La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/11/2020 | FRANCE | N°20NT00824

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 06 novembre 2020, 20NT00824


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 novembre 2019 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du même jour par laquelle le préfet l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1913650 du 18 décembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée

le 4 mars 2020, M. B... A... D..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) de l'admettre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 novembre 2019 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du même jour par laquelle le préfet l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1913650 du 18 décembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mars 2020, M. B... A... D..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire s'il n'a pas encore reçu de réponse ;

2°) d'annuler le jugement n° 1913650 du tribunal administratif de Nantes du 18 décembre 2019 ;

3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 28 novembre 2019 par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes et l'a assigné à résidence ;

4°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de reconnaitre la responsabilité de la France pour l'examen de sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demande d'asile portant la mention " demandeur d'asile en procédure normale " et le formulaire prévu par les dispositions de l'article R. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de cinq jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

. en ce qui concerne la décision portant transfert aux autorités italiennes :

- le signataire de la décision n'est pas compétent ;

o les arrêtés de transfert ne peuvent être signés que par le préfet du département accueillant un pôle régional Dublin, ou par délégation valablement constituée à un membre de l'effectif spécialement affecté à ce pôle régional Dublin ; la décision contestée a été signée par Mme C..., directrice de l'immigration et des relations avec les usagers, qui n'est pas affectée au service du pôle régional Dublin ; la délégation de signature est irrégulière puisque donnée à une personne qui n'est pas membre de ce pôle ;

o la délégation de signature est irrégulière puisqu'elle ne vise pas expressément l'arrêté de nomination de la personne qui reçoit délégation en application de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets ;

- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

o la décision est insuffisamment motivée en droit puisqu'elle ne permet pas de déterminer s'il a été fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; seules les pièces produites à l'appui des écritures en défense du préfet ont permis de comprendre que le préfet a considéré que l'Italie était responsable de la demande d'asile sur le fondement de l'article 13 paragraphe 1 du règlement ;

o la décision est insuffisamment motivée en fait puisqu'elle est stéréotypée ; elle ne tient pas compte du danger qu'il encourt en cas de retour en Italie ;

- il n'y a pas eu examen particulier de sa situation personnelle alors qu'il a présenté des pièces établissant qu'il était en danger en cas de remise aux autorités italiennes ;

- les dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues, en ce qui concerne le délai de trois jours entre la présentation de la demande à l'autorité compétente et l'enregistrement de la demande ; le retard dans l'enregistrement de la demande d'asile constitue une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ; en l'espèce, sa demande d'asile n'a été enregistrée que fin septembre 2019 trois mois après sa présentation en PADA ; le retard dans la prise en charge de sa demande d'asile a retardé la remise de l'attestation de demandeur d'asile et des droits afférents ; dès lors, les autorités italiennes doivent être considérées comme ayant été saisies hors du délai prévu par l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; le départ du délai de deux mois prévu par l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 a été artificiellement repoussée ;

- les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ; l'information requise ne lui a pas été délivrée en temps utile, puisqu'elle ne lui a été apportée qu'au cours de l'entretien alors que l'information devait lui être délivrée dès qu'une protection internationale est introduite au sens de l'article 20 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, soit dès sa convocation au GUDA et avant l'entretien ; les brochures d'information lui ont été remises à la fin de l'entretien, sans qu'on lui laisse le temps de les lire ou d'en prendre connaissance par le truchement de l'interprète ; il n'a pas pu porter à la connaissance de l'administration les raisons justifiant la mise en oeuvre de l'article 3 ou de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues :

o le préfet n'a apporté aucun élément permettant de vérifier la qualification de la personne ayant conduit l'entretien, en méconnaissance de l'article L. 744-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet ne peut apporter cette preuve si le nom de l'agent et sa qualité n'apparaissent pas sur le compte-rendu d'entretien ;

o l'entretien a été extrêmement sommaire ainsi que le montre son résumé ; aucune question précise ne lui a été posée et il n'a pu faire connaitre le refus des autorités italiennes d'enregistrer sa demande d'asile et les menaces dont il a fait l'objet en Italie ;

o les dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont également été méconnues ; il existe des doutes quant à la compétence de l'interprète puisqu'il n'a pu faire connaitre des éléments essentiels ;

o il n'est pas établi que les garanties de confidentialité de l'entretien individuel aient été respecté, le résumé de l'entretien ne comportant aucune mention permettant d'identifier le lieu où il s'est déroulé ;

o la finalité de l'entretien n'a pas été respectée et l'entretien n'a pas été conduit de façon sérieuse puisqu'il a été placé en procédure Dublin alors qu'il a précisé que les autorités italiennes avaient refusé d'enregistrer sa demande d'asile ;

