai 2019. Il n'est pas contesté par la ministre de la transition écologique que le premier avis environnemental, rendu le 25 novembre 2013 par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale, était irrégulier. Cependant, l'administration et le pétitionnaire font valoir que le vice entachant ce premier avis environnemental a été régularisé par l'avis du mai 2019 de la mission régionale d'autorité environnementale.

17. Eu égard à son office, le juge du plein contentieux de l'autorisation environnementale peut prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que des irrégularités affectant l'autorisation ont été régularisées, sous réserve qu'elles n'aient pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population.

18. Aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'environnement : " L'enquête publique a pour objet d'assurer l'information et la participation du public ainsi que la prise en compte des intérêts des tiers lors de l'élaboration des décisions susceptibles d'affecter l'environnement mentionnées à l'article L. 123-2. Les observations et propositions parvenues pendant le délai de l'enquête sont prises en considération par le maître d'ouvrage et par l'autorité compétente pour prendre la décision ". Il en résulte que lorsqu'un vice de procédure entache un avis qui a été soumis au public, notamment dans le cadre d'une enquête publique, préalablement à l'adoption de la décision attaquée, la régularisation implique non seulement que la procédure de consultation soit reprise, mais aussi que le nouvel avis soit porté à la connaissance du public.

19. Il résulte de l'instruction que l'avis du 10 mai 2019 de la mission régionale d'autorité environnementale, ainsi que les observations en réponse apportées par la société Enertrag AG, établissement France, ont été portés à la connaissance du public lors d'une enquête publique complémentaire qui a eu lieu du 26 septembre au 11 octobre 2019. Ainsi qu'il sera dit aux points 68 à 80, le vice de procédure entachant l'avis de l'autorité environnementale du 25 novembre 2013 a été régularisé par l'avis du 10 mai 2019. Il en résulte que les requérants ne peuvent utilement invoquer, pour demander l'annulation de l'arrêté contesté, le moyen tiré de l'illégalité de l'avis de l'autorité environnementale du 25 novembre 2013.

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'autorisation :

20. Les obligations relatives à la composition du dossier de demande d'autorisation d'une installation classée relèvent des règles de procédure. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant ce dossier ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. En outre, eu égard à son office, le juge du plein contentieux des installations classées peut prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées, sous réserve qu'elles n'aient pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population.

Quant à l'indication du montant et de la nature des garanties financières de démantèlement de l'installation :

21. Aux termes de l'article L. 516-1 du code de l'environnement : " La mise en activité (...) des installations définies par décret en Conseil d'État présentant des risques importants de pollution ou d'accident, (...) est subordonnée à la constitution de garanties financières. / Ces garanties sont destinées à assurer, suivant la nature des dangers ou inconvénients de chaque catégorie d'installations, la surveillance du site et le maintien en sécurité de l'installation, les interventions éventuelles en cas d'accident avant ou après la fermeture, et la remise en état après fermeture. (...) ". Aux termes de l'article R. 553-1 du code de l'environnement, alors en vigueur : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre de l'article L. 512-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 553-6. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. / II. - Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. / (...) " Aux termes de l'article R. 512-5 du code de l'environnement, alors en vigueur : " Lorsque la demande d'autorisation porte sur une installation mentionnée à l'article R. 516-1 ou R. 553-1, elle précise, en outre, les modalités des garanties financières exigées à l'article L. 516-1, notamment leur nature, leur montant et les délais de leur constitution. " Aux termes de l'article R. 516-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Les garanties financières exigées à l'article L. 516-1 résultent, au choix de l'exploitant : / a) De l'engagement écrit d'un établissement de crédit, d'une société de financement, d'une entreprise d'assurance ou d'une société de caution mutuelle ; / b) D'une consignation entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations ; / c) Pour les installations de stockage de déchets, d'un fonds de garantie géré par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie ; / d) D'un fonds de garantie privé, proposé par un secteur d'activité et dont la capacité financière adéquate est définie par arrêté du ministre chargé des installations classées ; ou / e) De l'engagement écrit, portant garantie autonome au sens de l'article 2321 du code civil, de la personne physique, où que soit son domicile, ou de la personne morale, où que se situe son siège social, qui possède plus de la moitié du capital de l'exploitant ou qui contrôle l'exploitant au regard des critères énoncés à l'article L. 233-3 du code de commerce. Dans ce cas, le garant doit lui-même être bénéficiaire d'un engagement écrit d'un établissement de crédit, d'une société de financement, d'une entreprise d'assurance, d'une société de caution mutuelle ou d'un fonds de garantie mentionné au d ci-dessus, ou avoir procédé à une consignation entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations. / (...) ".

22. Il résulte de l'instruction que le dossier de demande d'autorisation mentionne le montant des garanties financières, calculé conformément à l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, soit en l'espèce 250 000 euros, et expose les conditions d'actualisation de ce montant. Par ailleurs, le dossier de demande indique qu'" au vu des capacités financières de la société Enertrag, établissement France, les garanties financières seront assurées par cette dernière ", le dossier précisant que la société Enertrag, établissement France est une succursale sans personnalité morale distincte de la société Enertrag AG. Ces indications quant au montant et à la nature des garanties financières répondent aux exigences fixées par les dispositions citées au point précédent.

23. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisante indication de la nature des garanties financières dans le dossier de demande d'autorisation doit être écarté.

Quant à l'indication des capacités techniques et financières de la société pétitionnaire :

24. Aux termes de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " La demande prévue à l'article R. 512-2 (...) mentionne : / (...) 5° Les capacités techniques et financières de l'exploitant (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'une autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement est tenu de fournir, à l'appui de son dossier, des indications précises et étayées sur ses capacités techniques et financières. Le pétitionnaire doit notamment justifier disposer de capacités techniques et financières propres ou fournies par des tiers de manière suffisamment certaine, le mettant à même de mener à bien son projet et d'assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

25. Le dossier de demande d'autorisation d'exploiter déposé en août 2012, et complété les 8 mars 2013, 4 avril 2013, 5 septembre 2013 et 19 février 2014, fait apparaître que la société Enertrag - Etablissement France est une succursale, sans personnalité morale distincte, de la société Enertrag AG, au capital social de 11 335 000 marks allemand (5 795 493 euros). Le document mentionne que le projet est financé d'une part, par les emprunts bancaires à hauteur de 80% environ, d'autre part, pour les 20% restant, soit par le capital propre de la société, soit par l'intermédiaire de fonds structurés, apportés par une filiale de la société Enertrag AG. Il comporte également des informations sur les capacités financières de la société Enertrag AG, notamment son chiffre d'affaires entre 2006 et 2011. Toutefois, en l'absence notamment d'un quelconque engagement d'un établissement de crédit relatif à l'emprunt bancaire envisagé par le pétitionnaire, ou d'un quelconque engagement de financer l'intégralité du projet en cas d'un refus d'emprunt, ces seules informations figurant dans le dossier de demande d'autorisation d'exploiter n'étaient pas suffisamment précises et étayées quant aux capacités financières de la société. Si, par deux attestations du 29 mai 2017, la société Enertrag et son assureur ont respectivement certifié être en mesure de financer le projet par les seuls fonds propres du pétitionnaire, sans s'y engager, et être " en mesure de fournir une garantie financière de démantèlement ", ces documents sont contradictoires avec l'information selon laquelle le financement du projet est assuré par emprunt bancaire et n'ont pas, en tout état de cause, été joints au dossier soumis à l'enquête publique qui s'est déroulée du 26 mai au 27 juin 2014, ni même au dossier soumis à l'enquête publique complémentaire qui s'est tenue du 26 septembre au 11 octobre 2019. Dans ces conditions, le dossier de demande d'autorisation ne peut être regardé comme suffisamment précis et étayé quant aux capacités financières dont la société pétitionnaire serait effectivement en mesure de disposer. Compte tenu du coût du projet, de ses modalités de financement et des indications particulièrement succinctes figurant dans le dossier, cette insuffisance a eu pour effet de nuire à l'information complète du public. Par suite, l'arrêté du 18 mars 2016, qui n'a pas été complété et modifié par l'arrêté du 11 décembre 2019 sur ce point, est entaché d'irrégularité pour ce motif.

