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22/09/2020 | FRANCE | N°19NT01198

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 22 septembre 2020, 19NT01198


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2016 par lequel le préfet du Finistère a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles " Ouest Odet ", à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il concerne la commune de l'Ile-Tudy.

Par un jugement n° 1604075 du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoi

re enregistrés les 25 mars 2019 et 9 mars 2020, M. et Mme D..., représentés par Me B..., demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2016 par lequel le préfet du Finistère a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles " Ouest Odet ", à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il concerne la commune de l'Ile-Tudy.

Par un jugement n° 1604075 du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 25 mars 2019 et 9 mars 2020, M. et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2016 du préfet du Finistère, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il concerne la commune de l'Ile-Tudy ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité ; la minute du jugement ne comporte pas la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience ; les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ont donc été méconnues ;

- les dispositions de l'article R. 562-3 du code de l'environnement ont été méconnues ; les cartes de zonage ne sont pas d'une précision suffisante pour que les parcelles cadastrales puissent y être individuellement identifiées ;

- le classement de leur parcelle cadastrée AB 1020 en zone " rouge " du plan est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; cette parcelle n'a jamais fait l'objet d'une inondation ; il existe une évolution considérable du classement de leur parcelle entre le plan de prévention des risques de submersion marine de 1997, autorisant les constructions sous réserve de certaines conditions, et le plan litigieux qui prohibe toute construction nouvelle destinée à l'habitat en zone rouge, sans modification dans les circonstances de fait ; en outre, le plan contesté autorise en zone rouge, donc dans des zones prétendument vulnérables, les extensions des maisons d'habitation ; ce zonage est inadapté aux caractéristiques de leur parcelle qui est entourée de maisons d'habitation ; des permis de construire ont été délivrés pour des projets situés à proximité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2020, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., pour M. et Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. et Mme D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2016 par lequel le préfet du Finistère a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles " Ouest Odet ", à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il concerne la commune de l'Ile-Tudy. M. et Mme D... relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ". Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité au regard de ces dispositions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage (...) ; 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages (...) pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions (...)qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. (...) ". Selon l'article L. 562-4 de ce code : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan local d'urbanisme, conformément à l'article L. 153-60 du code de l'urbanisme. (...) ". Aux termes de l'article R. 562-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le dossier de projet de plan comprend : (...) 2° Un ou plusieurs documents graphiques délimitant les zones mentionnées aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 ; ".

4. Il résulte de ces dispositions que les documents graphiques des plans de prévention des risques naturels prévisibles dont les prescriptions s'imposent directement aux autorisations de construire, doivent, au même titre que les documents d'urbanisme, être suffisamment précis pour permettre de déterminer les parcelles concernées par les mesures d'interdiction et les prescriptions qu'ils prévoient et, notamment, d'en assurer le respect lors de la délivrance des autorisations d'occupation ou d'utilisation du sol. Ces dispositions n'ont, toutefois, ni pour objet ni pour effet d'imposer que ces documents fassent apparaître eux-mêmes le découpage parcellaire existant.

5. Il ressort des pièces du dossier que sont annexées au plan de prévention des risques naturels prévisibles de l'Ouest Odet quinze cartes du zonage réglementaire au 1/10000e complétées par quatre cartes au 1/5000e, en couleurs sur feuillets A3. Contrairement à ce qui est soutenu, ces documents graphiques sont d'une précision suffisante pour que les parcelles cadastrales puissent y être individuellement identifiées. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 562-3 du code de l'environnement ne peut, par suite, qu'être écarté.

