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17/07/2020 | FRANCE | N°20NT00468

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 17 juillet 2020, 20NT00468


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Euro protection surveillance a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre exécutoire n° 00391 émis le 14 décembre 2018 par le service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire pour le recouvrement de la somme de 202 euros au titre de frais d'intervention, ainsi que la décision du 26 février 2019 du président du conseil d'administration du SDIS rejetant son recours gracieux tendant à l'annulation de ce titre de perception et de la décharger de l'obligation d

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Par un jugement n° 1901479 du 10 décembre 2019, le tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Euro protection surveillance a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre exécutoire n° 00391 émis le 14 décembre 2018 par le service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire pour le recouvrement de la somme de 202 euros au titre de frais d'intervention, ainsi que la décision du 26 février 2019 du président du conseil d'administration du SDIS rejetant son recours gracieux tendant à l'annulation de ce titre de perception et de la décharger de l'obligation de payer.

Par un jugement n° 1901479 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 février 2020, la société Euro protection surveillance, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 décembre 2019 du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) d'annuler le titre de perception n° 00391 émis le 14 décembre 2018 par le service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire et tous les actes en découlant ;

3°) de décharger la société Euro protection surveillance de l'obligation de payer à hauteur des montants réclamés ;

4°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'intervention du SDIS du 28 août 2018 avait bien pour objet la réalisation d'une mission de service public au sens de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales de sorte que les conditions d'application de la participation aux frais prévue à l'article L. 1424-42 alinéa 2 du même code n'étaient pas réunies ;

- la sanction infligée est illégale au regard des dispositions de l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales dès lors que la procédure sécuritaire de la société est conforme à l'article L. 1424-41 de ce code, étant précisé que l'appel était justifié en l'espèce, que le SDIS est intervenu spontanément, que l'inutilité de l'intervention découverte a posteriori ne remet pas en cause le caractère justifié de l'appel au SDIS, qu'elle n'est pas la bénéficiaire de l'intervention du SDIS et qu'en tout état de cause, elle était dans l'obligation d'avertir le SDIS ;

- le forfait appliqué par le SDIS est illicite dès lors que l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales ne prévoit en aucun cas pour les SDIS la possibilité d'appliquer un forfait s'assimilant à une sanction pécuniaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2020, le service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la société Euro protection surveillance une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative elle n'est pas motivée s'agissant de la copie de la requête présentée en première instance et alors que la requérante est dépourvue d'intérêt à agir puisqu'elle n'a pas assumé le paiement des frais qu'elle conteste ;

- les moyens soulevés par société euro protection surveillance ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 14 décembre 2018, le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) d'Indre-et-Loire a émis un titre exécutoire à l'encontre de la société Euro protection surveillance (EPS), d'un montant de 202 euros, en paiement de frais afférents à une intervention qu'il a effectuée le 28 août 2018, au motif que celle-ci ne relevait pas de l'exercice des missions de service public qui lui sont dévolues. Par un jugement du 10 décembre 2019 dont la société Euro protection surveillance relève appel, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de ce titre exécutoire et de la décision du 26 février 2019 du président du conseil d'administration du SDIS rejetant son recours gracieux tendant à l'annulation de ce titre de perception, ainsi que sa demande de décharge de l'obligation de payer cette somme.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales : " Les services d'incendie et de secours sont chargés de la prévention, de la protection et de la lutte contre les incendies. Ils concourent avec les autres services et professionnels concernés, à la protection et à la lutte contre les autres accidents, sinistres et catastrophes, à l'évaluation et à la prévention des risques technologiques et naturels ainsi qu'aux secours d'urgence. Dans le cadre de leurs compétences, ils exercent les missions suivantes : (...) / 3° La protection des personnes, des biens et de l'environnement ; / 4° Les secours d'urgence aux personnes victimes d'accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur évacuation. ". Aux termes de l'article L. 1424-42 du même code : " Le service départemental d'incendie et de secours n'est tenu de procéder qu'aux seules interventions qui se rattachent directement à ses missions de service public définies à l'article L. 1424-2. / S'il a procédé à des interventions ne se rattachant pas directement à l'exercice de ses missions, il peut demander aux personnes bénéficiaires une participation aux frais, dans les conditions déterminées par délibération du conseil d'administration (...). ".

3. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les services départementaux d'incendie et de secours ne doivent supporter la charge que des interventions qui se rattachent directement aux missions de service public définies à l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales, au nombre desquelles figurent celles qui relèvent de la protection des personnes, des biens et de l'environnement. Les interventions ne relevant pas directement de l'exercice de leurs missions de service public effectuées par les services départementaux d'incendie et de secours peuvent donner lieu à une participation aux frais des personnes qui en sont bénéficiaires, dont ces services déterminent eux-mêmes les conditions.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le 28 août 2015 à 17H05 un ou des détecteurs installés chez un client de la société EPS ont signalé la présence de fumées. Contacté par téléphone, ce client a indiqué qu'il n'était pas sur place et qu'il ne pouvait écarter l'existence d'un incendie. La société a alors envoyé un salarié sur le site et prévenu le SDIS d'Indre-et-Loire de la situation. A 17H35, le client de la société EPS présent sur les lieux, ainsi que les pompiers, ont informé la société de l'absence de tout incendie sur place. L'origine du déclenchement du ou des détecteurs de fumée n'a pu être établie et demeure inexpliquée. Cette intervention s'est ainsi révélée sans lien direct avec les missions de service public fixées à ce service de secours et d'incendie par les dispositions citées de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales.

5. En deuxième lieu, la société EPS ne peut sérieusement soutenir que son signalement effectué auprès du SDIS de la situation de son client ne pouvait être interprété par ce service comme une demande d'intervention alors qu'elle l'informait du déclenchement réitéré de détecteurs de fumée au domicile d'un particulier en l'absence de ce dernier. Par ailleurs, c'est bien à l'initiative unique de cette société, et non à celle de son client, compte tenu du signalement émis par ses seuls détecteurs installés au domicile de ce dernier, que l'intervention de ce service, qui s'est avérée inutile, a été déclenchée.

6. En troisième lieu, la somme de 202 euros mise à la charge de la société EPS par le SDIS d'Indre-et-Loire comme participation aux frais qu'il a exposés inutilement dans ce contexte ne s'analyse pas comme une sanction mais trouve son fondement dans les dispositions mentionnées de l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales qui n'interdisent pas que cette participation financière prenne, au terme d'une délibération du conseil d'administration du SDIS, la forme d'un forfait.

7. En conséquence, c'est sans méconnaitre les dispositions citées au point 2 que le SDIS d'Indre-et-Loire a mis à la charge de la société EPS, par le titre exécutoire contesté, la somme de 202 euros et a rejeté la demande de décharge de l'obligation de paiement dont il était saisi.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par le SDIS d'Indre-et-Loire, que la société EPS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la société Euro protection surveillance. En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Euro protection surveillance est rejetée.

Article 2 : la société Euro protection surveillance versera la somme de 1 500 euros au service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Euro protection surveillance et au service départemental d'incendie et de secours d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. A..., président assesseur,

- M. Jouno, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

Le rapporteur,

C. A...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au préfet d'Indre-et-Loire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00468


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00468
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : CABINET FIDAL (SCHILTIGHEIM)

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-17;20nt00468 ?
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