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20/12/2019 | FRANCE | N°19NT03856

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 20 décembre 2019, 19NT03856


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 30 avril 2019 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique, d'une part, a prononcé son transfert aux autorités espagnoles, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1904598 du 20 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2019, M. A..., représenté par Me F..., demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 mai 2019 ;

2°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 30 avril 2019 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique, d'une part, a prononcé son transfert aux autorités espagnoles, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1904598 du 20 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2019, M. A..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 mai 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 30 avril 2019 du préfet de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans les meilleurs délais ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

en ce qui concerne l'arrêté de remise aux autorités espagnoles :

- il n'est pas suffisamment motivé ;

- il est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait et de droit dès lors que ses empreintes ne peuvent avoir été enregistrées en Espagne le 16 septembre 2018 alors qu'il se trouvait déjà en France ; une telle erreur fausse les délais et le prive de garanties ;

- la décision méconnait les articles 10 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, qui n'a pas été examiné, et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à sa relation stable et ancienne avec une compatriote, avec laquelle il s'est marié, et dont la demande d'asile en France est en cours d'examen ;

- la décision révèle que le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle, au regard de son état de santé tant en France qu'au regard des insuffisances de sa prise en charge en Espagne ;

- l'arrêté est intervenu sans examen du risque de violation des articles 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de son vécu à son arrivée en Espagne et des insuffisances de la prise en charge des demandeurs d'asile par cet Etat ;

- l'arrêté procède d'une application manifestement erronée de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales tant au regard de sa situation sanitaire que familiale ;

en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

- elle n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant réadmission ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle le prive de son droit à un recours effectif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2019, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les observations de Me F..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 10 avril 1997, est entré irrégulièrement en France où il a sollicité l'asile auprès des services de la préfecture de la Loire-Atlantique le 3 octobre 2018. Les recherches conduites par la préfecture sur le fichier Eurodac ont fait apparaître qu'il avait franchi irrégulièrement la frontière espagnole le 16 septembre 2018. Les autorités espagnoles ont été sollicitées le 15 octobre 2018 aux fins d'une prise en charge, en application de l'article 13.1 du règlement (UE) n° 604/2013. En application de l'article 22.7 du même règlement, une décision implicite d'acceptation de la requête aux fins de prise en charge est née le 15 décembre 2018 du silence gardé par les autorités espagnoles sur la demande de prise en charge, confirmée par un accord explicite du 24 janvier 2019. Par des arrêtés du 30 avril 2019, le préfet de la Loire-Atlantique a décidé, d'une part, de remettre l'intéressé aux autorités espagnoles et, d'autre part, de l'assigner à résidence dans le département de la Loire-Atlantique pour une durée maximale de 45 jours renouvelable. Par la requête visée ci-dessus, M. A... demande à la cour d'annuler le jugement du 20 mai 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés, ainsi que l'annulation de ces décisions.

En ce qui concerne la décision de transfert aux autorités espagnoles :

2. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens invoqués en première instance tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté et de la méconnaissance de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Il y a lieu d'écarter ces moyens, non assortis devant la cour de précisions supplémentaires susceptibles d'en modifier l'appréciation, par les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par le premier juge aux points 5 et 9 de son jugement.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 (...) ". Aux termes de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, en temps utile à partir du moment où le préfet, autorité compétente, est informé de la présentation effective d'une demande de protection internationale et de ce que le demandeur est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement et, en tout cas, au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, au cours duquel l'intéressé peut faire valoir ses observations et tous éléments de sa situation, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.

5. Il est constant que M. A... s'est vu remettre, le 3 octobre 2018, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de son entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, dans une langue qu'il comprend. Si l'intéressé soutient qu'il a reçu tardivement, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, l'information prévue par l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 alors qu'elle aurait dû lui être délivrée le 12 septembre 2018, date alléguée de sa présentation à la plate-forme d'accueil des demandeurs d'asile, il demeure que cette information lui a été délivrée dans les conditions prévues au point précédent. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

