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08/01/2021 | FRANCE | N°20NT03088

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 08 janvier 2021, 20NT03088


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé de le transférer aux autorités portugaises, d'autre part, d'annuler l'arrêté du même jour par lequel le préfet l'a assigné à résidence pour une durée maximale de quarante-cinq jours renouvelable trois fois et l'a astreint à se présenter une fois par semaine au commissariat de police du Mans et, enfin, d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire

de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours.

Par un jugement n° 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé de le transférer aux autorités portugaises, d'autre part, d'annuler l'arrêté du même jour par lequel le préfet l'a assigné à résidence pour une durée maximale de quarante-cinq jours renouvelable trois fois et l'a astreint à se présenter une fois par semaine au commissariat de police du Mans et, enfin, d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours.

Par un jugement n° 2007138 du 28 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2020, et un mémoire, enregistré le 8 décembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes en date du 28 juillet 2020 ;

2°) d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé de le transférer aux autorités portugaises, d'autre part, d'annuler l'arrêté du même jour par lequel le préfet de Maine-et-Loire l'a assigné à résidence pour une durée maximale de quarante-cinq jours renouvelable trois fois et l'a astreint à se présenter une fois par semaine au commissariat de police du Mans et, enfin, d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que la décision de transfert est insuffisamment motivée, que sa situation particulière n'a pas été examinée, que l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 a été violé dès lors qu'il n'est pas établi que l'entretien prévu par cet article ait été mené par un agent qualifié, qu'une erreur manifeste d'appréciation a été commise au regard de l'article 17 du même règlement dès lors qu'il souffre d'hypertension artérielle, qu'il souffre d'un problème pulmonaire et constitue une " personne à risque " susceptible de faire l'objet d'une forme grave de la maladie " covid 19 " et que, pour ces mêmes raisons, l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne a été méconnu.

Par un mémoire, enregistré le 4 novembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les observations de Me D..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant angolais né le 6 juin 1986, a déposé une demande d'asile auprès de la préfecture de Maine-et-Loire le 20 avril 2020. La consultation du système Visabio a permis de relever qu'il était en possession d'un visa périmé depuis moins de six mois délivré par les autorités portugaises. Saisies le 22 avril 2020, les autorités portugaises ont accepté de le prendre en charge par une décision du 3 juin 2020. Par deux arrêtés du 5 juin 2020, le préfet de Maine-et-Loire a décidé, d'une part, de transférer l'intéressé au Portugal et, d'autre part, de l'assigner à résidence dans le département de la Sarthe. M. B... a demandé l'annulation de ces deux arrêtés. Par un jugement du 28 juillet 2020, dont il relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

2. A l'appui de cet appel, le requérant reprend, en premier lieu, les moyens invoqués en première instance et tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté de transfert, de la violation de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et du défaut d'examen de sa situation particulière. Il y a lieu d'écarter ces moyens par les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par le premier juge aux points 3, 8 et 9 du jugement attaqué.

3. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ".

4. Il n'est établi ni que l'hypertension artérielle dont souffrirait le requérant ou la scoliose dorso-lombaire dont il souffre effectivement lui interdisent de voyager vers le Portugal ni, en tout état de cause, qu'elles ne pourraient faire l'objet d'une prise en charge médicale adaptée dans ce pays. Par ailleurs, il n'est pas établi que le requérant ait un risque accru de contracter la maladie " covid 19 " du fait de son transfert au Portugal. Enfin, la circonstance, révélée par un télérachis réalisé le 8 juin 2020, lequel avait été demandé dans le cadre d'un bilan de scoliose dorso-lombaire, que l'apex pulmonaire droit du requérant paraisse " moins aéré " que l'apex pulmonaire gauche n'est, en tout état de cause, en l'absence d'autre précision, pas de nature à indiquer qu'il présente une vulnérabilité accrue face à la maladie " covid 19 ". De même, il ne ressort pas des pièces du dossier que son éventuelle hypertension artérielle soit associée à des complications cardiaques, rénales et vasculo-cérébrales, en sorte qu'il n'est en tout état de cause, pas établi que le requérant constitue une personne spécialement vulnérable à la maladie " covid 19 ". Il n'est pas non plus établi qu'une fois transféré au Portugal, les autorités portugaises ne pourraient le protéger contre d'éventuels mauvais traitements susceptibles de lui être infligés par des compatriotes qui estimeraient que son handicap le rend porteur de " magie noire ". Ainsi, aucun des éléments invoqués ne justifie que les autorités françaises examinent, dans les conditions dérogatoires prévues par l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, sa demande de protection internationale. Par suite, il n'est fondé à soutenir ni que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, au regard de ces dispositions, en le transférant au Portugal, ni qu'il aurait méconnu l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 janvier 2021.

Le rapporteur,

T. A...Le président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20NT03088

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03088
Date de la décision : 08/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Thurian JOUNO
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : THOUMINE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-01-08;20nt03088 ?
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