Quant à l'avis des propriétaires concernés sur les conditions de démantèlement et de remise en état du site :

26. En vertu de l'article R. 512-30 du code de l'environnement, alors en vigueur, dont les dispositions sont reprises à l'article R. 181-43 de ce code, l'arrêté d'autorisation comporte les conditions de remise en état après la cessation d'activité. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, alors en vigueur : " I. - À chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; (...) ". Aux termes de l'article R. 553-6 du code de l'environnement, alors en vigueur : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / a) Le démantèlement des installations de production ; b) L'excavation d'une partie des fondations ; / c) La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; / d) La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état. " En vertu de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, alors en vigueur, les opérations de démantèlement et de remise en état de ces installations comprennent notamment le démantèlement des installations de production d'électricité, des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison.

27. En premier lieu, il résulte des dispositions du 1° de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales qu'il appartient au maire, compétent en matière de conservation et d'administration des biens de la commune, et non au conseil municipal, d'émettre l'avis prévu par les dispositions précitées de l'article R. 512-6 du code de l'environnement. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'avis du conseil municipal de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé devait être recueilli au motif que les câbles du réseau inter-éolien empruntent le chemin rural n° 22 de Tréon à Puiseux, lequel appartient au domaine privé de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé. En outre, il est constant que le maire de commune a donné un avis favorable aux conditions de démantèlement et de remise en état du site.

28. En second lieu, les requérants soutiennent que la demande d'autorisation ne comporte pas l'avis des propriétaires des parcelles cadastrées à la section OV sous les nos 26 et 77 concernées par le passage des câbles.

29. Cependant, d'une part, il résulte de l'instruction que ces parcelles ne supporteront aucune autre installation que les câbles de liaison électrique inter-éoliennes, lesquels ne seront en aucun point compris dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. Par suite, l'avis des propriétaires de ces parcelles n'était pas requis en application des dispositions citées au point 26.

30. D'autre part, si les requérants soutiennent que l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011, dans sa rédaction initiale comme dans sa rédaction issue de l'arrêté du 6 novembre 2014, est entaché d'incompétence, et que cet arrêté, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 6 novembre 2014, est entaché d'illégalité en ce qu'il limite le démantèlement des câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison, l'autorisation d'exploitation contestée n'a pas été prise en application des dispositions de cet arrêté du 26 août 2011, qui n'en constitue pas davantage la base légale. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement exciper de l'illégalité de cet arrêté en ce qu'il serait entaché d'une incompétence négative et méconnaîtrait les dispositions de l'article R. 553-6 du code de l'environnement. En tout état de cause, les câbles de liaison des éoliennes ne constituent pas des " installations de production " et ne sont, par suite, pas soumis à obligation de démantèlement au sens des dispositions de l'article R. 553-6 du code de l'environnement. Au demeurant le ministre chargé de l'environnement devait, en vertu des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 553-6 du code de l'environnement, fixer les conditions techniques de remise en état du site après exploitation. Il pouvait donc légalement, sans méconnaître les dispositions de cet article, fixer le périmètre du démantèlement des câbles des aérogénérateurs. Dès lors, les demandeurs ne sont pas fondés à soutenir que le préfet était tenu d'écarter l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 précité ni qu'il aurait dû prévoir dans son arrêté le démantèlement des câbles au-delà de 10 mètres autour des aérogénérateurs.

31. Il s'ensuit que l'avis des propriétaires des parcelles cadastrées à la section OV sous les nos 26 et 77, concernées par le passage des câbles, n'avaient pas à figurer dans le dossier de demande d'autorisation.

32. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la demande n'était pas conforme aux dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement doit être écarté.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

33. Aux termes des dispositions de l'article R. 512-6, alors en vigueur, du code de l'environnement : " I. - A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) / 4° L'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 dont le contenu est défini à l'article R. 122-5 et complété par l'article R. 512-8 ; / (...) ". Aux termes des dispositions du I de l'article R. 512-8, alors en vigueur, de ce code : " Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. ".

34. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision de l'autorité administrative.

Quant à l'étude paysagère :

35. Il résulte de l'instruction que l'étude d'impact comporte des photomontages établis depuis des espaces ouverts, publics et orientés vers les éléments naturels et patrimoniaux environnant susceptibles d'être affectés par le projet. L'étude paysagère réalisée en août 2012 par le bureau d'études " de long en large ", ainsi que l'étude complémentaire réalisée par le même bureau en février 2014, comportent une description du contexte paysager de la zone d'accueil, une évaluation des effets du projets sur la Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager (ZPPAUP) de Crécy-Couvé, située à environ 5 kilomètres du projet, ainsi que de très nombreux photomontages représentant les différentes situations de perception ou de covisibilité susceptibles d'affecter les paysages, les sites patrimoniaux dignes d'intérêt et monuments historiques, assortis de développements étayés et complétés. Les études d'impact paysagères relèvent que les éléments patrimoniaux sont tous situés à plus de 5 kilomètres du projet et précisent que le château du Boullay-Thierry se trouve sur une propriété privée close et difficilement accessible, que seules les lucarnes situées en toitures pourraient permettre des vues sur le projet, que les éoliennes ne seront pas visibles depuis les abords immédiats du château du fait de la présence des boisements qui masquent le projet, et que les éoliennes ne seront visibles que depuis les seuls abords ouest du parc. Compte tenu de toutes ces précisions, la circonstance que ces études ne comportent pas de photomontage s'agissant de ce château n'entache pas les études réalisées d'inexactitude ou d'insuffisance ayant eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou ayant été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision de l'autorité administrative.

Quant à la description de l'impact sur les chiroptères et à l'étude acoustique:

36. Les requérants soutiennent que, dans son avis du 10 mai 2019, la mission régionale d'autorité environnementale a recommandé de compléter les inventaires relatifs aux chauves-souris par la réalisation d'écoutes en continu sur des nuits entières au sol et en altitude, à hauteur de nacelle, et d'étudier l'opportunité de la mise en place d'une mesure de bridage préventive selon les modalités proposées par les lignes directrices pour la prise en compte de l'activité migratrice des chauves-souris en région Centre-Val de Loire, soit d'août à octobre, pour des vents inférieurs à 6 m/s. Ils font également valoir que, s'agissant du bruit, la même mission a recommandé de justifier l'absence de calculs d'émergence pour des vitesses de vent inférieures à 5 m/s, alors que les éoliennes sont susceptibles de fonctionner dès que la vitesse du vent atteint 3 m/s. Ils déduisent ainsi de cet avis que l'étude d'impact initiale était insuffisante en ce qui concerne les chauve-souris et les bruits.

