Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... B... G... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 février 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 28 novembre 2018 par laquelle les autorités consulaires françaises à Fès (Maroc) ont refusé de lui délivrer un visa dit " de retour ".
Par un jugement n° 1904985 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 novembre 2019 et 5 juin 2020, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1904985 du 24 octobre 2019 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision du 28 février 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 28 novembre 2018 par laquelle les autorités consulaires françaises à Fès (Maroc) ont refusé de lui délivrer un visa dit " de retour " ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité dans un délai de quinze jours sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les autorités administratives françaises étaient en situation de compétence liée pour lui délivrer le visa ;
- la date à laquelle s'est prononcée la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ne peut être retenue pour apprécier la péremption de son droit au séjour ;
- la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; il n'est pas resté volontairement au Maroc ; il n'a jamais perçu d'allocations familiales pendant qu'il était au Maroc ;
- la décision attaquée a été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. F... B... G... E..., ressortissant marocain né le 14 juin 1967, est titulaire d'une carte de résident en France valable pour une durée de dix ans, délivrée le 21 février 2013. Le 21 février 2016, M. E... a quitté le territoire français pour retourner au Maroc. Il a déposé, le 26 novembre 2018, une demande de visa dit " de retour " auprès des autorités consulaires à Fès. Cette demande a été rejetée par une décision du 28 novembre 2018. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision de refus de visa par une décision 28 février 2019. Le 11 mai 2019, M. E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cette dernière décision. Par un jugement du 24 octobre 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande. M. E... relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. D'une part, un étranger titulaire d'un titre l'autorisant à séjourner en France peut quitter le territoire national et y revenir tant que ce titre n'est pas expiré. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 314-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident d'un étranger qui a quitté le territoire français et a résidé à l'étranger pendant une période de plus de trois ans consécutifs est périmée (...) / La période mentionnée ci-dessus peut être prolongée si l'intéressé en a fait la demande soit avant son départ de France, soit pendant son séjour à l'étranger. "
3. M. E... est titulaire, depuis le 21 février 2013, d'une carte de résident valable pour une durée de dix ans. Il ressort de sa demande de visa qu'il a quitté le territoire français le 21 février 2016, et qu'il a sollicité un visa dit " de retour ", au plus tard, le 28 novembre 2018. Dans ces conditions, à la date du dépôt de sa demande de visa, et en dépit de ce qu'il avait perdu son titre, M. E..., dont la carte de résident n'était pas périmée, bénéficiait d'un droit au séjour sur le territoire français. Par suite, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ne pouvait légalement, quel que soit le motif invoqué, refuser la délivrance du visa sollicité.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
5. L'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. E... d'un visa de retour. Il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer ce visa dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. E... de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes 24 octobre 2019 est annulé.
Article 2 : La décision du 28 février 2019, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé devant elle contre la décision du consul général de France à Fès (Maroc) du 28 novembre 2018 rejetant la demande de visa dit " de retour " de M. E..., est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. E... le visa sollicité dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. E... une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B... G... E... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 16 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme C..., présidente-assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.
Le rapporteur,
A. A...Le président,
T. CELERIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT04265