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26/06/2020 | FRANCE | N°18NT04302

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 26 juin 2020, 18NT04302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Snidaro a demandé au tribunal administratif de Caen, d'une part, d'établir le décompte général et définitif du lot n° 9 " carrelage - sols caoutchouc " du marché de la construction d'une piscine intercommunale à Argences qu'elle a conclu avec la communauté de communes de Val ès Dunes à un montant de 1 088 298,90 euros HT, d'autre part, de condamner la communauté de communes de Val ès Dunes à lui verser la somme de 606 408 euros TTC, en règlement du solde du marché, majorée des intér

ts au taux légal à compter du 7 mai 2014, enfin, d'appeler à la cause la société Be...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Snidaro a demandé au tribunal administratif de Caen, d'une part, d'établir le décompte général et définitif du lot n° 9 " carrelage - sols caoutchouc " du marché de la construction d'une piscine intercommunale à Argences qu'elle a conclu avec la communauté de communes de Val ès Dunes à un montant de 1 088 298,90 euros HT, d'autre part, de condamner la communauté de communes de Val ès Dunes à lui verser la somme de 606 408 euros TTC, en règlement du solde du marché, majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2014, enfin, d'appeler à la cause la société Bertin.

Par un jugement n° 1500170 du 4 octobre 2018, le tribunal administratif de Caen a fixé à la somme de 723 378,71 euros TTC le montant du décompte général définitif du marché relatif au lot n° 9 " carrelage - sols caoutchouc " de la construction de la piscine intercommunale d'Argences passé avec la communauté de communes de Val ès Dunes (article 1er), a rejeté les conclusions de la société Snidaro tendant à la condamnation de la communauté de communes de Val ès Dunes au versement d'une somme au titre du solde du marché (article 2), a condamné la société Snidaro à verser à cette communauté de communes la somme de 5 934 euros TTC (article 3), a mis à la charge de la société Snidaro le versement d'une somme de 2 000 euros à la communauté de communes de Val ès Dunes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 4), a mis à la charge de cette même société le versement d'une somme de 1 000 euros à la société Bertin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 5) et a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 6).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2018, et un mémoire, enregistré le 7 décembre 2018, la société Snidaro, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 octobre 2018 du tribunal administratif de Caen en tant qu'il lui est défavorable ;

2°) d'établir le décompte général et définitif du lot n° 9 " carrelage - sols caoutchouc " du marché portant sur la construction de la piscine intercommunale située à Argences à la somme de 1 089 598,90 euros HT et de condamner la communauté de communes de Val ès Dunes à lui verser la somme de 601 988,48 euros TTC en règlement du solde de ce marché, majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2014 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes de Val ès Dunes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le surcoût de 17 334,68 euros HT lié au changement de gamme des carreaux et à la mise en place d'une grille PVC au droit de l'ensemble des goulottes finlandaises doit être intégré au décompte général, de même que les travaux de faïence murale du local hammam, pour un montant complémentaire de 3 038,11 euros HT, les travaux supplémentaires de reprise des socles des casiers des vestiaires pour un montant de 1 260,98 euros HT et les travaux supplémentaires de reprise des bassins pour un montant de 15 749.83 euros HT ;

- l'allongement de la durée du chantier de 5 mois et demi par la faute du maître d'ouvrage engage la responsabilité de ce dernier ;

- le retard de la société Bertin dans l'exécution du lot " gros oeuvre - maçonnerie ", notamment au niveau des bassins, engage sa responsabilité quasi-délictuelle ;

- elle a subi des préjudices du fait des retards sur le chantier ; ainsi, le surcoût lié au changement de méthodologie pour la réalisation des plages est de 45 000 euros HT ; le surcoût lié au paiement d'un chargé d'affaires pour l'encadrement supplémentaire du chantier s'élève à 15 688,00 euros HT ; le préjudice lié aux frais d'autres personnels est de 105 300 euros HT ;

- les pénalités de 23 920,20 euros correspondant à 60 jours de retard ne sont pas justifiées ;

