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18/12/2020 | FRANCE | N°20NT02807

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 décembre 2020, 20NT02807


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 26 mai 2020 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a décidé son transfert aux autorités finlandaises, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2005514 du 19 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2020, M. C... A..., représenté par Me E... D..., demande à la cour :<

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1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 juin 2020 ;

2°) d'annuler le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 26 mai 2020 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a décidé son transfert aux autorités finlandaises, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2005514 du 19 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2020, M. C... A..., représenté par Me E... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 juin 2020 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 26 mai 2020 du préfet de Maine-et-Loire ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour d'une durée minimale d'un mois, dans le délai de huit jours à compter de la lecture de l'arrêt, et de transmettre sa demande d'asile à l'OFPRA ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

en ce qui concerne l'arrêté de transfert :

- il n'est pas suffisamment motivé ;

- il est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- l'arrêté procède d'une application manifestement erronée de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande ;

en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant réadmission en Finlande.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité afghane, né le 4 janvier 1994, déclarant être entré irrégulièrement en France le 21 décembre 2019, a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de police de Paris le 8 janvier 2020. Les recherches effectuées sur le fichier Eurodac ont fait apparaître qu'il avait sollicité l'asile auprès des autorités finlandaises le 29 novembre 2015. Les autorités finlandaises, saisies le 3 février 2020 sur le fondement du règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil n° 604/2013 du 26 juin 2013 pour une reprise en charge de l'intéressé, ont explicitement accepté la reprise en charge de M. A... par un courrier du 7 février 2020, sur le fondement du d) de l'article 18 de ce règlement. Le préfet de Maine-et-Loire a alors pris à son encontre, le 26 mai 2020, la décision de transfert litigieuse ainsi qu'une décision d'assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours renouvelable. Par un jugement du 19 juin 2020, dont M. A... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

En ce qui concerne la décision de transfert :

2. En premier lieu, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation, du vice de procédure au regard de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de la violation de l'article 5 du même règlement, que M. A... reprend en appel sans nouvelles précisions, doivent être écartés par adoption des motifs retenus aux points 4 à 12 du jugement attaqué.

3. En second lieu, aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Par ailleurs, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et qu'en principe cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

4. M. A... fait valoir que sa demande d'asile présentée en Finlande a été rejetée par les autorités de ce pays et que son recours formé en dernier lieu devant la Cour administrative suprême de Finlande a été rejeté par une décision du 27 novembre 2019. Il ajoute qu'en conséquence il va être reconduit en Afghanistan, pays où il craint pour son intégrité en raison notamment de son travail aux côtés des forces de l'Otan. Toutefois, d'une part, en principe, l'arrêté en litige a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Finlande et non dans son pays d'origine. D'autre part, la Finlande, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut de réfugié, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'intéressé ne produit par ailleurs pas d'élément de nature à établir qu'il existerait des raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques en Finlande dans la procédure d'asile ou que les juridictions finlandaises n'auraient pas traité sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties procédurales exigées par le respect du droit d'asile. Enfin, il ressort des motifs de la décision du tribunal administratif de Finlande orientale du 26 avril 2019, dont une traduction est produite, que les autorités finlandaises, après un examen précis des éléments du récit de M. A..., ont notamment considéré que le travail de gardien qu'il aurait exercé dans une base de l'OTAN, les menaces qui pèseraient sur lui et les risques qu'il encourrait en sa qualité de membre de l'ethnie hazara chiite étaient invoqués de manière trop concise et générale pour que leur réalité soit regardée comme établie. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le transfert du requérant en Finlande l'exposerait à un refoulement indirect vers son pays d'origine susceptible d'entraîner pour lui des traitements inhumains ou dégradants. Il n'est par ailleurs pas établi que l'intéressé ne pourrait, alors même que les autorités finlandaises ont rejeté sa demande d'asile et prévu en juin 2017 de le renvoyer dans son pays, faire utilement valoir tout nouvel élément tenant à sa situation personnelle, ou à celle régnant en Afghanistan, avant qu'il soit procédé à un éventuel éloignement après son transfert. Dès lors, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité.

En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

5. Il résulte des points 2 à 4 du présent arrêt que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir, à l'encontre de la décision prononçant son assignation à résidence, de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités finlandaises.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 26 mai 2020 du préfet de Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. B..., président assesseur,

- M. Jouno, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2020.

Le rapporteur,

C. B...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT02807


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02807
Date de la décision : 18/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : RODRIGUES-DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-18;20nt02807 ?
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