- les dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues, ainsi que celles de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, en raison de la situation de défaillance systémique de l'asile en Italie ainsi qu'en raison des difficultés d'accès aux conditions matérielles des demandeurs d'asile, qui accèdent difficilement à un hébergement ou à des soins ; il existe en Italie un risque de ne pas avoir accès au droit d'asile dès lors que le dispositif est inefficace pour identifier, orienter et protéger les demandeurs d'asile et vise uniquement à un objectif d'identification des migrants entrant dans l'espace Schengen ; il y existe un risque réel de refoulement vers les pays où les personnes pourraient être soumises à des violations des droits humains ; les personnes susceptibles de demander l'asile n'arrivent pas à accéder aux administrations compétentes en Italie ; il n'a pu présenter de demande d'asile en Italie, où seules ses empreintes ont été prises ;

- il n'y a pas eu examen de sa situation particulière au regard de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; il n'y a pas eu de garanties procédurales en cas de renvoi vers l'Italie ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 :

o l'accès aux conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile transférés en Italie est défaillant ;

o les autorités italiennes ont refusé d'enregistrer sa demande d'asile ;

o il existe un risque de renvoi par ricochet vers l'Egypte et le risque d'y subir des atteintes graves à ses droits et libertés fondamentaux ;

. en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant transfert auprès des autorités italiennes ;

- le signataire de la décision est incompétent pour les mêmes motifs que ceux développés à l'encontre de l'arrêté de transfert ;

- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 561-2 du code ;

- la décision est entachée d'erreur d'appréciation ; les obligations mises à sa charge en application de l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont disproportionnées ; la fréquence de l'obligation de présentation, trois jours sur cinq, est disproportionnée alors qu'il n'existe aucune crainte avérée de fuite ;

- l'obligation qui lui est faite de se présenter avec ses effets personnels est dépourvue de base légale et méconnait l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le délai de réadmission de M. A... D... vers l'Italie a été reporté au 19 juin 2020 ;

- les moyens soulevés par M. A... D... ne sont pas fondés.

M. A... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 4 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme F..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... D..., ressortissant égyptien né en mai 1988, est entré en France en juin 2019. Il a déposé une demande d'asile qui a été enregistrée le 23 septembre 2019. Par une décision du 28 novembre 2019, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile, et par une décision du même jour, a également prononcé son assignation à résidence dans le département de la Loire-Atlantique entre le 9 décembre 2019 et le 23 janvier 2020. M. A... D... relève appel du jugement du 18 décembre 2019 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 28 novembre 2019.

Sur l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ".

3. M. A... D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 4 février 2020. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur sa demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Sur l'étendue du litige :

4. Le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 fixe, à ses articles 7 et suivants, les critères à mettre en oeuvre pour déterminer, de manière claire, opérationnelle et rapide, l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile. La mise en oeuvre de ces critères peut conduire, le cas échéant, à une demande de prise ou reprise en charge du demandeur, formée par l'Etat membre dans lequel se trouve l'étranger, dénommé " Etat membre requérant ", auprès de l'Etat membre que ce dernier estime être responsable de l'examen de la demande d'asile, ou " Etat membre requis ". En cas d'acceptation de ce dernier, l'Etat membre requérant prend, en vertu de l'article 26 du règlement, une décision de transfert, notifiée au demandeur, à l'encontre de laquelle ce dernier dispose d'un droit de recours effectif, en vertu de l'article 27, paragraphe 1, du règlement. Aux termes du paragraphe 3 du même article : " Aux fins des recours contre des décisions de transfert ou des demandes de révision de ces décisions, les États membres prévoient les dispositions suivantes dans leur droit national : / a) le recours ou la révision confère à la personne concernée le droit de rester dans l'État membre concerné en attendant l'issue de son recours ou de sa demande de révision (...) ". Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant ".

5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen (...) ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". En vertu du II du même article, lorsque la décision de transfert est accompagnée d'un placement en rétention administrative ou d'une mesure d'assignation à résidence notifiée simultanément, l'étranger dispose d'un délai de 48 heures pour saisir le président du tribunal administratif d'un recours et ce dernier dispose d'un délai de 96 heures pour statuer. Aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code prévoit que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".