37. Il résulte de l'instruction que, dans ses observations en réponse du 29 mai 2019, la société Enertag AG, établissement France, a indiqué qu'à défaut de réalisation d'une campagne d'écoute en continu, elle entendait mettre en place le bridage de précaution prévu par les récentes lignes directrices pour la prise en compte de l'activité migratrice des chauves-souris en région centre-Val de Loire, selon les conditions prévues à défaut de données en altitude, à savoir une programmation préventive de l'arrêt de toutes les machines pour des vents inférieurs à 6 m/s sur la période d'août à octobre. Par ailleurs, " le porter à connaissance " du 6 février 2019, relatif au changement de modèle d'éolienne, comporte une étude acoustique complémentaire qui décrit les émergences acoustiques pour les vitesses de vent de 4,5, 6, 7 et 8 m/s, et alors que le modèle d'éolienne retenue démarre avec une vitesse de vent d'environ 3,5-4 m/s. Dès lors, une telle étude présente les calculs d'émergence pour des vitesses de vent inférieures à 5 m/s, et couvre l'ensemble de la plage des vitesses de vent de fonctionnement de l'éolienne choisie. Dans ces conditions, eu égard à ces éléments qui figuraient au dossier de l'enquête publique complémentaire qui s'est tenue du 26 septembre au 11 octobre 2019, préalablement à l'arrêté du 11 décembre 2019, lequel complète et modifie l'autorisation initiale délivrée le 18 mars 2016, le moyen tiré des insuffisances affectant l'étude d'impact sur les chiroptères et l'étude acoustique doit être écarté.

En ce qui concerne l'enquête publique :

Quant à la composition du dossier soumis à l'enquête publique :

38. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 512-2 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable : " Si un permis de construire a été demandé, il peut être accordé mais ne peut être exécuté avant la clôture de l'enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du présent code ". Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. / Le dossier comprend au moins : / (...) 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme. Dans le cas d'avis très volumineux, une consultation peut en être organisée par voie électronique dans les locaux de consultation du dossier ; (...) ". Aux termes de l'article R. 425-9 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur une construction susceptible, en raison de son emplacement et de sa hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne, le permis de construire ou le permis d'aménager tient lieu de l'autorisation prévue par l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense. ". En vertu de l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile : " A l'extérieur des zones grevées de servitudes de dégagement en application du présent titre, l'établissement de certaines installations qui, en raison de leur hauteur, pourraient constituer des obstacles à la navigation aérienne est soumis à une autorisation spéciale du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense ".

39. Si le ministre chargé de l'aviation civile et le ministre de la défense doivent donner leur accord sur les projets susceptibles de constituer, comme en l'espèce, des obstacles à la navigation aérienne, les articles R. 425-9 du code de l'urbanisme et R. 244-1 du code de l'aviation civile, pas plus qu'aucune autre disposition législative ou réglementaire, ne prévoient que ces accords doivent figurer dans le dossier de l'enquête publique relative à l'autorisation d'exploiter un parc éolien, qui ne porte pas sur l'autorisation de construction des éoliennes. Ainsi, ces avis, alors même qu'ils devaient être émis dans le cadre de l'instruction des demandes de permis de construire les éoliennes, n'avaient pas à être joints au dossier d'enquête publique préalable à la délivrance de l'autorisation d'exploiter au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement. En tout état de cause, il résulte de l'instruction que le dossier de demande d'autorisation de mars 2013, joint au dossier soumis à l'enquête publique, fait état en page 33 de la présentation générale du projet, de la date et de la teneur des avis émis par ces deux autorités. Dès lors, l'absence de ces avis au dossier d'enquête publique n'a pas nui à l'information complète du public et n'a été de nature ni à exercer une influence sur les résultats de l'enquête ni, par suite, sur le sens de la décision de l'autorité administrative.

Quant à la consultation des communes intéressées :

40. Aux termes de l'article R. 512-20 du code de l'environnement : " Le conseil municipal de la commune où l'installation projetée doit être implantée et celui de chacune des communes mentionnées au III de l'article R. 512-14 sont appelés à donner leur avis sur la demande d'autorisation dès l'ouverture de l'enquête. (...) ". L'article R. 512-14 du même code vise les communes concernées par les risques et inconvénients dont le projet peut être la source.

41. Il résulte de l'instruction que les conseils municipaux de Marville-Moutiers-Brûlé et du Boullay-Mivoye ont été consultés sur le projet d'autorisation unique, dont les avis ont au demeurant été visés par l'autorisation litigieuse dans sa version modifiée et complétée du 11 décembre 2019, ainsi que par le rapport du commissaire enquêteur du 25 octobre 2019. Par suite, le moyen tiré de ce que les conseils municipaux des communes de Marville-Moutiers-Brûlé et du Boullay-Mivoye n'ont pas été consulté manque en fait et doit être écarté.

En ce qui concerne l'appréciation des conditions de fond relatives aux capacités financières de la société pétitionnaire :

42. Les articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 de ce code. Il en résulte qu'une autorisation d'exploiter une installation classée ne peut légalement être délivrée, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si les conditions qu'ils posent ne sont pas remplies. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

43. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il convient de faire application des dispositions de l'article L. 181-27 du code de l'environnement issues de l'ordonnance du 26 janvier 2017 pour apprécier les conditions de fond relatives aux capacités financières de l'exploitant.

44. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité. ". Selon l'article D. 181-15-2 du même code : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir. Dans ce dernier cas, l'exploitant adresse au préfet les éléments justifiant la constitution effective des capacités techniques et financières au plus tard à la mise en service de l'installation (...) ".

45. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement : " 1. Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. / 2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes : / a) qui sont élaborés pour les secteurs de l'agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l'énergie, de l'industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l'eau, des télécommunications, du tourisme, de l'aménagement du territoire urbain et rural ou de l'affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 85/337/CEE pourra être autorisée à l'avenir ; / ou b) pour lesquels, étant donné les incidences qu'ils sont susceptibles d'avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu des articles 6 et 7 de la directive 92/43/CEE. (...) ".

46. Il résulte de l'article 3 précité de la directive du 27 juin 2001, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans ses arrêts du 11 septembre 2012 (C-43/10, Nomarchiaki Aftodioikisi Aitoloakarnanias), et du 27 octobre 2016 (C-290/15, Patrice d'Oultremont contre Région wallonne), que la notion de " plans et programmes " se rapporte à tout acte qui établit, en définissant des règles et des procédures de contrôle applicables au secteur concerné, un ensemble significatif de critères et de modalités pour l'autorisation et la mise en œuvre d'un ou de plusieurs projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. Si, selon la Cour de justice, la notion de " plans et programmes " peut ainsi recouvrir au sens de la directive des actes normatifs adoptés par la voie législative ou réglementaire, c'est à la condition toutefois que ces actes concernent des secteurs déterminés et qu'ils définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 peut être autorisée.

