Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 février 2019 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
Par un jugement n° 1901095 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif d'Orléans a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 novembre 2019 le préfet du Loiret, représenté par
Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 octobre 2019 ;
2°) de rejeter la demande de M. A....
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le caractère réel et sérieux des études de
M. A... devait être apprécié à la date à laquelle il a statué une nouvelle fois sur sa demande ;
- les premiers juges ont méconnu l'autorité de la chose jugée par la cour administrative d'appel dans son arrêt du 21 septembre 2018 ;
- les autres moyens présentés par M. A... en première instance ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 mars 2020 M. C... A..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative la somme de 2 400 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il soutient que les moyens soulevés par le préfet du Loiret ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du
29 janvier 2020.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que l'arrêté contesté du 21 février 2019 méconnait l'autorité de la chose jugée par l'arrêt n° 18NT00445 du 21 septembre 2018 de la cour administrative d'appel de Nantes.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien né le 1er septembre 1998, est entré en France le 5 août 2014 selon ses déclarations. Il a demandé, le 19 mai 2017, un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 août 2017, le préfet du Loiret a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. Par un arrêt n° 18NT00445 du 21 septembre 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale. Par un nouvel arrêté du 21 février 2019, le préfet du Loiret a réitéré son refus de délivrer à M. A... le titre de séjour demandé et a prononcé à son encontre une nouvelle mesure d'éloignement assortie d'une nouvelle décision fixant le pays de destination. Le préfet du Loiret relève appel du jugement du 24 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé cet arrêté.
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée ; ". Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle.
3. Dans son arrêt n° 18NT00445 du 21 septembre 2018 la cour administrative d'appel de Nantes a annulé l'arrêté du 28 août 2017 du préfet du Loiret au motif qu'il était entaché d'une erreur d'appréciation de la situation de M. A..., celui-ci établissant le caractère réel et sérieux de sa formation, n'entretenant plus de lien avec sa famille restée au Mali et justifiant d'un avis favorable de sa structure d'accueil quant à son insertion dans la société française. Le préfet du Loiret, s'il pouvait tenir compte, le cas échéant, d'éléments de fait nouveaux intervenus postérieurement à l'arrêt du 21 septembre 2018, ne pouvait en revanche procéder à une nouvelle appréciation de la situation de l'intéressé, contraire à celle de la cour, sans méconnaître l'autorité absolue de la chose jugée dont était revêtu son arrêt. Il ne pouvait donc légalement refuser de déférer à l'injonction qui lui avait été faite de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " après avoir apprécié une nouvelle fois le caractère réel et sérieux de ses études et la nature de ses liens avec sa famille restée au Mali.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Loiret n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser au conseil de M. A... dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet du Loiret est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros au conseil de M. A... dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme E..., présidente rapporteure,
- M. Mony, premier conseiller,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.
La rapporteure
N. E... L'assesseur le plus ancien
A. Mony
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19NT04522