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22/12/2020 | FRANCE | N°19NT02256

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 22 décembre 2020, 19NT02256


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne ", l'association Dinard Côte d'Emeraude Environnement, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), M. et Mme G..., M. E... B..., M. L... K..., Mme M... O..., M. F... I... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2015 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a délivré à la société Boralex Energie Verte une autorisation d'exploiter une installation de p

roduction d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent de 6 éolien...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne ", l'association Dinard Côte d'Emeraude Environnement, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), M. et Mme G..., M. E... B..., M. L... K..., Mme M... O..., M. F... I... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2015 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a délivré à la société Boralex Energie Verte une autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent de 6 éoliennes sur le territoire de la commune de Marcillé-Raoul.

Par un jugement n° 1601303 du 11 avril 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 juin 2019 et 27 février 2020, l'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne ", la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), M. et Mme G..., M. B..., M. K... et Mme O..., représentés par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête est recevable y compris en ce qu'elle émane de M. et Mme G..., de

M. B..., de M. K... et de Mme O... qui justifient disposer d'un intérêt à contester l'arrêté préfectoral du 20 novembre 2015 ;

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité en ce qu'il ne comporte pas la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience ;

- l'arrêté du 20 novembre 2015 contesté a été pris au terme d'une procédure irrégulière, en ce que l'avis d'enquête n'a pas été publié dans des conditions conformes à l'article R. 123-11 du code de l'environnement ;

- le contenu de l'étude d'impact est insuffisant et méconnait l'article R. 122-5 du code de l'environnement ;

- l'arrêté du 20 novembre 2015 contesté est entaché d'une erreur d'appréciation au regard de ses impacts sur la santé publique, sur la faune, sur la flore et sur la conservation des sites et monuments ; les prescriptions dont il est assorti ne sont pas suffisantes.

Par des mémoires, enregistrés le 10 septembre 2019 et le 4 mars 2020, la société Boralex Energie Verte, représentée par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise conjointement à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable ; les appelants autres que les associations requérantes ne justifient pas disposer d'un intérêt à agir contre l'arrêté portant autorisation d'exploiter du 20 novembre 2015 ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., pour l'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne " et autres et de Me J..., pour la société Boralex Energie.

Considérant ce qui suit :

1. L'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne " et autres relèvent appel du jugement du 11 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine délivrant à la société Boralex Energie Verte une autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent de 6 éoliennes sur le territoire de la commune de Marcillé-Raoul.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ". Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité au regard de ces dispositions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article R. 123-11 du code de l'environnement auraient été méconnues que les requérants reprennent en appel sans apporter de précisions nouvelles.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires. ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération.

5. La commune de Marcillé-Raoul a, par une délibération du 9 avril 2015, émis un avis favorable au projet. Les requérants soutiennent que M. N..., membre du conseil municipal de cette commune, est propriétaire des parcelles AL 53 et AL 55, que " ces parcelles sont concernées par le surplomb des pâles des éoliennes " et qu'il " a perçu à ce titre une indemnité ". Toutefois, à supposer même que ces circonstances suffiraient à le faire regarder comme ayant un intérêt particulier à la délivrance de l'autorisation d'exploiter, aucun des éléments versés au dossier ne permet d'établir qu'il a participé au vote, ni que, par sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption, il aurait été en mesure d'exercer une influence sur cette délibération. Par suite, et en tout état de cause, le moyen doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. II.- L'étude d'impact présente : (...) / 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages (...), le bruit, les espaces naturels (...) ainsi que les interrelations entre ces éléments ; / 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux ; (...) / 7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : -éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; -compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. (...) / 8° Une présentation des méthodes utilisées pour établir l'état initial visé au 2° et évaluer les effets du projet sur l'environnement et, lorsque plusieurs méthodes sont disponibles, une explication des raisons ayant conduit au choix opéré ; 9° Une description des difficultés éventuelles, de nature technique ou scientifique, rencontrées par le maître d'ouvrage pour réaliser cette étude ; (...) ".

7. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

8. Les requérants soutiennent que l'étude d'impact est entachée d'insuffisance en ce qui concerne les analyses consacrées aux impacts du projet sur la commodité de voisinage, sur l'avifaune et les chiroptères, et sur le patrimoine bâti environnant.

9. S'agissant de la commodité de voisinage et de l'impact sonore du projet, il résulte de l'instruction que l'étude acoustique jointe au dossier a été réalisée à partir des textes réglementaires et des normes de référence en la matière, notamment du guide de l'étude d'impact sur l'environnement des parcs éoliens, actualisé en 2010, rédigé par le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer. Les vitesses de vent étudiées se situent entre 3 m/s et 10 m/s, qui constituent des vitesses de vent standardisées et correspondent à celles durant lesquelles les éoliennes sont en fonctionnement alors, en outre, qu'il n'est pas contesté que, par un vent inférieur à 3 m/s, les éoliennes ne fonctionnent pas et qu'au-delà de 8 m/s, les émergences sonores deviennent très faibles compte tenu de l'augmentation du bruit résiduel. En outre, 12 points de mesures ont été retenus. Dans ces conditions, les requérants n'établissent pas que les impacts sonores du projet auraient été minimisés.

10. S'agissant de l'avifaune et des chiroptères, l'étude d'impact, plus particulièrement son volet " Faune, Flore, Milieux naturels ", procède, pages 57 et suivantes, de façon détaillée, au recensement de l'avifaune sur le site ainsi qu'à la présentation des enjeux du projet dont la synthèse est présentée page 77. L'état initial concernant les chiroptères est analysé, pages 78 et suivantes. Les enjeux sont précisément décrits et font l'objet d'une synthèse, pages 120 et 121. Les effets du projet sur la Barbastelle, la pipistrelle de Nathusius et le Grand Murin sont étudiés, pages 155, 158 et 172. La société Boralex Energie Verte fait valoir, sans être contredite, que la présence du grand Rhinolophe n'a pas été constatée sur le site de sorte que le défaut d'analyse des impacts du projet sur cette espèce est sans incidence. La méthodologie utilisée est présentée avec précision, les auteurs de l'étude s'étant fondés notamment, s'agissant plus particulièrement des chiroptères, sur le plan régional d'actions pour les chiroptères 2009-2013 rédigé par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Bretagne ainsi que sur les prospections réalisées. Les périodes d'étude retenues ont couvert les périodes les plus importantes du cycle biologique des chiroptères. La recherche de colonies de reproduction de chiroptères a été effectuée. La seule circonstance que les préconisations du groupe de travail " Eurobats ", notamment en matière de recherche des colonies, n'auraient pas été suivies, ne suffit pas à remettre en cause la méthodologie mise en oeuvre.

11. Enfin, l'étude d'impact examine les impacts du projet sur les monuments situés à proximité du projet. Elle précise que " le projet éolien se trouve en dehors de l'aire d'influence paysagère du Mont-Saint-Michel définie par les DDTM (direction départementale des territoires et de la mer) 35 et 59 (carte 35) ", et que d'après le bassin visuel, le Mont-Saint-Michel, situé à 30 kilomètres, " se trouve dans une zone où seuls des bouts de pales seraient visibles " et comporte plusieurs photomontages. D'autres photomontages ont été réalisés dans cette étude qui concernent le château de la Ballue et ses jardins, l'église de Marcillé-Raoul, le cimetière de Marcillé-Raoul et sa porte romane, l'église de Saint-Léger-les-Prés et ses abords, le château de Montmuran et leurs perspectives, les remparts du château de Combourg ainsi que la route départementale 795, à l'entrée de Combourg, qui permettent d'apprécier, de façon satisfaisante, les impacts visuels du projet. En dépit des observations contraires formulées par la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) de Bretagne, dans son avis du 24 février 2014, il ne résulte pas de l'instruction que les développements consacrés par l'étude d'impact sur ces points seraient insuffisants.

