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02/04/2020 | FRANCE | N°19NT00064

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 02 avril 2020, 19NT00064


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme G... D... et autres ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés n° PA 72 253 13 P1416 et PA 72 253 13 P 1417 du 18 mai 2016 par lesquels le maire de Roeze-sur-Sarthe (Sarthe) a refusé de leur délivrer un permis d'aménager en vue de création d'une part d'un lotissement de 3 lots au lieudit les Landes de Beaufeu et d'autre part d'un lotissement de 21 lots au lieudit La Croix de Genièvre.

Par un jugement n° 165808 et 1605810 du 9 novembre 2018, le tribunal administr

atif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme G... D... et autres ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés n° PA 72 253 13 P1416 et PA 72 253 13 P 1417 du 18 mai 2016 par lesquels le maire de Roeze-sur-Sarthe (Sarthe) a refusé de leur délivrer un permis d'aménager en vue de création d'une part d'un lotissement de 3 lots au lieudit les Landes de Beaufeu et d'autre part d'un lotissement de 21 lots au lieudit La Croix de Genièvre.

Par un jugement n° 165808 et 1605810 du 9 novembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 janvier 2019 et des mémoires enregistrés les 28 et 30 octobre 2019, les consorts D..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 novembre 2018 ;

2°) d'annuler les arrêtés du maire de Roeze-sur-Sarthe du 18 mai 2016 portant refus de permis d'aménager ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roeze-sur-Sarthe le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

* l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme a été méconnu faute d'avoir recueilli l'avis d'Electricité Réseau Distribution France (ERDF) ;

* l'article NB 5 du plan local d'urbanisme a été méconnu ;

* l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme a été méconnu et l'article R. 111-13 du même code présente un caractère inopérant.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 août 2019, la commune de Roeze sur Sarthe, représentée par Me C..., conclut :

* au rejet de la requête ;

* à la condamnation des consorts D... à lui verser une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. H...,

- et les observations de Me I..., substituant Me F..., représentant les consorts D....

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts D... ont déposé les 24 et 25 octobre 2013, deux demandes de permis d'aménager pour la création d'une part, d'un lotissement comprenant 21 lots au lieudit la Croix de Genièvre et d'autre part, d'un lotissement comprenant 3 lots au lieudit Les Landes de Beaufeu sur le territoire de la commune de Roeze-sur-Sarthe. Le sursis à statuer qui leur avait été opposé par le maire le 20 novembre 2013 ayant été annulé par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 mars 2016, les consorts D... ont confirmé leurs demandes. Aux termes des arrêtés en litige du 18 mai 2016, le maire de Roeze-sur-Sarthe a refusé de leur délivrer les permis d'aménager sollicités. Par un jugement du 9 novembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions. Les consorts D... relèvent appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Pour refuser aux consorts D... les permis d'aménager sollicités, le premier, n° PA 072 253 13 P1416, destiné à la création de trois lots à provenir des parcelles cadastrées G 1242 et 1243 pour partie au lieudit les Landes de Beaufeu et le second, n° PA 072 253 13 P1417 destiné à la création de 21 lots à provenir des parcelles cadastrées G 2113, 2114 et 2117, au lieudit La Croix de Genièvre, le maire de Roeze-sur-Sarthe s'est fondé, dans ses arrêtés du 18 mai 2016, sur la méconnaissance par le projet des pétitionnaires, en premier lieu, des dispositions de l'article NB 5 du plan d'occupation des sols disposant qu'une unité foncière doit avoir une superficie minimale de 1 000 m2 alors que le projet prévoit que chacun des lots à créer sera d'une superficie moindre, en deuxième lieu, de l'article NB 1 de ce même plan prévoyant que " sont admis tous les modes d'occupations ou d'utilisation du sol (...) sous réserve qu'ils n'entraînent pas pour la collectivité un renforcement des réseaux. " alors que le projet nécessitera une extension du réseau électrique ainsi qu'une modification de certains regards de comptage d'eau et, en troisième lieu, de l'article NB 3 de ce plan prévoyant que les voies en impasse doivent être aménagées de manière à permettre aux véhicules de faire aisément demi-tour.

3. En premier lieu, en vertu de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur. ".

4. Consécutivement à l'annulation prononcée le 3 mars 2016 par le tribunal administratif de Nantes des arrêtés du 20 novembre 2013 par lesquels le maire de Roeze-sur-Sarthe a sursis à statuer sur les demandes de permis d'aménager présentées par M. et Mme D..., le maire restait saisi de leurs demandes et était tenu de se prononcer sur celles-ci sans qu'il soit besoin de procéder à une nouvelle instruction sauf circonstances de fait ou de droit nouvelles y faisant obstacle.

5. Il ressort des pièces du dossier que, par deux avis des 4 et 13 novembre 2013, Electricité et Réseaux de France (ERDF) et, par des avis des 29 octobre et 8 novembre 2013, le syndicat mixte pour l'alimentation en eau potable de la région mancelle (SIDERM), se sont prononcés sur les projets d'aménagement des requérants. ERDF, devenu Enedis, précisait, s'agissant du lieudit La Lande de Beaufeu, qu'une extension de 20 m du réseau hors du terrain d'assiette de l'opération est nécessaire moyennant un coût de 2 015,01 euros et, s'agissant du lieudit La Croix de Genièvre qu'une extension de 310 m hors du terrain d'assiette du projet s'impose, moyennant un coût de 18 556,71 euros. Des prescriptions particulières étaient énoncées par le SIDERM quant à ce dernier site.

