Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société SPIE Batignolles Grand-Ouest a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, d'établir et fixer le montant du décompte général et définitif du marché confié à la société Mab Construction, aux droits de laquelle vient la société SPIE Batignolles Ouest, par la communauté d'agglomération Lorient Agglomération à la somme de 7 391 367,49 euros TTC, assortie des intérêts moratoires applicables à compter de la notification du projet de décompte final en date du 12 septembre 2013, et de condamner, en conséquence, Lorient Agglomération à lui verser la somme de 3 553 937,93 euros TTC au titre du solde du marché, outre les intérêts moratoires à compter du 12 septembre 2013 et leur capitalisation, et de condamner Lorient Agglomération à restituer les pénalités de retard imputées à hauteur de 54 253,94 euros, et à titre subsidiaire, de condamner in solidum, sur le fondement quasi délictuel, la société Nicolas Michelin et associés, le cabinet Rouillé architectes associés, la société BETIBA (BET Structure) et la société AIA Management de projets à l'indemniser du préjudice subi, à hauteur de 3 553 937,93 euros TTC, sauf à parfaire, outre les intérêts au taux légal, à compter du 12 septembre 2013, et leur capitalisation et d'assortir l'ensemble des condamnations des intérêts moratoires contractuellement dus.
Par un jugement n° 1601424 du 14 novembre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 janvier 2020 et le 27 novembre 2020, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, représentée par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1601424 du tribunal administratif de Rennes du 14 novembre 2019 ;
2°) à titre principal, de condamner la communauté d'agglomération Lorient Agglomération à lui verser une somme de 3 553 937, 93 euros TTC, au titre du solde du marché confié à la société MAB Construction, avec intérêts à compter du 12 septembre 2013 et capitalisation des intérêts ;
3°) à titre subsidiaire de condamner solidairement la société Nicolas Michelin et Associés, le cabinet Rouillé Architectes associés, la société BETIBA, et la société AIA Management à lui verser une somme de 3 553 937, 93 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2013 et capitalisation des intérêts ;
4°) en cas de nécessité, ordonner avant dire droit une expertise pour chiffrer un ou plusieurs de ses chefs de réclamation ;
5°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Lorient Agglomération, la société mixte pour l'aménagement et l'équipement de la Bretagne, la société Nicolas Michelin et Associés, le cabinet Rouillé Architectes associés, la société BETIBA et la société AIA Management la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête de première instance n'est pas irrecevable :
o le CCIRA a été saisi le 4 juillet 2014 dans le délai de six mois suivant la décision implicite de rejet du maître d'ouvrage née le 1er février 2014 ; le CCIRA avait en outre été saisi initialement le 18 mars 2013 ;
o en ce qui concerne la signature du mémoire en réclamation et son auteur, il suffit que le mémoire en réclamation émane manifestement de l'entreprise titulaire du marché, ce qui est le cas puisque son nom était apposé en première page ;
- sa requête d'appel est bien recevable et elle développe l'ensemble de ses moyens contre l'interprétation erronée qu'a eue le tribunal administratif de Rennes du déroulement du marché ;
- elle a subi des préjudices dans l'exécution du marché, liés au fait qu'elle a été empêchée d'exécuter les prestations conformément aux conditions du marché en raison de différents incidents :
o les plans de synthèse n'ont été mis que tardivement à sa disposition ; ces plans devaient être dressés par le maître d'oeuvre, qui avait en charge la mission EXE PARTIELLE/VISA laquelle comprend l'animation de la cellule de synthèse ; ces plans devaient être réalisés par la société BETIBA, bureau d'étude du maître d'oeuvre, puis validés par l'architecte, la société ANMA, afin de lui permettre de produire ses propres plans d'atelier et de chantier ;
o le dossier PRO communiqué n'était pas conforme et des modifications des plans ont été apportées tout au long du chantier pendant la phase d'études d'exécution et même en cours de réalisation des travaux ; le projet n'a cessé d'évoluer au cours du chantier et les ouvrages ont été substantiellement modifiés :
* elle a dû recaler le plan des fondations sur la base d'un taux de travail au sol à 2 bars au lieu des 3 bars initialement prévus écartés par l'avis du contrôleur technique ;
* elle a dû revoir à la hausse l'équarrissage de l'ensemble des poutres du sous-sol ainsi que la nature du béton utilisé pour les réaliser ;
* elle a dû assumer une complexification de la technique de construction des voiles suspendus ;
* elle a dû apporter des modifications au niveau 5 et aux bacs collaborant et elle a dû réaliser neuf baies provisoires une fois la structure achevée ;
o en raison de ces difficultés, elle a subi des surcoûts constitué par 124 494 euros HT au titre des études supplémentaires, 158 501, 50 euros au titre de l'accroissement des frais de chantier et d'encadrement et 1 038 801, 35 euros HT au titre de la perte de productivité ;
- elle a subi des préjudices du fait de l'allongement du délai d'exécution du chantier :
o elle a subi des préjudices liés à l'allongement du délai d'exécution du lot " fondation gros oeuvre " :
* le délai d'exécution du lot devait s'étendre du 3 décembre 2010 au 31 juillet 2011 ; les plannings détaillés d'exécution n'ont été établis qu'en avril 2011 et ne lui ont été notifiés qu'en mai 2011 ; l'allongement du délai d'exécution du lot ne lui est pas imputable et résulte de l'inachèvement des études de projet et de multiples travaux supplémentaires ;
* l'allongement de trois mois du délai d'exécution de son lot lui a causé un préjudice évalué à 187 129, 50 euros HT comprenant 75 124, 50 euros HT résultant du maintien de l'encadrement sur le chantier entre août et octobre 2011 et 107 085 euros HT de frais de chantier correspondant à des locations de matériel à des fournisseurs ;
o elle a subi des préjudices liés à l'allongement du délai d'exécution global du chantier :
* le chantier devait durer vingt mois et a finalement duré trente mois ; l'ordre de service n° 22 a prolongé le délai général de l'opération de trois mois et n'a pas non plus été respecté ;
* l'allongement lui a causé un préjudice total de 21 474 euros HT pour la première phase d'allongement du planning (13 963, 50 euros de frais d'encadrement et 7 510, 50 euros de frais de chantier) et 26 465, 40 euros pour la seconde phase d'allongement du planning (11 440, 40 euros de frais d'encadrement pour le suivi des réunions et la gestion de la fin de chantier et 15 021, 00 euros HT de frais de chantier) ;
- en ce qui concerne les responsabilités encourues :
o à titre principal, la responsabilité de la communauté d'agglomération de Lorient, maître d'ouvrage, et de la SEMBREIZH, maître d'ouvrage délégué est engagée ; les difficultés qu'elle a rencontrées sont imputables au maître d'ouvrage, assisté de son mandataire, qui a commis une faute dans l'exercice de son pouvoir de direction du chantier ; la faute de la SEMBREIZH, maître d'ouvrage délégué, est assimilable à une faute du maître d'ouvrage ; elle est en outre spécialisée dans les missions d'assistance aux maîtres d'ouvrage publics pour assurer la conduite opérationnelle de leurs projets de construction et est un acteur professionnel :
* elle n'a pas mis en oeuvre ses pouvoirs de direction pour veiller à ce que le maître d'oeuvre respecte ses obligation de délivrer les plans de synthèse alors que cette obligation reposait bien sur le maître d'oeuvre ;
* à titre subsidiaire, elle a validé des pièces de marché erronées, incohérentes et contradictoires puisqu'il était très difficile d'identifier dans ces pièces, notamment dans l'ensemble des CCTP, de façon certaine l'intervenant en charge de l'élaboration des plans de synthèse ;
