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02/04/2020 | FRANCE | N°19NT03076

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 02 avril 2020, 19NT03076


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 décembre 2018 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste à Annaba du 30 septembre 2018 rejetant sa demande de visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 1901362 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a r

ejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 décembre 2018 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste à Annaba du 30 septembre 2018 rejetant sa demande de visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 1901362 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2019, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 mai 2019 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer un visa de long séjour, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le défaut de motivation qui entache le jugement attaqué est arbitraire au regard du droit à un procès équitable ;

- les premiers juges ont inversé la charge de la preuve et, en se fondant sur l'absence de lien matrimonial tout en relevant l'existence d'un voyage commun, ont tiré une conclusion en contradiction avec leur constatation ;

- il ne présente aucune menace à l'ordre public ;

- le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère frauduleux de son mariage

- le refus de visa méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 28 mai 1997, a sollicité auprès des autorités consulaires françaises en poste à Annaba la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Le rejet de visa qui lui a été opposé le 30 septembre 2018 a été confirmé par une décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 6 décembre 2018. M. B... relève appel du jugement du 28 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission du 6 décembre 2018.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, la contradiction de motifs dont serait entaché le jugement attaqué concerne son bien-fondé et est donc en tout état de cause sans incidence sur sa régularité.

3. D'autre part, il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nantes a expressément répondu au moyen soulevé par M. B... et tiré de l'erreur dans l'appréciation de la sincérité de son union matrimoniale. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments développés par les parties, a énoncé les raisons pour lesquelles il a considéré que les éléments apportés par M. B..., notamment l'attestation EDF, les photographies, les attestations de sa conjointe et de tiers ne permettaient pas d'infirmer les éléments avancés par le ministre de l'intérieur au soutien du motif fondé sur le caractère frauduleux du mariage.

4. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public ".

6. D'une part, lorsque l'autorité administrative refuse au conjoint étranger le visa qu'il sollicite au motif que le mariage aurait été contracté dans le seul but de permettre l'entrée et le séjour sur le territoire national, il lui appartient d'établir le caractère frauduleux de ce mariage sur la base d'éléments précis et concordants.

7. Le ministre de l'intérieur fait valoir que M. B... qui, entré en France le 22 décembre 2016, muni d'un visa de court séjour, s'est irrégulièrement maintenu sur le territoire français à l'expiration de celui-ci, n'a entrepris les démarches en vue de son mariage que postérieurement à l'obligation de quitter le territoire français que le préfet des Hauts-de-Seine a édictée à son encontre le 19 janvier 2018. L'intéressé ayant déféré à cette mesure d'éloignement, le mariage a été célébré en Algérie le 18 février 2018. Il ajoute qu'il n'existe pas de communauté de vie entre les époux. Si le requérant soutient qu'il a vécu en concubinage avec sa future épouse de nationalité française, qu'il avait rencontrée en Algérie, dès son entrée en France, le 22 décembre 2016, jusqu'à son éloignement en 2018, il ressort du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun, ayant statué le 30 janvier 2018 sur l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. B..., que ce dernier a déclaré, lors de son audition par les services de police, être célibataire et résider le plus souvent chez sa soeur demeurant à .... Par ailleurs, la relation qu'il soutient avoir entretenue, au cours de cette période, avec sa future épouse n'est étayée que par quelques photographies, une " attestation titulaire de contrat " établie par EDF le 22 janvier 2018 sur la base des déclarations du requérant et de sa compagne alléguée ainsi qu'une attestation de cette dernière peu circonstanciée quant à la rencontre. En outre, hormis un séjour en Tunisie en septembre 2018, il n'est justifié d'aucune relation entre les époux, en dépit de leur résidence séparée, ni d'aucun projet matrimonial. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur doit être regardé comme apportant suffisamment d'éléments précis et concordants de nature à mettre en doute la sincérité du mariage.

8. D'autre part, la circonstance que M. B... ne représente aucune menace à l'ordre public est sans incidence sur la légalité de la décision en litige, qui n'est pas fondée, contrairement à celle des autorités consulaires à laquelle elle s'est substituée, sur la menace à l'ordre public.

9. Il suit de là que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En second lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. Il ressort des pièces du dossier que trois soeurs de M. B..., mariées à des ressortissants français, ainsi que six neveux et nièces résident en France. Le requérant justifie également d'attaches amicales. Toutefois, et alors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, la réalité du projet matrimonial de l'intéressé n'est pas établie, il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus de visa qui lui a été opposé porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur le surplus des conclusions :

13. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions du requérant aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Brisson, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 2 avril 2020.

Le rapporteur,

K. C...

Le président,

A. PEREZLe greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03076


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03076
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : VOGELGESANG

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-04-02;19nt03076 ?
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