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27/11/2020 | FRANCE | N°20NT01021

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 27 novembre 2020, 20NT01021


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision en date du 9 mai 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision de l'autorité consulaire française à Oran lui refusant un visa d'établissement en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 1907827 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :
r>Par une requête enregistrée le 16 mars 2020 sous le n°20NT01021, M. D..., représenté par Me E...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision en date du 9 mai 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision de l'autorité consulaire française à Oran lui refusant un visa d'établissement en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 1907827 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2020 sous le n°20NT01021, M. D..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 janvier 2020 ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France du 9 mai 2019 et la décision de l'autorité consulaire ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de la commission de recours n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation quant à la réalité de l'intention matrimoniale ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la Cour a désigné Mme B..., présidente assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Pérez, président de la 2ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant algérien né le 20 octobre 1990, relève appel du jugement du 16 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 mai 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision de refus de visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, la décision litigieuse est fondée sur les articles L. 211-1 et L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, notamment son article 6, et sur les circonstances qu'il n'était pas établi que le couple ait un projet concret de vie commune ni que M. D..., entré irrégulièrement sur le territoire français, participe aux charges du mariage selon ses facultés propres, alors que sa conjointe française perçoit l'allocation adulte handicapé, que, par ailleurs, la communauté de vie entre les époux postérieurement à leur mariage ne saurait être tenue pour établie par la seule production du passeport de Mme H... C... attestant d'un voyage en Algérie et de témoignages émanant uniquement de proches de M. D... sur leur vie commune dans ce pays. La commission a déduit de ces éléments qu'un faisceau d'indices suffisamment précis et concordants attestait du caractère complaisant du mariage contracté à des fins étrangères à l'institution matrimoniale, dans le seul but de faciliter l'établissement du demandeur en France. Par suite, la décision contestée est suffisamment motivée et le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire afin que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir, par des éléments précis et concordants, que le mariage est entaché d'une telle fraude de nature à légalement justifier le refus de visa.

4. M. D... soutient que l'administration n'apporte pas la preuve du caractère complaisant de son mariage avec Mme C..., ressortissante française née le 27 mars 1969. Le ministre fait valoir qu'aucun élément ne justifie d'une vie commune avant 2018, que le mariage présente un caractère précipité, deux mois après l'édiction d'une obligation de quitter le territoire et que, lors des auditions des époux lors de l'enquête de police diligentée par le préfet, Mme C... a déclaré que M. D... avait présenté le projet de mariage en ces termes : " J'ai besoin de papiers pour travailler et avancer dans ma vie. Donc il faut que nous nous marrions. Va voir ma famille en Algérie. Si tu leur plais et s'ils te plaisent, on se marie. Sinon, je trouverai une autre française ". Si Mme C... conteste avoir tenu ces propos, expliquant qu'ils ont été déformés et qu'elle était impressionnée par cet entretien, fatiguée de devoir répondre aux questions répétées de son interlocuteur et avoir seulement déclaré " qu'il n'y avait pas que moi comme femme sur cette terre pour lui, mais que c'est moi qu'il a choisie ", ces dénégations ne permettent pas de remettre en cause la teneur du compte rendu d'audition, particulièrement précis et détaillé, qui indique également que Mme C... a expliqué que la démarche de [M. D...] était " tout à fait normale " et que " comme il n'avait pas de papiers, il fallait effectivement le régulariser pour qu'ils avancent dans la vie ". Dans ces conditions, alors même qu'il ressort des pièces du dossier que M. D... a vécu au domicile de Mme C... à compter du mois de mars 2018 et que le couple a maintenu des liens par messagerie et lors de deux voyages de Mme C... en 2019 en Algérie, en estimant que le mariage avait été contracté dans le seul but de favoriser l'établissement en France du demandeur, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas inexactement apprécié la situation de M. D... et l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'une fraude de nature à justifier légalement la décision en litige.

5. Il suit de là que la commission de recours n'a pas inexactement appliqué les dispositions précitées ni, pour les mêmes motifs, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :

7. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. D..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé à fin d'injonction, sous astreinte, doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. D... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme B..., présidente-assesseur,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2020.

L'assesseur le plus ancien,

M. G...

Le rapporteur,

H. B...

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT1021


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01021
Date de la décision : 27/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DOUET
Rapporteur ?: Mme Hélène DOUET
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : GAILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-27;20nt01021 ?
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