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24/01/2020 | FRANCE | N°19NT00683

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 24 janvier 2020, 19NT00683


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... et Mme I... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 22 juin 2017 par lequel le maire de Rennes a délivré un permis de construire à la société SPI, ainsi que le rejet de leurs recours gracieux.

Par un jugement n° 1705347 du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 février 2019 et 13 août 2019, M. et Mme A... D...

et Mme I... B..., représentés par Me E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... et Mme I... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 22 juin 2017 par lequel le maire de Rennes a délivré un permis de construire à la société SPI, ainsi que le rejet de leurs recours gracieux.

Par un jugement n° 1705347 du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 février 2019 et 13 août 2019, M. et Mme A... D... et Mme I... B..., représentés par Me E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 juin 2017 et les rejets de leur recours gracieux ;

3°) de condamner la commune de Rennes et la société SPI à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable ;

- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant de la réponse au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 151-34 du code de l'urbanisme ;

- il n'est nullement établi qu'à la date à laquelle la direction régionale des affaires culturelles s'est prononcée, celle-ci avait pu prendre connaissance des modifications apportées au dossier de demande de permis ;

- le dossier de demande de permis de construire comporte des incohérences concernant le soubassement de la façade sur rue, les pignons et les percements ;

- le dossier de demande de permis de construire comporte des erreurs de calculs de niveaux et/ou de cotes, ce qui compromet la mise en oeuvre du permis ;

- l'article UA11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) a été méconnu ;

- l'article UA 12 du règlement du PLU méconnait l'article L. 151-34 du code de l'urbanisme ainsi que le plan de déplacement urbain, ce qui entache d'illégalité le permis.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 juin 2019 et 27 août 2019, la société SPI, représentée par Me J..., demande à la cour de rejeter la requête et de condamner les requérants à lui verser 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance était irrecevable dès lors que les requérants n'avaient pas intérêt à agir ;

- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 juillet 2019 et 22 août 2019, la commune de Rennes, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, de faire application des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

3°) en toute hypothèse, de condamner conjointement et solidairement les requérants à lui verser 2 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un courrier du 26 septembre 2019, les parties ont été informées, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, que la cour était susceptible de surseoir à statuer pour permettre la régularisation du vice tiré de la méconnaissance de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme, s'agissant des lucarnes du projet.

La commune de Rennes a produit des observations en réponse à ce courrier, par un mémoire enregistré le 14 octobre 2019.

Elle soutient que les ouvertures considérées ne sont pas des lucarnes au sens de l'article UA11 du règlement du PLU.

M. et Mme D... et Mme B... ont produit des observations en réponse à ce courrier, par un mémoire enregistré le 25 octobre 2019, ainsi que par un mémoire enregistré le 27 décembre 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué.

Ils soutiennent que les ouvertures en cause correspondent bien à la définition de lucarnes et que l'article UA 11 du règlement du PLU a été méconnu.

La société SPI a produit des observations en réponse à ce courrier, par un mémoire enregistré le 6 décembre 2019.

Elle soutient que les fenêtres donnant sur le 4e niveau de la construction (ou 3e étage) ne sont pas des " lucarnes " au sens du PLU de la ville de Rennes et au sens de la jurisprudence et ne doivent pas être considérées comme des ouvrages de toitures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme H...,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant M. et Mme D... et Mme B..., et de Me G..., représentant la commune de Rennes.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 22 juin 2017, le maire de Rennes a délivré à la société SPI un permis de construire un immeuble devant comporter 13 logements, pour une surface de plancher de 537 m². M. et Mme D... et Mme B..., voisins du projet en cause, ont formé des recours gracieux, qui ont été rejetés respectivement les 5 et 17 octobre 2017. Ils ont ensuite demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de cet arrêté et du rejet de leurs recours gracieux. Par un jugement du 17 décembre 2018, le tribunal a rejeté leur demande. Ils font appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Il ressort du point 8 du jugement attaqué que la réponse à une des branches du moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'article 12 du règlement du PLU, dès lors qu'il méconnait l'article L. 151-34 du code de l'urbanisme est, contrairement à ce que soutiennent les requérants, suffisamment motivée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de 1ère instance :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ". Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que les demandeurs, qui ont établi détenir régulièrement leurs biens, sont les voisins immédiats du projet litigieux. Au vu des caractéristiques de ce projet et notamment de sa façade sur cour comportant des balcons, des vues directes seront créées sur les propriétés des requérants, Mme B... pouvant en outre subir une perte d'ensoleillement. Dès lors, et alors même que les propriétés des intéressés subiraient déjà des vues sur leurs propriétés, la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir des demandeurs doit être écartée.