- l'allongement de la durée du chantier ne lui a pas permis de couvrir ses frais généraux ; il en résulte un préjudice de 168 447,71 euros HT de perte d'amortissement de ses frais généraux ;

- elle a subi un préjudice au titre de la perte de marge brute qui s'élève à 56 149,24 euros HT ;

- la somme de -5 934 euros TTC, intégrée au décompte général du marché par les premiers juges, doit en être retirée, dès lors qu'elle correspond à une minoration du prix du marché initial, résultant de l'absence de pose de deux fontaines dans le hammam, et a été prise en compte dans une option diminuant le montant du marché de 45 537,27 euros HT.

Par un mémoire, enregistré le 28 février 2019, la communauté de communes de Val ès Dunes, représentée par la SELARL Axone Droit public, conclut au rejet de la requête et demande :

1°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il établit le décompte général et définitif du lot n° 9 du marché portant sur la construction de la piscine intercommunale située à Argences à 723 378,71 euros TTC et non pas à 698 262,50 euros TTC et de condamner en conséquence la société Snidaro à lui verser une somme de 31 050,21 euros TTC au titre du solde de ce lot ;

2°) de mettre à la charge de la société Snidaro une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens soulevés par la société Snidaro ne sont pas fondés ;

- la communauté de communes a appliqué à juste titre 25 116,21 euros de pénalités de retard à la société Snidaro, correspondant à 63 jours de retard dans la réalisation des chapes des plages de la piscine, compte tenu de la réalité de ce retard dûment constaté.

Par un mémoire, enregistré le 4 octobre 2019, la société Bertin, représentée par la SELAS Fidal, conclut au rejet de la requête en tant qu'elle la vise et à ce que soit mise à la charge de la société Snidaro une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Snidaro à l'appui des conclusions la visant sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jouno, rapporteur,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la société Snidaro, et de Me B..., représentant la communauté de communes de Val ès Dunes.

Considérant ce qui suit :

1. La communauté de communes de Val ès Dunes a entrepris, en 2011, la construction d'une piscine intercommunale à Argences (Calvados). Par un acte d'engagement du 12 mai 2011, elle a confié le lot n° 9 " carrelage - sols caoutchouc " à la société Snidaro pour un montant forfaitaire total de 715 208 euros TTC. La réception des travaux a été prononcée le 23 décembre 2013 avec des réserves, levées le 17 février 2014. La communauté de communes a établi un décompte général du marché, qui mentionnait que le montant cumulé du prix du marché de base, de celui convenu par avenants à ce marché, de celui des travaux supplémentaires et de la révision des prix s'élevait à 739 146,70 euros TTC. Ce document précisait en outre que des pénalités d'un montant cumulé de 54 436,41 euros étaient applicables et que le montant total des acomptes versés à la société Snidaro s'élevait à 738 290,25 euros TTC, en sorte que, d'après certificat de paiement annexé au décompte général, le solde du lot n° 9 s'élevait à 856,45 euros TTC. Le 5 juin 2014, la société Snidaro a signé ce décompte général, sous la réserve expresse de la prise en compte de son mémoire en réclamation annexé. Faute d'avoir répondu à ce mémoire en réclamation dans le délai requis, la communauté de communes de Val ès Dunes a implicitement rejeté les prétentions de la société Snidaro qui, par une demande enregistrée le 21 janvier 2015, a porté sa réclamation devant le tribunal administratif de Caen. Par un jugement du 4 octobre 2018, le tribunal a fixé le montant du décompte général définitif du marché relatif au lot n° 9 " Carrelage-sols caoutchouc " du marché de construction de la piscine sports et loisirs intercommunale d'Argences à la somme de 723 378,71 euros TTC (article 1er), a rejeté la demande indemnitaire de la société Snidaro (article 2), a condamné la société Snidaro à verser à la communauté de communes de Val ès Dunes la somme de 5 934 euros TTC (article 3) et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 4), a condamné la société Snidaro à verser à la société Bertin une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 (article 5), et a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 6). Il s'ensuit qu'en application de ce jugement, le solde du lot n° 9 a été porté à la somme de 25 955,65 euros TTC. La société Snidaro relève appel de ce jugement en tant qu'il lui est défavorable et demande à la cour de condamner la communauté de communes de Val ès Dunes à lui verser la somme de 601 988,48 euros TTC en règlement du solde du marché, majorée des intérêts au taux légal. La communauté de communes de Val ès Dunes présente, pour sa part, des conclusions d'appel incident tendant à ce que le montant du décompte général définitif du marché soit fixé à 698 262,50 euros TTC et à la condamnation de la société Snidaro au versement d'une somme de 31 050,21 euros au titre du solde du marché.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'appel principal :