6. En troisième lieu, M. A... soutient que la décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dès lors que lui est opposé un relevé d'empreintes effectué par les autorités espagnoles le 16 septembre 2018 alors qu'il était à cette date sur le territoire français où il se serait rendu auprès d'une association dès le 12 septembre 2018. Cependant les pièces au dossier ne permettent pas d'établir le bien-fondé des affirmations sur ce point de l'intéressé, dont la demande d'asile a été enregistrée en préfecture le 3 octobre 2018. Par ailleurs, la seule circonstance que les autorités françaises n'aient pas procédé à un relevé décadactylaire complet, en méconnaissance des dispositions de l'article 9 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013, ne saurait suffire à mettre en doute la fiabilité de la comparaison effectuée par Eurodac et, partant, à établir que l'intéressé ne serait pas entré illégalement sur le territoire des Etats membres par l'Espagne, eu égard à la force probante attachée au résultat positif d'Eurodac. Au demeurant, l'intéressé ne conteste pas être entré irrégulièrement en Espagne, dans les douze mois précédant sa demande d'asile. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 10 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Si le demandeur a, dans un Etat membre, un membre de sa famille dont la demande de protection internationale présentée dans cet Etat membre n'a pas encore fait l'objet d'une première décision sur le fond, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, à condition que les intéressés en aient exprimé le souhait par écrit ". L'article 2 du même règlement précise que les membres de la famille s'entendent, " dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine " comme " le conjoint du demandeur, ou son ou sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable (..) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. M. A... soutient qu'il a retrouvé en France sa compagne, Mme C... E..., dont la demande d'asile en France n'a pas encore fait l'objet d'une décision définitive. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant s'est borné à déclarer qu'il était célibataire à l'appui de sa demande d'asile puis a précisé, lors de l'entretien en préfecture, qu'il est le père de deux enfants mineurs qui vivent avec leur mère en Guinée. Parallèlement, Mme E... s'est déclarée célibataire lors du dépôt de sa demande d'asile en octobre 2018 sans mention du requérant. Les photographies présentes au dossier censées attester des fiançailles des intéressés, ainsi qu'une déclaration manuscrite non datée qui émanerait de Mme E..., présentant M. A... comme son conjoint, n'établissent pas le lien familial allégué. Si figure désormais également au dossier un document présenté comme un extrait d'acte de mariage guinéen, celui-ci comporte un en-tête imprimé comprenant une erreur grossière, et est signé par M. A... et Mme E... pour une union censée être intervenue le 22 juillet 2019 en Guinée, alors qu'ils se trouvaient sur le territoire français. Ainsi le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait intervenue sans examen de sa situation personnelle et en méconnaissance des dispositions citées au point précédent.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ".

10. Si M. A... fait état de l'existence de défaillances systémiques affectant les conditions d'accueil et de prise en charge des demandeurs d'asile en Espagne, les documents qu'il produit à l'appui de ses allégations ne permettent pas de tenir pour établi que sa demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités espagnoles dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que l'Espagne est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il suit de là, et alors que l'Espagne a donné son accord explicite le 24 janvier 2019 à la reprise en charge de l'intéressé, que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

11. En sixième lieu, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre État membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit. ". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et qu'en principe cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

12. Si M. A... fait valoir, outre sa situation familiale rappelée au point 8, qu'il se trouve dans une situation de particulière vulnérabilité en raison de son état de santé, les pièces au dossier, comprenant une réponse positive à une sérologie de l'hépatite B et des documents attestant de prises en charge médicales pour des soins dentaires, ophtalmologiques et d'orthopédie, ne permettent ni séparément, ni cumulativement, d'établir une telle situation. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, le préfet de la Loire-Atlantique n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 20130.

En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

13. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet peut prendre une mesure d'assignation à résidence à l'encontre d'un étranger qui fait l'objet d'une décision de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qui présente des garanties propres à prévenir le risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement.

14. En premier lieu, il résulte des points 2 à 7 du présent arrêt que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir, à l'encontre de la décision prononçant son assignation à résidence, de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités espagnoles.

15. En deuxième lieu, l'arrêté portant assignation à résidence de M. A... vise, notamment, les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment son 1° bis. Il comporte également les considérations de fait et les autres considérations de droit qui le fondent. M. A... n'est donc pas fondé à soutenir que cet arrêté serait insuffisamment motivé.

16. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mesure d'assignation à résidence de M. A..., dont le caractère disproportionné n'est pas établi en l'état des pièces soumises au débat, procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressé.

17. En quatrième lieu, M. A... a formé, dans le délai de recours applicable, un recours contentieux contre les décisions de remise et d'assignation devant le tribunal administratif de Nantes, puis a relevé appel du jugement rendu devant la présente cour. Il a pu, au cours de ces procédures, faire valoir l'ensemble des éléments nécessaires à l'appréciation de sa situation. Dans ces conditions il n'est pas fondé à soutenir que la décision d'assignation à résidence porterait atteinte à son droit à un recours effectif.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 30 avril 2019 du préfet de la Loire-Atlantique. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Me F... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président,

- M. B..., président assesseur,

- Mme G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2019.

Le rapporteur,

C. B...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03856


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03856
Date de la décision : 20/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : NERAUDAU

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-12-20;19nt03856 ?
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