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30/03/2020 | FRANCE | N°19NT01840

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 30 mars 2020, 19NT01840


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Erquy environnement et habitat, M. et Mme L... D..., Mme B... I... et Mme K... H... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 avril 2016, par lequel le maire d'Erquy a délivré à la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) SPI un permis d'aménager un lotissement de 31 lots et au maximum 40 pour la construction de maisons individuelles et accessoirement l'accueil d'activités libérales sur un terrain situé rue de la Corniche.

Par un jugement no 1

602682 du 15 mars 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Erquy environnement et habitat, M. et Mme L... D..., Mme B... I... et Mme K... H... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 avril 2016, par lequel le maire d'Erquy a délivré à la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) SPI un permis d'aménager un lotissement de 31 lots et au maximum 40 pour la construction de maisons individuelles et accessoirement l'accueil d'activités libérales sur un terrain situé rue de la Corniche.

Par un jugement no 1602682 du 15 mars 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 mai 2019, 30 octobre 2019 et 28 novembre 2019, l'association Erquy environnement et habitat et M. et Mme L... D..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1602682 du 15 mars 2019 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 avril 2016 ;

3°) de condamner la commune d'Erquy à leur verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable ;

- les pièces, qui ont été exigées, notamment sur les remarques techniques, devaient faire l'objet d'une nouvelle instruction par les services consultés, étant précisé que le délai d'instruction avait été relancé ;

- l'arrêté en litige autorise un permis d'aménager de 40 lots destiné à la construction de maisons individuelles et de bâtiments accueillant des activités libérales alors même que les pièces fondamentales du dossier de demande ne font état que de 31 lots tous destinés à la construction de maisons individuelles et l'arrêté litigieux méconnait donc les dispositions des articles L. 442-3 L. 442-12 et R. 442-21 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté litigieux méconnait les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté litigieux méconnait les dispositions de l'article 1AU3 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance de l'article 4 " mixité sociale " des dispositions générales du règlement du PLU ;

- l'arrêté litigieux méconnait les dispositions de l'article 1AU4 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- l'arrêté litigieux méconnait les dispositions de l'article 1AU9 du règlement du plan local d'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 septembre 2019 et 2 décembre 2019, la commune d'Erquy, représentée par Me J..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de condamner solidairement les requérants à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme étant, de plus, inopérant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2019, la SAS SPI, représentée par Me M..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de condamner solidairement les requérants à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande, en tant qu'elle émane de M. et Mme D..., était irrecevable ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant les requérants, de Me A..., représentant la commune d'Erquy et de Me C... représentant la société SPI.

Considérant ce qui suit :