2. Aux termes de l'article 13.3.1. du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux) dans sa rédaction issue de l'arrêté du 8 septembre 2009, auquel le cahier des clauses administratives particulières renvoie sans y déroger : " Après l'achèvement des travaux, un projet de décompte final est établi concurremment avec le projet de décompte mensuel afférent au dernier mois d'exécution des prestations ou à la place de ce dernier. (...) ".

S'agissant des sommes réclamées au titre de travaux supplémentaires :

3. En premier lieu, la société Snidaro soutient que le carrelage que la communauté de communes lui a demandé de poser sur les plages des bassins de la piscine, dans les locaux annexes ainsi que dans le hammam et sur les murs intérieurs, ne correspond pas à celui mentionné dans le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) et que les frais correspondant à ce changement de gamme du carrelage ainsi qu'à la pose d'une grille PVC au droit des goulottes finlandaises a engendré, pour elle, un surcoût de 17 334,68 euros HT, somme correspondant à celle mentionnée sur le devis n° 5620 du 17 janvier 2012. Toutefois, il résulte de l'article 09.6.1 du CCTP du lot n° 9, relatif aux " carreaux de grès cérame vitrifié ", et de l'article 09.6.2 du même CCTP, relatif aux " carreaux de grès cérame antidérapant ", que le titulaire de ce lot devait fournir et poser un carrelage en grès cérame pleinement vitrifié et, dans le cas visé au 09.6.2, antidérapant. Le carrelage devait correspondre, dans le cas visé au paragraphe 09.6.1, à la " série Météor des établissements Casalgrande " et, dans le cas visé dans le 09.6.2, au " système Chroma de chez Buchtal ", ou être équivalent à ces produits. Dans tous les cas, le titulaire du lot devait soumettre huit coloris différents de carrelages à l'architecte, ce dernier étant maître du choix du carrelage à retenir. Or, il ne résulte pas de l'instruction que les carrelages posés par la société Snidaro, mentionnés sur le devis n° 5620 du 17 janvier 2012, ne seraient pas équivalents à ceux mentionnés dans le CCTP. Leur fourniture et leur pose étaient donc incluses dans le prix global et forfaitaire du lot n° 9 du marché. De même, il n'est pas établi que la pose d'une grille PVC n'ait pas été comprise dans le lot de la société Snidaro, qui incluait la pose de tous les revêtements de sol intérieurs, plages comprises.

4. En deuxième lieu, la société Snidaro soutient qu'elle a réalisé des travaux supplémentaires dans le hammam de la piscine consistant en la pose de mosaïques au plafond, pour un montant de 10 702,99 euros HT, mentionné dans le devis n° 5619 établi le 17 janvier 2012 et que ces travaux, effectivement réalisés, n'ont été approuvés, par l'ordre de service n°4 du 19 mars 2012, qu'à hauteur de 7 664,88 euros HT, ce dont elle infère qu'elle peut prétendre à l'indemnisation, au titre de travaux supplémentaires, d'un surcoût de 3 038,11 euros HT. Toutefois, il résulte des énonciations claires de l'avenant n° 2 au marché qu'alors que les travaux supplémentaires dans le hammam avaient initialement été proposés par la société Snidaro pour le prix de 10 702,99 euros HT, ils ont été en définitive approuvés dans cet avenant, par la communauté de communes et la société elle-même, pour être exécutés au prix global et forfaitaire de 7 664,88 euros HT. Ainsi, la société Snidaro n'est pas fondée à réclamer, au titre de ces travaux, le versement d'une somme complémentaire de 3 038,11 euros, non prévue contractuellement, qui a le caractère d'un supplément de prix non accepté par le maître d'ouvrage et non de travaux supplémentaires indemnisables.