47. L'ordonnance du 26 janvier 2017, qui détermine les règles applicables aux projets relevant de l'ensemble des secteurs soumis auparavant à la règlementation des installations classées pour la protection de l'environnement, n'a pas pour objet de définir le cadre dans lequel peuvent être mis en œuvre des projets déterminés dans un secteur particulier. Elle ne relève pas, par conséquent, de la notion de " plans et programmes " au sens de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 et n'avait pas, dès lors, à être précédée d'une évaluation environnementale. Ainsi, l'ordonnance du 26 janvier 2017, non plus que le décret pris pour son application, d'où sont issues les dispositions précitées du code de l'environnement, et fixant le régime de l'autorisation environnementale, n'entrent pas dans le champ de la directive 2001/42/CE et n'avaient pas, en tout état de cause, à faire l'objet d'une évaluation environnementale en application de l'article L. 122-4 du code de l'environnement ou de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001.

48. Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que les dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017, non plus que le décret pris pour son application d'où sont issues les dispositions précitées du code de l'environnement, méconnaissent les objectifs de la directive 2001/42 ni, en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 122-4 du code de l'environnement.

49. En second lieu, il résulte de l'instruction que la société Enertrag, établissement France est une succursale, sans personnalité morale distincte, de la société Enertrag AG, au capital social de 11 335 000 marks allemand (5 795 493 euros). Cette société, spécialisée dans l'exploitation de parcs éoliens, peut se prévaloir au cours de l'instance d'un chiffre d'affaires atteignant plus de 100 millions d'euros en 2011, 200 millions d'euros en 2016, et d'un résultat opérationnel représentant 30 % de ce chiffre d'affaires, soit environ 63 millions d'euros. Pour 2016, son bilan certifié s'est élevé à 104 189 900 euros d'actifs immobilisés, 40 719 500 euros d'actifs circulants et 70 986 900 euros de fonds propres. La seule circonstance, invoquée par les requérants, que la société Enertrag AG soit engagée dans un grand nombre de projets ne saurait suffire à remettre en cause le sérieux de cette garantie et l'importance de ces capacités. Dans ces conditions, eu égard aux conditions de fonctionnement des parcs éoliens, et alors que la mise en service du parc éolien ne peut désormais intervenir avant la constitution des garanties, la société société Enertrag établissement France justifie la pertinence des modalités selon lesquelles elle prévoit de disposer de capacités financières suffisantes pour mener à bien son projet. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance des capacités financières de l'exploitant doit être écarté.

En ce qui concerne le montant des garanties de démantèlement et de remise en état du site :

50. Aux termes de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation ". Les articles 30 à 32 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans leur rédaction issue de l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, précisent ces dispositions. En vertu du II de l'annexe I à cet arrêté, auquel renvoie l'article 30, le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur est égal au nombre d'éoliennes multiplié par le coût unitaire d'un aérogénérateur qui varie selon la puissance de l'éolienne. Celui-ci s'établit à 50 000 euros lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2 MW. Lorsque la puissance unitaire de l'aérogénérateur est supérieure à 2 MW, ce coût unitaire est calculé selon la formule définie par le b) du I de cette annexe, selon laquelle : " Cu = 50 000 + 10 000 * (P-2) où : Cu est le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur ; P est la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur, en mégawatt (MW). ".

51. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce.

52. D'une part, il résulte de l'instruction que le montant initial des garanties financières fixé à 249 855 euros par l'article 6 de l'arrêté attaqué a été calculé conformément aux dispositions de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, sur la base d'un coût forfaitaire de 50 000 euros, par éolienne, quelle que soit sa puissance. Ces dispositions ont été abrogées par l'arrêté du 22 juin 2020 précité et remplacées, par un coût variable selon leur puissance, calculé ainsi qu'il a été dit au point 50, pour les seules éoliennes d'une puissance supérieure à 2 MW. Il résulte de l'instruction que les éoliennes du projet litigieux disposent d'une puissance égale à 2 MW. Par suite, le montant initial des garanties financières fixé à l'article 6 de l'arrêté contesté du 18 mars 2016 n'avait pas à être modifié après l'intervention de l'arrêté du 22 juin 2020.

53. D'autre part, les requérants, en se bornant à faire référence au coût estimé pour un autre projet de parc éolien ou à un rapport rendu en mai 2019 par le Conseil général de l'environnement et le Conseil général de l'économie, n'établissent, ni que les dispositions des arrêtés des 26 août 2011 et 22 juin 2020 seraient entachées d'illégalité, ni que le montant des garanties financières exigé par elles, qui prend en compte les bénéfices liés à la revente des matériaux, ne serait pas suffisant pour assurer le démantèlement des installations et la remise en état de leur site d'implantation. Il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que les installations projetées appelleraient la fixation de garanties supérieures.

54. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les garanties financières fixées par l'arrêté sont insuffisantes dans la mesure où elles sont inférieures au montant résultant de l'annexe I de l'arrêté du 11 août 2011 modifié le 22 juin 2020.

En ce qui concerne l'insuffisance des mesures de démantèlement et de remise en état du site :

55. Les mesures de démantèlement et de remise en état du site mises à la charge de l'exploitant n'ont pas été déterminées par l'arrêté d'autorisation contesté lui-même, mais résultent directement de l'application des dispositions de l'article L. 553-3, devenu l'article L. 515-46, du code de l'environnement, de celles de l'article R. 553-6, devenu l'article R. 515-106, de ce code et de celles de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent. Les dispositions de ce dernier arrêté sont désormais reprises, après modification, par l'article 20 de l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, à l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué, " en ce qu'il n'impose pas l'excavation de la totalité des fondations, ni ne conditionne un éventuel démantèlement partiel des fondations des aérogénérateurs à la production préalable d'une étude ", méconnaît l'article R. 515-106 du code de l'environnement et l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011, ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance du plan local d'urbanisme de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé :

56. En premier lieu, aux termes de l'article 6.2 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme de Marville-Moutiers-Brûlé, approuvé le 15 janvier 2009 et révisé le 14 février 2012 : " les constructions implantées le long d'une emprise publique, d'une voie ouverte à la circulation générale ou d'un chemin rural doivent être implantées avec un recul de 12 mètres minimum par rapport à l'alignement de la voie ". L'article 6.3 du même règlement prévoit que " dans le but d'une meilleure intégration du projet dans son environnement, un recul moindre ou une implantation à l'alignement sont admis dans les cas suivants : [...] 2. Lorsqu'il s'agit d'équipements techniques liés à la sécurité, à un service public, à la gestion des eaux, à la distribution d'énergie tels que transformateurs, château d'eau ".

57. D'une part, le poste de livraison jouxtant les éoliennes constitue une interface entre le réseau public de distribution d'électricité et le réseau interne au parc éolien. Par suite, cette construction caractérise un équipement technique lié à la distribution d'énergie, au sens de l'article précité du règlement du plan local d'urbanisme. La société pétitionnaire soutient, sans être sérieusement contredite, qu'afin d'améliorer l'intégration de la construction dans son environnement, et de perturber le moins possible l'exploitation agricole sur laquelle elle est implantée ainsi que la circulation des engins agricoles sur le chemin rural voisin, l'édification du poste de livraison a été prévue à 3,50 mètres des limites cadastrales du chemin n° 22 de Tréon à Puiseux. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que les éoliennes du projet litigieux seraient elles-mêmes implantées à une distance inférieure à 12 mètres par rapport à l'alignement de la voie. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'autorisation litigieuse méconnaîtrait les règles de distance d'implantation prévues par l'article 6.2 précité du règlement du plan local d'urbanisme.