1. Le 3 novembre 2015, la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) SPI a déposé à la mairie d'Erquy une demande de permis d'aménager un lotissement de 31 lots et au maximum 40, pour la construction de maisons individuelles et accessoirement pour l'accueil d'activités libérales sur un terrain situé rue de la Corniche. Par un arrêté du 8 avril 2016, la maire d'Erquy a délivré le permis d'aménager sollicité. L'association Erquy environnement et habitat, M. et Mme L... D..., Mme B... I... et Mme K... H... ont demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 15 mars 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. L'association Erquy environnement et habitat et M. et Mme D... font appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que si la demande de permis d'aménager a été déposée le 3 novembre 2015, elle a été complétée le 15 janvier 2016 par la notice hydraulique " loi sur l'eau ", la convention de rétrocession des équipements communs et les réponses aux remarques techniques. Les avis du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) et de l'agence technique départementale ont été respectivement fournis les 5 janvier et 13 janvier 2016, soit avant l'apport des compléments précités. Cependant, il n'est pas établi que ces documents techniques, qui n'avaient pas vocation à modifier le projet, auraient été de nature à modifier le sens des avis déjà émis. Par conséquent, et alors même que le délai d'instruction de la demande a été prolongé de trois mois à compter de la réception de ces compléments, la commune n'avait pas à saisir à nouveau les organismes précités.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 442-3 du code de l'urbanisme : " La demande précise, outre les informations mentionnées à l'article R. 441-1, le nombre maximum de lots et la surface de plancher maximale dont la construction est envisagée dans l'ensemble du lotissement (...) ". Et aux termes de l'article R. 442-21 du même code : " Les subdivisions de lots provenant d'un lotissement soumis à permis d'aménager sont assimilées aux modifications de lotissements sauf (...) b) Lorsque ces subdivisions interviennent dans la limite du nombre maximum de lots autorisés, et résultent d'une déclaration préalable, d'un permis d'aménager, d'un permis valant division ou d'une division réalisée en application du a de l'article R. 442-1 dès lors que le lotisseur atteste de son accord sur cette opération par la délivrance d'une attestation. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le projet porte sur la création d'un lotissement de 31 lots et que le pétitionnaire se réserve la possibilité de procéder à une division ultérieure de certains lots pour aboutir à un maximum de 40 lots. Le dossier de demande de permis d'aménager mentionne, dans sa notice, une création de 31 lots avec un maximum de 40 lots. Si notamment le plan de composition ne fait apparaître que 31 lots, avec 17 places de stationnement public et 6 lots réservés au logement locatif social, il ressort des termes des dispositions précitées de l'article R. 442-21 du code de l'urbanisme que la subdivision éventuelle des lots de 31 à un maximum de 40 devra faire l'objet d'une déclaration ou autorisation, nécessitant des compléments sur les caractéristiques des lots créés et les obligations en découlant, telles celles relatives au stationnement ou au nombre de logements sociaux. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande de permis d'aménager ne peut qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage (...) est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. (...) En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature. (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'une opération qu'il est projeté de réaliser en agglomération ou, de manière générale, dans des espaces déjà urbanisés ne peut être regardée comme une " extension de l'urbanisation " que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions.

6. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe à 110 mètres du rivage de la mer et qu'il est situé sur une butte, en covisibilité de la mer. Dès lors, il doit être regardé comme un espace proche du rivage au sens des dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme précitées. Le projet porte sur la création de 31 lots au minimum et 40 lots au maximum, avec une surface minimum des lots allant de 148 m2 à 998 m2, destinés à la construction de maisons individuelles et accessoirement à l'activité libérale, sur un terrain de 18 975 m2, pour une superficie maximale de plancher de 9 700 m2, avec une superficie de 219 m2 de surface de stationnement et 4 073 m2 d'espaces verts (soit 21,5%). Les parcelles du lotissement en cause sont entourées de terrains déjà bâtis pour la plupart, classés en zone UC et se situent dans un quartier d'habitat balnéaire dense, situé à proximité immédiate du centre-bourg. Compte tenu de la localisation de ce projet au milieu d'un espace urbanisé et de l'absence de densification significative, le projet litigieux ne peut être regardé comme constituant une extension de l'urbanisation. Dès lors, les moyens tirés de ce que cette extension n'est pas limitée, n'est pas justifiée par le plan local d'urbanisme et n'a pas donné lieu à une autorisation du préfet ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 1AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) d'Erquy : " Un terrain pour être constructible doit disposer d'un accès sur une voie publique ou privée, ou bien le pétitionnaire doit produire une servitude de passage suffisante, instituée par acte authentique ou par voie judiciaire en application de l'article 682 du code civil (...) ". Il ressort des pièces du dossier, en particulier des plans et de la notice du projet d'aménagement, que le lotissement projeté est desservi par la rue de la Corniche au nord, la rue de la Franchise à l'est ainsi que par la rue Louis Veuillot à l'ouest. Comme l'indique le plan de composition, la rue des Forges bordant le périmètre du lotissement ne donne que sur les parties arrières des lots, qui disposent d'un unique accès sur la voie interne du lotissement, menant ensuite à la rue de la Corniche, la rue de la Franchise ou la rue Louis Veuillot. Dès lors, les circonstances que la rue des Forges ne serait pas une voie ouverte à la circulation publique et qu'aucune servitude de passage n'a été produite sont inopérantes, l'accès aux lots n° 17 et 20 à 27 ne s'effectuant pas par cette voie, contrairement à ce que soutiennent les requérants.

