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09/07/2021 | FRANCE | N°21NT00618

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 09 juillet 2021, 21NT00618


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les deux arrêtés du 4 février 2021 par lesquels le préfet d'Ille-et-Vilaine, d'une part, a décidé son transfert aux autorités autrichiennes, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2100631 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 mars 2021, M. A... D..., représenté par Me C..., demande à la cour :r>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 février 2021 ;

2°) d'annuler le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les deux arrêtés du 4 février 2021 par lesquels le préfet d'Ille-et-Vilaine, d'une part, a décidé son transfert aux autorités autrichiennes, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2100631 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 mars 2021, M. A... D..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 février 2021 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 4 février 2021 du préfet d'Ille-et-Vilaine décidant son transfert et l'assignant à résidence ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

en ce qui concerne l'arrêté de transfert :

- il est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- il est dépourvu de base légale et entaché d'un défaut de motivation ;

en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant transfert en Autriche ;

- en méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration aucune procédure contradictoire préalable à la décision n'a été conduite ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de risques accrus de contamination au Covid 19.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au non-lieu à statuer dès lors que M. D... a été transféré en Autriche le 25 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., se disant ressortissant afghan né le 4 janvier 1995, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 2 octobre 2020 selon ses déclarations. Il a sollicité l'asile à la préfecture d'Ille-et-Vilaine le 7 octobre suivant. Suite à la consultation du fichier " Eurodac " le préfet d'Ille-et-Vilaine a présenté le 1er décembre 2020 aux autorités autrichiennes une demande de transfert de M. D..., qu'elles ont acceptée le 10 décembre suivant. Par un jugement du 12 février 2021 dont M. D... relève appel, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 4 février 2021 par lesquels le préfet d'Ille-et-Vilaine a ordonné son transfert aux autorités autrichiennes et l'a assigné à résidence.

Sur l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence [...], l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président ". Aux termes de l'article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles : " (...) / L'admission provisoire est accordée par le président du bureau ou de la section ou le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué. ".

3. M. D..., représenté par un avocat, a déposé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été statué. Dans ces conditions, il y a lieu d'admettre provisoirement M. D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée par le préfet d'Ille-et-Vilaine :

4. Les arrêtés portant transfert de M. D... et assignation à résidence ayant été exécutés et ayant produit des effets, il y a lieu de statuer sur les conclusions tendant à leur annulation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision de transfert :

5. En premier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge aux point 3 à 5 du jugement attaqué.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement précité du 26 juin 2013, relatif à l'entretien individuel : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) / 5. L'entretien individuel (...) est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. (...) ".

7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le requérant a bien bénéficié le 7 octobre 2020 de l'entretien individuel prévu par ces dispositions. Il résulte du compte-rendu de cet entretien qu'il a été conduit par un agent habilité de la préfecture et il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci n'aurait pas été une personne qualifiée au sens des dispositions précitées. Par conséquent, et alors même que le patronyme de cet agent n'est pas mentionné, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement précité ne peut qu'être écarté.

8. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine a saisi les autorités autrichiennes d'une demande de transfert de M. D... sur le fondement du b) du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et que ces dernières ont explicitement accepté ce transfert sur ce fondement en se référant au point 5 de l'article 20 du même règlement. Ces mêmes éléments sont repris dans l'arrêté contesté et le préfet n'était pas autrement tenu de motiver en droit sa décision au regard du règlement mentionné. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait dépourvue de fondement légal et, en tout état de cause, insuffisamment motivée en droit pour ce motif.

En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'illégalité de la décision portant transfert n'est pas établie. Le moyen tiré de l'illégalité de cette décision que M. D... invoque par la voie de l'exception à l'encontre de la décision portant assignation à résidence doit, dès lors, être écarté.

10. En deuxième lieu, il résulte de l'ensemble des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie une mesure de transfert à l'étranger, laquelle est susceptible de donner lieu à une décision d'assignation à résidence. Aucune de ces dispositions n'obligeait le préfet à informer préalablement le requérant de son intention d'adopter à son encontre une mesure d'assignation à résidence. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration est inopérant et ne peut qu'être écarté.

11. En dernier lieu, l'arrêté contesté assigne à résidence M. D... à Rennes et lui impose de se présenter deux fois par semaine à 17 heures aux autorités de police situées à Saint-Jacques-de-la-Lande. Les seules considérations générales invoquées par le requérant relatives à la pandémie de Covid 19 ne sont pas à elles seules de nature à établir que ces modalités de contrôle du respect par l'intéressé de l'arrêté contesté seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 4 février 2021 du préfet d'Ille-et-Vilaine. Ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : M. D... est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de M. D... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. A... D..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 29 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. B..., président assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2021.

Le rapporteur,

C. B...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

S. Levant

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT00618


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00618
Date de la décision : 09/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : MAZOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-09;21nt00618 ?
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