Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association les Michelais rouge de colère a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2015 par lequel le préfet de la Vendée a approuvé le plan de prévention des risques littoraux (PPRL) prévisibles ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1603567 du 27 juin 2018 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2018 sous le n° 18NT03231 et mémoire enregistré le 25 avril 2019, l'association Les Michelais rouge de colère, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 juin 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Vendée du 30 novembre 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les modalités d'association et de concertation prévues à l'article R. 562-2 du code de l'environnement ont été méconnues ; aucun comité de pilotage du Bassin du Lay n'a été mis en place privant ainsi les personnes publiques associées d'une garantie ;
- le périmètre du PPRL n'est pas pertinent en ce qu'il inclut la commune de St Michel en l'Herm qui n'est pas riveraine de la rivière du Lay et n'a jamais été inondée ; le risque n'est pas établi ;
- une erreur a été commise quant au niveau de référence ;
- une erreur manifeste d'appréciation a été commise faute de prise en compte des ouvrages de protection et du classement de certaines parcelles en zone Ru.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique:
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. D...,
- et les observations de Me B..., représentant l'association Les Michelais rouges de colère.
Considérant ce qui suit :
1. Le 22 février 2012, le préfet de la Vendée a prescrit l'élaboration du plan de prévention des risques naturels prévisibles littoraux (PPRL) du Bassin du Lay, ayant pour périmètre le territoire des communes d'Angles, Grues, La Tranche-sur-Mer, Longeville-sur-Mer, Saint-Benoist-sur-Mer, Saint-Denis-du-Payré, Saint-Michel-en-l'Herm et Triaize. Ce plan a été approuvé par un arrêté du 30 novembre 2015. L'association les Michelais rouge de colère a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté, ainsi que de la décision par laquelle le préfet a implicitement rejeté son recours gracieux. Par un jugement du 27 juin 2018 dont l'association relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. Sont associés à l'élaboration de ce projet les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés (...) ". Aux termes de l'article R. 562-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte. Il désigne le service déconcentré de l'Etat qui sera chargé d'instruire le projet. / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation et de l'association des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale concernés, relatives à l'élaboration du projet. (...) ". Aux termes de l'article 70 de la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, alors applicable : " Lorsque l'autorité administrative, avant de prendre une décision, procède à la consultation d'un organisme, seules les irrégularités susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise au vu de l'avis rendu peuvent, le cas échéant, être invoquées à l'encontre de la décision. / L'alinéa précédent s'applique également aux consultations ouvertes conduites en application de l'article 16 de la présente loi. ".
3. La concertation à destination du public prévue par ces dispositions doit porter sur la nature et les options essentielles du projet et se dérouler avant que celui-ci ne soit arrêté. Il incombe, par ailleurs, à l'autorité administrative de veiller au bon déroulement de la consultation dans le respect des modalités qu'elle a elle-même fixées. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. L'arrêté du 22 février 2012 du préfet de la Vendée prescrivant l'élaboration d'un plan de prévention des risques littoraux (PPRL) a, au titre des modalités d'association et de consultation, prévu la constitution d'un comité de pilotage composé des communes directement concernées, du département de la Vendée ainsi que de plusieurs communautés de communes, services et organismes publics. L'article 6 de cet arrêté prévoit que " au fur et à mesure de l'avancement du projet de plan de prévention des risques, seront organisées à l'initiative du préfet, des réunions de ce comité de pilotage, en qualité et en nombre au regard des enjeux et du contexte particulier ".
5. Il est constant que les réunions des 5 septembre 2013, 25 octobre 2013 et 11 février 2014 destinées à la caractérisation des risques ont été communes aux PPRL du Bassin du Lay, du Marais poitevin-Sèvre niortaise et du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) du Lay aval. Les deux réunions suivantes, des 28 mai et 10 juillet 2014, relatives à la présentation d'un avant-projet de plan et du bilan de la concertation et des propositions d'évolution ont été communes aux PPRL du Bassin du Lay et du Marais poitevin-Sèvre niortaise. La dernière réunion du 24 septembre 2014, spécifique au PPRL du Bassin du Lay, avait pour objet de présenter les évolutions du projet afférent à ce plan.
6. Il ressort des pièces du dossier et notamment des comptes-rendus de ces réunions que les observations ou suggestions formulées sur les PPRL ont bien été distinguées et rattachées à chacun des plans en cours d'élaboration. En complément des réunions évoquées ci-dessus, une réunion a été organisée avec les élus de Grues, de Triaize et de St Michel-en-l'Herm le 7 juillet 2014 et une autre, avec les seuls élus de cette dernière commune, le 24 juillet 2014, aux fins de répondre à leurs interrogations. En outre, le préfet a, par des courriers du 11 août 2014, apporté des éclaircissements aux observations ayant pu être émises par les élus quant à la situation propre à chacune des communes intéressées. Des évolutions ont été apportées au projet de PPRL afin de tenir compte des observations formulées au cours de ce processus.
