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20/12/2019 | FRANCE | N°19NT03048

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 20 décembre 2019, 19NT03048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 20 mars 2019 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a prononcé son transfert aux autorités néerlandaises, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1903150 du 2 avril 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 avril 2019 ;

2°) d'annuler les ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 20 mars 2019 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a prononcé son transfert aux autorités néerlandaises, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1903150 du 2 avril 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 avril 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 20 mars 2019 du préfet de Maine-et-Loire ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de transmettre sa demande d'asile à l'OFPRA dans le délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir, de le munir d'une attestation de demande d'asile en procédure normale et de réexaminer sa situation dans le mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

en ce qui concerne l'arrêté de remise aux autorités néerlandaises :

- il n'a pas été signé par une autorité compétente ;

- il n'est pas suffisamment motivé ;

- il est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle et a commis une erreur de droit notamment en s'estimant lié par le mécanisme de détermination de l'Etat responsable prévu par le règlement Dublin III et en choisissant de le renvoyer aux Pays-Bas ;

- l'arrêté procède d'une application manifestement erronée de l'article 17 et méconnaît l'article 3.2 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile avec un risque de violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant réadmission aux Pays-Bas.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2019, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 juin 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant soudanais né le 15 janvier 1994, déclare être entré en France le 8 août 2018. Sa demande d'asile a été enregistrée le 14 janvier 2019. Suite au relevé de ses empreintes digitales, il a été constaté qu'il avait, le 2 septembre 2018, demandé la protection internationale aux autorités néerlandaises. Consécutivement à leur saisine par le préfet de Maine-et-Loire, les autorités néerlandaises ont accepté, le 29 janvier 2019, de le reprendre en charge. Par un jugement du 2 avril 2019, dont M. A... relève appel, sa demande d'annulation des deux arrêtés du 20 mars 2019 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire a décidé de le transférer aux Pays-Bas et l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours a été rejetée.

En ce qui concerne la décision de transfert :

2. En premier lieu, l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sans préjudice du second alinéa de l'article 11-1 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004, l'autorité compétente pour renouveler l'attestation de demande d'asile en application de l'article L. 742-1, procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile, assigner à résidence un demandeur d'asile en application du 1° bis du I de l'article L. 561-2 et prendre une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 est le préfet de département (...) ". Par ailleurs, l'article 11 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que " Le préfet de département est compétent en matière d'entrée et de séjour des étrangers ainsi qu'en matière de droit d'asile. / En matière d'asile, un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'asile peut donner compétence à un préfet de département et, à Paris, au préfet de police pour exercer ces missions dans plusieurs départements ". Enfin, l'article 1er de l'arrêté du 2 octobre 2018 du ministre de l'intérieur, également chargé de l'asile, dispose que " Par dérogation aux dispositions de l'arrêté du 20 octobre 2015 susvisé, le préfet du département de Maine-et-Loire est l'autorité administrative compétente pour procéder, en application de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile s'agissant des demandes d'asile enregistrées par le préfet du département de la Loire-Atlantique ou par le préfet du département de Maine-et-Loire, et s'agissant des demandes d'asile enregistrées par un autre préfet de département concernant des demandeurs domiciliés dans un département de la région Pays de la Loire ". Enfin, selon l'article 3 du même arrêté : " Les dispositions du présent arrêté sont applicables aux demandes d'asile enregistrées : 1° A compter du 1er octobre 2018 par le préfet de Maine-et-Loire ou par le préfet d'un autre département concernant les demandeurs domiciliés dans le département de Maine-et-Loire ou de la Sarthe (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'à la date du 20 mars 2019 à laquelle a été prise la décision de transfert de M. A... auprès des autorités néerlandaises, étaient applicables les dispositions de l'arrêté du 2 octobre 2018 du ministre de l'intérieur, également chargé de l'asile, qui confèrent au préfet de Maine-et-Loire compétence pour procéder, en application de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la détermination de l'Etat responsable de l'examen des demandes d'asile enregistrées par le préfet de la Loire-Atlantique ou par le préfet de Maine-et-Loire, et des demandes d'asile enregistrées par un autre préfet de département concernant des demandeurs domiciliés dans un des départements de la région des Pays-de-la-Loire. Si l'arrêté du 2 octobre 2018 a été adopté en vertu du dernier alinéa de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, supprimé par le décret n° 2019-38 du 23 janvier 2019, les dispositions de cet alinéa ont été transférées au sein de l'article 11-1 du décret du 29 avril 2004 précité auquel renvoie la nouvelle rédaction de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 2 octobre 2018 serait dépourvu de base légale. Le moyen tiré de l'incompétence du préfet de Maine-et-Loire pour prononcer le transfert de M. A... auprès des autorités néerlandaises doit donc être écarté.

