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06/07/2021 | FRANCE | N°20NT02766

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 06 juillet 2021, 20NT02766


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 janvier 2019 par lequel le maire du Relecq-Kerhuon a délivré à la SA Aiguillon Construction un permis de construire quatre bâtiments de logements collectifs, comprenant cinquante-six logements, sur un terrain situé 46 avenue Ghilino, ainsi que la décision du 18 avril 2019 par laquelle le maire du Relecq-Kerhuon a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement no 1903164 du 3 juillet 2020, le trib

unal administratif de Rennes a, d'une part, annulé l'arrêté du 4 janvier 2019 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 janvier 2019 par lequel le maire du Relecq-Kerhuon a délivré à la SA Aiguillon Construction un permis de construire quatre bâtiments de logements collectifs, comprenant cinquante-six logements, sur un terrain situé 46 avenue Ghilino, ainsi que la décision du 18 avril 2019 par laquelle le maire du Relecq-Kerhuon a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement no 1903164 du 3 juillet 2020, le tribunal administratif de Rennes a, d'une part, annulé l'arrêté du 4 janvier 2019 du maire du Relecq-Kerhuon ainsi que la décision de rejet du recours gracieux en tant que ces décisions autorisent la construction des bâtiments B et C, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions d'annulation présentées par M. E..., et, enfin, mis à la charge de la SA Aiguillon Construction et de la commune du Relecq-Kerhuon une somme de 750 euros chacun à verser à M. E... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 3 septembre 2020, 14 janvier 2021, 8 février 2021 et 26 février 2021 (non communiqué), la SA Aiguillon Construction, représentée par la SELARL Lexcap, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant, d'une part, qu'il a partiellement annulé l'arrêté du 4 janvier 2019 du maire du Relecq-Kerhuon ainsi que la décision du 18 avril 2019 de rejet du recours gracieux formé par M. E... et, d'autre part, qu'il l'a condamnée à verser 750 euros à M. E... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de première instance et les conclusions d'appel incident de M. E... ;

3°) de mettre à la charge de M. E... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a considéré que les décisions litigieuses méconnaissaient les articles UC 6 et UC 10 du plan local d'urbanisme intercommunal de Brest ;

- les conclusions d'appel incident présentées par M. E... sont irrecevables dès lors qu'elles portent sur un litige distinct de l'appel principal ; elles sont également irrecevables dès lors que cet appel incident méconnaît les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- en tout état de cause, aucun des moyens soulevés par M. E... dans le cadre de son appel incident n'est fondé.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 13 novembre 2020, 1er février 2021 et 12 février 2021, M. E..., représenté par Me A..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à l'annulation du jugement du 3 juillet 2020 en tant qu'il n'a pas annulé totalement l'arrêté du 4 janvier 2019 du maire du Relecq-Kerhuon ainsi que la décision du 18 avril 2019 de rejet de son recours gracieux ;

3°) à ce qu'il soit mis à la charge de la SA Aiguillon Construction et de la commune du Relecq-Kerhuon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la SA Aiguillon Construction ne sont pas fondés ;

- son appel incident est recevable dès lors qu'il ne porte pas sur un litige distinct de l'appel principal ;

- cet appel incident n'avait pas à respecter les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, qui ne lui étaient pas applicables ; en tout état de cause, il a régularisé cette irrecevabilité alléguée ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole s'agissant des bâtiments A, B et C ;

- il méconnaît les dispositions de l'article UC 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole s'agissant des bâtiments A et C ;

- il méconnaît les dispositions de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole ;

- il méconnaît les dispositions de l'article UC 13 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole ;

- il méconnaît les dispositions de l'article 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole.

Le 27 mai 2021, la SA Aiguillon Construction a communiqué à la cour un permis de construire modificatif accordé le 26 mai 2021 par le maire du Relecq-Kerhuon, ayant pour objet la suppression de la mention " barrière levante " sur les plans du permis de construire.

Par un mémoire, enregistré le 3 juin 2021 et non communiqué, M. E... conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me F... substituant Me D..., représentant la société Aiguillon Construction, et de Me A..., représentant M. E....