6. En second lieu, à la suite de la tempête Xynthia, les services de l'Etat ont identifié plusieurs communes dont la couverture par des plans de prévention des risques littoraux naturels prévisibles a été jugée prioritaire, parmi lesquelles huit communes du Finistère, comprises entre la rivière de l'Odet et la pointe de Penmarch, dont celle de l'Ile-Tudy. Après consultation des collectivités territoriales intéressées et enquête publique, le préfet du Finistère a approuvé le plan de prévention des risques littoraux " Ouest Odet " de ces huit communes par arrêté du 12 juillet 2016, qui s'est substitué au plan de préventions des risques de submersion marines préexistant, notamment, sur le territoire de la commune de l'Ile-Tudy.

7. Il ressort des pièces du dossier que le zonage réglementaire retenu par le plan contesté résulte d'une analyse croisée de l'aléa de référence et de l'aléa à l'horizon 2100 avec les enjeux sur les territoires étudiés, compte tenu de la nature de la zone concernée, qui prennent en compte, outre les aléas de submersion marine et d'érosion, certains critères conduisant à l'établissement d'une bande de précaution liée aux ruptures des structures de protection ou soumises aux chocs mécaniques des vagues, à des projections de matériaux ou à un recul du trait de côte. Il n'est pas contesté que la parcelle AB 1020 dont sont propriétaires M. et Mme D..., située au nord de la commune de l'Ile-Tudy, à moins de 280 mètres du trait de côte, est comprise dans une vaste zone poldérisée qui s'étend depuis le lieu-dit du " Sillon " jusqu'à la frange ouest du secteur de " Sainte Marine ", sur la commune voisine de Combrit. Ce polder est protégé de l'océan Atlantique au sud par un unique cordon dunaire qui subit un double phénomène d'érosion et de submersion marine. Il ressort, également, des énonciations non contredites du rapport de caractérisation des aléas établi dans le cadre de l'élaboration du plan de prévention des risques littoraux litigieux que ce cordon dunaire naturel est instable et présente des dimensions faibles, que, lors des tempêtes observées entre les mois de décembre 2013 et de mars 2014, le recul du trait de côte a été important et qu'un démarrage de brèche a été observé avec franchissements de paquets d'eau de mer. La parcelle AB 1020 est comprise entre 1,01 mètre NGF et 1,36 mètre NGF alors que, dans le secteur considéré, le niveau des eaux peut atteindre entre 4,30 et 4,40 mètres NGF au regard de l'aléa actuel de référence et entre 4,70 et 4,80 mètres NGF au regard de l'aléa à l'échéance centennale de sorte qu'elle se trouve exposée à un risque de submersion marine susceptible de dépasser, en l'état actuel de l'aléa, plus de 3 mètres de hauteur d'eau et, à l'aléa centennal, plus de 3,30 mètres. Par suite, compte tenu de la situation particulière de cette parcelle et des éléments qui précédent et alors même qu'elle n'aurait, selon leurs allégations, " jamais fait l'objet d'une inondation " et que le plan de prévention des risques de submersion marine de 1997 autorisait dans ce secteur les constructions nouvelles, au demeurant, sous réserve de respecter certaines prescriptions, le classement de cette parcelle en zone rouge du plan n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, la circonstance, à la supposer établie, qu'un permis de construire aurait été délivré pour un projet situé à proximité de leur parcelle étant sans incidence sur la légalité de ce classement. Enfin, contrairement à ce qui est soutenu, un nombre important de constructions de ce secteur est également classé en zone rouge et les extensions ne sont autorisées, dans cette zone, que dans certaines conditions très restrictives, dans le seul but d'améliorer " le confort du logement et en réduire la vulnérabilité, sans augmentation conséquente de la capacité d'accueil, dans la limite de 25 m2 - utilisable une seule fois - d'emprise au sol ", sous réserve, en outre, que le premier niveau de plancher soit situé aux cotes prescrites.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. et Mme D... de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D..., à Mme C... D... et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme A..., présidente-assesseur,

- M. Franck, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 septembre 2020.

Le rapporteur,

C. A...Le président,

T. CELERIER

La greffière,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19NT01198


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT01198
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : AARPI VIA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-09-22;19nt01198 ?
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