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13/04/2021 | FRANCE | N°20NT01287

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 13 avril 2021, 20NT01287


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1804581 du 25 février 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2020, Mme B... C... D..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrat

if de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1804581 du 25 février 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2020, Mme B... C... D..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me F..., son avocat, de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision attaquée a été prise à la suite d'un entretien qui s'est tenu dans des conditions irrégulières ;

- elle est entaché d'erreur dans l'appréciation de son degré d'assimilation à la communauté française ;

- elle est été prise en méconnaissance de l'article 34 de la convention de Genève et de la circulaire du 12 mai 2000.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Mme C... D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 25 % par une décision du 15 juin 2020 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Nantes (section administrative).

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 25 février 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme C... D... tendant à l'annulation de la décision du 28 février 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation. Mme C... D... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 41 du décret du 30 décembre 1993, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le postulant se présente en personne devant un agent désigné nominativement par l'autorité administrative chargée de recevoir la demande. / Lors d'un entretien individuel, l'agent vérifie que le demandeur possède les connaissances attendues de lui, selon sa condition, sur l'histoire, la culture et la société françaises, telles qu'elles sont définies au 2° de l'article 37. / A l'issue de cet entretien individuel, cet agent établit un compte rendu constatant le degré d'assimilation du postulant à la communauté française ainsi que, selon sa condition, son niveau de connaissance des droits et devoirs conférés par la nationalité française. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le compte rendu d'entretien d'assimilation a été établi le 18 mai 2017 par M. E... Duc. Par l'arrêté du 16 mai 2017, produit en défense par le ministre de l'intérieur, le préfet de l'Isère a désigné M. E... Duc comme étant habilité à conduire l'entretien d'assimilation prévu à l'article 41 du décret du 30 décembre 1993. En outre, si Mme C... D... soutient que l'entretien individuel ne se serait pas tenu dans des conditions régulières, elle n'apporte au soutien de son allégation aucun élément permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". En vertu de l'article 27 du même code, l'administration a le pouvoir de rejeter ou d'ajourner une demande de naturalisation. En outre, aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande. ". Il appartient ainsi au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la demande. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'assimilation du postulant.

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du compte-rendu de l'entretien d'assimilation, que Mme C... D... ne connaît pas les dates d'armistice des deux guerres mondiales ni l'année de la Révolution française, n'a pas su citer de personnages historiques français, de chaînes de montagnes et de noms de région de France, d'acteurs français ou encore de chaînes de télévision et de journaux français. En outre, l'intéressée ne connaît pas le nombre de pays de l'Union européenne et n'a pas su définir la démocratie et expliquer la devise de la République. Par suite, si Mme C... D... a su répondre à certaines questions, ses connaissances sur l'histoire, la culture, la société françaises ainsi que sur les principes et valeurs de la République demeurent lacunaires et insuffisantes, malgré le suivi d'une formation civique en 2013. Dans ces conditions et alors même que l'intéressée aurait été stressée lors de l'entretien, le ministre, qui dispose d'un large pouvoir d'apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en retenant une insuffisance d'assimilation à la société française.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 34 de la convention de Genève relative au statut des réfugiés : " Les Etats contractants faciliteront, dans toute la mesure du possible, l'assimilation et la naturalisation des réfugiés. Ils s'efforceront notamment d'accélérer la procédure de naturalisation et de réduire, dans toute la mesure du possible, les taxes et les frais de cette procédure ". Cet article ne crée pas pour l'Etat français l'obligation d'accorder la nationalité française aux personnes bénéficiant du statut de réfugié qui la demandent. Par suite, Mme C... D... ne peut utilement soutenir que la décision contestée méconnaît ces stipulations.

7. En quatrième lieu, la circulaire du 12 mai 2000 étant dépourvue de tout caractère règlementaire, Mme C... D... ne peut utilement invoquer la méconnaissance de ses orientations générales. En outre, eu égard au motif de la décision attaquée, la requérante ne se prévaut pas utilement de son niveau en langue française et de son intégration professionnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Il suit de là que ses conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... D... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente assesseur,

- Mme A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.

Le rapporteur,

C. A...

Le président,

T. CELERIER Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT01287


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01287
Date de la décision : 13/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-04-13;20nt01287 ?
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