En ce qui concerne l'atteinte au patrimoine architectural, urbain et paysager :

58. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...), les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". Et aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Il résulte de ces dispositions que lorsqu'il statue sur une demande d'autorisation d'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement, il appartient au préfet de s'assurer que le projet ne méconnaît pas, notamment, l'exigence de conservation des sites, des monuments ainsi que de protection des paysages, prévue par l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

59. D'une part le projet prévoit l'implantation du parc éolien sur le territoire de Marville-Moutiers-Brûlé au sud-ouest de son centre bourg, à quelques kilomètres au sud de l'agglomération de Dreux, et au nord de Puiseux. La commune de Marville-Moutiers-Brûlé se situe dans une zone identifiée comme favorable au développement éolien dans le schéma régional éolien. L'aire d'implantation, constituée de vastes plaines agricoles cultivées, ne présente pas d'intérêt environnemental ou paysager significatif. Le projet est situé à environ 5 kilomètres au sud-est de la zone de protection de patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP) de Crécy-Couvré et Aunay-sous-Crécy.

60. D'autre part le projet prévoit l'installation de cinq éoliennes et d'un poste de livraison, dont les pales atteindront une hauteur totale de 150 mètres.

61. Il résulte de l'instruction que, de manière générale, les hameaux qui composent l'aire immédiate sont peu habités et présentent des vues fermées sur le paysage alentour, notamment du fait de la présence de végétations. Il résulte notamment de l'étude paysagère réalisée en août 2012, ainsi que de l'étude complémentaire réalisée en février 2014, dont la sincérité n'est pas contestée, que le parc projeté ne sera pas visible depuis le fond de la vallée de Crécy-Couvé, et que les vues offertes depuis son plateau sont limitées par " le contexte urbanisé et boisé ", seul le haut des pâles étant en réalité perceptible. Par ailleurs, il résulte des photomontages produits par le pétitionnaire que les éoliennes ne seront pas visibles et n'entreront pas en covisibilité avec 4 des 7 monuments historiques inscrits au sein de la ZPPAUP, le Pont et moulin de la Belfassière, l'ancien hôpital de Saint-Jean, la machine grille hydraulique et la glacière. L'impact visuel sera faible et limité depuis les trois autres sites recensés, l'église paroissiale Saint-Eloi, la " terrasse " et l'ancien baillage de justice, tous situés à plus de 5 kilomètres du projet. Les éoliennes ne seront pas visibles depuis les abords immédiats du château du Boullay-Thierry, propriété privée qui ne fait pas l'objet d'une protection particulière. Enfin, et contrairement à ce qu'indiquent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que le projet implique une covisibilité avec la Chapelle royale de Dreux, située à environ 9,5 kilomètres du projet et que les éoliennes seront significativement perceptibles depuis ses terrasses. Il s'ensuit que les vues alléguées par les requérants, dont aucune n'est franche, n'influenceront pas significativement la perception visuelle des monuments ou les perspectives offertes depuis ces sites. Par suite, eu égard à la consistance du projet, à son implantation et aux éléments naturels qui dissimulent efficacement les machines, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet aurait fait une inexacte application des dispositions précitées des articles du code de l'environnement et de l'urbanisme en délivrant l'autorisation environnementale sollicitée.

En ce qui concerne l'absence de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées :

62. D'une part, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle (...) d'animaux de ces espèces (...). " Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " I. - Un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle (...) / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement (...) ".

63. D'autre part, aux termes de l'article L. 181-1 du code de l'environnement, créé par l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " L'autorisation environnementale, dont le régime est organisé par les dispositions du présent livre ainsi que par les autres dispositions législatives dans les conditions fixées par le présent titre, est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : / (...) / 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1. / (...). " En vertu du I de l'article L. 181-2 du même code, créé par la même ordonnance, " l'autorisation environnementale tient lieu, y compris pour l'application des autres législations, des autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments suivants, lorsque le projet d'activités, installations, ouvrages et travaux relevant de l'article L. 181-1 y est soumis ou les nécessite : / (...) / 5° Dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats en application du 4° de l'article L. 411-2 ; / (...) ". Selon l'article L. 181-3 du même code : " (...) / II. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : / (...) 4° Le respect des conditions, fixées au 4° de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation ; / (...) ".

64. Enfin, aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance no 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance no 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, ainsi que les permis de construire en cours de validité à cette même date autorisant les projets d'installation d'éoliennes terrestres sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont (...) contestées (...) ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; / (...). "

65. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les autorisations délivrées au titre des installations classées pour la protection de l'environnement en application de l'article L. 512-1 du code de l'environnement, antérieurement au 1er mars 2017, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017, sont considérées, à compter de cette date, comme des autorisations environnementales. Il en résulte également que les autorisations délivrées au titre des installations classées pour la protection de l'environnement, postérieurement au 1er mars 2017, dans les conditions fixées par le 2° de l'article 15 de cette ordonnance, sont considérées comme des autorisations environnementales à compter de leur délivrance. Dès lors que l'autorisation environnementale créée par cette ordonnance tient lieu des diverses autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés au I de l'article L. 181- 2 du code de l'environnement, dont la dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale du 18 mars 2016, modifié et complété le 11 décembre 2019, délivrée au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement, peut être utilement contestée au motif qu'elle n'incorpore pas, à la date à laquelle la cour statue, la dérogation dont il est soutenu qu'elle est requise pour le projet en cause.

66. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection : " Pour les espèces d'oiseaux dont la liste est fixée ci-après : / I. ' Sont interdits sur tout le territoire métropolitain et en tout temps : / ' la destruction intentionnelle ou l'enlèvement des œufs et des nids ; / ' la destruction, la mutilation intentionnelles, la capture ou l'enlèvement des oiseaux dans le milieu naturel ; / ' la perturbation intentionnelle des oiseaux, notamment pendant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation remette en cause le bon accomplissement des cycles biologiques de l'espèce considérée. / II. ' Sont interdites sur les parties du territoire métropolitain où l'espèce est présente ainsi que dans l'aire de déplacement naturel des noyaux de populations existants la destruction, l'altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux. Ces interdictions s'appliquent aux éléments physiques ou biologiques réputés nécessaires à la reproduction ou au repos de l'espèce considérée, aussi longtemps qu'ils sont effectivement utilisés ou utilisables au cours des cycles successifs de reproduction ou de repos de cette espèce et pour autant que la destruction, l'altération ou la dégradation remette en cause le bon accomplissement de ces cycles biologiques. / (...) ". La liste d'espèces d'oiseaux de cet article vise notamment le busard Saint-Martin.