En ce qui concerne l'irrégularité de l'avis émis par l'architecte des bâtiments de France :

5. Il ressort des pièces du dossier que l'architecte des bâtiments de France a émis un avis le 3 mai 2017 et a pu examiner le dossier de demande de permis de construire tel qu'il avait été complété le 3 avril 2017. Par conséquent, le moyen tiré de ce que l'architecte des bâtiments de France se serait prononcé sur un dossier incomplet doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne le moyen tiré des incohérences et erreurs mentionnées dans le dossier de demande de permis de construire :

6. Aux termes de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme : " Sont joints à la demande de permis de construire : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Le projet architectural défini par l'article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 431-8 à R. 431-12. ". L'article R. 431-8 du même code dispose que : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ".

7. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

8. Aux termes de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme : " (...) Matériaux/ Sont proscrits les matériaux anciens en contre-emploi avec l'architecture du projet ainsi que l'emploi à nu en parements extérieurs de matériaux de remplissage ou fabriqués en vue d'être recouverts d'un enduit./ Les murs séparatifs et les murs aveugles d'un bâtiment doivent, lorsqu'ils ne sont pas construits avec les mêmes matériaux que les murs des façades principales, avoir un aspect qui s'harmonise avec celui des dites façades./ Les toitures sont couvertes par des matériaux adaptés à l'architecture du projet. (...) ".

9. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la notice architecturale mentionne que le soubassement du projet sur rue est en granit alors que le plan de la façade correspondant mentionne que le soubassement est en béton avec une peinture de teinte granite rouille. Toutefois, au vu des dispositions précitées, il n'est pas établi que cette incohérence ait eu une influence sur l'appréciation portée par le service instructeur sur le respect de ces dispositions. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il n'y a pas d'incohérence entre la notice architecturale indiquant que les pignons reprendront les éléments des bâtiments existants (briques ou pierre de Pont Réan) mais dans un registre contemporain, et les plans joints au dossier de demande mentionnant " béton peint couleur brique ". Il n'y a pas davantage d'incohérence entre la notice indiquant que les percements sont encadrés en pierre calcaire alors que les plans mentionnent seulement une teinte pierre calcaire, sans préciser le matériau utilisé. En outre, il n'est pas établi que ces mentions aient eu une influence sur l'appréciation portée par le service instructeur sur le respect des dispositions de l'article UA 11 et sur l'appréciation portée par l'architecte des bâtiments de France.

10. En second lieu, s'il est constant que la cote NGF du rez-de-chaussée est erronée sur les plans du dossier de demande de permis de construire, le niveau correspondant, de 3m50 et ne comportant pas d'inexactitude, était également mentionné. En tout état de cause, comme le reconnaissent les requérants eux-mêmes, cette circonstance ne serait que de nature à faire obstacle à une exécution du permis de construire et est ainsi sans influence sur la légalité de ce dernier. Il en est de même de la circonstance, non précisée par les requérants et à la supposer établie, que le chéneau encaissé ne pourrait pas assurer une évacuation des eaux de pluies conformes aux règles de l'art.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme :

11. Aux termes de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) : " Rappel : En vertu de l'article R.111-21 du Code de l'Urbanisme " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales". (...) Tous les travaux exécutés sur un bâtiment faisant l'objet d'une protection au titre de l'article L.123-1-5-III-2° du Code de l'Urbanisme, doivent être conçus en prenant en compte les caractéristiques culturelles ou historiques constituant leurs intérêts, tels qu'ils sont présentés dans l'annexe "Patrimoine d'intérêt local - recensement des éléments". En outre, les projets contigus aux bâtiments ainsi protégés, ou au titre des Monuments Historiques, doivent être élaborés dans la perspective d'une bonne insertion urbaine. Pour les éléments de patrimoine repérés aux documents graphiques à titre d'information dans l'annexe "Patrimoine d'intérêt local - recensement des éléments", le projet de construction ou d'extension de ce bâtiment doit tenir compte de l'intérêt de l'élément repéré. (...) Toitures (...) Les lucarnes et les fenêtres de toit correspondent à l'éclairage limité du volume d'un comble. Leur inscription doit être soucieuse du rapport au volume bâti et doit respecter une hiérarchie entre les percements de la façade et ceux en combles. L'écriture des percements en combles et leur importance doivent être moindres que ceux des façades du bâtiment. Les lucarnes quelle que soit leur forme ne dépassent pas en longueur la moitié de la longueur de la toiture. (...) Façades Les constructions font l'objet d'une recherche notamment dans la composition des ouvertures, de l'organisation des entrées et de l'accroche aux constructions limitrophes. (...) ".

12. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la longueur de la toiture est de 12,75 mètres et que la longueur cumulée des 5 lucarnes prévues est de 7,25 mètres, alors qu'au regard des dispositions précitées de l'article UA 11, leur longueur cumulée, quelle que soit leur forme, ne pouvait excéder 6,38 mètres. Le pétitionnaire ne saurait se prévaloir d'une adaptation mineure, dès lors qu'il ne ressort ni de l'arrêté attaqué ni des écritures de la commune que cette-dernière ait entendu permettre une telle adaptation mineure. Surtout, il n'est pas établi qu'elle serait rendue nécessaire par le caractère des constructions avoisinantes. Si la commune et le pétitionnaire font valoir qu'il ne s'agit pas de lucarnes au sens de l'article UA 11, leurs seules dimensions ne sauraient y faire obstacle, dès lors que ces ouvertures sont en saillie dans une partie de la toiture et, ne peuvent pas être regardées comme ne constituant que le prolongement de la façade. Ainsi, il y a lieu d'accueillir cette première branche du moyen.

13. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que l'architecture du projet respecte, par ses dimensions, les caractéristiques des ouvertures et les teintes choisies, l'architecture des bâtiments voisins, et en particulier ceux contigus, protégés au titre du 2° du III de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, en vigueur à la date d'approbation du PLU au vu de leur intérêt architectural et historique. Si la façade arrière du projet présente notamment une façade courbe avec des balcons, les façades à l'arrière des bâtiments avoisinants présentent des caractéristiques relativement hétérogènes. D'ailleurs, l'architecte des bâtiments de France a émis un avis favorable au projet. Dès lors, la seconde branche du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écartée.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'article UA 12 du règlement du plan local d'urbanisme :

14. Il ressort des pièces du dossier que l'article UA 12 du règlement du PLU ne prévoit aucune place de stationnement en centre ville si le programme est inférieur ou égal à 20 logements.

15. Si le permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation. Par suite, un requérant demandant l'annulation d'un permis de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut. Cependant, il résulte de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme que la déclaration d'illégalité d'un document d'urbanisme a, au même titre que son annulation pour excès de pouvoir, pour effet de remettre en vigueur le document d'urbanisme immédiatement antérieur. Dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu'un permis de construire a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

16. Les requérants soutiennent que le permis de construire a été délivré au vu de l'article UA 12 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) qui est illégal. Ils soutiennent en outre que préalablement à la modification litigieuse, le règlement imposait la réalisation de 0,8 place de stationnement/ logement et qu'ainsi, le projet aurait dû prévoir au moins 11 places de stationnement, alors qu'il n'en prévoit aucune. Dès lors, ce moyen est opérant.

17. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-34 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le règlement peut ne pas imposer la réalisation d'aires de stationnement lors de la construction : 1° De logements locatifs financés avec un prêt aidé par l'Etat ; 2° Des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnés au 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ; 3° Des résidences universitaires mentionnées à l'article L. 631-12 du code de la construction et de l'habitation. ". Contrairement à ce que soutiennent les requérants, et au vu notamment des articles précédents et suivants du code de l'urbanisme, les dispositions précitées de l'article L. 151-34 du code de l'urbanisme ne fixent pas une liste limitative des cas dans lesquels le règlement d'un plan local d'urbanisme peut ne pas imposer la réalisation d'aires de stationnement.

18. En second lieu, aux termes de l'article L. 1214-2 du code des transports : " Le plan de déplacements urbains vise à assurer : 1° L'équilibre durable entre les besoins en matière de mobilité et de facilités d'accès, d'une part, et la protection de l'environnement et de la santé, d'autre part ; 2° Le renforcement de la cohésion sociale et urbaine, notamment l'amélioration de l'accès aux réseaux de transports publics des personnes handicapées ou dont la mobilité est réduite, ainsi que des personnes âgées ; 3° L'amélioration de la sécurité de tous les déplacements, en opérant, pour chacune des catégories d'usagers, un partage de la voirie équilibré entre les différents modes de transport et en effectuant le suivi des accidents impliquant au moins un piéton ou un cycliste ; 4° La diminution du trafic automobile ; 5° Le développement des transports collectifs et des moyens de déplacement les moins consommateurs d'énergie et les moins polluants, notamment l'usage de la bicyclette et la marche à pied ; 6° L'amélioration de l'usage du réseau principal de voirie dans l'agglomération, y compris les infrastructures routières nationales et départementales, par une répartition de son affectation entre les différents modes de transport et des mesures d'information sur la circulation ; 7° L'organisation du stationnement sur la voirie et dans les parcs publics de stationnement, notamment en définissant les zones où la durée maximale de stationnement est réglementée, les zones de stationnement payant, les emplacements réservés aux personnes handicapées ou dont la mobilité est réduite, la politique de tarification des stationnements sur la voirie et dans les parcs publics corrélée à la politique de l'usage de la voirie, la localisation des parcs de rabattement à proximité des gares ou aux entrées de villes, les modalités particulières de stationnement et d'arrêt des véhicules de transport public, des taxis et des véhicules de livraison de marchandises, les mesures spécifiques susceptibles d'être prises pour certaines catégories d'usagers, notamment tendant à favoriser le stationnement des résidents et des véhicules bénéficiant du label " autopartage " tel que défini par voie réglementaire ; (...) ".