Une note en délibéré, présentée par M. E..., a été enregistrée le 21 juin 2021.

Considérant ce qui suit :

1. La SA Aiguillon Construction a déposé le 13 juillet 2018 en mairie du Relecq-Kerhuon une demande de permis de construire quatre bâtiments de logements collectifs, comprenant cinquante-six logements, sur un terrain cadastré section AE nos 730, 962 et 963, situé 46 avenue Ghilino au Relecq-Kerhuon. Par un arrêté du 4 janvier 2019, le maire du Relecq-Kerhuon lui a délivré le permis de construire sollicité. Par une décision du 18 avril 2019, ce maire a rejeté le recours gracieux formé par M. E... contre l'arrêté de permis de construire. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a, à la demande de M. E..., d'une part, annulé l'arrêté du 4 janvier 2019 du maire du Relecq-Kerhuon ainsi que la décision de rejet du recours gracieux en tant que ces décisions autorisent la construction des bâtiments B et C, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions d'annulation présentées par M. E..., et, enfin, mis à la charge de la SA Aiguillon Construction et de la commune du Relecq-Kerhuon une somme de 750 euros chacun à verser à M. E... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La SA Aiguillon Construction demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a fait partiellement droit à la demande de première instance de M. E.... Ce dernier, par la voie de l'appel incident, demande à la cour d'annuler ce même jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande de première instance.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne les moyens d'annulation retenus par le tribunal administratif de Rennes :

2. Aux termes de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de Brest métropole, relatif à l'" implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques " : " Dans cette zone deux bandes de constructibilité sont définies : une bande de constructibilité principale d'une profondeur de 17 m à compter de l'alignement et une bande de constructibilité secondaire qui correspond au terrain non compris dans la bande principale. / Dans la bande de constructibilité principale de 17 m à compter de l'alignement, les constructions doivent s'implanter en fonction des dispositions figurant sur le document graphique N°2 " plan des formes urbaines ". En l'absence de celles-ci, les constructions doivent s'implanter : / ' Soit à l'alignement, / ' Soit en fonction de l'implantation des constructions existantes du même côté de la voie. Si les constructions voisines ont un recul uniforme, la distance de retrait sera identique au recul uniforme constaté. Si les constructions voisines ont des reculs différents, la distance de retrait est identique à l'un des reculs constatés ou comprise entre les deux, / ' Soit, en l'absence de constructions de référence, entre 0 et 5m de l'alignement. (...) ". Aux termes de l'article 6 des dispositions générales du même règlement : " (...) / Les règles d'implantation définies aux articles 6 des différentes zones s'appliquent au corps principal du bâtiment. Les éléments architecturaux, les ouvrages en saillies dès lors que leur profondeur est au plus égale à 0,50 m quand ils sont situés à une hauteur comprise entre 2,50 m et 3 m, à 0,80 m quand l'ouvrage se situe à plus de 3 m, ne sont pas pris en compte dans la marge de recul. Il en est de même pour les sas d'entrée ou dispositifs vitrés dans une limite de 2 m ".

3. Aux termes de l'article UC 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole, relatif à la " hauteur maximale des constructions " : " Dans la bande de constructibilité principale de 17 m à compter de l'alignement, le nombre maximal de niveaux des constructions est défini sur le document graphique N°2 " plan des formes urbaines ". / Indépendamment des indications portées sur le document graphique N°2 " plan des formes urbaines ", si la distance de la façade de la construction à l'axe de la voie ou de l'emprise publique est inférieure à 5 m, le nombre maximal de niveaux est de 3 niveaux plus un niveau en attique ou en comble. Cette règle ne s'applique pas aux constructions implantées sur des parcelles d'angles et comportant une façade implantée à plus de 5 mètres de l'axe de la voie ou de l'emprise publique. (...) / Dans la bande de constructibilité secondaire : (...) / ' Dans le cas d'un projet portant sur la totalité d'un îlot, en l'absence de limites séparatives, la hauteur maximale est fixée à 3 niveaux, un niveau supplémentaire en attique ou en comble peut être autorisé sous réserve de ne pas porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux. (...) ".