67. En l'espèce, il résulte de l'instruction qu'un couple de busard Saint-Martin a été observé à proximité de la zone d'accueil du projet, mais que leur nid n'a pas été précisément localisé. Le volet naturaliste de l'étude d'impact indique que le Busard Saint-Martin ne se reproduit pas au sein de la zone d'étude rapprochée, même s'il utilise le territoire pour chasser. Il précise que si les Busards peuvent être perturbés par la construction d'éoliennes en période de reproduction, ils adaptent leur comportement et le niveau de leur vol à la présence des éoliennes, et que " la présence d'un parc ne semble avoir aucune incidence sur le pouvoir reproducteur de ces espèces ". Par ailleurs, il a été décidé de ramener la taille du parc litigieux " de 6 à 5 éoliennes " et de " modifier l'implantation du parc en passant de 2 lignes d'éoliennes à une seule, afin d'éviter les impacts ". Le projet conserve de larges espaces sans éoliennes pour les espèces patrimoniales des milieux ouverts tels que le Busard, soit une distance d'au moins 250 mètres entre les éoliennes pour faciliter le passage des oiseaux. Le projet ne place pas les éoliennes dans les zones de prairies dans les secteurs de Mondétour (hameau du Boullay-les-Deux-Eglises) et Masserville, lesquelles sont favorables à la nidification du Busard Saint-Martin. Au titre des impacts résiduels, l'étude d'impact qualifie l'incidence du projet éolien de faible à moyenne pour le couple de Busard Saint-Martin, qui sera dérangé principalement lors des travaux de construction du parc éolien notamment par un risque de perturbation d'une faible surface de son territoire de chasse (moins de 5%), par un risque de collision notamment des jeunes à l'envol et dans une moindre mesure d'une perte éventuelle de site de reproduction en cas de réalisation des travaux en période de nidification du busard. L'étude écologique détaillée du bureau d'études " TAUW ", sur laquelle se fonde l'étude d'impact, explique que le projet aura des impacts résiduels " faibles à modérés ", que l'impact est " négligeable " à " très faible " en phase de travaux, et " nul " à " faible " en phase d'exploitation. En outre, il résulte de l'instruction, et notamment de l'autorisation contestée, que la société doit faire réaliser un passage sur la zone d'implantation du projet par un ornithologue, notamment pour vérifier qu'aucune espèce communautaire n'est présente sur cette zone. En cas de découverte d'une espèce en reproduction sur le site, le démarrage des travaux sera retardé afin d'éviter tout risque de mortalité. Les travaux de construction seront entrepris en dehors des périodes les plus favorables à l'avifaune, en particulier au Busard Saint-Martin afin de ne pas perturber la nidification. Enfin l'autorisation contestée, et notamment l'arrêté complémentaire du 11 décembre 2019, prévoit qu'en cas de découverte de nidification du Busard Saint-Martin, l'exploitant devra établir une convention avec l'exploitant agricole concerné afin de mettre en œuvre des mesures de protection. Dans ces conditions, et en l'absence d'impact avéré pour le Busard Saint-Martin, les requérants ne sont pas fondés, à soutenir que le pétitionnaire était tenu de joindre à son dossier une demande de dérogation aux interdictions prévues à l'article L. 411-1 du code de l'environnement.

Sur la légalité de l'arrêté du 11 décembre 2019 :

En ce qui concerne l'avis de l'autorité environnementale du 10 mai 2019 :

68. En premier lieu d'une part le paragraphe 1 de l'article 6 de la directive 2011/92 du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement dispose : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, dispose, dans sa rédaction applicable au litige, que : " (...) II. - Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l'autorité environnementale. / (...) / III. - L'évaluation environnementale est un processus constitué de l'élaboration, par le maître d'ouvrage, d'un rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement, dénommé ci-après "étude d'impact", de la réalisation des consultations prévues à la présente section, ainsi que de l'examen, par l'autorité compétente pour autoriser le projet, de l'ensemble des informations présentées dans l'étude d'impact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître d'ouvrage. / (...) V. - Lorsqu'un projet est soumis à évaluation environnementale, le dossier présentant le projet comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation déposée est transmis pour avis à l'autorité environnementale ainsi qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet. / Les avis des collectivités territoriales et de leurs groupements, dès leur adoption, ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai fixé par décret en Conseil d'État sont mis à la disposition du public sur le site internet de l'autorité compétente lorsque cette dernière dispose d'un tel site ou, à défaut, sur le site de la préfecture du département. / L'avis de l'autorité environnementale fait l'objet d'une réponse écrite de la part du maître d'ouvrage. / VI. - Les maîtres d'ouvrage tenus de produire une étude d'impact la mettent à disposition du public, ainsi que la réponse écrite à l'avis de l'autorité environnementale, par voie électronique au plus tard au moment de l'ouverture de l'enquête publique prévue à l'article L. 123-2 ou de la participation du public par voie électronique prévue à l'article L. 123-19. " En vertu du III de l'article R. 122-6 du même code, dans sa version applicable au litige, l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1, lorsqu'elle n'est ni le ministre chargé de l'environnement, dans les cas prévus au I de cet article, ni la formation compétente du Conseil général de l'environnement et du développement durable, dans les cas prévus au II de ce même article, est la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable de la région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé.

69. L'article 3 du décret du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit : " (...) / Les missions régionales d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable exercent les attributions de l'autorité environnementale fixées au III de l'article R. 122-6 et au III de l'article R. 122-17 du code de l'environnement et à l'article R. 104-21 du code de l'urbanisme. / Dans chaque région, la mission régionale bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement dans les conditions fixées à l'article R. 122-24 du code de l'environnement. " L'article 11 du même décret, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que : " La formation d'autorité environnementale est composée de membres du conseil, permanents ou associés, désignés par le ministre chargé de l'environnement en raison de leurs compétences en matière d'environnement, sur proposition du vice-président formulée après concertation avec le commissaire général au développement durable et avis du bureau. (...) / Les missions régionales d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable sont composées, chacune, de membres permanents du conseil et de membres associés, désignés dans les conditions fixées au premier alinéa. Les membres associés, au nombre de deux dans les régions métropolitaines et au nombre de un et dans les régions d'outre-mer, sont choisis en raison de leurs compétences en matière d'environnement et de leur connaissance des enjeux environnementaux de la région concernée. Dans chaque mission régionale, les membres permanents sont en nombre au moins égal à celui des membres associés. Des membres suppléants peuvent être désignés dans les mêmes conditions. / Au sein de chaque mission régionale, un président, choisi parmi ses membres permanents, est désigné dans les mêmes conditions qu'au premier alinéa. En cas de partage des voix, sa voix est prépondérante. / Les autres règles relatives aux délibérations des missions régionales, notamment de quorum, sont fixées par le règlement intérieur mentionné à l'article 16. / Le président de la formation d'autorité environnementale s'assure du bon exercice de la fonction d'autorité environnementale mentionnée à l'article 3. / (...) ".

70. Par ailleurs, aux termes du I de l'article R. 122-21 du code de l'environnement : " La personne publique responsable de l'élaboration ou de l'adoption du plan, schéma, programme ou document de planification transmet pour avis à l'autorité définie au III de l'article R. 122-17 le dossier comprenant le projet de plan, schéma, programme ou document de planification, le rapport sur les incidences environnementales ainsi que les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables et qui ont été rendus à la date de la saisine. Lorsque l'autorité environnementale est la mission régionale d'autorité environnementale, ces éléments sont transmis au service régional chargé de l'environnement (appui à la mission régionale d'autorité environnementale) qui prépare et met en forme toutes les informations nécessaires pour que la mission régionale puisse rendre son avis. ".