12. Compte tenu de l'ensemble des développements qui précèdent, il ne résulte pas de l'instruction que l'étude d'impact serait entachée d'inexactitudes, d'omissions ou d'insuffisances ayant pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou de nature à exercer une influence sur la décision prise.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. / L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral. (...) ". Aux termes de l'article L. 512-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les conditions d'installation et d'exploitation jugées indispensables pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, les moyens de suivi, de surveillance, d'analyse et de mesure et les moyens d'intervention en cas de sinistre sont fixés par l'arrêté d'autorisation et, éventuellement, par des arrêtés complémentaires pris postérieurement à cette autorisation. ". Enfin, aux termes de l'article R. 512-28 du même code, alors en vigueur : " L'arrêté d'autorisation et, le cas échéant, les arrêtés complémentaires fixent les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1, L. 220-1 et L. 511-1. / Ces prescriptions tiennent compte notamment, d'une part, de l'efficacité des meilleures techniques disponibles et de leur économie, d'autre part, de la qualité, de la vocation et de l'utilisation des milieux environnants ainsi que de la gestion équilibrée de la ressource en eau. (...) ".

14. Les requérants soutiennent que, compte tenu des nuisances sonores susceptibles d'être provoquées par le projet litigieux, les prescriptions dont est assorti l'arrêté du 20 novembre 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine contesté sont insuffisantes. Toutefois, l'article 8 de cet arrêté impose à l'exploitant d'établir un plan de gestion acoustique spécifique, en période diurne et nocturne, en vue de s'assurer du respect des dispositions de l'article 26 de l'arrêté du 26 août 2011, lequel fixe un niveau maximal de dépassement du bruit généré par l'installation par rapport au niveau sonore ambiant. Ce plan, vérifié dans un délai maximum de 12 mois après la mise en service du parc et révisé en cas de dépassement des émergences sonores autorisées, doit permettre l'engagement par l'exploitant de mesures correctives, notamment des mesures de bridage ou des coupures temporaires, dans les conditions définies à l'article 11 de l'arrêté contesté, dont l'inspection des installations classées est avisée et qu'elle doit valider. Cet article prévoit, également, la mise en place d'un " dispositif d'alerte pour que tout riverain gêné par le bruit des éoliennes puisse contacter rapidement le maître d'ouvrage, qu'un examen soit réalisé et qu'une action soit éventuellement mise en oeuvre ", action dont les riverains et l'inspection des installations classées sont tenus informés. En outre, l'article 10 de l'arrêté du 20 novembre 2015 prescrit l'instauration d'un dispositif " d'auto surveillance des niveaux sonores " consistant en la mesure, par un organisme ou une personne qualifiée, de la situation acoustique de l'installation, dans un délai maximum de 12 mois après la mise en service du parc, et précise les points de contrôle qui devront obligatoirement être vérifiés. Les résultats de ce dispositif sont communiqués à l'inspection des installations classées. Lorsqu'il en résulte des risques ou des écarts par rapport aux normes de référence autorisées, l'exploitant doit mettre en oeuvre les mesures correctives définies à l'article 11. Il ne résulte pas de l'instruction et n'est d'ailleurs pas établi par les requérants que ces prescriptions seraient insuffisantes.