7. Dans ces conditions, alors même que le rapport de la commission d'enquête regrette qu'un travail d'explications plus approfondi n'ait pas été effectué et à supposer même, comme il est mentionné par des attestations rédigées par des élus ayant participé à ces réunions, que le nombre de participants ou l'ampleur et la complexité des questions débattues aient pu rendre le débat plus difficile, les modalités de la concertation mises en oeuvre par le préfet de la Vendée, qui n'excluaient pas que des travaux préparatoires soient communs à plusieurs plans de prévention, n'ont pas été de nature à priver les communes sur le territoire duquel le PPRL du Bassin du Lay a vocation à s'appliquer, d'une garantie.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L 562-1 du code de l'environnement : " I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, (...) / II.- Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; (...) ".
9. Il est constant que la commune littorale de St Michel-en-l'Herm est située dans la zone aval du bassin versant du Lay. L'étude d'aléas liée à la probabilité de survenue d'un évènement naturel de grande intensité sur un territoire donné, qui a été réalisée en vue de l'établissement du PPRL, a notamment tenu compte de l'historique des principales inondations et tempêtes survenues dans le passé et des caractéristiques physiques de ce secteur. Elle a permis de constater que le territoire de la commune, zone de marais de faible altimétrie, peut être concerné, non seulement par le phénomène d'érosion du trait de côte ou par l'aléa de submersion marine mais également par des inondations terrestres provoquées par une crue du Lay, des ruptures de digues en terre dont l'érosion est importante et qui présentent plusieurs points d'entrée des eaux. Si lors de la tempête Xynthia, la limite de submersion a été constatée à un km du bourg tout en recouvrant une grande partie des terres agricoles du marais poitevin dans la partie sud de la commune, il a également été observé que la zone d'inondation terrestre au nord du bourg était en lien avec une remontée d'eau par les étiers. En outre, les extensions de l'urbanisation sont de nature à exposer la population à un risque accru pour sa sécurité.
10. Dans ces conditions, alors même que les bassins du Lay, du Lay aval et de la Sèvre niortaise présentent d'importantes similitudes et l'intégralité du territoire de la commune de St Michel-en-l'Herm étant soumise aux aléas mentionnés ci-dessus, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le PPRL l'a inclus, dans sa totalité, dans le périmètre du PPRL du Bassin du Lay.
11. En troisième lieu, le niveau marin retenu pour déterminer l'évènement de référence a tenu compte à la fois de l'évènement historique le plus fort connu, soit en l'espèce du niveau enregistré par le marégraphe de La Pallice, près de La Rochelle, lors de la tempête Xynthia, de 4,50 m A..., l'analyse des niveaux des laisses de mer dans l'estuaire du Lay conduisant à retenir un niveau de 4,70 m A... auquel ont été ajoutés 20 cm, ainsi que du niveau marin d'occurrence centennale, évalué en 2008, par le service hydrographique et océanographique de la marine entre 3,90 m et 4,10 m A..., niveaux majorés de 60 cm à l'horizon 2100 afin de tenir compte de l'impact du changement climatique. Ainsi, il n'est pas établi que la détermination du risque de submersion marine serait fondée sur des éléments erronés.
12. En dernier lieu, les requérants critiquent le manque de fiabilité de la méthode utilisée dans le cadre de l'élaboration du PPRL en arguant de l'absence de prise en compte de la " digue des habitants ", de l'imprécision des relevés altimétriques et de l'existence de phénomènes naturels tels que l'envasement ou la dispersion des produits de la submersion, cette carence conduisant à des classements erronés de certaines parcelles.
13. Pour caractériser le risque, l'administration a tenu compte du caractère urbanisé ou non de la zone considérée ainsi que des caractéristiques des lieux, tant dans leur état naturel, en particulier de l'altimétrie du terrain, que du fait de l'édification d'ouvrages.
14. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort des pièces du dossier que les ouvrages de protection contre les eaux, au titre desquels figure en particulier la " digue des habitants ", ont été pris en considération par le préfet tout comme la vitesse d'écoulement de l'eau ou les phénomènes naturels constatés sur le site en cause. Il a, en particulier, été observé que les ouvrages de protection n'ont pu contenir l'avancée des inondations lors de la tempête Xynthia. La méthode Lidar employée par l'administration, fondée sur l'émission d'impulsions d'ondes lumineuses à partir d'un laser topographique aéroporté, a permis de disposer de très nombreux points de mesure des territoires concernés ayant une altitude inférieure à 10 m A... avec une densité de 500 à 700 points pour une parcelle de 500 à 700 m2, dont la précision verticale est de l'ordre du décimètre minimisant ainsi les risques d'erreur. Si consécutivement à la production de relevés altimétriques de géomètres, des ajustements quant au classement de certains biens ont été opérés par l'administration, après un examen de situations particulières, cette circonstance ne saurait démontrer que la méthode utilisée aurait été inappropriée et entachée d'une approximation telle que le risque de submersion ne pourrait être considéré comme susceptible de mettre en danger la vie des habitants.
15. Il résulte de ce qui précède que l'association Les Michelais rouge de colère n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les frais du litige :
16. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association Les Michelais rouge de colère demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association Les Michelais rouge de colère est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Les Michelais rouge de colère, au ministre de la transition écologique et solidaire .
Une copie sera adressée au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020, où siégeaient :
- M. Perez, président de chambre,
- Mme C..., président-assesseur,
- M. Giraud, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 24 janvier 2020 .
Le rapporteur,
C. C...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT03231