5. En troisième lieu, la société Snidaro soutient que la communauté de communes lui doit une somme de 1 260,98 euros HT au titre des travaux supplémentaires de reprise des socles des casiers des vestiaires de la piscine, carrelage et étanchéité. Toutefois, aucun élément n'indique que ces travaux n'auraient pas été inclus dans le prix global et forfaitaire du lot, alors que la société Snidaro avait à sa charge la pose du carrelage sur le sol et de l'étanchéité sous celui-ci. Elle ne peut utilement invoquer la circonstance, à la supposer établie, que ses travaux initiaux auraient été détériorés en cours de chantier dès lors que les travaux demeuraient sous sa garde tant que la réception n'était pas intervenue et qu'il résulte d'ailleurs de l'article 09.1.1 du CCTP que le marché comprenait à la charge du titulaire du lot " " la protection de leurs ouvrages pendant les travaux ".

6. En quatrième lieu, la société Snidaro soutient que la société Bertin, titulaire du lot " gros-oeuvre " avait réalisé la structure en béton des bassins, sur laquelle elle devait poser le revêtement en carrelage, avec des défauts d'exécution la rendant non conforme aux règles de l'art si bien que des travaux complémentaires non prévus initialement ont dû être réalisés pour que le carrelage puisse être posé à l'intérieur des bassins, ce qui lui aurait coûté la somme de 15 749,83 euros HT dont elle demande à la communauté de communes de l'indemniser. Toutefois, la société Snidaro n'établit pas par ses seules allégations que la préparation des surfaces devant recevoir le carrelage à l'intérieur des bassins, qui n'était d'ailleurs pas incluse dans le lot n° 1 " gros-oeuvre " dont la société Bertin était titulaire, ne relèverait pas des prestations incluses dans le prix global et forfaitaire du lot n° 9.

S'agissant des sommes réclamées au titre de l'indemnisation des préjudices liés aux retards de chantier :

7. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.

8. La société Snidaro relève que le chantier a débuté le 30 mai 2011 et devait se terminer le 30 novembre 2012, ses interventions devant avoir lieu durant quatre mois et demi, du 15 mars 2012 au 31 juillet 2012, et impute à trois modifications du planning de chantier la circonstance que son intervention a dû durer cinq mois et demi supplémentaires. Toutefois, d'une part, le retard allégué ne constitue pas, par lui-même, une sujétion imprévue ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat conclu avec la communauté de communes. D'autre part, alors surtout que la société Snidaro elle-même impute un tel retard à d'autres locateurs d'ouvrage, il n'est pas établi qu'il résulte d'une faute de la communauté de communes de Val ès Dunes, notamment de la carence alléguée à utiliser ses pouvoirs de contrôle et de direction du chantier pour éviter plusieurs modifications de planning. Dans ces conditions, si la requérante estime que cette augmentation de sa période d'intervention lui aurait imposé un " changement de méthodologie sur les plages " autour des bassins, en passant de la pose scellée prévue à une pose collée impliquant la réalisation préalable d'une chape, engendrant un surcoût de 45 000 euros HT, un surcoût de 15 688 euros HT pour l'encadrement supplémentaire du chantier et son suivi administratif et financier par un chargé d'affaires en raison de la prolongation de la durée globale des travaux, un surcoût de main d'oeuvre évalué à 105 300 euros HT en raison des décalages de planning entraînant des difficultés de coordination du chantier, une perte d'amortissement de ses frais généraux évaluée à 168 447,71 euros HT et une perte de marge brute représentant une somme de 56 149,24 euros, du fait du retard à réaliser le chiffre d'affaires correspondant au marché, il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'elle ne peut être fondée à solliciter l'indemnisation de ces chefs de préjudice par la communauté de communes dès lors qu'elle n'établit ni l'existence d'une faute du maître d'ouvrage, ni que ces préjudices résulteraient de sujétions imprévues ayant bouleversé l'économie du contrat.