15. Par ailleurs, il résulte de l'instruction, notamment de l'étude d'impact dont il a été dit au point 12 qu'elle est suffisamment précise et étayée, que l'impact de l'installation sur l'avifaune et certaines espèces de chiroptères est qualifié de faible ou moyen, le site n'étant traversé par aucun couloir migrateur. Si les requérants soutiennent que " les espaces naturels et zones humides choisies pour accueillir le projet de grand éolien de la société abritent une faune et une flore variées, avec de nombreuses espèces protégées, qui sont directement menacées par le projet de parc éolien ", ils n'apportent aucune précision quant aux espèces qui seraient menacées et aux risques qu'ils allèguent. De même, en se bornant à soutenir qu'il est " évident que le projet par son ampleur et sa nature aura des impacts négatifs " sur la faune de l'étang du Boulet, classé site Natura 2000 et inclus en ZNIEFF de type 1 et que la forêt de Vile Cartier et les marais de Sougeal constituent une zone d'importance communautaire pour la conservation des oiseaux ( ZICO), ils n'apportent pas de précisions suffisantes permettant au juge d'apprécier le bien-fondé de leurs dires alors qu'il n'est pas contesté que ces sites sont éloignés, respectivement, de 12 et 2 kilomètres du projet. En outre, l'arrêté litigieux prévoit des mesures destinées à prévenir et limiter les impacts du projet, notamment des mesures spécifiques liées à la protection de l'avifaune et des chiroptères, notamment des mesures de suivi de ces populations et de leur mortalité, et un dispositif de régulation du fonctionnement des éoliennes afin d'éviter les risques de collision. Il prévoit, également, dans son article 6, plusieurs mesures compensatoires parmi lesquelles, notamment, l'installation de nichoirs à chiroptères dans un rayon de 500 mètres à 2 kilomètres, la replantation de haies et des mesures destinées à la restauration des zones humides. Enfin, il est également prévu de compenser " la perte d'une surface d'environ 3 500 m² de l'habitat communautaire " Prairies Atlantiques à fourrage ", avant la mise en service du parc éolien, sur la base des propositions émises dans le dossier de demande d'exploitation ou équivalentes, par l'achat d'une parcelle de taille équivalente, en dehors du site, ou la participation financière à une action en cours ou future de réhabilitation d'une zone équivalente dans le département. Contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance que l'arrêté n'impose pas à l'exploitant de justifier d'une promesse d'achat ou d'un compromis de vente d'une telle parcelle ou ne fixe pas le montant de la participation financière prévue n'est pas de nature à faire regarder cette prescription comme entachée d'insuffisance.

16. Enfin, les requérants soutiennent que le projet est de nature à porter atteinte aux paysages et au patrimoine caractéristiques de l'arrière-pays de la baie du Mont-Saint-Michel et de Saint-Malo dans laquelle il s'insère. Toutefois, il ressort des photomontages produits que seuls " des bouts de pale " des éoliennes seraient perceptibles depuis les remparts les plus hauts du Mont-Saint-Michel, en raison de sa distance à plus de 30 kilomètres et du relief existant. Il résulte, également, de l'instruction que les éoliennes ne seront pas visibles depuis l'église Saint-Léger et ses abords, ni depuis la porte romane de Marcillé-Raoul et ne présenteront qu'une covisibilité négligeable avec ces monuments, compte tenu de la distance les séparant du projet ou de la présence de premiers plans atténuant leur perception simultanée. De même, il résulte de l'instruction qu'elles ne seront que très peu visibles depuis les remparts du château de Combourg, en raison des écrans bâtis, depuis le parc du château et l'étang de Combourg, en raison des écrans végétaux ou encore depuis les jardins remarquables du château de la Ballue, en raison des écrans végétaux et bâtis, ainsi que du relief. Enfin, il résulte de l'instruction, notamment des analyses relatives à la covisibilité du projet litigieux avec le parc éolien de Trémeheuc, que ces deux parcs seront peu visibles simultanément compte tenu de la distance d'une dizaine de kilomètres qui les sépare, de leur implantation sur des reliefs différents, et du contexte bocager environnant.

17. Il résulte des développements qui précèdent que les moyens tirés par les requérants de ce que les prescriptions de l'arrêté contesté seraient insuffisantes à prévenir les atteintes portées par le projet et de ce que le préfet d'Ille-et-Vilaine a fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'environnement doivent être rejetés.

18. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête, que l'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne " et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à l'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne " et autres de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne " et autres le versement à la société Boralex Energie Verte de la somme que celle-ci demande au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association " Environnement et Paysage en Haute-Bretagne " et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Boralex Energie Verte tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme G..., représentants uniques, à la société Boralex Energie Verte et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme C..., présidente-assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2020.

Le rapporteur,

C. C...Le président,

T. CELERIER

La greffière,

C. POPSE

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT02256


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02256
Date de la décision : 22/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SELARL VOLTA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-22;19nt02256 ?
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