* en ce qui concerne le caractère incomplet du dossier PRO joint au document de consultation des entreprises, elle n'a pas veillé à ce que la variante que la société MAB avait proposée soit prise en compte par les plans PROjets ; la communauté d'agglomération a été informée des difficultés dès avril 2011 ; les études PROjet, validées par le maître d'ouvrage et son délégué, étaient irréalisables et non conformes ce qui a conduit à une désorganisation du chantier et de nombreuses modifications en cours de marché ; le maître d'ouvrage délégué n'a pris aucune mesure pour remédier à l'ampleur des dysfonctionnements et des retards ; il ne saurait lui être reproché d'avoir déposé son offre sans faire de remarque sur le dossier PRO dès lors que l'entreprise ne réalise les plans EXE qu'après attribution du marché et que les irrégularités touchant les plans PRO ont été constatées à cette période ; les simples rappels effectués par le maître d'ouvrage délégué étaient insuffisants et démontrent la faute dans l'exercice des pouvoirs ;
o à titre subsidiaire, la responsabilité quasi-délictuelle de la société Nicolas Michelin et Associés, mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, du cabinet Rouillé Architectes associés, de la société BETIBA et de la société AIA venant aux droits de la société CEROC est engagée solidairement :
* le fait que les manquements qui leur sont imputables puissent constituer des fautes contractuelles n'interdit pas de rechercher leur responsabilité quasi-délictuelle ;
* les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre étaient contractuellement en charge d'une mission complète et devaient réaliser les plans projets ; ils devaient communiquer aux entreprises, avant la phase d'exécution, un dossier PRO opérationnel ; le maître d'oeuvre était également an charge des missions d'étude d'exécution partielle pour l'ensemble des lots et devait donc non seulement animer la cellule de synthèse mais également réaliser les plans de synthèse pour assurer la cohérence d'ensemble du projet ; cependant, certain des plans projets réalisés par la maîtrise d'oeuvre comportaient des erreurs et ils ont fait l'objet de modifications pendant toute la durée du chantier notamment en l'absence de mise à jour des plans PRO à la suite de la variante qu'elle avait proposée ; elle a dû pallier la carence du maître d'oeuvre en faisant réaliser elle-même une partie des études projet ;
* la responsabilité de la société CEROC est engagée en raison de la fonction d'OPC (ordonnancement, coordination, pilotage) qui lui était confiée et de son obligation de veiller au respect des objectifs calendaires ; le calendrier détaillé exigé pour le bon déroulement normal d'un marché de travaux n'a été transmis que le 17 mai 2011 et était au demeurant incomplet et non réalisable ; la société CEROC a dû revoir son planning d'exécution à deux reprises ; elle a été dans l'incapacité de faire respecter les délais et a participé à l'allongement de la durée générale du chantier ;
* tant les membres de la maîtrise d'oeuvre que la société CEROC ayant concouru à la réalisation du dommage, ils doivent être condamnés solidairement ;
- elle doit être indemnisée de la totalité des travaux supplémentaires, au-delà du montant accepté par le maître d'ouvrage :
o sont concernés des travaux supplémentaires réalisés sur ordres de service pour un montant total de 167 927, 31 euros, ordres de service sur lesquels elle avait présenté des réserves ; l'ensemble des travaux ordonnés ainsi correspondent à des travaux exclus du prix forfaitaire ou à des travaux modificatifs par lesquels il lui a été demandé d'intervenir à nouveau sur des prestations déjà réalisées ; la plupart des travaux ont dû être réalisés sur des ouvrages achevés et sont la conséquence de l'impréparation du chantier ;
o sont concernés des travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service mais indispensables à l'ouvrage correspondant aux devis 4, 16, 23 et 29 pour un montant total de 17 385, 26 euros ;
- les pénalités qui lui ont été infligées à hauteurs de 54 253, 94 euros doivent être restituées, la prolongation des délais d'exécution ne lui étant pas imputable et en application des stipulations des articles 19.2 et 17 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) ; ni le maître d'ouvrage ni le maître d'oeuvre n'ont prouvé l'imputabilité des retards à son intervention ; 52 jours de retard lui ont été attribués de manière aléatoire et arbitraire ; les délais ont été prolongés en raison d'intempéries, de coupures EDF, de travaux supplémentaires, de retard dans la diffusion des plans de synthèse et de la modification importante de certaines natures d'ouvrage en raison des changements du dossier PRO ; le maître d'ouvrage s'était engagé à conclure un nouvel avenant prenant en compte la prolongation des délais d'exécution liée aux travaux supplémentaires ; les stipulations de l'article 6.3 du CCAP et de l'article 20.1 du CCAG valant pour tous les titulaires, le maître d'ouvrage doit identifier le ou les titulaires responsables du retard global ce qui n'a pas été le cas ;
- son préjudice inclut également le coût d'élaboration du mémoire en réclamation, pour un montant de 30 844, 86 euros ;
- en application de l'article 5.1 du CCAP, elle a droit aux intérêts moratoires pour un montant total de 19 088, 31 euros, montant qui sera actualisé lors du paiement définitif :
o sur les retenues opérées sur la situation n° 9 ;
o sur le non-règlement des situations 15 et 16, les travaux supplémentaires ayant été réglés le 4 octobre 2013 après la signature de l'avenant n° 1 ;
o les retenues sur la situation du projet de décompte final ;
- son préjudice inclut également le préfinancement des travaux supplémentaires qu'elle a opéré, soit un montant de 119 319 euros HT ;
- son préjudice inclut également un préjudice capitalistique puisqu'elle n'a pas disposé de la somme correspondant à son préjudice et qui serait venue grossir ses capitaux propres et consolider sa valeur ;
- un expert judiciaire peut être désigné pour chiffrer de façon contradictoire les chefs de réclamation.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 octobre 2020 et le 26 novembre 2020, la SEMBREIZH, venant aux droits de la société mixte pour l'aménagement et l'équipement de la Bretagne, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête de première instance de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest était tardive en application de l'article 50 du CCAG Travaux de 2009 ; il n'est pas établi que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest ait saisi le comité consultatif de règlement amiable dans le délai de six mois à compter de la décision implicite de rejet de sa réclamation par le maître d'ouvrage ;
- la responsabilité du maître d'ouvrage n'est pas engagée :
o la société SPIE Batignolles Grand-Ouest ne peut invoquer de retards ou d'incohérence dans la communication des plans de synthèse alors que les documents contractuels lui confiaient la tâche de les établir ; la cellule de synthèse prévue par le maître d'ouvrage constituait une initiative pour faciliter les études de synthèse ;
o le caractère incomplet ou incohérent du dossier PRO joint au document de consultation des entreprises n'est pas établi ; c'est la société SPIE Batignolles Grand-Ouest qui a pris l'initiative de proposer une variante avec un taux de travail de deux bars, sur laquelle le contrôleur technique a émis un avis défavorable prescrivant à l'entreprise de réimplanter les fondations comme prévu au CCTP ; la société SPIE Batignolles Grand-Ouest avait fait une lecture erronée du dossier PRO ;
o elle a rempli parfaitement sa mission de direction des travaux et de surveillance de leur avancement ;
- il n'existe pas de bouleversement de l'économie générale du contrat ; aucune sujétion de nature technique, exceptionnelle, imprévisible et extérieure aux parties n'est établie ; l'allongement des délais sur le chantier n'a été que de 151 jours sur un délai initial de 20 mois ; les travaux supplémentaires, ayant fait l'objet de l'avenant n° 1, ne représentent que 4,94 % du montant du marché et ne caractérisent pas un bouleversement de l'économie du contrat, le montant des intérêts moratoires ne pouvant être inclus ;
- à titre subsidiaire, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'établit pas le caractère justifié et fondé des préjudices dont elle demande l'indemnisation :
o en ce qui concerne les travaux supplémentaires invoqués :
* la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'établit pas que les travaux ayant fait l'objet des ordres de service n'étaient pas compris dans le prix forfaitaire ;
* la société SPIE Batignolles Grand-Ouest ne démontre pas le caractère indispensable des travaux réalisés sans ordre de service à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ;