4. Aux termes du lexique du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole : " (...) / Alignement / L'alignement est la limite du domaine public routier au droit des propriétés riveraines. Le domaine public routier comprend les chaussées, les trottoirs, les espaces plantés, les terrains contigus, les passages, les parcs de stationnement de surfaces. En cas de voirie à créer, l'alignement correspond à la limite d'emprise de la future voie. (...) / Bandes de constructibilité / La bande de constructibilité principale dans les zones où elle est prévue par le règlement correspond à la portion du terrain bordant les emprises publiques et voies sur une certaine profondeur. La partie du terrain non comprise dans la bande de constructibilité principale constitue la bande de constructibilité secondaire. / En cas d'élargissement prévu au PLU d'une voie ou d'une emprise publique, la bande de constructibilité principale s'applique à compter du futur alignement. (...) / Emprises publiques / Cette notion recouvre les espaces publics qui ne peuvent être qualifiés de voies, il peut s'agir de places, cours urbaines, parvis, mails, jardins publics. (...) / Implantation du bâti / Emprise que le bâtiment occupe au niveau du sol. Les règles d'implantation mentionnées aux articles 6 et 7 concernent une façade en totalité ou partiellement (...) Saillie / Élément, corps d'ouvrage, qui dépasse le plan de référence ou du nu d'une façade : les balcons, corniches, pilastres, ... (...) / Voie / La voie qui sert de référence pour les règles d'implantation des constructions (article 6 des zones) est une voie existante ou à créer dans le cadre d'un projet qui permet de desservir plusieurs propriétés, plusieurs constructions ou logements et qui doit permettre la circulation des personnes et des véhicules (voies piétonnes, voies pour cycles, routes, chemins, voies en impasse, quel que soit son statut) (...) ".

S'agissant de la détermination de la bande de constructibilité principale du terrain d'assiette du projet :

5. Si les dispositions de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme définissent la bande de constructibilité comme ayant " une profondeur de 17 m à compter de l'alignement ", lequel est défini par le lexique du règlement comme " la limite du domaine public routier au droit des propriétés riveraines ", l'entrée " bandes de constructibilité " de ce même lexique indique que " la bande de constructibilité principale (...) correspond à la portion du terrain bordant les emprises publiques et voies sur une certaine profondeur ", tandis que l'entrée " voie " du lexique dispose que " la voie qui sert de référence pour les règles d'implantation des constructions (article 6 des zones) est une voie existante ou à créer dans le cadre d'un projet qui permet de desservir plusieurs propriétés, plusieurs constructions ou logements et qui doit permettre la circulation des personnes et des véhicules ". Ainsi, en dépit de l'ambiguïté résultant de l'emploi du terme " alignement " à l'article UC 6 pour désigner le point de départ de la bande de constructibilité principale, les dispositions de cet article doivent être interprétées, ainsi que le confirment les schémas explicatifs situés sous la définition des " bandes de constructibilité " au lexique, comme générant une bande de constructibilité d'une profondeur de 17 mètres depuis l'ensemble des voies et emprises publiques. Par ailleurs, eu égard aux mentions qui figurent à l'entrée " voie " du lexique du règlement, ces dispositions de l'article UC 6 doivent être interprétées comme permettant de générer une bande de constructibilité principale à partir d'une voie privée, existante ou à créer, y compris en impasse, à la double condition que cette voie desserve plusieurs propriétés, constructions ou logements et qu'elle soit ouverte à la circulation publique.

6. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de la SA Aiguillon Construction est entouré, à l'ouest, par l'avenue Ghilino et la place de la gare, au nord-ouest, par la parcelle supportant la gare du Relecq-Kerhuon, au nord, par des voies ferrées, et enfin, à l'est et au sud, par un chemin piétonnier dont la partie sud se trouve incluse dans la même parcelle que le domaine public routier de l'avenue Ghilino. L'avenue Ghilino et la place de la gare constituent des voies qui relèvent du domaine public routier. Les parcelles sur lesquelles se trouvent la gare et les voies ferrées, situées au nord-ouest et au nord du terrain d'assiette, à supposer qu'elles ne puissent être qualifiées de voies au sens du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole, constituent des emprises publiques au sens de ce même règlement. Le chemin piétonnier situé au sud du terrain d'assiette du projet, qui prolonge le domaine public routier communal et permet de desservir plusieurs propriétés, constitue une voie publique. Enfin, ce chemin se poursuit, à l'est du terrain d'assiette du projet, au centre de la parcelle cadastrée section AE no 727, laquelle, propriété de la commune et accessible au public, peut être qualifiée d'emprise publique au sens du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole. Il s'ensuit que le terrain d'assiette du projet de la SA Aiguillon Construction est entièrement entouré de voies ou d'emprises publiques et qu'une bande de constructibilité principale est générée depuis l'ensemble de ses limites.

7. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 5, les dispositions de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de Brest permettent de générer une bande de constructibilité principale à partir d'une voie privée à créer, y compris en impasse, à la double condition que cette voie desserve plusieurs propriétés, constructions ou logements et qu'elle soit ouverte à la circulation publique. La circonstance que le plan local d'urbanisme de Brest Métropole n'a pas lui-même prévu la création d'une telle voie privée et n'a pas défini un alignement futur relatif à cette voie ne fait pas obstacle à ce que celle-ci puisse être prise en compte pour générer une bande de constructibilité principale.

8. En l'espèce, d'une part, la voie à créer interne au projet permettra de desservir quatre bâtiments de cinquante-six logements au total. D'autre part, si les plans PC 2-7 et PC 2-8 annexés au permis de construire faisaient initialement apparaître qu'une " barrière levante " serait installée à l'entrée de cette voie privée, la SA Aiguillon Construction fait valoir qu'elle a renoncé, en cours d'instruction du permis, à l'instauration d'une telle barrière, et que la mention figurant sur ces plans PC 2-7 et PC 2-8, relatifs aux conteneurs, était une coquille. Cette allégation était corroborée par l'absence de mention de cette barrière sur le plan de masse du projet (PC 2-1) et sur les autres plans de celui-ci. En tout état de cause, la mention de la présence d'une " barrière levante " sur les plans précités a été supprimée par le permis de construire modificatif accordé le 26 mai 2021 par le maire du Relecq-Kerhuon. Ainsi, la voie à créer qui permettra de desservir les quatre bâtiments du projet peut être regardée comme ouverte à la circulation publique. Par conséquent, cette voie à créer pouvait, conformément aux dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme, servir de référence pour définir les bandes de constructibilité du projet.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest Métropole :

9. Il ressort des pièces du dossier que les bâtiments B et C sont implantés à moins de 17 mètres de l'alignement de la voie interne, en forme de " U ", à créer du projet litigieux, et donc dans la bande de constructibilité principale générée par cette voie privée ouverte à la circulation publique. En application des dispositions de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme, dès lors qu'il n'existe pour le terrain d'assiette en cause aucune construction de référence, ces bâtiments doivent être implantés soit à l'alignement, au sens des dispositions de ce règlement, soit à une distance comprise entre zéro et cinq mètres de cet alignement. Il ressort des plans de masse annexés au dossier de permis de construire que ces bâtiments B et C sont situés à une distance inférieure à cinq mètres de l'alignement de la voie privée.

10. Ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest Métropole pour annuler partiellement les décisions contestées en tant qu'elles concernent les bâtiments B et C.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UC 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest Métropole :

11. Le document graphique no 2 " plan des formes urbaines " fixe à quatre niveaux plus un attique ou un comble la hauteur maximale des constructions dans la bande de constructibilité principale du terrain d'assiette du projet.

12. Il ressort des pièces du dossier que le bâtiment C est implanté, dans sa totalité, dans la bande de constructibilité principale d'une profondeur de 17 mètres générée par la voie interne au projet, ainsi que partiellement dans la bande de constructibilité principale générée par l'emprise publique constituée, à l'est, par la parcelle cadastrée section AE no 727. Sa façade orientale est implantée à plus de cinq mètres de l'axe de cette emprise publique. Dès lors, en prévoyant un bâtiment C composé de quatre niveaux plus un attique, le projet litigieux ne méconnaît pas les règles de hauteur fixées par l'article UC 10 du règlement du plan local d'urbanisme.

13. Ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance de l'article UC 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest Métropole pour annuler partiellement les décisions contestées en tant qu'elles concernent le bâtiment C.

14. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E... tant en première instance qu'en appel.

En ce qui concerne les autres moyens invoqués par M. E... :

15. En premier lieu, il y a lieu, par adoption des motifs figurant aux points 5 et 6 du jugement attaqué, d'écarter les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué et du caractère insuffisant du dossier de demande de permis de construire.

16. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole, relatif à l'aspect extérieur des constructions et à l'aménagement de leurs abords : " (...) / Toitures / Les toitures doivent présenter une simplicité de volume et une unité de conception. (...) / Les éléments de superstructure tels que souches de cheminées, matériels de ventilation et de climatisation, cages d'escaliers et d'ascenseurs, locaux techniques doivent faire l'objet d'une intégration soignée. (...) / Nouvelles constructions, extensions et annexes / Dans le cas d'une construction nouvelle, une liberté de conception architecturale est laissée, sous réserve du respect des autres articles du présent règlement, pour proposer une architecture représentative de son temps. / Tout projet d'expression contemporaine doit participer au paysage urbain dans lequel il s'intègre, tant par les matériaux utilisés que par la conception des volumes, saillies, percements et soubassement. / Volumétrie / La volumétrie, les rythmes d'architecture, les couleurs générales et le choix des matériaux doivent être étudiés au regard de ceux des constructions voisines tout en recourant à un vocabulaire architectural susceptible d'exprimer notre époque. Un soin particulier doit être apporté à la volumétrie de toiture afin qu'elle s'harmonise avec la silhouette urbaine environnante. / Le volume et l'aspect extérieur des constructions doivent concourir au confortement d'un paysage bâti structuré. (...) "

17. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le paysage urbain dans lequel prendra place le projet litigieux se caractérise principalement par des constructions de dimensions relativement modestes, dont la hauteur dépasse rarement deux niveaux plus un niveau en comble ou en attique, avec une toiture mansardée ou à deux pans fortement inclinés. Pour autant, ce paysage urbain, sans intérêt particulier, comprend également dans son environnement proche un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes d'au moins trois niveaux formé de nombreux parallélépipèdes, situés en contrebas du terrain d'assiette du projet, ainsi que des immeubles collectifs dans le bas de la rue Ghilino. Les maisons d'habitation du lotissement situé à proximité immédiate du projet comportent toutes une avancée et un garage de forme cubique, accolés à la maison en toiture à deux pans. Enfin, les bâtiments projetés remplaceront un ancien hangar inesthétique d'une hauteur d'environ trois niveaux. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le secteur dans lequel s'insère le projet de la SA Aiguillon Construction serait caractérisé par une unité de style architectural, de volumétrie et de conception.

18. D'autre part, s'il est vrai que les bâtiments projetés par la SA Aiguillon Construction seront, pour trois d'entre eux, d'une hauteur de cinq niveaux, sensiblement supérieure à la plupart des constructions environnantes, et comportent des balcons et saillies qui contrastent avec la simplicité de la plupart des bâtiments voisins, ils se caractérisent par une unité de conception, une certaine qualité esthétique et une couleur dominante blanche qui rappelle celle des constructions avoisinantes. Les autres couleurs utilisées, à savoir le gris pour l'enduit des rez-de-chaussée, les menuiseries et les garde-corps, et l'ocre marronné pour l'enduit de certains balcons et des éléments de façade encadrant les balcons, ne dépareront pas avec celles des bâtiments voisins, notamment de la place de la gare. Les toitures terrasses ou en zinc d'une pente de 3 %, surmontant le niveau en attique, présentent une simplicité de volume et intègrent de façon soignée les éléments de superstructure.

