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10/11/2020 | FRANCE | N°19NT04722

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 10 novembre 2020, 19NT04722


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... G... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2018 par lequel le maire de la commune de Guidel a délivré à la SAS F.M.T. un permis d'aménager un lotissement comprenant 14 lots à bâtir sur un terrain situé au lieu-dit " Kerbrest ", parcelles cadastrées à la section YR n° 15 et n° 1081, ainsi que le rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n°s 1803464, 1803466, du 7 octobre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
>Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 décembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... G... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2018 par lequel le maire de la commune de Guidel a délivré à la SAS F.M.T. un permis d'aménager un lotissement comprenant 14 lots à bâtir sur un terrain situé au lieu-dit " Kerbrest ", parcelles cadastrées à la section YR n° 15 et n° 1081, ainsi que le rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n°s 1803464, 1803466, du 7 octobre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 décembre 2019, les 19 mai et 23 juillet 2020, M. G..., représenté par Me F..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1803464, 1803466, du 7 octobre 2019 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2018 par lequel le maire de la commune de Guidel a délivré à la SAS F.M.T. un permis d'aménager un lotissement comprenant 14 lots à bâtir sur un terrain situé au lieu-dit " Kerbrest ", parcelles cadastrées section YR n° 15 et n° 1081, ainsi que le rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Guidel la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que la somme de 13 euros de droits de plaidoirie au titre des dépens.

Il soutient que l'arrêté méconnaît l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme et méconnaît l'article 1AU1 et les orientations d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme ; le permis d'aménagement contesté ne pouvait être délivré avant la création et l'autorisation d'une voie de liaison entre le chemin de Danaé et la rue des terres fortes.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 mars, 6 juillet et 4 août 2020, la commune de Guidel et la SAS F.M.A..., représentées par Me H..., concluent au rejet de la requête, et à ce que soit mis à la charge de M. G... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- la requête d'appel est irrecevable en ce qu'elle ne respecte pas les formalités prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- M. G... n'a pas intérêt à agir contre la décision contestée ;

- aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant M. G..., et de Me E..., représentant la commune de Guidel et la société F.M.T.

Une note en délibéré, présentée pour la commune de Guidel et la SAS F.M.A..., a été enregistrée le 20 octobre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... G... est propriétaire d'une parcelle cadastrée à la section CN n°62, située sur le territoire de la commune de Guidel, au lieu-dit " Kerbrest ", et sur laquelle il exerce une activité d'élevage. Le 28 juillet 2017, la SAS F.M.T. a déposé à la mairie de Guidel une demande de permis d'aménager un lotissement comprenant 14 lots à bâtir sur la parcelle cadastrée à la section YR n° 15 et n° 1081, d'une superficie de 7 872 m², au lieu-dit " Kerbrest ". Par un arrêté du 23 janvier 2018 le maire de la commune de Guidel a délivré à la SAS F.M.T. le permis d'aménager sollicité. Le 20 juillet 2018, M. G... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cet arrêté et le rejet de son recours gracieux. Par un jugement du 7 octobre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande. M. G... relève appel de ce jugement.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Guidel :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. G... a régulièrement notifié sa requête d'appel à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation, conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Guidel doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dans sa version alors applicable : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ". Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le E... immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. M. G..., requérant en première instance, justifie être propriétaire d'une parcelle cadastrée à la section CN n°62, située sur le territoire de la commune de Guidel, au lieu-dit " Kerbrest ", à environ 110 mètres du projet litigieux, et sur laquelle il exerce une activité d'élevage d'agneaux. Au vu des caractéristiques de ce projet, comportant 14 lots à bâtir et impliquant la disparition d'un important massif végétal jouxtant son terrain, ainsi que la création d'une voirie de desserte et de liaison susceptible d'en modifier les conditions d'accès et de circulation, et de perturber le bien-être des animaux, la commune de Guidel n'est pas fondée à soutenir que la demande de M. G... n'était pas recevable aux motifs qu'il ne justifierait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour contester l'arrêté litigieux.

En ce qui concerne la compatibilité du projet avec l'orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme de la commune de Guidel :

5. Aux termes de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports, les déplacements et, en zone de montagne, sur les unités touristiques nouvelles (...) ". Aux termes du I de l'article L. 151-7 du même code, dans sa version alors applicable : " Les orientations d'aménagement et de programmation peuvent notamment : (...) 3° Comporter un échéancier prévisionnel de l'ouverture à l'urbanisation des zones à urbaniser et de la réalisation des équipements correspondants (...) ". Aux termes de l'article L. 152-1 du même code: " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols (...) sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation ". L'article 1AU 1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Guidel, relatif aux occupations et utilisation du sol interdites, vise : " Toute opération d'aménagement non compatible avec les conditions d'ouverture à l'urbanisation inscrites dans les orientations d'aménagement et de programmation ".

6. Le secteur de " Kerbrest ", où est situé le terrain d'assiette du projet, est couvert par une orientation d'aménagement et de programmation. Cette dernière dispose notamment, dans la partie intitulée " Les conditions d'aménagement " : " Ce secteur ne pourra toutefois être aménagé que sous condition que la voirie de liaison prévue en emplacement réservé n° 15 entre Kerbrest et la rue de la Danaé soit autorisée et créée ". Les auteurs du plan local d'urbanisme ont ainsi entendu conditionner l'aménagement du secteur de " Kerbrest " à l'existence préalable d'une voie de liaison bordant ce secteur au nord, sur l'emplacement réservé n° 15. Or, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, cette voirie de liaison sur l'emplacement réservé n°15 n'avait pas été créée, ni même autorisée. Si un projet urbain partenarial mentionnant cette voirie de liaison a été signé entre la société F.M.T., la société Lotimer et la commune de Guidel le 1er août 2017, cette convention n'a pas eu pour objet ou pour effet de créer, ni même d'autoriser, cette voie. Dans ces conditions, l'arrêté contesté délivrant le permis d'aménager est incompatible avec l'orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme de Guidel, eu égard à la teneur de ses dispositions.

7. Il résulte de ce qui précède que M. G... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2018 du maire de Guidel, ainsi que du rejet de son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. G..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la commune de Guidel d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

9. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Guidel le versement à M. G... d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais.

10. La somme demandée au titre des dépens correspond à des droits de plaidoirie qui ne sont pas au nombre des dépens énumérés par l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées à ce titre ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement nos 1803464, 1803466 du 7 octobre 2019 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 23 janvier 2018, par lequel le maire de la commune de Guidel a délivré à la SAS F.M.T. un permis d'aménager un lotissement comprenant 8 lots à bâtir sur un terrain situé au lieu-dit " Kerbrest ", parcelles cadastrées à la section YR n° 15 et n° 1081, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté, sont annulés.

Article 3 : La commune de Guidel versera la somme de 1 500 euros à M. G... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Guidel, à M. D... G..., et à la SAS F.M.T.

Copie en sera adressée au préfet du Morbihan et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lorient.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme C..., présidente-assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 19NT04722


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04722
Date de la décision : 10/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Alexis FRANCK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : QUENTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-10;19nt04722 ?
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