3. En deuxième lieu, l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. / Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. (...)".

4. En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à- dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.

5. La décision litigieuse de transfert de M. A... auprès des autorités néerlandaises vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, dont ses articles 7.2 et 18, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier son article L. 742-3, et elle mentionne que les recherches entreprises sur le fichier Eurodac ont fait apparaître que l'intéressé avait déposé une première demande d'asile aux Pays-Bas. La décision comporte ainsi un exposé détaillé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de Maine-et-Loire s'est fondé pour considérer les Pays-Bas comme responsable de l'examen de la demande d'asile de M. A... et décider son transfert auprès des autorités de ce pays. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision ne satisferait pas à l'exigence légale de motivation doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 (...) ". Aux termes de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, en temps utile à partir du moment où le préfet, autorité compétente, est informé de la présentation effective d'une demande de protection internationale et de ce que le demandeur est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement et, en tout cas, au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, au cours duquel l'intéressé peut faire valoir ses observations et tous éléments de sa situation, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est vu remettre, le 14 janvier 2019, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de son entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, en langue arabe. Si l'intéressé soutient qu'il a reçu tardivement, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, l'information prévue par l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 alors qu'elle aurait dû lui être délivrée en août 2018, lorsqu'il s'est présenté à la plate-forme d'accueil des demandeurs d'asile, il demeure que ladite information lui a été délivrée dans les conditions prévues au point précédent. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. A..., qu'il a bénéficié, le 14 janvier 2019, soit avant l'intervention de la décision de transfert contestée, au sein des services préfectoraux, de l'entretien individuel prévu par les dispositions précitées. En l'absence notamment de tout élément permettant de supposer un défaut de formation ou de qualification de l'agent ayant mené cet entretien, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'aurait pas été conduit par une personne qualifiée en vertu du droit national. L'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent, lequel s'est borné à apposer ses initiales sur le compte-rendu, n'a pas privé le requérant de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien individuel. Enfin, le requérant ne peut en tout état de cause utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration qui traitent des mentions devant figurer sur les correspondances qui lui sont adressées. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Par ailleurs, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et, qu'en principe, cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

12. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen complet et rigoureux de la situation de M. A... et des conséquences de sa réadmission aux Pays-Bas, au regard notamment des garanties exigées par le respect du droit d'asile, ou aurait entaché sa décision d'une erreur de droit, alors que les autorités de cet Etat ont accepté sa réadmission sur le fondement du b) du 1 de l'article 18 dudit règlement et que les autorités italiennes ont explicitement décliné la demande française de réadmission en raison de la compétence néerlandaise, alors même que le requérant serait entré en Europe par l'Italie. D'autre part, l'arrêté contesté n'a ni pour objet ni pour effet de le contraindre à retourner au Soudan. Par suite, doivent être écartés les moyens tirés de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et en prononçant son transfert aux autorités néerlandaises, le préfet, dont il n'est pas démontré qu'il se serait cru en situation de compétence liée, aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen de sa situation personnelle, d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 17 du règlement n° 604/2013 ou bien encore d'une méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir, à l'encontre de la décision prononçant son assignation à résidence, de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités néerlandaises.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 20 mars 2019 du préfet du Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., à Me C..., et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président,

- M. B..., président assesseur,

- Mme D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2019.

Le rapporteur,

C. B...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03048


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03048
Date de la décision : 20/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : PAPINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-12-20;19nt03048 ?
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