19. Dans ces conditions, compte tenu de la volonté des auteurs du plan local d'urbanisme de densifier le secteur de la gare et de la rédaction de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest métropole, qui encourage les " projets d'expression contemporaine " en laissant une liberté de conception architecturale pour proposer une " architecture représentative de son temps " et recourant à un " vocabulaire architecturale susceptible d'exprimer notre époque ", le moyen tiré de l'inexacte application de ces dispositions doit être écarté.

20. En troisième lieu, aux termes de l'article UC 13 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest Métropole, relatif aux espaces libres, aires de jeux, de loisirs et plantations : " Des espaces libres non imperméabilisés doivent être aménagés et représenter au minimum 20 % de la superficie du terrain dont la moitié en pleine terre. (...) " Le lexique de ce règlement précise que " Les espaces libres correspondent à la superficie du terrain non occupée par la construction, les espaces réservés au stationnement ou à la circulation automobile. "

21. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet représente une superficie de 3 902 mètres carrés. En application des dispositions précitées de l'article UC 13, le projet doit prévoir au moins 780,40 mètres carrés d'espaces libres non imperméabilisés, dont la moitié en pleine terre. Le dossier de permis de construire indique que 782,12 mètres carrés seront consacrés aux espaces verts en pleine terre, qui n'incluent ni les terrasses en bois ni les places de stationnement en " dalle gazon ". Si M. E... soutient que, selon ses propres calculs, les surfaces d'espaces verts en pleine terre ne représenteront qu'à peine 658,03 mètres carrés, le document graphique annoté qu'il a produit n'est pas suffisamment probant pour remettre en cause les données figurant dans le dossier de permis de construire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de cet article doit être écarté.

22. En dernier lieu, aux termes de l'article 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest Métropole, applicable à l'ensemble des zones et relatif aux obligations imposées en matière de réalisation d'aires de stationnement : " (...) Les aires de stationnement en plein air peuvent être fractionnées en plusieurs unités à l'aide de dispositifs végétaux et doivent comprendre des cheminements piétonniers permettant d'aller de la place de stationnement à la construction ou à l'installation en toute sécurité. (...) "

23. Si M. E... soutient que les 26 places de stationnement situées au nord du tènement, le long de la voie de chemin de fer et de la gare, ainsi que le garage à vélo situé au nord-ouest de ce même tènement, ne font l'objet d'aucun aménagement permettant d'assurer la circulation des piétons vers les bâtiments B et C, il ressort des pièces du dossier que ces places et ce garage font face auxdits bâtiments et sont séparés de quelques mètres seulement des trottoirs qui les bordent. Alors même que les utilisateurs de ces places et de ce garage devront traverser la voie de circulation interne au projet pour rejoindre ces trottoirs, ils pourront le faire en toute sécurité indépendamment de tout cheminement piéton. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Brest Métropole doit être écarté.

24. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Aiguillon Construction est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 4 janvier 2019 du maire du Relecq-Kerhuon ainsi que la décision du 18 avril 2019 de rejet du recours gracieux formé par M. E... en tant qu'ils concernaient les bâtiments B et C.

Sur l'appel incident :

25. Il résulte de ce qui a été dit aux points 15 à 23 qu'aucun des moyens invoqués par M. E... à l'encontre du permis de construire accordé par l'arrêté du 4 janvier 2019 n'est fondé.

26. Par conséquent, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par la SA Aiguillon Construction à l'encontre des conclusions d'appel incident formées par M. E..., il résulte de ce qui précède que ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation totale de l'arrêté du 4 janvier 2019 du maire du Relecq-Kerhuon et de la décision du 18 avril 2019 rejetant son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SA Aiguillon Construction, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. E... demande au titre des frais exposés par lui à l'occasion du litige soumis au juge.

28. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la SA Aiguillon Construction au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 3 juillet 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Rennes et ses conclusions d'appel incident sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Aiguillon Construction et à M. E....

Copie en sera adressée à la commune du Relecq-Kerhuon.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente assesseure,

- M. B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2021.

Le rapporteur,

F.-X. B...Le président,

T. Célérier

Le greffier,

C. Goy

La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 20NT02766


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02766
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : CABINET LEXCAP RENNES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-06;20nt02766 ?
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