19. Aux termes de l'article 28-1-2 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, à présent codifié à l'article L. 1214-4 du code des transports : " Le plan de déplacements urbains délimite les périmètres à l'intérieur desquels les conditions de desserte par les transports publics réguliers permettent de réduire ou de supprimer les obligations imposées par les plans locaux d'urbanisme et les plans de sauvegarde et de mise en valeur en matière de réalisation d'aires de stationnement, notamment lors de la construction d'immeubles de bureaux, ou à l'intérieur desquels les documents d'urbanisme fixent un nombre maximum d'aires de stationnement à réaliser lors de la construction de bâtiments à usage autre que d'habitation. Il précise, en fonction notamment de la desserte en transports publics réguliers et, le cas échéant, en tenant compte de la destination des bâtiments, les limites des obligations imposées par les plans locaux d'urbanisme et les plans de sauvegarde et de mise en valeur en matière de réalisation d'aires de stationnement pour les véhicules motorisés et les minima des obligations de stationnement pour les véhicules non motorisés. " Aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : (...) 3° Les plans de déplacements urbains prévus à l'article L. 1214-1 du code des transports ; ".

20. Il résulte de ces dispositions qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les plans de déplacements urbains peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des plans de déplacements urbains, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un plan de déplacements urbains, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le plan de déplacements urbains, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

21. Le plan de déplacements urbains (PDU) 2007-2017 de Rennes métropole indique qu'il faut " prévoir suffisamment d'emplacements sur le domaine privé pour que les véhicules n'occupent pas de manière inconsidérée l'espace public " et que " de fait, les règlements de PLU ne pourront pas y envisager, pour les constructions à usage de logements, des obligations de réalisation d'aires de stationnement supérieures aux niveaux suivants. Ils pourront cependant justifier de niveaux inférieurs, selon la spécificité de certains secteurs spécifiques ou en fonction de dispositions particulières (mutualisation par exemple) ". Il mentionne également, au titre de l'axe n°1, intitulé " Développer un urbanisme favorable aux modes alternatifs ", la réduction des exigences de création de stationnement dans les zones " bien desservies par les transports collectifs " : " Toute politique en faveur des modes alternatifs doit être accompagnée d'une action volontaire sur le stationnement. En limitant l'accessibilité de la voiture par la réduction des capacités de stationnement, les solutions alternatives gagneront en attractivité. Les communes sont invitées à encourager sur leur territoire ces mesures en prenant plusieurs initiatives, parmi lesquelles : - La réduction des normes dans les zones bien desservies par les transports collectifs pour ne pas encourager à la motorisation excessive des ménages ".

22. D'une part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le plan de déplacements urbains, s'il mentionne une réduction des capacités de stationnement et des niveaux inférieurs, n'interdit pas, pour certains projets, que le règlement du PLU n'impose aucune place de stationnement.

23. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet, s'il prévoit la suppression de quelques places de stationnement, est situé dans le centre-ville, dans un quartier desservi par les transports publics et comportant de nombreuses places de stationnement dans des rues situées à moins de 10 minutes de marche, avec en particulier le parking Hoche comportant 777 places, dont il n'est pas établi qu'elles seraient insuffisantes et ne pourraient pas être utilisées par des résidents. Dès lors, l'incompatibilité de l'article UA 12 du règlement du PLU avec le PDU n'est pas établie.

24. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité des dispositions de l'article UA 12 du règlement du PLU doit être écarté.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

25. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

26. Il résulte de ce qui précède que l'illégalité mentionnée au point 12 peut être régularisée par un permis de régularisation. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt afin que, dans ce délai, la commune de Rennes et le pétitionnaire procèdent à une régularisation et notifient à la cour le permis de construire obtenu.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête présentée par M. et Mme D... et Mme B..., jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, pour permettre à la commune de Rennes et à la société SPI de notifier à la cour un permis de construire régularisant le vice tiré de la méconnaissance de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme, s'agissant des lucarnes.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... D..., à Mme I... B..., à la commune de Rennes et à la société SPI.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, président assesseur,

- Mme H..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 janvier 2020.

Le rapporteur,

P. H...

Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00683


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00683
Date de la décision : 24/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SCP ARES BOIS COLLET LEDERF-DANIEL LE DANTEC

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-01-24;19nt00683 ?
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