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22/09/2020 | FRANCE | N°19NT03114

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 22 septembre 2020, 19NT03114


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... G... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 octobre 2016 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours du 20 juillet 2016 dirigé contre la décision des autorités consulaires françaises à Lima (Pérou) lui refusant la délivrance de visas d'entrée et de long séjour en qualité de visiteur, ainsi que, par voie de conséquence, la décision consulaire.

Par un jugement n°1609506 du

29 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure dev...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... G... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 octobre 2016 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours du 20 juillet 2016 dirigé contre la décision des autorités consulaires françaises à Lima (Pérou) lui refusant la délivrance de visas d'entrée et de long séjour en qualité de visiteur, ainsi que, par voie de conséquence, la décision consulaire.

Par un jugement n°1609506 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée 29 juillet 2019, Mme A... G... D..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1909506 du 29 mai 2019 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 19 octobre 2016 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de visa d'entrée et de long séjour, ainsi que la décision consulaire ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- la décision contestée n'est pas suffisamment motivée, alors même qu'elle entre dans le champ d'application du 1° et 2° de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; Mme D... est à la charge exclusive de sa tante, qui l'a adoptée, et qui a les ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins ; elle ne saurait être privée de son droit de vivre avec sa mère adoptive en France ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le jugement du tribunal administratif de Nantes est entachée d'une erreur de droit, dès lors qu'elle remplissait toutes les conditions pour se voir délivrer un visa long séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Par une décision n°2019/014301 du 16 juillet 2019, le président de la section du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes chargée d'examiner les demandes relatives aux affaires portées devant la cour a rejeté sa demande d'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le décret no 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... G... D... est une ressortissante péruvienne née le 6 novembre 1990. Elle a été adoptée par sa tante, Mme F... D..., ressortissante française, par acte notarié du 3 juin 2010 au Pérou. Par jugement du 11 mars 2013, le tribunal de grande instance de Toulouse a déclaré exécutoire ladite adoption sur le territoire français. Le 14 juin 2016, elle a sollicité auprès des autorités consulaires françaises à Lima un visa de long séjour portant la mention " visiteur " qui lui a été refusé par une décision du 2 août 2016. Elle a formé un recours préalable contre cette décision consulaire, lequel a été rejeté par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France par une décision du 19 octobre 2016. Le 14 novembre 2016, Mme D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cette dernière décision, ainsi que, par voie de conséquence, la décision consulaire. Par un jugement du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. Mme D... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Par dérogation aux dispositions du titre Ier du livre II du code des relations entre le public et l'administration, les décisions de refus de visa d'entrée en France, prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, ne sont pas motivées sauf dans les cas où le visa est refusé à un étranger appartenant à l'une des catégories suivantes et sous réserve de considérations tenant à la sûreté de l'Etat : / 1° Membres de la famille de ressortissants des Etats membres de l'Union européenne et des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen qui ne sont pas ressortissants de l'un de ces Etats, appartenant à des catégories définies par décret en Conseil d'Etat ; / 2° Conjoints, enfants de moins de vingt et un ans ou à charge, et ascendants de ressortissants français ; / 3° Enfants mineurs ayant fait l'objet, à l'étranger, d'une décision d'adoption plénière au profit de personnes titulaires d'un agrément pour adoption délivré par les autorités françaises ; / ". Il résulte de la combinaison des 1° et 2° de ces dispositions que les membres de familles de ressortissants français, qui sont spécialement visés par le 2°, n'entrent pas dans le champ d'application du 1°, qui ne s'applique par conséquent qu'aux membres de la famille de ressortissants d'Etats membres de l'Union européenne autres que la France. Dès lors l'intéressée, nièce d'une ressortissante française, ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 1° de l'article L. 211-2 pour soutenir que la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de lui délivrer un visa aurait dû être motivée. De plus, la requérante, adoptée par un acte notarié du 3 juin 2010 et âgée de 25 ans à la date de la décision attaquée, ne relève pas du champ d'application des dispositions du 2° ou du 3° de l'article L. 211-2, dont elle ne saurait davantage se prévaloir. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ne répond pas à l'exigence de motivation imposée par l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut qu'être écarté comme inopérant.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment du mémoire en défense du ministre de l'intérieur en première instance, que pour refuser de délivrer le visa de long séjour sollicité par Mme D..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le motif tiré de ce que l'intéressée ne justifiait pas de ressources suffisantes afin de prendre en charge les frais liés à son séjour en France. Mme D..., qui s'est déclarée sans emploi lors de sa demande de visa, ne soutient pas disposer de ressources propres pour subvenir à ses besoins, et indique être à la charge de Mme F... D..., sa tante et mère adoptive de nationalité française. Toutefois, si celle-ci lui apporte une aide financière régulière, la requérante n'établit pas, par la seule production d'attestations de la caisse d'assurance maladie, pour le mois de juin 2016, et de la caisse d'allocations familiales, pour le mois de juillet 2016, de versements de prestations sociales à hauteur respective de 685 euros et de 573 euros, que Mme F... D... disposait, à la date de la décision attaquée, de revenus suffisants et stables pour financer un long séjour de l'intéressée. La circonstance, postérieure à la décision attaquée, que la requérante aurait séjourné en France pendant trois mois, du 29 janvier 2017 au 28 avril 2017, laquelle n'est pas établie, ne peut en tout état de cause être utilement invoquée pour justifier de ce qu'elle dispose de ressources suffisantes à l'appui de la demande du visa sollicité. Enfin, si Mme D... indique que sa tante et mère adoptive " possède " un appartement de 40 m2, elle n'établit pas la réalité de cette allégation. En tout état de cause, elle ne soutient pas ni même n'allègue que l'occupation de ce logement n'engage aucun frais à la charge de sa tante et mère adoptive. Par suite, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de délivrer le visa sollicité pour le motif précédemment mentionné.

4. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et sa correspondance. (...) ". Il ressort des pièces du dossier que Mme D... était âgée de 25 ans à la date de la décision contestée, et a toujours vécu au Pérou, pays où elle n'est pas dépourvue d'attache personnelle et où réside notamment sa mère biologique, avec laquelle elle indique entretenir des relations, ainsi que son père. Elle n'établit par ailleurs pas que sa tante et mère adoptive serait dans l'impossibilité de lui rendre visite au Pérou. Elle soutient même qu'elle lui rend régulièrement visite dans ce pays. Dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle. Par conséquent, les moyens soulevés en ce sens doivent être écartés.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Dès lors, sa requête d'appel doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et, en tout état de cause, celles présentées par son conseil sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... G... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... G... D... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme C..., présidente-assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 septembre 2020.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03114


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03114
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : GAILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-09-22;19nt03114 ?
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