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04/12/2020 | FRANCE | N°20NT02254

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 04 décembre 2020, 20NT02254


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a décidé son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 2000486 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 23

juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoind...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a décidé son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 2000486 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 23 juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en réponse au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 :

- la décision préfectorale est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2020, le préfet de la Seine Maritime conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. G... A..., né en 1996 et de nationalité nigériane, entré irrégulièrement en France, a déposé une demande d'asile le 23 janvier 2020 auprès de la préfecture du Calvados. Les contrôles effectués ont révélé que M. A... a été identifié comme demandeur d'asile en Italie le 15 décembre 2015. Saisies par la France, les autorités italiennes ont explicitement accepté le transfert de M. A... le 12 février 2020 sur le fondement du d) du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 UE. Par un arrêté du 13 février 2020 le préfet de la Seine-Maritime a décidé la remise de M. A... aux autorités italiennes. Par un jugement du 23 juin 2020, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. En réponse au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 le premier juge a exposé avec suffisamment de précision au point 8 de son jugement les considérations de fait fondant son jugement. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de ce jugement en raison de son insuffisante motivation ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et qu'en principe cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

5. M. A... soutient que sa demande d'asile doit être examinée en France, où réside son épouse, ressortissante nigériane s'étant vu reconnaitre la qualité de réfugiée en France, ainsi que leur fille née le 20 février 2020 à Saint-Lô. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que les intéressés seraient mariés. Par ailleurs, pour établir leur vie commune M. A... se borne à produire le titre de séjour de Mme B... D..., ainsi que l'acte de naissance de leur fille mentionnant qu'il en est le père. Ces éléments n'établissent pas l'existence d'une vie de famille étant observé que M. A... ne serait arrivé en France qu'en janvier 2020 et que l'acte d'état-civil de la ville de Saint-Lô du 25 février 2020 fait état d'une domiciliation distincte des parents de l'enfant. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la faculté que lui accorde l'article 17 précité du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

6. En second lieu, il résulte de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Pour les motifs exposés au point 5, en l'état des pièces produites au dossier, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 février 2020 du préfet de la Seine-Maritime. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. G... A... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. C..., président de la formation de jugement,

- M. Jouno, premier conseiller,

- Mme F... première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 décembre 2020.

Le président rapporteur,

C. C...

L'assesseur le plus ancien,

T. Jouno

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 20NT02254


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02254
Date de la décision : 04/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : ABDOU-SALEYE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-04;20nt02254 ?
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