o le préjudice consécutif à l'allongement du délai d'exécution des travaux de gros oeuvre ne peut être indemnisé, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'établissant pas avoir rencontré des sujétions techniques imprévues ;
o aucun préjudice n'est établi à la suite de la mise à disposition des plans de synthèse et de la communication du dossier PRO, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest ayant eu le temps de procéder à l'analyse du dossier avant de constituer son offre ;
o le préjudice résultant de la modification des quantités du fait du changement des hypothèses du marché n'est pas établi, s'agissant d'un marché à prix global et forfaitaire, réputé comprendre l'ensemble des prestations nécessaires à la réalisation de l'ouvrage indépendamment des quantités mises en oeuvre ; les adaptations, notamment concernant les fondations, ont été rendues nécessaires par la lecture erronée des documents par la société MAB ou la réalisation d'ouvrages non conformes ;
o en ce qui concerne le préjudice consécutif à l'allongement du délai global du chantier, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'apporte pas la preuve que le retard serait imputable au maître d'ouvrage ;
o les frais liés à la rédaction d'un mémoire en réclamation sont réputés compris dans le marché ; en outre, ces frais ne sont pas justifiés ;
o en ce qui concerne le préjudice résultant de préfinancements apportés par l'entreprise, la réalité des travaux supplémentaires est contestée ; en outre, la réalité de ce préfinancement n'est pas justifiée par la seule référence à un taux de préfinancement de 2.5 % ; la marge ne saurait être intégrée dans ce calcul, le coût de préfinancement ne pouvant concerner que le coût de revient de la prestation ;
o en ce qui concerne le préjudice capitalistique, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest est seule à l'origine des préjudices allégués ; il n'est pas établi que la société était dans l'impossibilité de contracter d'autres marchés ou d'y engager des moyens ;
- les pénalités et retenues ont été infligées conformément à l'article 6.3 du CCAP et l'article 20.1 du CCAG Travaux ; la réception partielle des locaux est intervenue le 17 mai 2013 avec 151 jours de retard par rapport à la date prévisionnelle de livraison ; dans un souci d'apaisement, il a été choisi de n'imputer à la société SPIE Batignolles Grand-Ouest qu'un tiers des pénalités de retard ; aucune pénalité ne lui a été infligée pour les retards constatés sur la livraison du local CTA, du parking en sous-sol et de la rampe d'accès ;
- les demandes indemnitaires devant être rejetées, les intérêts moratoires doivent l'être également ; en outre, pour les sommes réglées dans l'avenant n° 1, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest a expressément renoncé à toute somme supplémentaire au titre des travaux concernés ;
- aucune faute de sa part dans l'exercice de sa mission de maître d'ouvrage délégué n'étant identifiable, elle appelle en garantie la communauté d'agglomération de Lorient ; elle n'est pas le rédacteur des documents des marchés de travaux ; le contrat de mandat excluait sa responsabilité s'agissant des délais d'exécution ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2020, la communauté d'agglomération Lorient Agglomération, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest est irrecevable dès lors qu'en méconnaissance des dispositions de l'article R. 411-1 et de l'article R. 811-13 du code de justice administrative, elle ne présente pas de moyens dirigés contre le jugement ;
- à titre subsidiaire, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'établit ni des fautes imputables à la personne responsable du marché, ni des sujétions imprévues :
o s'agissant des plans de synthèse, l'analyse des pièces contractuelles démontre que l'élaboration des plans d'exécution et de synthèse était, pour l'ensemble des lots, mise à la seule charge de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest en application des articles 0.3, 0.5 et 1.3 du CCTP ;
o s'agissant de la communication du dossier PRO, cette mission était à la charge de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, le maître d'oeuvre étant uniquement chargé d'une mission VISA/EXE partiel ; en outre, les modifications invoquées par la société ne résultent que du non respect de ses propres obligations contractuelles, notamment s'agissant de l'ancrage des fondations ; la technique de construction des voiles suspendus figurait bien dans les plans projets intégrés au document de consultation des entreprises ;
o en conséquence la demande de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest au titre de l'allongement des délais d'exécution doit être rejetée ; en outre, la communauté d'agglomération ne peut être condamnée à indemniser la société SPIE Batignolles Grand-Ouest du fait des fautes commises par les autres intervenants ;
- en ce qui concerne les travaux supplémentaires invoqués par la société SPIE Batignolles Grand-Ouest :
o les travaux prescrits par ordres de service étaient prévus au marché et ne sauraient être qualifiés de travaux supplémentaires ; l'émission d'ordres de service résulte uniquement de la mauvaise exécution de la société MAB Construction ;
o il n'est pas établi que les travaux non prescrits par ordre de service n'étaient pas prévus aux marchés ; il n'est pas établi qu'ils auraient été indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ;
- les pénalités de retard ont été infligées en application des stipulations de l'article 5 de l'avenant n° 1 et de l'article 20.1 du CCAG Travaux ; , il a été choisi de n'imputer à la société SPIE Batignolles Grand-Ouest qu'un tiers des pénalités de retard ; aucune pénalité ne lui a été infligée pour les retards constatés sur la livraison du local CTA, du parking en sous-sol et de la rampe d'accès ;
- la mesure d'instruction avant-dire droit sollicitée est inutile ;
- à titre très subsidiaire, elle appelle en garantie la société SEMBREIZH et la société Nicolas Michelin et Associés, la société BETIBA, la société AIA Management et la société Rouillé Architectes Associés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 octobre 2020 et le 13 novembre 2020, la société AIA Management, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest ;
2°) à titre subsidiaire, de condamner la société BETIBA à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif n'a pas statué sur le moyen tiré de la tardiveté de la requête ;
- la requête de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest devant le tribunal administratif était irrecevable :
o le mémoire en réclamation n'étant pas signé, il n'est pas possible d'identifier son auteur ;
o il n'est pas établi que la requête de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest devant le tribunal administratif de Rennes ait été déposée dans les délais ;
- aucune faute ne lui est imputable en sa qualité d'OPC :
o si la mission d'OPC comprend l'élaboration d'un calendrier détaillé d'exécution, cette élaboration est conditionnée à la diligence de chacun des intervenants ; la société MAB Construction n'a pas été diligente, communiquant ses prévisions de travaux avec 22 jours de retard ; en tout état de cause, elle avait établi un premier planning pour les premiers travaux ; le planning annexé à l'acte d'engagement s'appliquait jusqu'à la notification d'un calendrier détaillé d'exécution ; les retards de travaux ne sont donc pas imputables à la non diffusion du calendrier d'exécution ;
o aucune faute n'est imputable à l'OPC concernant le retard de bornage du terrain d'assiette du projet, intervenu avec un retard de 15 jours ; ce retard a été pris en compte dans le planning d'avril 2011 ;
o aucune faute n'est imputable à l'OPC concernant la décalage dans le temps de la réalisation des gradins, décalage lié à une organisation technique du chantier ;
- à titre subsidiaire, il ne saurait y avoir de condamnation solidaire ; la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'a pas démontré que l'ensemble des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre et l'OPC auraient contribué ensemble à la réalisation du même dommage ;
- à titre subsidiaire, elle appelle en garantie le BET Structure Betiba qui a réalisé les plans de conception ;
- la mesure d'expertise demandée est inutile.