9. Par ailleurs, la société Snidaro ne peut utilement invoquer la responsabilité quasi-délictuelle de la société Bertin, titulaire du lot n° 1 " gros oeuvre ". En effet, d'une part, l'entreprise titulaire du marché ne peut demander au maître d'ouvrage l'indemnisation des difficultés subies du seul fait de fautes commises par les autres intervenants à l'opération. D'autre part, la société Snidaro ne dirige aucune de ses conclusions à fin de condamnation pécuniaire contre la société Bertin.

S'agissant des pénalités :

10. Aux termes de l'article 20.1 du CCAG Travaux : " En cas de retard imputable au titulaire dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixé, il est appliqué une pénalité journalière de 1/3 000 du montant hors taxes de l'ensemble du marché, de la tranche considérée ou du bon de commande. Ce montant est celui qui résulte des prévisions du marché, c'est-à-dire du marché initial éventuellement modifié ou complété par les avenants intervenus ; il est évalué à partir des prix initiaux du marché hors TVA (...). ". Aux termes de l'article 20.1.1 du même cahier : " Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre ". Aux termes de l'article 6.4.1 du CCAP du marché : " Par dérogation à l'article 20.1 du CCAG, une pénalité de retard de 2/3000ème du marché de base (avec un minimum de 300 euros HT) par jour calendaire de retard pourra être appliquée à l'entreprise pour chaque ouvrage ou partie d'ouvrage (retard sur délai global ou partiel) sur simple constat figurant dans le compte rendu de l'OPC ".

11. Il résulte de l'instruction, notamment du compte-rendu n° 62 du 5 avril 2013 établi par le titulaire de la mission ordonnancement, pilotage et coordination (OPC), qu'à cette date la société Snidaro avait accumulé un retard de plus de 60 jours dans la pose de carrelages et de faïences au niveau des " zones collectives ", dès lors que cette tâche devait être réalisée le 30 novembre 2012, comme le rappelle en particulier le compte-rendu OPC n° 48 du 9 novembre 2012 produit par la communauté de communes, et ne l'a été que le 2 avril 2013. Or, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que ce retard serait imputable de quelque manière à un autre constructeur, notamment à la société Bertin qui avait réalisé la structure en béton des bassins. Ainsi, c'est à bon droit que des pénalités correspondant à un retard de soixante jours calendaires ont été appliquées à la société Snidaro pour un montant de 23 920,20 euros.

S'agissant des demandes reconventionnelles de la communauté de communes présentées en première instance :

12. Les premiers juges ont constaté que la prestation portant sur la pose de deux fontaines dans le hammam, qui était à l'origine contractuellement prévue, n'avait pas été réalisée par la société Snidaro et n'avait donc pas vocation à donner lieu à un paiement à celle-ci. Ayant relevé que le pouvoir adjudicateur avait cependant, par erreur, inclus le prix de cette prestation dans le montant total des prestations à payer au titre du lot n° 9, ils ont retiré du décompte général au crédit de l'entreprise " la somme de 4 945 euros HT, soit la somme de 5 934 euros TTC " et ont condamné la société à payer cette somme à la communauté de communes. Pour contester le bien-fondé du jugement attaqué sur ce point, la société Snidaro soutient qu'une moins-value correspondant à la suppression de cette prestation était déjà incluse dans une variante retenue par le pouvoir adjudicateur, laquelle consistait en une " diminution du revêtement mural " et impliquait une réduction du montant du lot de 45 537,27 euros HT. Toutefois, il ressort des énonciations de la " décomposition du prix global et forfaitaire " du lot n° 9, et spécialement de la rubrique 9.8 de ce document intitulée " revêtement mural ", de la rubrique 9.9.1 concernant la " fontaine hammam " et de la rubrique portant sur les " variantes ", que la variante correspondant à une " diminution du revêtement mural " concernait les prestations de la société Snidaro visant les murs du bâtiment, notamment ceux du hammam, mais ne concernait pas la pose de fontaines dans le hammam. Ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le prix de cette dernière prestation devait être retiré du montant total à payer au titre du lot n° 9.

