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20/10/2020 | FRANCE | N°19NT03633

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 20 octobre 2020, 19NT03633


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé devant elle contre la décision implicite des autorités consulaires françaises à Bagdad (Irak) rejetant les demandes de visas d'entrée et de long séjour en France formulées pour ses parents, M. E... F... et Mme B... F..., sa soeur, Mme J... E..., et son neveu, M. I....

Par un jugement

n° 1809570 du 7 mars 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé devant elle contre la décision implicite des autorités consulaires françaises à Bagdad (Irak) rejetant les demandes de visas d'entrée et de long séjour en France formulées pour ses parents, M. E... F... et Mme B... F..., sa soeur, Mme J... E..., et son neveu, M. I....

Par un jugement n° 1809570 du 7 mars 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2019, M. C... E..., représenté par Me Poulard, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1809570 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé devant elle contre la décision implicite des autorités consulaires françaises à Bagdad (Irak) rejetant les demandes de visas d'entrée et de long séjour en France formulées pour ses parents, M. E... F... et Mme B... F..., sa soeur, Mme J... E..., et son neveu, M. I... ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités, à défaut, de procéder au réexamen des demandes, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la requête formée en première instance était recevable ; il produit, en appel, l'accusé de réception justifiant de ce qu'il a saisi la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France d'un recours préalable obligatoire ;

- la décision contestée n'est pas motivée ;

- l'absence de motivation révèle l'absence d'examen personnalisée de sa situation personnelle ;

- la commission de recours a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; il bénéficie du statut de réfugié ; sa famille est exposée à des risques, et souhaite demander l'asile en France ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, qu'elle méconnaît.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frank,

- et les conclusions de M. Mas, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... E... est un ressortissant irakien né le 1er mai 1975. Il est entré en France en 2014, avec sa femme et ses six enfants, sous couvert de visas de court séjour, et a obtenu le statut de réfugié au cours de l'année 2015. Le 27 juillet 2017, les parents de M. C... E..., M. E... F... et Mme B... F..., sa soeur, Mme J... E..., et son neveu, M. I..., ressortissants irakiens nés respectivement les 1er juillet 1942, 30 décembre 1954, 16 décembre 1970 et 28 septembre 1990, ont sollicité la délivrance de visas de long séjour auprès des autorités consulaires de France à Bagdad (Irak), afin de solliciter l'asile en France. Cette demande a été implicitement rejetée. Ils ont formé un recours préalable contre cette décision consulaire devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, implicitement rejeté. Le 15 octobre 2018, M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cette dernière décision. Par un jugement du 7 mars 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. M. E... relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Le tribunal administratif a rejeté comme irrecevable la demande de M. C... E... tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, au motif qu'il ne justifiait pas, malgré la fin de non-recevoir opposée par le ministre en ce sens, avoir saisi ladite commission du recours préalable obligatoire prévu par l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. C... E... établit toutefois, dans sa requête d'appel, avoir formulé ledit recours le 6 novembre 2017, lequel a été réceptionné par la sous-direction des visas, le 9 novembre 2017. Le ministre, qui n'a pas produit de mémoire en défense en appel, s'est borné à faire valoir en première instance que la commission de recours n'a pas reçu un tel recours préalable, lequel n'a donc pas été examiné. Par suite, M. C... E... est fondé à soutenir que la décision implicite contestée n'a pas été précédée d'un examen personnalisé de la situation des demandeurs.

3. Il résulte de ce qui précède que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant la demande de visa présentée pour M. E... F..., Mme B... F..., Mme J... E..., et M. I...,

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique seulement qu'il soit procédé au réexamen de la demande de M. E... F..., Mme B... F..., Mme J... E..., et M. I.... Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder audit réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Sur les frais liés au litige:

5. M. E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Poulard de la somme de 800 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1809570 du 7 mars 2019 du tribunal administratif de Nantes et la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, refusant de délivrer à M. E... F..., Mme B... F..., Mme J... E... et M. I... un visa de long séjour, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de la demande de visa dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : L'Etat versera à Me Poulard la somme de 800 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. C... E... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente-assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2020.

Le rapporteur,

A. FrankLe président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03633


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03633
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : POULARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-10-20;19nt03633 ?
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