Par une ordonnance du 21 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 novembre 2020.
Un mémoire a été présenté le 8 février 2021 pour la société Agence Nicolas Michelin et Associés (ANMA) et la société Rouillé Architectes Associés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;
- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;
- le décret n° 93-1270 du 29 novembre 1993 ;
- le décret n° 2010-1525 du 8 décembre 2010 ;
- l'arrêté du 21 décembre 1993 précisant les modalités techniques d'exécution des éléments de mission de maîtrise d'oeuvre confiés par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;
- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme H..., première conseillère,
- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., représentant la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, Me B..., représentant la communauté d'agglomération Lorient Agglomération, Me A..., représentant l'Agence Nicolas Michelin et Associés et le cabinet Rouillé Architectes Associés, et Me C..., représentant la SEMBREIZH.
Considérant ce qui suit :
1. En vue de la construction de l'Ecole nationale supérieure d'ingénieurs de Bretagne Sud, une convention a été conclue en juin et juillet 2010 entre la communauté d'agglomération du Pays de Lorient, l'Etat et le recteur de l'académie, les locaux destinés à l'université de Bretagne devant être implantés sur un terrain appartenant à la commune de Lorient et le financement de l'opération reposant sur l'Etat, la région, le département du Morbihan, le FEDER et la communauté d'agglomération du Pays de Lorient. Aux termes de cette convention, la maitrise d'ouvrage de l'opération a été confiée à la communauté d'agglomération. La communauté d'agglomération du Pays de Lorient a délégué la maîtrise d'ouvrage par un marché des 4 décembre 2008 et 2 janvier 2009 attribué à la société d'économie mixte d'aménagement et d'équipement de la Bretagne (SEMAEB), devenue SEMBREIZH. La maîtrise d'oeuvre de l'opération de construction de l'Ecole nationale a été confiée en octobre 2009 à une équipe constituée par la société agence Nicolas Michelin et Associés (ANMA), la société Rouillé Architectes Associés, la société BETIBA, la société ABC et la société Acoustique Bureau Conseil Decibel (ABC Decibel). Le mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre était l'agence Nicolas Michelin et Associés. Enfin, une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination (OPC) a été confiée à la société CEROC. Les travaux, qui comportaient une tranche ferme correspondant à la construction de l'Ecole nationale supérieure, et une tranche conditionnelle correspondant à la construction d'un campus numérique, ont été divisés en seize lots. Le lot n° 1 " fondations - gros oeuvre " a été confié, les 28 octobre 2010 et 29 novembre 2010, à la SAS MAB Construction, filiale de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, pour un montant de 3 617 466, 87 euros TTC pour la tranche ferme et 514 875, 76 euros TTC pour la tranche conditionnelle. Le marché du lot n° 1 a été notifié par courrier du 2 décembre 2010, tandis que deux ordres de service du même jour ont d'une part, donné l'ordre de démarrer le jour même les travaux de la tranche ferme du marché et d'autre part, rappelé le délai global d'exécution de l'ensemble des lots fixé à 20 mois par l'acte d'engagement et le cahier des clauses administratives particulières (CCAP). La réception des ouvrages est intervenue partiellement, à l'exception du local technique ventilation du parking en sous-sol et de la rampe d'accès au sous-sol, au 17 mai 2013 par une décision du 29 mai suivant. Les travaux relatifs au local technique ventilation, au parking en sous-sol et à la rampe d'accès au sous-sol ont été réceptionnés, avec réserves, au 19 juillet 2013 par une décision du 22 juillet suivant.
2. Entretemps, avant la fin des travaux, par courrier du 16 octobre 2012, la société MAB Construction a adressé à la société d'économie mixte pour l'aménagement et l'équipement de la Bretagne, mandataire du maître d'ouvrage, un mémoire en réclamation en demandant l'indemnisation de préjudices qu'elle aurait subis à l'occasion de l'exécution des travaux de son lot. Par un courrier du 21 décembre 2012, la SEMAEB a indiqué à la société MAB que la communauté d'agglomération avait décidé de rejeter les demandes indemnitaires à l'exception de l'indemnisation de travaux supplémentaires pour un montant total de 149 391, 04 euros HT, devant faire l'objet d'un avenant. L'avenant portant le montant total du marché à 3 796 139, 15 euros TTC et modifiant quelques stipulations du CCAP a été signé en août 2013. En l'absence d'accord sur les autres points, la société MAB Construction a saisi le 18 mars 2013 le comité consultatif de règlement amiable des différends ou litiges relatifs aux marchés publics (CCIRA).