6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, a été notifié à l'administration, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

7. La requête de M. A... D... devant le tribunal administratif de Nantes a interrompu le délai de six mois fixé par l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Italie. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification au préfet de Maine-et-Loire du jugement de ce tribunal administratif et n'a pas été interrompu par l'appel de M. A... D.... Il ressort des pièces du dossier que le jugement n° 1913650 du tribunal administratif de Nantes a été notifié à l'administration le 19 décembre 2019 et est donc expiré depuis le 19 juin 2020. A la date de lecture du présent arrêt, la France est donc devenue responsable de l'examen de la demande de protection de M. A... D.... Les conclusions de l'intéressé tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes sont donc privées d'objet. Il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

8. L'arrêté portant assignation à résidence de l'intéressé ayant été exécuté et ayant produit des effets, il y a lieu de statuer sur les conclusions tendant à son annulation.

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision portant transfert auprès des autorités italiennes :

9. En premier lieu, l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sans préjudice du second alinéa de l'article 11-1 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004, l'autorité compétente pour renouveler l'attestation de demande d'asile en application de l'article L. 742-1, procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile, assigner à résidence un demandeur d'asile en application du 1° bis du I de l'article L. 561-2 et prendre une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police (...) ". Par ailleurs, l'article 11-1 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que " Le préfet de département est compétent en matière d'entrée et de séjour des étrangers ainsi qu'en matière de droit d'asile. / En matière d'asile, un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'asile peut donner compétence à un préfet de département et, à Paris, au préfet de police pour exercer ces missions dans plusieurs départements ". L'article 2 de l'arrêté du 10 mai 2019 désignant les préfets compétents pour enregistrer les demandes d'asile et déterminer l'Etat responsable de leur traitement, en métropole, dispose que : " L'annexe II au présent arrêté fixe la liste des préfets compétents pour procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile. A cette fin, les préfets désignés sont compétents pour : / 1° Renouveler l'attestation de demande d'asile en application de l'article L. 742-1 du code précité ; / 2° Prendre la décision de transfert en application de l'article L. 742-3 du même code ; / 3° Assigner à résidence le demandeur en application du I - 1° bis de l'article L. 561-2 du même code et, le cas échéant, prendre les mesures prévues au II de l'article L. 561-2 et aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 742-2 du code précité./ Cette annexe précise en outre les départements dans lesquels chacun de ces préfets est compétent ". L'article 6 de ce même arrêté dispose, quant à lui, que " Les dispositions du présent arrêté sont applicables aux demandes d'asile enregistrées à compter de la publication du présent arrêté ". Enfin, l'annexe II à cet arrêté prévoit que le préfet de Maine-et-Loire est compétent " pour les demandes concernant les demandeurs domiciliés dans un département de la région Pays de la Loire ".

10. Par ailleurs, l'article 43 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que : " Le préfet de département peut donner délégation de signature, notamment en matière d'ordonnancement secondaire : (...) / 2° Pour les matières relevant de leurs attributions, aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département ; ces chefs de service peuvent recevoir délégation afin de signer les lettres d'observation valant recours gracieux adressées aux collectivités territoriales ou à leurs établissements publics ; / (...) 7° Aux agents en fonction dans les préfectures, pour les matières relevant des attributions du ministre de l'intérieur, y compris les lettres d'observation valant recours gracieux formés auprès des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, pour les matières relevant des ministères qui ne disposent pas de services dans le département ainsi que pour la transformation en états exécutoires des ordres de recettes mentionnés aux articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (...) ".

11. L'arrêté portant transfert de M. A... D... aux autorités italiennes a été signé, pour le compte du préfet de Maine-et-Loire et par délégation, par Mme C..., directrice de l'immigration et des relations avec les usagers. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 8 octobre 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 11 octobre 2019, le préfet de Maine-et-Loire a donné délégation à Mme C... pour signer " j) les décisions d'application du règlement Dublin III (arrêtés de transfert, assignations à résidence) ". Contrairement à ce que soutient le requérant, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au préfet de Maine-et-Loire d'accorder une délégation pour signer les décisions prises en application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 uniquement aux agents du pôle régional Dublin installé au sein des services de sa préfecture. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que cet arrêté vise la nomination de l'agent bénéficiaire de la délégation. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté comme manquant en fait.

