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28/05/2021 | FRANCE | N°20NT02384

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 mai 2021, 20NT02384


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... F... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler notamment la décision du 13 novembre 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités diplomatiques françaises en Turquie rejetant sa demande de visa de long séjour présentée en qualité de conjointe d'un ressortissant français.

Par un jugement n° 1912606 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Na

ntes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... F... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler notamment la décision du 13 novembre 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités diplomatiques françaises en Turquie rejetant sa demande de visa de long séjour présentée en qualité de conjointe d'un ressortissant français.

Par un jugement n° 1912606 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 août 2020, Mme F..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 juillet 2020 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un visa de long séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision contestée est dépourvue de base légale dès lors que le Conseil constitutionnel a supprimé le délit de détention de vidéos jihadistes ;

- elle n'est pas motivée ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de la menace à l'ordre public qu'elle invoque ;

- le refus de visa est contraire aux articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'erreur manifeste tant dans l'appréciation de l'existence d'une menace à l'ordre public que dans celle de la réalité de l'intention matrimoniale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et les administrations ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., ressortissante turque née en 2000, a épousé le 14 août 2018, en Turquie, M. C..., de nationalité française, né en 1997. Les autorités diplomatiques françaises en poste en Turquie ont refusé de délivrer à Mme F... le visa de long séjour qu'elle a sollicité en sa qualité de conjointe d'un ressortissant français. Le recours formé contre cette décision a été rejeté par une décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 13 novembre 2019 au motif que la présence en France de Mme F... représentait une menace pour l'ordre public. Mme F... relève appel du jugement du 2 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 novembre 2019.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes des dispositions de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'immigration est chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. La saisine de cette commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier. ".

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la demande de Mme C... devant le tribunal administratif de Nantes tendait à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France. Par suite la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur dans ses écritures de première instance et tirée de ce que les conclusions de la requête sont dirigées contre la décision des autorités consulaires à Ankara, à laquelle la décision de la commission s'est substituée, et sont, par suite, irrecevables, ne peut qu'être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) doivent être motivées les décisions qui : / (...) 8° rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire. ". Aux termes des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article. ".

5. Par la décision contestée, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, s'est bornée, pour rejeter le recours formé contre le refus de visa opposé à Mme F..., à énoncer qu'" après un examen approfondi de la situation personnelle " de l'intéressée, elle considérait " que sa présence en France représente une menace pour l'ordre public. ", sans indiquer les considérations de fait sur lesquels elle fondait cette appréciation. Une telle motivation ne satisfait pas aux exigences des dispositions précitées de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme F... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

7. Sous réserve d'un changement de circonstances de droit ou de fait, l'exécution du présent arrêt implique seulement, eu égard aux motifs sur lesquels il se fonde, que le ministre de l'intérieur réexamine la demande de visa de Mme F.... Il y a lieu d'enjoindre au ministre d'y procéder dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

8. Mme F... n'a pas demandé l'aide juridictionnelle. Son avocat ne peut, par suite, se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Les conclusions présentées à ce titre doivent, dès lors, être rejetées.

D E C I D E:

Article 1er : La décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 13 novembre 2019 et le jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 juillet 2020 en tant qu'il rejette les conclusions de la demande dirigée contre cette décision sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de visa de Mme F... dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... F... épouse C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Douet, présidente de la formation de jugement,

M. A...'hirondel, premier conseiller,

Mme E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mai 2021.

Le rapporteur,

K. E...

La présidente,

H. DOUETLe greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 20NT02384


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02384
Date de la décision : 28/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DOUET
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : ECA WA LWENGA BLAISE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-05-28;20nt02384 ?
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