3. Par un courrier adressé le 10 septembre 2013 au maître d'oeuvre et reçu le 12 septembre par celui-ci, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest a présenté son projet de décompte final relatif au lot n° 1 du marché public de construction de l'Ecole nationale supérieure d'ingénieurs de Bretagne Sud mentionnant un montant total du marché de 6 182 920, 87 euros HT et 7 391 367, 49 euros TTC. Par un courrier du 5 novembre 2013, parvenu le 19 novembre suivant à son destinataire, le maître d'ouvrage délégué a adressé à la société le décompte général arrêté à la somme de 3 836 993, 24 euros TTC. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest a contesté ce décompte en adressant un nouveau mémoire en réclamation daté du 12 décembre 2013. N'obtenant pas de réponse explicite, la société a de nouveau saisi le CCIRA le 4 juillet 2014. A l'issue de la séance du 3 décembre 2015, le CCIRA a proposé l'abandon par la communauté d'agglomération de Lorient des pénalités de retard infligées à la société SPIE Batignolles Grand-Ouest et le versement à celle-ci d'une somme de 700 000 euros HT, avec intérêts moratoires. La communauté d'agglomération ayant refusé, par un courrier du 2 mars 2016, de suivre l'avis du CCIRA, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à titre principal à la condamnation de la communauté d'agglomération à lui verser la somme de 3 553 937, 93 euros TTC et restitution des pénalités infligées à hauteur de 54 253, 94 euros. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest relève appel du jugement n° 1601424 du 14 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
4. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
5. Les premiers juges ont rejeté au fond les conclusions indemnitaires de la demande de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest après avoir mentionné " sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense et tirées du caractère définitif du décompte général et de la tardiveté de la requête ". Dans ces conditions, et dès lors que le tribunal a accueilli les conclusions présentées en défense qui tendaient au rejet de la requête de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, le jugement attaqué n'est pas, contrairement à ce que soutient la société AIA Management, entaché d'une irrégularité pour omission de répondre à une des fins de non-recevoir opposées en défense.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le décompte du lot n° 1 confié à la société MAB Construction et la responsabilité contractuelle du maître d'ouvrage :
6. Il résulte de l'instruction, notamment de l'acte d'engagement du lot n° 1, que le marché conclu entre la société mixte pour l'aménagement et l'équipement de la Bretagne, mandataire du maître d'ouvrage, et la SAS MAB Construction, aux droits de laquelle vient la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, est un marché à prix global et forfaitaire.
7. Par ailleurs, les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.
S'agissant de la fourniture des plans de synthèse :
8. L'article 7 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maitrise d'ouvrage publique et ses rapports avec la maitrise d'oeuvre privée dispose que : " (...) Pour la réalisation d'un ouvrage, la mission de maîtrise d'oeuvre est distincte de celle d'entrepreneur. / Le maître de l'ouvrage peut confier au maître d'oeuvre tout ou partie des éléments de conception et d'assistance suivants : / 1° Les études d'esquisse ; / 2° Les études d'avant-projets ; / 3° Les études de projet ; / 4° L'assistance apportée au maître de l'ouvrage pour la passation du contrat de travaux ; / 5° Les études d'exécution ou l'examen de la conformité au projet et le visa de celles qui ont été faites par l'entrepreneur ; / 6° La direction de l'exécution du contrat de travaux ; / 7° L'ordonnancement, le pilotage et la coordination du chantier ; / 8° L'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement ". Par ailleurs, l'article 8 du décret du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé dispose que : " I. Les études d'exécution permettent la réalisation de l'ouvrage. Elles ont pour objet, pour l'ensemble de l'ouvrage ou pour les seuls lots concernés : / a) D'établir tous les plans d'exécution et spécifications à l'usage du chantier ainsi que les plans de synthèse correspondants ; / b) D'établir sur la base des plans d'exécution un devis quantitatif détaillé par lot ou corps d'état ; / c) D'établir le calendrier prévisionnel d'exécution des travaux par lot ou corps d'état ; / d) D'effectuer la mise en cohérence technique des documents fournis par les entreprises lorsque les documents pour l'exécution des ouvrages sont établis partie par la maîtrise d'oeuvre, partie par les entreprises titulaires de certains lots. / II. Lorsque les études d'exécution sont, partiellement ou intégralement, réalisées par les entreprises, le maître d'oeuvre s'assure que les documents qu'elles ont établis respectent les dispositions du projet et, dans ce cas, leur délivre son visa ".
9. Par ailleurs, l'article 3.2 du marché de maîtrise d'oeuvre précise que la mission confiée au groupement de maitrise d'oeuvre comprenait des missions énumérées dont la mission " EXE partielle / VISA ". La mission " études d'exécution " était précisée par l'article 3.3 de ce marché de maîtrise d'oeuvre et comportait cinq points : " 1. Réalisation des études nécessaires à l'élaboration des dossiers quantitatifs détaillés remplie des quantités / 2. l'élaboration des dossiers quantitatifs détaillés remplie des quantités pour l'ensemble des lots, hors lot STRUCTURE-GROS OEUVRE / 3. Production des carnets de détails d'exécution suivant : coffrage, VRD, réseaux, faux plafonds, revêtements de sols, serrurerie, et de tout détail nécessaire à la parfaite compréhension du projet par les entreprises / 4. la mission VISA telle que définie à l'article 8 du décret n° 93-1268 / 5. Animation de la cellule de synthèse (incluse dans la mission VISA) ". En ce qui concerne le lot n° 1 " fondation - gros oeuvre " confié à la SAS MAB Construction, aux droits de laquelle vient la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, l'article 0.3 de son cahier des clauses techniques particulières (CCTP) lui confiait explicitement la réalisation de l'ensemble des études d'exécution (article 0.3), des études de coordination et de synthèse avec tous les autres lots (article 0.1.1), des études d'exécution (article 0.1.2), qui devaient être réalisées à partir des plans " ARCHITECTE " et comprendre un certain nombre de documents (la liste des plans et documents, une notice technique, les plans de coffrage, les plans d'armature et de ferraillage, les plans d'étaiement, les notes de calcul, les calculs des descentes de charges générales et locales, tous les calculs et documents nécessaires à l'implantation et le dimensionnement des fondations, et les spécifications techniques et avis techniques des matériaux) et les études et plans d'exécution (article 0.3.2.1). Enfin l'article 1.1 du CCTP commun à tous les lots stipule que : " Chaque entreprise établira à partir du dossier technique correspondant à la consultation, à ses frais, pour tous les ouvrages et composants, vus et non vus, les plans d'exécution et de mise en oeuvre, plans de fabrication, plans d'assemblage, notes de calcul détaillées, etc.... " et que " Aucune opération de fabrication ou d'exécution ne pourra être entreprise sans que les plans correspondants établis par l'Entreprise ne portent le visa délivré par le maître d'oeuvre et le Bureau de contrôle (...) ".
10. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest invoque la circonstance, à l'origine de l'allongement de la durée du chantier, que les plans d'exécution incombant au groupement de maîtrise d'oeuvre et plus spécifiquement à la société BETIBA, lui auraient été tardivement remis par cette dernière et soutient que le maître d'ouvrage et son mandataire auraient commis une faute en ne mettant pas en oeuvre leurs pouvoirs de direction pour contraindre le groupement de maîtrise d'oeuvre à produire ces plans d'exécution dans les temps. Néanmoins, il résulte clairement des documents contractuels cités au point précédent que la mission confiée à la société MAB Construction, titulaire du lot n° 1, comprenait la fourniture des plans de synthèse, la mission EXE partielle/VISA confiée au maître d'oeuvre comprenait l'établissement des devis quantitatifs en application du b) de l'article 8 du décret du 29 novembre 1993 et la mise en cohérence technique des documents fournis par les entreprises, en application du d) de ce même article, par l'apposition de son visa et l'animation d'une cellule de synthèse. Dans ces conditions, et alors qu'il résulte des documents contractuels que cette tâche lui incombait, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à soutenir que le maître d'ouvrage ou son mandataire auraient commis une faute en n'exigeant pas la fourniture de ces plans par le groupement de maîtrise d'oeuvre.
S'agissant de la validation des documents contractuels :
11. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus au point 9 du présent arrêt, il résulte clairement de l'ensemble des documents contractuels que la réalisation des plans de synthèse incombait au titulaire du lot n° 1, la mission du maître d'oeuvre étant limitée, notamment, à l'animation de la cellule de synthèse et à la délivrance d'un visa sur les plans d'exécution dressés par les entreprises. Dans ces conditions, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à soutenir que le maître d'ouvrage ou son mandataire auraient commis une faute en validant des pièces de marché " erronées, incohérentes et contradictoires ".
S'agissant du dossier PRO :
12. L'article 21 du décret du 29 novembre 1993 dispose que : " Les études de projet ont pour objet : / a) De préciser la solution d'ensemble et les choix techniques, architecturaux et paysagers ; / b) De fixer les caractéristiques et dimensions des différents ouvrages de la solution d'ensemble, ainsi que leur implantation topographique ; / c) De préciser les tracés des alimentations et évacuations de tous les fluides ainsi que des réseaux souterrains existants ; / d) De préciser les dispositions générales et les spécifications techniques des équipements répondant aux besoins de l'exploitation ; / e) D'établir un coût prévisionnel des travaux décomposés en éléments techniquement homogènes ; / f) De permettre au maître de l'ouvrage d'arrêter le coût prévisionnel de la solution d'ensemble et, le cas échéant, de chaque tranche de réalisation, d'évaluer les coûts d'exploitation et de maintenance, de fixer l'échéancier d'exécution et d'arrêter, s'il y a lieu, le partage en lots ".
13. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest soutient que le dossier PRO qui lui avait été remis aurait présenté des erreurs ou incohérences exigeant des modifications en cours d'exécution du chantier à l'origine à la fois d'un allongement de la durée d'exécution de l'ouvrage et d'un surcoût important, en matériaux, en études supplémentaires et en frais de chantier. Elle invoque la faute qu'auraient commise le maître d'ouvrage ou son mandataire en validant ce dossier PRO.
14. En premier lieu, si la société SPIE Batignolles Grand-Ouest soutient que le dossier PRO n'avait pas été modifié pour s'adapter à la variante qu'elle a proposée en ce qui concerne la construction des fondations de l'ouvrage, il résulte de l'instruction que l'article 2.4 du CCTP du lot " fondation - gros oeuvre " avait prévu, pour les fondations, la réalisation de semelles filantes ancrées dans la couche de micaschiste altéré et dimensionnées avec un taux de travail admissible de 3 bars. Il résulte en effet de l'instruction, notamment de l'étude de sols réalisée préalablement, que sous les formations de couverture, le substrat micaschisteux présentait un caractère décomposé sur une épaisseur de cinq à six mètres avec des caractéristiques mécaniques limitées. Au-delà de ce substrat micaschisteux décomposé, le substrat micaschisteux apparaissait altéré avec de bonnes caractéristiques mécaniques. Par ailleurs, il n'est pas contesté que la société MAB Construction, titulaire du lot n° 1, a proposé au contraire des fondations ancrées dans la couche supérieure de micaschiste décomposé avec un taux de travail admissible de 2 bars, en méconnaissance des prescriptions du CCTP de son lot et contrairement aux prescriptions du rapport d'étude de sol, qui était joint au CCTP, et qui précisait explicitement que seul un ouvrage avec de faibles charges de type rez-de-chaussée ou rez-de-chaussée surmonté de combles pouvait être édifié sur des fondations superficielles ancrées dans le micaschiste décomposé et qu'en revanche, un ouvrage comportant des étages devait être édifié sur des fondations ancrées dans le micaschiste altéré à compact. Par ailleurs, dans son avis défavorable du 21 janvier 2011, le contrôleur technique a rappelé le respect d'une hypothèse de trois bars avec réalisation des fondations dans les micaschistes altérés. Dans ces conditions, la proposition effectuée par la société MAB Construction méconnaissant les obligations contractuelles résultant pour elle de son CCTP, lequel au demeurant ne prévoyait pas la possibilité d'une variante sur ce point, elle n'est pas fondée à invoquer la circonstance que le dossier PRO n'aurait pas été modifié pour tenir compte de sa variante et qu'une faute aurait été commise du fait de l'élaboration de ce dossier PRO, alors au demeurant que l'élaboration de ce dossier ne reposait aucunement sur le maître d'ouvrage et son mandataire.
15. En second lieu, si la société SPIE Batignolles Grand-Ouest soutient que le dossier PRO a été modifié à plusieurs reprises en cours de chantier, notamment en ce qui concerne la technique de construction des voiles suspendus, l'équarrissage des poutres du sous-sol et les bacs collaborant, et invoque la faute commise par le maître d'ouvrage et son mandataire en validant un tel dossier PRO, ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 17 de leur jugement. Par ailleurs, si la société appelante soutient que le dossier PRO a également été modifié en ce qui concerne le niveau 5 de l'immeuble et la pose de baies provisoires, il résulte de l'instruction, notamment des ordres de service 17-01 et 21-01 des 27 octobre 2011 et 30 janvier 2012 qu'il a, au contraire, été demandé à la société MAB Construction de réaliser ces ouvrages conformément à ses plans d'exécution d'octobre 2011 et selon le plan de synthèse.
16. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 à 14 que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à invoquer la faute qu'auraient commise le maître d'ouvrage et son mandataire du fait de la validation d'un dossier PRO erroné ou incohérent.
S'agissant de l'allongement de la durée du chantier :
17. Il résulte de l'article 3 de l'acte d'engagement du lot n° 1 que les délais d'exécution de la tranche ferme de la construction de l'ENSIBS a été fixée à 20 mois. Ce délai global d'exécution a été rappelé explicitement à la société MAB Construction par l'ordre de service n° 1-01 du 2 décembre 2010, tandis que le démarrage des travaux a été ordonné par l'ordre de service n° 2 du même jour. Il est en outre constant que la réception, avec réserves, des travaux a été prononcée le 17 mai 2013 pour certains ouvrages et le 19 juillet 2013 pour le local technique ventilation, le parking en sous-sol et la rampe d'accès au sous-sol. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest demande l'indemnisation des surcoûts occasionnés pour elle tant par l'allongement de trois mois du délai d'exécution du lot n° 1 que par l'allongement de dix mois de la durée globale d'exécution des travaux.
18. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'établit pas, ni même ne soutient, que l'allongement de la durée d'exécution du lot n° 1, de trois mois, ou de la durée d'exécution globale des travaux, de dix mois, serait imputable à la survenue de difficultés exceptionnelles et imprévisibles. Par ailleurs, si l'existence de travaux supplémentaires a été actée par la conclusion, le 8 août 2013, d'un avenant augmentant le montant de la rémunération du lot n° 1 d'un montant de 149 391, 54 euros HT, aucun accord entre les parties n'est intervenu quant à l'incidence éventuelle sur la durée d'exécution du marché de ces travaux supplémentaires, qui ne paraissent pas excéder, par leur importance et leurs conséquences, ceux que l'on peut normalement rencontrer dans l'organisation d'un chantier de cette importance. En outre, ainsi qu'il a été dit ci-dessus aux points 8 à 15 du présent arrêt, d'une part, il appartenait contractuellement à la société MAB Construction de fournir les plans d'exécution nécessaires au démarrage des travaux de son lot, et d'autre part, la société appelante n'établit pas que l'allongement de la durée d'exécution du chantier serait imputable à la fourniture à l'entreprise d'un dossier PRO erroné ou incohérent. Il résulte en revanche de l'instruction, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, que plusieurs modifications intervenues dans l'exécution des travaux ont été consécutives à des rappels adressés à la société MAB Construction de respecter les prescriptions contractuelles, figurant notamment dans le CCTP de son lot. Enfin, si la société SPIE Batignolles Grand-Ouest soutient que le retard du démarrage de l'exécution de son lot serait imputable à une faute de la société CEROC, à qui la mission d'ordonnancement, pilotage et coordination (OPC) avait été confiée, du fait de la transmission tardive du calendrier détaillé d'exécution, il résulte de l'instruction, contrairement à ce que soutient la société, que les documents contractuels ne prévoyaient pas uniquement le délai global d'exécution des travaux (20 mois), mais comportaient, en annexe du CCAP applicable à tous les lots de travaux, un calendrier prévisionnel. En outre, et alors même que la société MAB Construction, en charge du premier lot devant débuter l'opération de construction, a tardé à produire les plans d'exécution, il ne résulte pas de l'instruction que la société aurait été, pour un autre motif, empêchée de débuter les travaux conformément au calendrier prévisionnel figurant en annexe du CCAP et conformément à son propre calendrier prévisionnel annexé à son offre, dont la société SPIE Batignolles Grand-Ouest indique qu'il avait été accepté par le maître d'ouvrage.
19. Il résulte de ce qui précède, et alors qu'il résulte de l'instruction que l'allongement de la durée d'exécution du lot n° 1 et du chantier dans sa totalité est en large partie imputable à la société MAB Construction, que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à demander l'indemnisation de cet allongement qui n'est ni imputable aux conséquences de sujétions imprévues ni imputable à un fait du pouvoir adjudicateur, ni en tout état de cause, au fait d'un autre intervenant à l'opération de construction.
S'agissant des travaux supplémentaires :
20. Ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, par un avenant du 8 août 2013, le prix du marché du lot n° 1 " fondations - gros oeuvre " a été augmenté d'un montant de 149 391, 54 euros HT, correspondant à des travaux supplémentaires ordonnés par le maître d'oeuvre. L'article 3 de l'avenant listait précisément les travaux en cause, ayant fait l'objet des ordres de service n° 4, n° 20, n° 9, n° 11, n° 12, n° 10, n° 16, n° 19, n° 18-25, n° 19, n° 24 et ayant fait l'objet d'un accord donné le 6 avril 2012. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest soutient qu'elle a droit à l'indemnisation d'autres travaux supplémentaires, à hauteur de 167 927, 31 euros pour des travaux supplémentaires qui auraient été réalisés à la suite d'ordres de service, et à hauteur de 17 385, 26 euros pour des travaux supplémentaires qui auraient été réalisés sans ordre de service.
21. En premier lieu, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest produit un tableau comportant une liste de travaux dont elle estime qu'ils ont été ordonnés par des ordres de service et qu'ils représentent des travaux supplémentaires dont elle serait fondée à demander l'indemnisation. Néanmoins, et alors au demeurant qu'elle ne produit pas l'intégralité des ordres de service qui auraient ordonné ces travaux, la seule circonstance que des travaux ont fait l'objet d'ordres de service de la maîtrise d'oeuvre n'est pas de nature à établir qu'il s'agirait de travaux supplémentaires. Il résulte d'ailleurs de l'instruction que nombre des travaux dont la société appelante demande l'indemnisation étaient, ainsi que le rappelait explicitement l'ordre de service correspondant, par exemple les ordres de service 18-01 et 30-01 d'avril 2012 relatifs aux carottages du bassin et au traitement des joints, des prestations incluses dans le prix du marché. D'autres travaux ont été rendus nécessaires par une mauvaise exécution de ses obligations contractuelles par la société MAB Construction, par exemple ceux visés par l'ordre de service 18-01. Enfin pour les travaux ayant fait l'objet des devis 15, 22, 24 et 26, il résulte de ce qui a été dit au point 14 du présent arrêt, que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'établit pas les modifications alléguées, par rapport aux plans PRO, de la technique des voiles suspendus, du niveau 5 de l'immeuble, de la pose de baies ou des bacs collaborant. Elle n'établit dès lors pas le caractère supplémentaire de ces travaux.
22. En second lieu, le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise cocontractante sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest se borne néanmoins à demander le paiement des travaux ayant fait l'objet de quatre devis sans établir le caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage de ces travaux.
23. Il résulte de ce qui précède que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à demander l'intégration dans le décompte du lot n° 1 de travaux supplémentaires qu'aurait effectués la société MAB Construction.
S'agissant des pénalités :
24. L'article 20.1 de l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, applicable au présent marché stipule que : " 20.1. En cas de retard imputable au titulaire dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixé, il est appliqué une pénalité journalière de 1/3 000 du montant hors taxes de l'ensemble du marché, de la tranche considérée ou du bon de commande. Ce montant est celui qui résulte des prévisions du marché, c'est-à-dire du marché initial éventuellement modifié ou complété par les avenants intervenus ; il est évalué à partir des prix initiaux du marché hors TVA définis à l'article 13.1.1. / 20.1.1. Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre (...) ".
25. Par ailleurs, l'article 5 de l'avenant du 8 août 2013 modifie l'article 6.3 du CCAP commun à tous les lots de travaux et stipule que : " (...) Les pénalités journalières de retard seront appliquées comme suit : / . Jusqu'à la date de la première réception partielle : / seules les dispositions de l'article 20-1 du CCAG-Travaux sont applicables sur l'intégralité du marché. / . A compter de la date de la première réception partielle des travaux : / Par dérogation à l'article 20-1 du CCAG-Travaux, la pénalité journalière de retard applicable à la partie d'ouvrage non réceptionnée lors de la première réception partielle, s'élèvera à 1/3000ème du montant hors taxes des travaux considérés et déterminé comme suit, soit 627 755, 88 euros HT (...) ".