12. En deuxième lieu, en vertu du paragraphe 1 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, lorsqu'une telle demande est présentée, un seul Etat, parmi ceux auxquels s'applique ce règlement, est responsable de son examen. Cet Etat, dit Etat membre responsable, est déterminé en faisant application des critères énoncés aux articles 7 à 15 du chapitre III du règlement ou, lorsqu'aucun Etat membre ne peut être désigné sur la base de ces critères, du premier alinéa du paragraphe 2 de l'article 3 de son chapitre II. Si l'Etat membre responsable est différent de l'Etat membre dans lequel se trouve le demandeur, ce dernier peut être transféré vers cet Etat, qui a vocation à le prendre en charge. Lorsqu'une personne a antérieurement présenté une demande d'asile sur le territoire d'un autre Etat membre, elle peut être transférée vers cet Etat, à qui il incombe de la reprendre en charge, sur le fondement des b), c) et d) du paragraphe 1 de l'article 18 du chapitre V et du paragraphe 5 de l'article 20 du chapitre VI de ce même règlement.

13. En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.

14. Ainsi, doit notamment être regardée comme suffisamment motivée, s'agissant d'un étranger en provenance d'un pays tiers ou d'un apatride ayant, au cours des douze mois ayant précédé le dépôt de sa demande d'asile, pénétré irrégulièrement au sein de l'espace Dublin par le biais d'un Etat membre autre que la France, la décision de transfert à fin de prise en charge qui, après avoir visé le règlement, fait référence à la consultation du fichier Eurodac sans autre précision, une telle motivation faisant apparaître que l'Etat responsable a été désigné en application du critère énoncé à l'article 13 du chapitre III du règlement.

15. La décision litigieuse de transfert de M. A... D... auprès des autorités italiennes vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier son article L. 742-3. La décision de transfert qui, après avoir, ainsi qu'il a été dit, visé le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, a relevé que M. A... D... a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique le 23 septembre 2019, et que les recherches entreprises sur le fichier Eurodac ont fait apparaître que l'intéressé avait franchi irrégulièrement les frontières italiennes moins de douze mois avant le dépôt de sa première demande d'asile, doit être regardée comme suffisamment motivée, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement. La décision comporte ainsi un exposé détaillé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de Maine-et-Loire s'est fondé pour considérer l'Italie comme responsable de l'examen de la demande d'asile de M. A... D..., en l'absence de risques particuliers encourus dans ce pays, et décider son transfert auprès des autorités de ce pays, et ne présente pas, contrairement à ce que soutient l'intéressé, un caractère stéréotypé. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision ne satisferait pas à l'exigence légale de motivation doit être écarté.

16. En troisième lieu, l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Tout demandeur reçoit, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, une information sur ses droits et obligations en application dudit règlement, dans les conditions prévues à son article 4. (...) / L'enregistrement a lieu au plus tard trois jours ouvrés après la présentation de la demande à l'autorité administrative compétente, sans condition préalable de domiciliation. Toutefois, ce délai peut être porté à dix jours ouvrés lorsqu'un nombre élevé d'étrangers demandent l'asile simultanément. / (...) Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. La durée de validité de l'attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l'asile. (...) ".

17. Les décisions par lesquelles l'autorité administrative décide de transférer un étranger à l'État compétent pour examiner sa demande d'asile ne sont pas prises pour l'application de la mesure par laquelle le préfet lui a, en début de procédure, délivré une attestation de demande d'asile. L'enregistrement de la demande d'asile matérialisé par la délivrance d'une telle attestation ne constitue pas davantage la base légale de la décision de transfert. Par suite, le moyen, soulevé par M. A... D..., tiré de la tardiveté de l'enregistrement de sa demande d'asile au regard des dispositions précitées ne peut être utilement invoqué à l'appui du recours dirigé contre la décision le transférant en Italie, État responsable de l'examen de sa demande de protection internationale.

18. En quatrième lieu, l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " 1. L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur. / Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif (" hit ") Eurodac avec des données enregistrées en vertu de l'article 14 du règlement (UE) n° 603/2013, la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif en vertu de l'article 15, paragraphe 2, dudit règlement. /Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéas, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'État membre auprès duquel la demande a été introduite (...) ". Par ailleurs, l'article 20 du même règlement dispose que : " (...) 2. Une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur ou un procès-verbal dressé par les autorités est parvenu aux autorités compétentes de l'État membre concerné. (...) ".