71. Enfin, aux termes de l'article R. 122-24 du code de l'environnement, dans sa version applicable au litige : " Dans chaque région, la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement selon les modalités prévues aux articles R. 122-17 et suivants du présent code et R. 104-19 et suivants du code de l'urbanisme. Pour l'exercice de cet appui, par dérogation à l'article 2 du décret n° 2009-235 du 27 février 2009 relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, (...) les agents de ce service sont placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale. "

72. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la mission régionale d'autorité environnementale est une entité administrative de l'État, dont les membres sont nommés à raison de leurs compétences en matière d'environnement et de leur connaissance spécifique des enjeux environnementaux de la région concernée, séparée de l'autorité compétente pour autoriser un projet et qui dispose d'une liberté de décision pour exercer sa mission consultative d'autorité environnementale. Par ailleurs, si elle s'appuie à cette fin sur le " service régional chargé de l'environnement (appui à la mission régionale d'autorité environnementale) " pour l'instruction des demandes d'avis, constitué, en vertu des articles 1er et 2 du décret du 27 février 2009, au sein de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, qui exerce ses missions sous l'autorité du préfet de région, il résulte des dispositions précitées que le service ainsi spécialement désigné pour l'appui à la mission régionale d'autorité environnementale doit disposer de moyens humains et administratifs dédiés à cette mission. Enfin, il résulte également des dispositions précitées que ce service est placé sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale pour l'exercice de cette mission. La mission régionale d'autorité environnementale doit être regardée, dans ces conditions, comme disposant d'une autonomie réelle, la mettant en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur les projets qui lui sont soumis.

73. Les requérants soutiennent que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale n'a pas été émis par un service autonome, en se prévalant de l'article 15 du règlement intérieur du Conseil général de l'environnement et du développement durable, approuvé par l'arrêté du 12 mai 2016 du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, qui dispose que : " Les projets d'avis et de décision sont préparés et transmis à la MRAE par la direction du service régional de l'environnement ". Toutefois, ces dispositions d'un règlement intérieur approuvé par un arrêté ministériel doivent être interprétées, conformément aux dispositions précitées de l'article 3 du décret du 2 octobre 2015 et des articles R. 122-21 et R. 122-24 du code de l'environnement, ainsi qu'aux dispositions des articles R. 122-17 et suivants du même code, comme prévoyant que les projets d'avis et de décisions sont préparés et transmis à la MRAE par le service régional chargé de l'environnement (appui à la mission régionale d'autorité environnementale). Par suite, les requérants ne sont, en tout état de cause, pas fondés à soutenir que l'avis rendu par la mission régionale d'autorité environnementale le 12 avril 2019 sur le projet litigieux était irrégulier au motif qu'il aurait fait application des dispositions précitées de l'article 15 du règlement intérieur du Conseil général de l'environnement et du développement durable, lesquelles ne sont pas entachées de l'illégalité alléguée.

74. En deuxième lieu l'article 6 de la directive 2011/92 du 13 décembre 2011 a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive 2001/42 du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive 2011/92 du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.

75. Lorsque le projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, définie par le décret du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable et les articles R. 122-21 et R. 122-25 du code de l'environnement, doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et que l'avis environnemental émis par la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable a été préparé par la même direction, à moins que l'avis n'ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.

76. Il résulte de l'instruction que la demande d'autorisation présentée par la société Enertrag AG, établissement France a été instruite, pour le compte de la préfète d'Eure-et-Loir, par l'unité départementale d'Eure-et-Loir de la DREAL Centre-Val de Loire. La société pétitionnaire et la ministre de la transition écologique font valoir, sans être contesté, que l'avis rendu par la mission régionale d'autorité environnementale le mai 2019 a, quant à lui, été préparé par les agents du département " Mission d'appui à l'autorité environnementale " du service " évaluation, énergie et valorisation de la connaissance " de la DREAL Centre-Val de Loire. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que les agents qui ont préparé en l'espèce l'avis émis par la mission régionale d'autorité environnementale comprenaient des agents qui n'étaient pas rattachés au département " appui à l'autorité environnementale " de la DREAL Centre-Val de Loire, et donc des agents qui n'étaient pas placés sous l'autorité fonctionnelle du président de cette mission. Par suite, et en tout état de cause, les requérants ne peuvent utilement soutenir que les articles 2 et 9 de la convention conclue entre la mission régionale d'autorité environnementale Centre-Val de Loire et la DREAL de la même région, en tant qu'ils mettraient prétendument à disposition de la mission régionale des agents non placés sous l'autorité fonctionnelle de son président, méconnaît l'article R. 122-24 du code de l'environnement, l'article 3 du décret du 2 octobre 2015 et l'article 15 du règlement intérieur du Conseil général de l'environnement et du développement durable.

77. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la mission régionale d'autorité environnementale n'a pas été dotée d'une autonomie réelle la mettant en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et n'a pas donné un avis objectif sur le projet qui lui a été soumis doit être écarté.

78. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement : " (...) Lorsqu'un projet est soumis à évaluation environnementale, le dossier présentant le projet comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation déposée est transmis pour avis à l'autorité environnementale ainsi qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet (...) ".

79. Il résulte de l'instruction que la société Enertag AG établissement France a informé les services de l'Etat, par un " porter à connaissance " du 7 juin 2016, d'un changement du modèle d'éoliennes envisagé pour le projet litigieux. Si la hauteur totale de 150 mètres ainsi que la puissance de 2 MW pour chaque machine n'ont pas été modifiées, la dimension du rotor des éoliennes, initialement de 90 mètres, a été augmentée pour atteindre désormais 100 mètres. Ce document de 16 pages compare les caractéristiques techniques des deux machines, analyse les impacts générés par ce nouveau choix, et conclut à l'absence de modification des conséquences du projet sur l'environnement. Il résulte de l'instruction que ce " porter à connaissance " du 7 juin 2016 n'a pas figuré dans le dossier de demande transmis à l'autorité environnementale le 4 avril 2019.

80. Il résulte toutefois de l'instruction que le dossier transmis à l'autorité environnementale comportait un document, réalisé par le pétitionnaire le 6 février 2019, intitulé " porter à connaissance aux fins de régularisation de l'autorisation ". Ce document compare l'état du projet litigieux en mars 2013 avec le projet modifié, et mentionne notamment le changement de dimension du rotor des éoliennes. Par ailleurs, le courrier du 4 avril 2019 par lequel la préfète d'Eure-et-Loir a saisi la mission régionale d'autorité environnementale mentionne que " le projet est globalement maintenu en l'état, à l'exclusion du diamètre du rotor qui sera de 100 mètres au lieu de 90 mètres initialement prévu, la hauteur totale de l'éolienne restant inchangée, cette modification étant donc non substantielle ". Par suite, et alors que les requérants n'établissent ni même n'allèguent que la modification envisagée emporterait un impact supplémentaire sur l'environnement, l'omission mentionnée au point précédent n'a pas été nature à fausser la consultation et à exercer une influence sur le sens de l'avis, ni, par suite, sur le sens de la décision de l'autorité administrative.

En ce qui concerne l'enquête publique complémentaire :

Quant à la consultation des communes concernées :

81. Aux termes de l'article R. 123-13 du code de l'environnement : " Lorsqu'une enquête complémentaire est organisée conformément au II de l'article L. 123-14, elle porte sur les avantages et inconvénients des modifications pour le projet et pour l'environnement. L'enquête complémentaire, d'une durée de quinze jours, est ouverte dans les conditions fixées aux articles R. 123-9 à R. 123-12. / Le dossier d'enquête initial est complété dans ses différents éléments, et comprend notamment (...). 2° Lorsqu'ils sont requis, l'étude d'impact, l'étude d'incidence environnementale mentionnée à l'article L. 181-1 ou le rapport sur les incidences environnementales intégrant ces modifications, ainsi que, le cas échéant, l'avis de l'autorité environnementale mentionné aux articles L. 122-1 et L. 122-7 du présent code ou à l'article L. 104-6 du code de l'urbanisme portant sur cette évaluation environnementale actualisée et les avis des collectivités territoriales et de leurs groupements consultés en application du V de l'article L. 122-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " V. Lorsqu'un projet est soumis à évaluation environnementale, le dossier présentant le projet comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation déposée est transmis pour avis à l'autorité environnementale ainsi qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet./Les avis des collectivités territoriales et de leurs groupements dès leur adoption ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai fixé par décret en Conseil d'Etat sont mis à la dis position du public sur le site internet de l'autorité compétente lorsque cette dernière dispose d'un tel site ou à défaut sur le site de la préfecture du département ".

