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18/09/2020 | FRANCE | N°20NT00136

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 septembre 2020, 20NT00136


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 20 septembre 2019 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités espagnoles pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du même jour par laquelle le préfet l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1910443 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 j

anvier 2020, M. B... A..., représenté par Me D... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 20 septembre 2019 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités espagnoles pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du même jour par laquelle le préfet l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1910443 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2020, M. B... A..., représenté par Me D... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1910443 du tribunal administratif de Nantes du 3 octobre 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 20 septembre 2019 par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités espagnoles et l'a assigné à résidence ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de transmettre sa demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides pour examen et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour d'une durée minimale d'un mois dans un délai de huit jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

. en ce qui concerne la décision portant transfert aux autorités espagnoles :

- les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ; il appartiendra à l'autorité préfectorale de démontrer qu'elle s'est acquittée de son obligation dans une langue qu'il comprend ; il devait se voir remettre les brochures d'information dès sa demande de protection internationale alors qu'il ne s'est vu remettre aucune information, ni aucune brochure lors de son passage au centre de pré-accueil des demandeurs d'asile ;

- les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ; il n'est pas établi que l'entretien s'est déroulé dans les conditions prévues par ces dispositions et notamment qu'il a été conduit par une personne qualifiée, la qualité de l'agent ayant mené l'entretien n'étant pas indiquée ;

- il est impossible que ses empreintes aient été relevées en Espagne le 9 juin 2019, date à laquelle il était déjà en France ; ses empreintes ont été relevées le 7 mai 2019 sans aucune explication ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

. en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant transfert auprès des autorités espagnoles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 avril 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut à ce qu'il n'y ait pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision de transfert et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que :

- l'Espagne a été libérée de son obligation de prise en charge en application de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- les moyens soulevés par M. A... à l'appui de l'exception d'illégalité de la décision de transfert ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 13 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le décret n° 2019-38 du 23 janvier 2019 ;

- l'arrêté du 10 mai 2019 désignant les préfets compétents pour enregistrer les demandes d'asile et déterminer l'Etat responsable de leur traitement ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant guinéen né en avril 1993, est entré en France en mai 2019. Il a déposé une demande d'asile qui a été enregistrée le 17 juillet 2019. Par une décision du 20 septembre2019, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités espagnoles pour l'examen de sa demande d'asile, et par une décision du même jour a également prononcé son assignation à résidence. M. A... relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 20 septembre 2019.

Sur l'étendue du litige :

2. Le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 fixe, à ses articles 7 et suivants, les critères à mettre en oeuvre pour déterminer, de manière claire, opérationnelle et rapide, l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile. La mise en oeuvre de ces critères peut conduire, le cas échéant, à une demande de prise ou reprise en charge du demandeur, formée par l'Etat membre dans lequel se trouve l'étranger, dénommé " Etat membre requérant ", auprès de l'Etat membre que ce dernier estime être responsable de l'examen de la demande d'asile, ou " Etat membre requis ". En cas d'acceptation de ce dernier, l'Etat membre requérant prend, en vertu de l'article 26 du règlement, une décision de transfert, notifiée au demandeur, à l'encontre de laquelle ce dernier dispose d'un droit de recours effectif, en vertu de l'article 27, paragraphe 1, du règlement. Aux termes du paragraphe 3 du même article : " Aux fins des recours contre des décisions de transfert ou des demandes de révision de ces décisions, les États membres prévoient les dispositions suivantes dans leur droit national : / a) le recours ou la révision confère à la personne concernée le droit de rester dans l'État membre concerné en attendant l'issue de son recours ou de sa demande de révision (...) ". Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant ".

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen (...) ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". En vertu du II du même article, lorsque la décision de transfert est accompagnée d'un placement en rétention administrative ou d'une mesure d'assignation à résidence notifiée simultanément, l'étranger dispose d'un délai de 48 heures pour saisir le président du tribunal administratif d'un recours et ce dernier dispose d'un délai de 96 heures pour statuer. Aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code prévoit que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, a été notifié à l'administration, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

5. La requête de M. A... devant le tribunal administratif de Nantes a interrompu le délai de six mois fixé par l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Espagne. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification au préfet de Maine-et-Loire du jugement du tribunal administratif, intervenue le 4 octobre 2019, et n'a pas été interrompu par l'appel de M. A.... Il est donc expiré depuis le 4 avril 2020. A la date de lecture du présent arrêt, la France est donc devenue responsable de l'examen de la demande de protection de M. A.... Les conclusions de l'intéressé tendant à l'annulation de la décision du 20 septembre 2019 portant transfert auprès des autorités espagnoles sont donc, ainsi que le soutient le préfet intimé, privées d'objet. Il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.

6. L'arrêté portant assignation à résidence de l'intéressé ayant été exécuté et ayant produit des effets, il y a lieu en revanche de statuer sur les conclusions tendant à son annulation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

7. M. A... invoque à l'encontre de la décision portant assignation à résidence un unique moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision du même jour portant transfert auprès des autorités espagnoles.

8. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ".

9. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie

10. M. A... fait valoir qu'il a reçu tardivement, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile à la préfecture, l'information prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 alors qu'elle aurait dû lui être délivrée lorsqu'il s'est présenté à la plate-forme d'accueil des demandeurs d'asile en vue de l'introduction de sa demande d'asile. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est vu remettre, le 17 juillet 2019, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de l'entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, en langue française, qu'il a déclaré comprendre. Par ailleurs, il résulte du compte-rendu de l'entretien du 17 juillet 2019, qui s'est tenu avec l'assistance d'un interprète en langue malinké, désignée par M. A... pour être sa langue d'audition auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, que les informations contenues dans les brochures A et B et dans le guide du demandeur d'asile lui ont par ailleurs été communiquées oralement et qu'il a reconnu les avoir comprises. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ".

12. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. A... qu'il a bénéficié le 17 juillet 2019, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en langue malinké, que l'intéressé a désignée pour être sa langue d'audition à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, avec le concours par téléphone d'un interprète, dont l'identité est portée sur le compte rendu d'entretien, intervenant pour le compte de la société ISM Interprétariat agréée par le ministère de l'intérieur. Il n'est pas établi que le requérant n'aurait pas été en capacité de comprendre les informations qui lui ont été délivrées et de faire valoir toutes observations utiles relatives à sa situation au cours de l'entretien, ainsi que cela ressort du compte-rendu qui en a été établi. Rien ne permet en outre de démontrer que l'entretien ne se serait pas tenu dans des conditions conformes aux exigences de l'article 5 précité. Par ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national et dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité. En outre, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent ayant conduit l'entretien n'a pas privé le requérant de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien individuel. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article 9 du règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, dit " Règlement Eurodac ", relatif à la collecte, la transmission et la comparaison des empreintes digitales des demandeurs d'une protection internationale : " 1. Chaque État membre relève sans tarder l'empreinte digitale de tous les doigts de chaque demandeur d'une protection internationale âgé de 14 ans au moins et la transmet au système central dès que possible et au plus tard 72 heures suivant l'introduction de la demande de protection internationale (...). / 3. Les données dactyloscopiques au sens de l'article 11, point a), qui sont transmises par un État membre (...) sont comparées automatiquement avec les données dactyloscopiques transmises par d'autres États membres qui sont déjà conservées dans le système central. (...) / 5. Le système central transmet automatiquement le résultat positif ou négatif de la comparaison à l'État membre d'origine (...) ". Le point l) du 1 de l'article 2 de ce même règlement définit les données dactyloscopiques comme " les données relatives aux empreintes digitales de tous les doigts ou au moins des index et si ces derniers sont manquants, aux empreintes de tous les autres doigts d'une personne, ou à une empreinte digitale latente ". La portée de ces dispositions est précisée au considérant 5 du même règlement, qui énonce que " Les empreintes digitales constituent un élément important aux fins de l'établissement de l'identité exacte de ces personnes (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'annexe II au règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 du 30 janvier 2014 : " Liste A - Eléments de preuve / (...) II. Obligations de réadmission ou de reprise du demandeur de l'État membre responsable de l'examen de la demande / 1. Procédure de détermination de l'État membre responsable en cours dans l'État membre où la demande a été introduite (article 20, paragraphe 5) / Preuves : - résultat positif fourni par Eurodac par suite de la comparaison des empreintes du demandeur avec les empreintes collectées au titre de l'article 9 du règlement "Eurodac" (...). / 2. Procédure de demande en cours d'examen ou antérieure [article 18, paragraphe 1, points b), c) et d)] / Preuves : résultat positif fourni par Eurodac par suite de la comparaison des empreintes du demandeur avec les empreintes collectées au titre de l'article 9 du règlement "Eurodac" (...) ".

14. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la preuve de l'entrée irrégulière sur le territoire des Etats membres par une frontière extérieure, déterminant la responsabilité d'un Etat membre en application de l'article 13.1 du règlement dit " Dublin III ", est constitué par le résultat positif transmis par Eurodac à la suite de la comparaison des empreintes du demandeur d'asile à celles collectées sur le système central informatisé. En outre, une telle preuve fait foi jusqu'à ce qu'elle soit réfutée par une preuve contraire. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le système central Eurodac a émis un résultat positif à la suite d'une comparaison entre les données dactyloscopiques enregistrées dans la base de données centrale informatisée et celles qui ont été transmises par les autorités françaises, concernant M. A.... La seule circonstance que le relevé espagnol porte la date du 9 juin 2019 ne saurait suffire à mettre en doute la fiabilité de la comparaison effectuée par Eurodac, et partant, à établir que l'intéressé n'est pas entré illégalement sur le territoire des Etats membres par l'Espagne, eu égard à la force probante attachée au résultat positif d'Eurodac. Au demeurant, l'intéressé ne conteste pas être entré irrégulièrement sur le territoire des Etats membres par l'Espagne, dans les douze mois précédant la présente demande d'asile puisqu'il indique que ses empreintes ont été relevées en Espagne le 7 mai 2019. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

15. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)".

16. M. A... ne fait état d'aucune circonstance, notamment médicale, établissant qu'il serait dans une situation de particulière vulnérabilité imposant d'instruire sa demande d'asile en France. Il se borne à faire état de sa volonté de déposer une demande d'asile dans ce pays et de la circonstance que des associations en Espagne lui auraient proposé d'aller en France y déposer une demande d'asile. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité.

17. Il résulte de tout ce qui précède que l'unique moyen soulevé par M. A... à l'encontre de la décision portant assignation à résidence, tiré de l'illégalité de la décision du 20 septembre 2019 portant transfert auprès des autorités espagnoles, doit être écarté. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision portant assignation à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

18. Si, compte tenu de la caducité de la décision de transfert contestée, la France est l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile présentée par M. A..., le présent arrêt, n'implique, par lui-même, aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

19. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au profit de son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... aux fins d'annulation de la décision du 20 septembre 2019 portant transfert auprès des autorités espagnoles.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me D... C... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 18 septembre 2020.

La rapporteure,

M. E...Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20NT00136

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00136
Date de la décision : 18/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : RODRIGUES-DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-09-18;20nt00136 ?
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