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15/01/2021 | FRANCE | N°20NT01645

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 15 janvier 2021, 20NT01645


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste à Bamako rejetant les demandes de visa de long séjour présentées, au titre du regroupement familial, par Mme D... C... et les jeunes Mohamed C... et B... C....

Par un jugement n° 1910732 du 30 avril 2020, le tribunal

administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste à Bamako rejetant les demandes de visa de long séjour présentées, au titre du regroupement familial, par Mme D... C... et les jeunes Mohamed C... et B... C....

Par un jugement n° 1910732 du 30 avril 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 juin 2020 et le 6 août 2020, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 avril 2020 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué méconnaît l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- l'identité de son épouse et de leurs deux enfants ainsi que leurs liens familiaux sont parfaitement établis ;

- la décision contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme I...,

- et les observations de Me E..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. H... C..., ressortissant malien résidant régulièrement en France, a obtenu, par une décision du préfet d'Indre-et-Loire du 6 juillet 2018, une autorisation de regroupement familial au profit de Mme D... C... qu'il présente comme son épouse et des jeunes Mohamed C... et B... C... qu'il présente comme leurs enfants. Les demandes de visa de long séjour présentées le 19 décembre 2018 par ces derniers ont été rejetées par les autorités consulaires françaises en poste à Bamako. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé le 1er juillet 2019 contre ces refus de visa. M. C... relève appel du jugement du 30 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Dans le cas où la venue d'une personne en France a été autorisée au titre du regroupement familial, l'autorité diplomatique ou consulaire n'est en droit de rejeter la demande de visa dont elle est saisie à cette fin que pour des motifs d'ordre public. Figure au nombre de ces motifs le défaut de valeur probante des documents destinés à établir l'identité du demandeur de visa ou encore le lien familial entre celui-ci et le membre de famille que celui-ci entend rejoindre.

3. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. / (...) ". L'article 47 du code civil dispose : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ".

En ce qui concerne Mme D... C... :

4. M. C... indique sans être contredit que les autorités consulaires françaises, estimant que l'extrait d'acte de naissance du 26 avril 2016 présenté par son épouse pour justifier de son identité n'était pas régulier, ont demandé à celle-ci d'en produire un nouveau. L'intéressée s'est, en conséquence, adressée au tribunal de grande instance de la commune VI du district de Bamako, lequel a, par un jugement n° 4423/18 du 8 novembre 2018, ordonné la transcription sur les registres d'état civil de la naissance, le 13 mai 1994 à Bamako, de Mariam C... dont le père est M. F... C... et la mère est M. J.... En exécution de ce jugement, un acte de naissance a été dressé le 13 novembre 2018. Le requérant produit une copie littérale ainsi qu'un extrait de cet acte. L'ensemble de ces pièces contient les mêmes informations que celles portées sur l'acte de naissance dressé en 2016. Aucun élément au dossier ne permet de les regarder comme frauduleux. Ainsi, l'identité de Mme D... C... doit être tenue pour établie.

5. Ensuite, il ressort des pièces du dossier que, le 10 juillet 2016, M. H... C... a épousé Mme D... C... à Gogui. Si, ainsi que le fait valoir le ministre de l'intérieur, l'article 179 de la loi malienne n° 2011-087 du 30 décembre 2011 portant code des personnes et de la famille exige que, avant la célébration du mariage, un extrait de naissance ou la pièce en tenant lieu doit être présentée à l'officier d'état civil, il ressort des pièces du dossier que Mme C... détenait, à la date de son mariage, l'extrait d'acte de naissance du 26 avril 2016 mentionné au point précédent ainsi que le volet n° 3 de ce même acte de naissance. Le lien matrimonial entre Mme D... C... et le requérant est ainsi parfaitement établi.

6. Enfin, la photographie apposée sur le passeport Mme C... permettait à l'administration de s'assurer que la personne formant la demande de visa était bien celle au bénéfice de laquelle le regroupement familial a été autorisé et celle mentionnée sur l'acte de mariage.

En ce qui concerne le jeune G... C... :

7. Un acte de naissance enregistrant la naissance du jeune G... C... a été dressé le 10 août 2016 sur le fondement de la déclaration de la mère reçue le 19 novembre 2015. La discordance, non expliquée, entre la date de déclaration et la date d'établissement de l'acte est de nature à ôter à celui-ci sa valeur probante. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que par un jugement supplétif d'acte de naissance du 19 novembre 2018, le tribunal de grande instance de la commune VI du district de Bamako a déclaré que l'enfant G... C... est né le 15 novembre 2015 à Bamako de M. H... C... et de Mme D... C.... Ce jugement a été transcrit le 22 novembre 2018. Aucun des arguments du ministre ne permet de regarder ce jugement, dont il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé, comme frauduleux. En particulier, à supposer que la transcription de ce jugement ait été effectuée sur les registres de l'année 2019 et non de l'année 2018, ce que le ministre de l'intérieur ne démontre pas, une telle erreur est sans incidence sur le jugement lui-même. Par ailleurs, la photographie apposée sur le passeport de l'enfant permettait à l'administration de s'assurer que l'enfant pour lequel la demande de visa était présentée était bien celui concerné par l'acte de naissance dressé suivant le jugement supplétif ci-dessus mentionné et par l'autorisation de regroupement familial.

En ce qui concerne la jeune B... C... :

8. Pour justifier de l'identité et de la filiation de la jeune B..., M. C... produit plusieurs extraits de l'acte de naissance n° 102 établi le 27 février 2017. Par un courrier du 29 mai 2019, le maire de Gogui a certifié que cet acte, dont il ressort que l'enfant B... C... est née le 14 février 2017 à Gogui de M. H... C... et Mme D... C..., avait été établi au centre d'état civil de cette localité. Le ministre ne démontre pas que cet acte, dressé dans le délai de déclaration de trente jours, n'aurait pu être établi en l'absence de jugement supplétif. La circonstance qu'il ne mentionne pas de numéro de registre n'est pas de nature à mettre en doute l'exactitude des mentions qu'il comporte. La photographie apposée sur le passeport de l'enfant permettait à l'administration de s'assurer que l'enfant pour lequel la demande de visa était présentée était bien celui concerné par l'acte de naissance dressé suivant le jugement supplétif ci-dessus mentionné et par l'autorisation de regroupement familial.

9. Il suit de là qu'en confirmant les refus de visa opposés à Mme D... C... et aux jeunes Mohamed C... et B... C..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions citées au point 3. M. C... est, par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

10. Eu égard aux motifs d'annulation sur lesquels il est fondé, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement de circonstances de droit ou de fait, la délivrance de visas de long séjour à Mme D... C... et aux jeunes Mohamed C... et B... C.... Il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

11. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 avril 2020 et la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme D... C... et aux jeunes Mohamed C... et B... C... des visas de long séjour, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pérez, président de chambre,

M. A...'hirondel, premier conseiller,

Mme I..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 janvier 2021.

Le rapporteur,

K. I...

Le président,

A. PEREZLe greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT01645


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01645
Date de la décision : 15/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP OMNIA LEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-01-15;20nt01645 ?
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