En ce qui concerne l'appel incident :

13. Les premiers juges ont estimé que la pénalité d'un montant de 25 116,21 euros appliquée en raison d'un retard de 63 jours dans la réalisation des chapes des plages de la piscine ne pouvait pas être intégrée au décompte général dès lors que ce retard n'était pas justifié. Toutefois, d'une part, il résulte du compte rendu n° 74 du 26 juillet 2013 établi par le titulaire de la mission OPC, produit en première instance, que la réalisation des plages n'avait pas débuté à cette date alors même qu'elle aurait dû commencer à être exécutée le 1er juillet 2013. D'autre part, il résulte du compte rendu n° 3 du 25 septembre 2013, produit pour la première fois en appel, qu'à cette date l'étanchéité des plages autour du bassin de nage devait être réalisée le 27 septembre 2013 et que la chape autour du bassin ludique devant être réalisée par la société Snidaro était notée " terminée pour le 24/09 ". Ainsi, ont été constatés dans les comptes-rendus des titulaires de la mission OPC plus de 63 jours de retard dans la réalisation des chapes des plages de la piscine. Par conséquent, c'est à bon droit que la communauté de communes a appliqué à cette société des pénalités correspondant à un retard de 63 jours dans l'exécution des chapes des plages de la piscine, soit une somme de 25 116,21 euros. La communauté de communes intimée est donc fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retiré cette somme du décompte général du lot n° 9. Ses conclusions tendant à ce que la société Snidaro soit condamnée à lui verser une somme au titre du solde du marché, présentées devant la cour, doivent être interprétées comme tendant à ce que la cour fixe le solde du marché résultant nécessairement de ce qui est jugé par le présent arrêt.

14. Il résulte de tout ce qui précède que le montant du marché au décompte général et définitif fixé à 723 378,71 euros TTC par l'article 1er du jugement attaqué doit être ramené à 698 262,50 euros TTC et que le solde du lot n° 9, fixé par le pouvoir adjudicateur à la somme de 856,45 euros TTC, et porté à la somme de 25 955,65 euros TTC en conséquence du jugement attaqué, doit être réduit à la somme de 839,44 euros TTC.

Sur les frais liés au litige :

15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Snidaro le versement d'une part à la communauté de communes de Val ès Dunes d'autre part à la société Bertin d'une somme de 1 500 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la communauté de communes, qui n'est pas la partie perdante, au titre de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Snidaro est rejetée.

Article 2 : Le montant du marché fixé à 723 378,71 euros TTC par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Caen du 4 octobre 2018 est ramené à 698 262,50 euros TTC et le solde de ce marché est fixé à 839,44 euros TTC.

Article 3 : L'article 1er du jugement n° 1500170 du 4 octobre 2018 du tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : La société Snidaro versera une somme de 1 500 euros à la communauté de communes de Val ès Dunes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions d'appel incident de la communauté de communes de Val ès Dunes est rejeté.

Article 6 : La société Snidaro versera une somme de 1 500 euros à la société Bertin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la société Snidaro, à la société Bertin et à la communauté de communes de Val ès Dunes.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Jouno, premier conseiller,

- Mme D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 26 juin 2020.

Le rapporteur,

T. JounoLe président,

L. Lainé

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18NT04302

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04302
Date de la décision : 26/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Thurian JOUNO
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : MANHOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-06-26;18nt04302 ?
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