26. Il résulte de l'instruction, notamment du décompte final établi par la SEMBREIZH en novembre 2013, que sur les 165 jours de retard constatés entre la fin contractuelle des travaux, modifiée au 2 décembre 2012 conformément au planning notifié par l'ordre de service n° 22-01 du 4 février 2012, et la date de réception partielle le 17 mai 2013, le maître d'ouvrage n'a imputé à la société SPIE Batignolles Grand-Ouest que 52 jours, et lui a infligé des pénalités de retard pour un montant total de 54 253, 94 euros, prenant donc en compte l'imputabilité partielle des retards aux autres intervenants. Si la société appelante conteste l'imputabilité de cette part de retard à l'intervention de la société MAB Construction, aux droits desquelles elle vient, il résulte de ce qui a été dit précédemment, d'une part, que la société titulaire du lot n° 1 a tardé à produire les plans d'exécution qui étaient contractuellement à sa charge, d'autre part, qu'un certain nombre des travaux ordonnés par les ordres de service ou dont la société SPIE Batignolles Grand-Ouest invoque qu'ils seraient consécutifs à des modifications du dossier PRO résultent en réalité de la méconnaissance par la société MAB de certaines prescriptions contractuelles et de la nécessité de reprendre ses travaux en conséquence. Par ailleurs, ainsi qu'il a été rappelé précédemment, si l'avenant du 8 août 2013 a retenu l'existence et l'indemnisation d'un certain nombre de travaux supplémentaires, aucun autre avenant contractuel n'a retenu une nouvelle prolongation du délai contractuel d'exécution des travaux. Dès lors, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à demander la restitution des pénalités de retard qui ont été infligées au titulaire du lot n° 1.
S'agissant des intérêts moratoires :
27. L'article 5 du CCAP applicable à tous les marchés de travaux stipule que : " Les demandes de paiement seront présentées conformément à l'article 13.1 du CCAG Travaux. Les comptes seront réglés mensuellement. (...) / Les sommes dues au(x) titulaire(s) et au(x) sous-traitant(s) de premier rang éventuel(s) du marché, seront payées dans un délai global de trente jours à compter de la date de réception des factures ou des demandes de paiement équivalentes. / Le taux des intérêts moratoires sera celui du taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récentes effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points ".
28. En premier lieu, si la société SPIE Batignolles Grand-Ouest demande l'allocation d'intérêts moratoires sur des retenues qui auraient été opérées sur son état de situation n° 9, elle n'apporte aucune précision à l'appui de sa contestation.
29. En deuxième lieu, si la société SPIE Batignolles Grand-Ouest demande l'allocation d'intérêts moratoires sur le paiement des travaux supplémentaires acceptés par l'avenant du 8 août 2013, il résulte de l'instruction qu'à l'article 9 de cet avenant, le titulaire a renoncé à " toute demande de modification des prix nouveaux traités dans le présent avenant ". La société n'établit en outre pas le paiement tardif de la somme fixée dans cet avenant postérieurement à la conclusion de l'avenant.
30. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 25 du présent arrêt que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à demander l'application d'intérêts moratoires sur le solde du décompte du lot n° 1, l'ensemble de ses conclusions tendant à la condamnation du maître d'ouvrage ayant été rejetées.
31. Il résulte de tout ce qui précède que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à demander la modification du décompte du lot n° 1 " fondations - gros oeuvre " du marché de construction de l'ENSIBS et la condamnation, en conséquence, de la communauté d'agglomération de Lorient, maître d'ouvrage, à l'indemniser de l'ensemble des préjudices qu'elle invoque, incluant, en tout état de cause, le coût de rédaction de son mémoire en réclamation, le préfinancement des travaux et un éventuel préjudice capitalistique.
En ce qui concerne la responsabilité quasi délictuelle des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre et du titulaire du marché OPC :
32. La société SPIE Batignolles Grand-Ouest invoque, à titre subsidiaire, la responsabilité quasi-délictuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre et du titulaire de la mission OPC et demande leur condamnation solidaire. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que contrairement à ce que soutient la société appelante, la maitrise d'oeuvre n'était pas en charge de l'élaboration des plans d'exécution et de synthèse. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit précédemment, la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'établit pas le caractère incomplet ou erroné du dossier PRO mis à sa disposition. Enfin, ainsi qu'il a été rappelé, la circonstance que la société CEROC, en charge de la mission OPC, aurait remis tardivement un planning d'exécution est sans incidence sur le retard pris par l'exécution du lot n° 1, le titulaire de ce lot disposant d'un calendrier prévisionnel annexé au CCTP commun à l'ensemble des lots. Par ailleurs il ne résulte pas de l'instruction que le retard pris tant par l'exécution du lot n° 1 que par l'exécution de l'ensemble des travaux soit imputable à l'action de la société CEROC.
33. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à titre subsidiaire présentées par la société SPIE Batignolles Grand-Ouest tendant à la condamnation solidaire de la société Nicolas Michelin et Associés, du cabinet Rouillé Architectes associés, de la société BETIBA, et de la société AIA Management, venant aux droits de la société CEROC, doivent être rejetées.
34. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin ni d'examiner la fin de non-recevoir opposée à titre principal par la communauté d'agglomération de Lorient ni d'ordonner, avant-dire droit, une expertise, que la société SPIE Batignolles Grand-Ouest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses conclusions tendant à titre principal à la condamnation de la communauté d'agglomération et à titre subsidiaire à la condamnation solidaire de la société Nicolas Michelin et Associés, du cabinet Rouillé Architectes associés, de la société BETIBA, et de la société AIA Management.
Sur les frais du litige :
35. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Lorient Agglomération, la SEMBREIZH, venant aux droits de la société mixte pour l'aménagement et l'équipement de la Bretagne, la société Nicolas Michelin et Associés, le cabinet Rouillé Architectes associés, la société BETIBA et la société AIA Management, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que la société SPIE Batignolles Grand Ouest demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
36. En deuxième lieu, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest la somme de 1000 euros à verser à la SEMBREIZH, la somme de 1000 euros à verser à la communauté d'agglomération de Lorient et la somme de 1000 euros à verser à la société AIA Management en application de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société SPIE Batignolles Grand-Ouest est rejetée.
Article 2 : La société SPIE Batignolles Grand-Ouest versera, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros à la SEMBREIZH, la somme de 1 000 euros à la communauté d'agglomération Lorient Agglomération et la somme de 1 000 euros à la société AIA Management.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société SPIE Batignolles Grand-Ouest, à l'Agence Nicolas Michelin et Associés, à la société AIA Management, au cabinet Rouillé Architectes Associés, à la société BETIBA, à la SEMBREIZH et à la communauté d'agglomération Lorient Agglomération.
Délibéré après l'audience du 16 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme H..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2021.
La rapporteure,
M. H...Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
S. LEVANT
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT00184