8. En cinquième lieu, les caractéristiques générales de la zone 1 AU, dans laquelle est située le projet litigieux, prévoient que : " au titre de l'article L. 123-2 d) du code de l'urbanisme, dans les zones 1AU, au moins 20 % du nombre de logements de toutes les opérations comprenant au moins 8, devront être affecté à la réalisation des logements locatifs à vocation sociale, dans le respect des objectifs de mixité sociale ". Il ressort des pièces du dossier que si le permis d'aménager litigieux ne prévoit que 6 logements sociaux, un permis d'aménager modificatif a été délivré le 30 novembre 2016, prenant en compte l'engagement du lotisseur à produire 20% de logements locatifs à vocation sociale au regard du nombre de logements qui seront réellement construits, selon le nombre de lots final, pouvant varier de 31 à 40. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

9. En sixième lieu, l'article AU4 du règlement du PLU dispose que : " Tout projet d'aménagement ou de construction devra respecter les règles définies dans la note technique du Schéma Directeur d'Assainissement des Eaux Pluviales, notamment les coefficients d'imperméabilisation et les débits de rejet. Pour information, le débit d'apport des terrains, après imperméabilisation, ne doit pas dépasser le débit d'apport naturel indiqué dans la note technique : - Cimpfutur = 0,5 pour les zones AU, AUb, AUc, et Auah ". La société SPI fait valoir sans être ensuite sérieusement contestée, au moyen d'un calcul détaillé, que le coefficient d'imperméabilisation du projet est de 0,5, alors que les requérants ne précisent pas leurs modalités de calcul d'une moyenne pondérée.

10. En septième et dernier lieu, aux termes de l'article R. 151-21 du code de l'urbanisme : " (...) Dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, l'ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d'urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose. ". Les dispositions générales du règlement du PLU relatives à la zone 1AU disposent que : " (...) L'urbanisation de toute ou partie de la zone ne pourra se faire qu'après la réalisation ou la programmation des équipements publics primaires donnant aux terrains un niveau d'équipement suffisant correspondant aux conditions particulières prévues par le présent règlement. Lorsque ces conditions sont remplies, les règles de constructions applicables aux différentes zones portées au plan sont celles des zones urbaines affectées du même indice (ex : 1 AUC = UC ; 1 AUE = UE ...), sauf règles particulières prévues par les orientations d'aménagement spécifiques, le zonage ou le présent règlement. " L'article 1AU 9 ne prévoit pas de règle mais l'article UC9, qui était applicable au projet litigieux dès lors que la programmation des équipements publics primaires était prévue, dispose que " l'emprise au sol cumulée des constructions ne devra pas excéder 40% de la superficie du terrain ". Le projet prévoit un règlement de lotissement dont l'article 9 dispose : " L'emprise au sol autorisée à l'échelle du périmètre de l'opération est de 40 %. ". Contrairement à ce que soutiennent les requérants, la règle d'emprise au sol s'apprécie non pas lot par lot mais à l'échelle de l'ensemble du lotissement. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 1AU9 et UC9 du règlement du PLU ne peut qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande de 1ère instance en tant qu'elle émanait de M. et Mme D..., que l'association Erquy environnement et habitat et M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune d'Erquy, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre de ces dispositions. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants les sommes demandées au titre des dispositions précitées par la commune d'Erquy et par la société SPI.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Erquy environnement et habitat et de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Erquy et par la société SPI au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Erquy environnement et habitat, à M. et Mme L... D..., à la commune d'Erquy et à la société par actions simplifiée SPI.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Côtes-d'Armor.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, président assesseur,

- Mme G..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 30 mars 2020.

Le rapporteur,

P. G...

Le président,

T. CELERIER Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet des Côtes d'Armor en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT01840


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT01840
Date de la décision : 30/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SARL ANTIGONE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-03-30;19nt01840 ?
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