19. La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit, dans l'arrêt C-670/16 du 26 juillet 2017 Mengesteab, que le paragraphe 2 de l'article 20 du règlement (UE) n° 604/2013 devait être interprété en ce sens qu'une demande de protection internationale est réputée introduite lorsqu'un document écrit, établi par une autorité publique et attestant qu'un ressortissant de pays tiers a sollicité la protection internationale, est parvenu à l'autorité chargée de l'exécution des obligations découlant de ce règlement et, le cas échéant, lorsque seules les principales informations figurant dans un tel document, mais non celui-ci ou sa copie, sont parvenues à cette autorité. La cour a également précisé, dans cet arrêt, que, pour pouvoir engager efficacement le processus de détermination de l'État responsable, l'autorité compétente a besoin d'être informée, de manière certaine, du fait qu'un ressortissant de pays tiers a sollicité une protection internationale, sans qu'il soit nécessaire que le document écrit dressé à cette fin revête une forme précisément déterminée ou qu'il comporte des éléments supplémentaires pertinents pour l'application des critères fixés par le règlement Dublin III ou, a fortiori, pour l'examen au fond de la demande, et sans qu'il soit nécessaire à ce stade de la procédure qu'un entretien individuel ait déjà été organisé (point 88).

20. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'accusé de réception généré par l'application " Dublinet ", que les autorités italiennes ont été saisies d'une demande de prise en charge de M. A... D... le 25 septembre 2019. Si l'intéressé soutient que le délai de deux mois prévu par les dispositions du deuxième alinéa du 1 de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 entre l'introduction de sa demande d'asile auprès d'une structure de pré-accueil des demandeurs d'asile et la saisine des autorités italiennes a été dépassé, il n'apporte aucune justification, ni même aucune précision quant à la date à laquelle il aurait été reçu en structure de pré-accueil et aurait ainsi manifesté son intention de demander l'asile en France. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1 de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

21. En cinquième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ".

22. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.

23. Il ressort des pièces du dossier que M. A... D... a reçu, le 23 septembre 2019, date à laquelle il a présenté sa demande d'asile en préfecture de Loire-Atlantique, les informations prévues par les dispositions précitées, dès lors qu'il s'est vu délivrer le guide du demandeur d'asile, ainsi que la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - Quel pays sera responsable de ma demande ' " et la brochure B intitulée : " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " en arabe, langue qu'il a déclaré comprendre dès l'instruction de sa demande d'asile et lors de son entretien individuel. Il ressort en outre du compte-rendu d'entretien sur lequel il a apposé sa signature que les informations contenues dans l'ensemble de ces trois documents lui ont également été communiquées oralement et qu'il a reconnu les avoir comprises. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

24. En sixième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ". Par ailleurs, l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. / En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes mentionnées à l'article L. 111-9 ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger ". Par ailleurs, l'article L. 744-6 du même code dispose que : " A la suite de la présentation d'une demande d'asile, l'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de procéder, dans un délai raisonnable et après un entretien personnel avec le demandeur d'asile, à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer, le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d'accueil. Ces besoins particuliers sont également pris en compte s'ils deviennent manifestes à une étape ultérieure de la procédure d'asile. Dans la mise en oeuvre des droits des demandeurs d'asile et pendant toute la période d'instruction de leur demande, il est tenu compte de la situation spécifique des personnes vulnérables. / L'évaluation de la vulnérabilité vise, en particulier, à identifier les mineurs, les mineurs non accompagnés, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les femmes enceintes, les parents isolés accompagnés d'enfants mineurs, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes atteintes de maladies graves, les personnes souffrant de troubles mentaux et les personnes qui ont subi des tortures, des viols ou d'autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, telles que des mutilations sexuelles féminines. / L'évaluation de la vulnérabilité du demandeur est effectuée par des agents de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ayant reçu une formation spécifique à cette fin (...) ".

25. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. A... D... qu'il a bénéficié le 23 septembre 2019, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en langue arabe, que l'intéressé a déclaré comprendre, avec le concours par téléphone d'une interprète, dont l'identité est portée sur le compte rendu d'entretien, intervenant pour le compte de l'AFTCom et dont aucun élément ne permet de douter de la compétence. Il n'est pas établi que le requérant n'aurait pas été en capacité de comprendre les informations qui lui ont été délivrées et de faire valoir toutes observations utiles relatives à sa situation, notamment en Italie, au cours de l'entretien, ainsi que cela ressort du compte-rendu qui en a été établi. D'autre part, le fait que l'entretien individuel n'aurait duré qu'une quinzaine de minutes ne suffit pas à démontrer qu'il ne se serait pas tenu dans des conditions conformes aux exigences de l'article 5 précité. Par ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national et dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité. En outre, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent ayant conduit l'entretien n'a pas privé le requérant de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien individuel. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 et des dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas fondé et doit être écarté. Enfin, la circonstance, à la supposer établie, que l'intéressé n'a pas fait l'objet de l'évaluation prévue pour déterminer les besoins particuliers en matière d'accueil, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté portant transfert aux autorités italiennes. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 744-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.

26. En septième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable (...) ". Par ailleurs, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dispose que : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

27. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation de M. A... D... et des conséquences de sa réadmission en Italie au regard notamment des garanties exigées par le respect du droit d'asile et des risques encourus.

28. M. A... D... fait état de l'existence de défaillances affectant les conditions d'accueil et de prise en charge des demandeurs d'asile en Italie et du fait que les autorités italiennes auraient refusé d'enregistrer sa demande d'asile, mais les documents qu'il produit à l'appui de ces affirmations ne permettent pas de tenir pour établi que sa demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que l'Italie est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, il ne démontre pas davantage qu'il n'a pu présenter de demande d'asile dans ce pays, ni qu'il serait exposé au risque de subir en Italie des traitements contraires aux dispositions des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et que la décision de transfert méconnaîtrait ainsi l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.

29. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)".

30. M. A... D... ne produit aucun document permettant de démontrer qu'il serait dans une situation de particulière vulnérabilité imposant d'instruire sa demande d'asile en France. Il n'établit notamment ni que les autorités italiennes auraient refusé d'enregistrer sa demande d'asile lorsqu'ils se trouvait sur leur territoire, ni qu'il encourrait un risque de renvoi en Egypte sans examen des risques qu'il pourrait encourir dans son pays d'origine. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité.

31. Il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision du 28 novembre 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes doit être écarté.

En ce qui concerne les autres moyens :

32. L'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ; (...) / Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I, ou trois fois pour les cas relevant du 1° bis (...) ". L'article L. 561-1 du même code dispose que : " (...) La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée (...) ".

33. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10 du présent arrêt.

34. En deuxième lieu, la décision portant assignation à résidence de M. A... D... comporte l'exposé des considérations de droit et de fait qui la fondent. Elle est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

35. En dernier lieu, l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application des articles L. 561-1, L. 561-2, L. 744-9-1 ou L. 571-4 ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5 est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés. / Toutefois, lorsque l'étranger est assigné à résidence en application de l'article L. 561-1 au titre du 5° de cet article ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5, l'autorité administrative peut fixer à quatre au plus le nombre de présentations quotidiennes. La même autorité administrative est compétente pour désigner à l'étranger assigné à résidence, en application de l'article L. 561-1, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside ".

36. Il résulte des dispositions précitées que le préfet a pu, sans entacher sa décision d'un défaut de base légale, assortir sa décision d'assignation à résidence de M. A... D... l'obligation pour celui-ci de se présenter les mardis, mercredis et jeudis, à l'exception des jours fériés, aux services du commissariat de police de Nantes, à 8 heures du matin, muni de ses effets personnels. Par ailleurs, il n'est pas démontré que cette obligation et ses modalités présenteraient pour le requérant un caractère disproportionné. Par suite, les moyens tirés du défaut de base légale et de l'erreur manifeste d'appréciation qui entacheraient la décision d'assignation doivent être écartés.

37. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2019 portant assignation à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

38. Si, compte tenu de la caducité de la décision de transfert contestée, la France est l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile présentée par M. A... D..., le présent arrêt, n'implique par lui-même aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

39. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... D... au profit de son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... D... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et aux fins d'annulation de la décision du 28 novembre 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... D... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... D..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme F..., première conseillère.

Lu en audience publique le 6 novembre 2020.

La rapporteure,

M. F...Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00824


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00824
Date de la décision : 06/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : GUINEL-JOHNSON

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-06;20nt00824 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award