6. Les requérants font valoir que, eu égard à l'évolution de l'urbanisation le long de la route du Mans, et en particulier à la création d'un lotissement de 5 lots à une centaine de mètres du lieudit Croix de Genièvre, une nouvelle consultation des personnes ou services visés à l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme s'imposait. La commune, quant à elle, se prévaut des termes d'un courriel émis par Enedis le 14 février 2017 lequel précise qu'il n'a pas été procédé à un renforcement du réseau de distribution d'électricité alimentant le lieudit La Lande de Beaufeu au cours des cinq dernières années.

7. Toutefois, eu égard à la fois aux documents cadastraux et photographiques produits par les requérants et au silence gardé par la commune à la suite de la mesure d'instruction diligentée par la cour, les allégations des requérants relatives à la délivrance par la commune en février 2017 de cinq permis de construire sur des parcelles de terrain sises à environ une centaine de mètres du terrain d'assiette du projet d'aménagement de La Croix de Genièvre le long de la route du Mans, laquelle supporte une urbanisation continue, doivent être regardées comme établies.

8. Dans ces conditions et alors que l'avis émis en 2017 par Enedis ne mentionne pas l'évolution de la situation en ce lieu puisqu'il ne se prononce que sur le lieudit La Lande de Beaufeu, les requérants sont fondés à soutenir qu'en omettant de procéder à une nouvelle consultation des personnes et services visés à l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme relativement au projet d'aménagement de La Croix de Genièvre, omission qui a eu une influence sur le sens de sa décision, le maire de la commune de Roeze-sur-Sarthe, qui n'a pas accompli les diligences appropriées auprès des concessionnaires ou services publics concernés, a entaché la décision PA 072 253 13 P1416 d'un vice de procédure.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 123-10-1 du code de l'urbanisme, alors applicable : " Dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, l'ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d'urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose. ". Aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis. ". L'article NB 5 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Roeze-sur-Sarthe dispose : " Pour être constructible, toute unité foncière doit avoir une superficie minimale de 1 000 m2. / (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions que, dans le cas d'un lotissement, et sauf si le règlement d'urbanisme prévoit des règles spécifiques, doivent être prises en compte les caractéristiques de l'ensemble du terrain destiné à faire l'objet d'une division, notamment sa superficie, et non celles des parcelles ou lots futurs destinés à être créés sur ce terrain. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que le règlement du plan d'occupation des sols applicable s'opposerait à ce que la règle énoncée à l'article NB 5 soit appliquée, conformément aux dispositions de l'article R.123-10-1 du code de l'urbanisme, au regard de l'ensemble du projet et pour chaque lot issu de la division foncière.

11. En l'espèce, il est constant que les unités foncières formées d'une part, des parcelles cadastrées G 1242 et 1243 pour partie sises au lieudit La Lande de Beaufeu et d'autre part, des parcelles cadastrées G 2113, 2114 et 2117 sises au lieudit La Croix de Genièvre sont toutes deux d'une superficie supérieure à 1 000 m2.

12. Il s'ensuit, alors même que les terrains issus de la division à intervenir et destinés à être cédés sont prévus pour être chacun d'une surface inférieure à 1 000 m2, que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la surface minimale de chaque parcelle constructible devait être celle de l'unité foncière mentionnée à l'article NB 5 du règlement du plan d'occupation des sols.

13. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés (...) ". Aux termes de l'article NB 1 du plan d'occupation des sols de la commune : " Sont admis tous les modes d'occupation ou d'utilisation du sol (...) sous réserve qu'ils n'entraînent pas pour la collectivité un renforcement des réseaux. ".

14. En application de ces dispositions, un permis d'aménager ne peut être accordé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.

15. Comme il a été dit ci-dessus, le refus de la commune est fondé sur les termes des avis émis en 2013 par ERDF et le SIDERM. Pour contester ce motif de refus, les requérants font valoir que leur projet n'implique pas une extension du réseau électrique mais un simple raccordement dès lors que des constructions à usage d'habitation ont été édifiées à proximité du lieudit La Croix Genièvre. Toutefois, alors que la commune n'a pas sollicité de nouvel avis, elle ne conteste pas l'édification de nouveaux pavillons à usage d'habitation en ce lieu. Dans ces conditions, la commune ne peut utilement se prévaloir de ce qu'un renforcement des réseaux s'imposait et qu'elle était, par suite, tenue de refuser, pour ce motif, le permis sollicité.

16. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature, en l'état du dossier, à justifier l'annulation des décisions contestées.

17. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des consorts D..., qui ne sont pas en l'espèce la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par la commune de Roeze-sur-Sarthe ne peuvent dès lors être accueillies.

19. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Roeze-sur-Sarthe une somme de 1 500 euros qui sera versée aux consorts D... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 novembre 2018 et les arrêtés n° PA072 253 13 P1416 et n° PA072 253 13 P1417 du 18 mai 2016 sont annulés.

Article 2 : La commune de Roeze-sur-Sarthe versera aux consorts D... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : Les conclusions de la commune de Roeze-sur-Sarthe tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme G... D..., à Mme B... D..., à M. A... D... et à la commune de Roeze-sur-Sarthe.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Perez, président de chambre,

- Mme E..., président-assesseur,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 2 avril 2020.

Le rapporteur,

C. E... Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00064
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : CABINET LEXCAP RENNES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-04-02;19nt00064 ?
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