82. Il résulte de l'instruction que l'autorité administrative a fait le choix, avant de délivrer l'autorisation modificative et complémentaire litigieuse, de recourir à une nouvelle enquête publique, qui s'est tenue du 26 septembre au 11 octobre 2019. Cette nouvelle enquête doit être regardée comme une enquête publique complémentaire organisée selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, distincte de l'enquête publique initiale. Il ne résulte pas de l'instruction que l'étude d'impact, ou le dossier d'autorisation, ont été substantiellement modifiées par rapport aux documents soumis à consultation des collectivités lors de la procédure ayant abouti à l'autorisation délivrée le 18 mars 2016. Dès lors, une nouvelle consultation des conseils municipaux concernés n'était pas requise au sens de l'article R. 123-13 du code de l'environnement.

83. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de consultation des communes concernées doit être écarté.

Quant au rapport du commissaire enquêteur :

84. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ".

85. Il appartient au commissaire-enquêteur, après avoir examiné l'ensemble des observations recueillies, mais sans être tenu de répondre à chacune d'entre elles, ainsi qu'après avoir apprécié les avantages et inconvénients de l'opération, d'indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

86. Il résulte de l'instruction que le commissaire-enquêteur a présenté un rapport, le 25 octobre 2019, qui relate le déroulement de l'enquête publique ordonnée par un arrêté préfectoral du 19 août 2019, qui s'est tenue du 26 septembre au 11 octobre 2019. Le document analyse les observations du public et mentionne les motifs d'opposition des habitants. Il indique notamment que 26 observations ont été régulièrement formulées, une observation présentée hors délai n'ayant pas été prise en compte. Ses conclusions, contenues dans un document séparé, développent de manière circonstanciée les éléments ayant conduit le commissaire enquêteur à émettre un avis favorable sur le projet de réalisation, par le pétitionnaire, d'un parc éolien de cinq éoliennes sur le territoire de la commune de Marville-Moutiers-Brûlé. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des conclusions du commissaire enquêteur doit être écarté.

87. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont seulement fondés à soutenir que le dossier de demande de l'autorisation litigieuse ne peut être regardé comme suffisamment précis et étayé quant aux capacités financières dont la société pétitionnaire serait effectivement en mesure de disposer, en méconnaissance de l'article R. 512-3 du code de l'environnement.

Sur l'application des dispositions du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :

88. Les dispositions du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, rappelées au point 4 du présent arrêt, prévoient que le juge peut, après avoir constaté que les autres moyens dont il est saisi ne sont pas fondés, soit surseoir à statuer pour permettre la régularisation devant lui de l'autorisation environnementale attaquée lorsque le ou les vices dont elle est entachée sont susceptibles d'être régularisés par une décision modificative, soit limiter la portée ou les effets de l'annulation qu'il prononce si le ou les vices qu'il retient n'affectent qu'une partie de la décision ou une phase seulement de sa procédure d'instruction. Le 2° du I de l'article L. 181-18 permet au juge, même pour la première fois en appel, lorsqu'il constate un vice qui entache la légalité de la décision mais qui peut être régularisé par une décision modificative, de rendre un jugement avant-dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Cette faculté relève d'un pouvoir propre du juge qui n'est pas subordonné à la présentation de conclusions en ce sens. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation. Ces dispositions peuvent trouver à s'appliquer lorsque le vice constaté entache d'illégalité l'ensemble de l'autorisation environnementale ou une partie divisible de celle-ci. Rien ne fait par ailleurs obstacle à un sursis à statuer dans le cas où le vice n'affecte qu'une phase de l'instruction, dès lors que ce vice est régularisable. Dans tous les cas, le sursis à statuer a pour objet de permettre la régularisation de l'autorisation attaquée. Cette régularisation implique l'intervention d'une décision complémentaire qui corrige le vice dont est entachée la décision attaquée. S'il constate que la régularisation a été effectuée, le juge rejette le recours dont il est saisi.

89. Ainsi qu'il a été dit aux points 25 et 87, l'arrêté du préfet de la région Centre-Val de Loire du 18 mars 2016, en tant qu'il n'a pas été modifié et régularisé par l'arrêté du 11 décembre 2019 du préfet d'Eure-et-Loir, est entaché d'irrégularité dès lors que le public et l'administration n'ont pas été suffisamment informés quant aux capacités financières de la société pétitionnaire. Cette irrégularité peut être régularisée par l'intervention d'une autorisation modificative de régularisation prise au regard d'indications précises et étayées que la société apportera au service instructeur quant à ses capacités financières et qui seront portées à la connaissance du public. Cette information pourra être mis en ligne sur un site internet suffisamment accessible et ayant une notoriété suffisante, tels que le site de la préfecture de la région ou celui de la préfecture d'Eure-et-Loir, de manière à ce qu'une information suffisante du public soit assurée et que celui-ci ait la possibilité, par des cadres définis et pouvant accepter un nombre suffisant de caractères, de présenter ses observations et propositions.

90. Eu égard aux modalités de régularisation ainsi fixées, l'éventuelle autorisation modificative devra être communiquée à la cour dans un délai de quatre mois à compter du présent arrêt.

91. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de l'Association danger de tempête et autres jusqu'à l'expiration du délai mentionné au point précédent afin de permettre cette régularisation.

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions en annulation du jugement du 24 avril 2018 du tribunal administratif d'Orléans, en tant qu'il a transmis le dossier de l'affaire par application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative afin que le Conseil d'Etat examine les questions de droit posées dans les motifs de sa décision et a sursis à statuer sur la demande, sont rejetées.

Article 2 : Le jugement du 24 avril 2018 du tribunal administratif d'Orléans, en tant qu'il statue sur les droits et moyens de la demande, ainsi que les jugements du 8 février 2019 et du 23 juin 2020 du tribunal administratif d'Orléans, sont annulés.

Article 3 : Il est sursis à statuer sur les conclusions en annulation de l'arrêté du préfet de la région Centre-Val de Loire du 18 mars 2016, en tant qu'il n'a pas été modifié et régularisé par l'arrêté du 11 décembre 2019 du préfet d'Eure-et-Loir, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à l'État pour produire devant la cour une autorisation environnementale modificative conforme aux modalités définies aux points 89 et 90 du présent arrêt.

Article 4 : Tous droits et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Danger de tempête sur le patrimoine rural, représentant unique désigné par Me Monamy, mandataire, à la ministre de la transition écologique et à la société Enertrag AG, établissement France.

Copie en sera adressée au préfet de la région Centre-Val de Loire et au préfet d'Eure-et-Loir.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente-assesseure,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.

Le rapporteur,

A. FRANKLe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 20NT02663


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02663
Date de la décision : 28/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-09-28;20nt02663 ?
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