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29/11/2019 | FRANCE | N°19NT00574

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 29 novembre 2019, 19NT00574


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... F... et Mme G... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de La Ville-ès-Nonais à leur verser la somme de 220 000 euros en réparation du préjudice subi en raison de l'illégalité de l'arrêté de péril imminent du 25 mai 2009 du maire de La Ville-ès-Nonais.

Par un jugement n° 1305023 du 22 juillet 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 16NT03249 du 20 octobre 2017, la cour administrative d'appel de Nan

tes a rejeté l'appel présenté contre ce jugement par Mmes F... et A....

Par une décision...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... F... et Mme G... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de La Ville-ès-Nonais à leur verser la somme de 220 000 euros en réparation du préjudice subi en raison de l'illégalité de l'arrêté de péril imminent du 25 mai 2009 du maire de La Ville-ès-Nonais.

Par un jugement n° 1305023 du 22 juillet 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 16NT03249 du 20 octobre 2017, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel présenté contre ce jugement par Mmes F... et A....

Par une décision n° 417047 du 4 février 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nantes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2016, et un mémoire, enregistré le 18 septembre 2017, Mmes A... et F..., représentées par Me Maitre, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 juillet 2016 ;

2°) de condamner la commune de La Ville-ès-Nonais à leur verser la somme de 240 000 euros en réparation des préjudices subis, majorée des intérêts au taux légal à compter du jour de la démolition de leurs biens, le 16 juin 2009, avec capitalisation des intérêts à compter de l'année suivante ;

3°) de mettre à la charge de la commune de La Ville-ès-Nonais le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'article R. 741-7 du code de justice administrative a été méconnu, le jugement notifié faisant apparaître la seule signature du greffier ;

- des travaux effectués pour une personne publique et poursuivant un but d'intérêt général ont le caractère de travaux publics ; dès lors, il n'était pas nécessaire de saisir le maire d'une demande indemnitaire préalable avant de saisir le juge ; c'est à tort que le jugement a rejeté la demande comme étant irrecevable, faute de liaison du contentieux ;

- en adoptant l'arrêté de péril imminent, le 25 mai 2009, le maire de la commune a commis une faute qui leur a causé un préjudice patrimonial de 210 000 euros, correspondant au coût de reconstruction à l'identique de la dépendance, de remise en état du terrain et aux frais d'huissier de justice, ainsi qu'un préjudice moral de 30 000 euros ;

- cette faute résulte, en premier lieu, du vice de procédure censuré par le jugement du 1er octobre 2009 du tribunal administratif de Rennes, en deuxième lieu, de l'insuffisance de la motivation de l'arrêté de péril imminent, en troisième lieu, de l'absence de précision quant à la nature et à la consistance des travaux exigés par cet arrêté, en quatrième lieu, de ce que la prescription de la démolition d'un immeuble ne ressortit pas au champ d'application de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation mais uniquement, et en cas d'extrême urgence, au pouvoir de police générale que le maire tient des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, et en cinquième lieu, de ce que la prescription d'une démolition résulte d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux risques causés par la dépendance " côté C... ".

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 juillet 2017, 26 septembre 2017 et 24 septembre 2019, la commune de La Ville-ès-Nonais, représentée par Me E... B..., conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que les prétentions indemnitaires de Mmes A... et F... soient ramenées à de plus justes proportions et demande en outre que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge des requérantes en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mmes A... et F... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jouno, rapporteur,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,

- et les observations de Mme F... et de Me E...-B..., représentant la commune de La Ville-ès-Nonais.

Une note en délibéré présentée pour la commune de La Ville-ès-Nonais a été enregistrée le 15 novembre 2019.

Une note en délibéré présentée par Mme F... a été enregistrée le 25 novembre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts A..., dont Mme G... A... et Mme H... F..., sont propriétaires en indivision d'un terrain situé 6 et 8 impasse des Petits Clos à La Ville-ès-Nonais (Ille-et-Vilaine), sur lequel est édifié un ensemble de bâtiments en pierres sèches. Au nombre de ces bâtiments figure en particulier une dépendance qui jouxte le terrain de voisins, M. et Mme C.... Le 25 mai 2009, le maire de la commune, agissant sur le double fondement des dispositions des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales et de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, a pris un arrêté de péril imminent visant cette dépendance. Comme le préconisait le rapport de constat établi par un expert désigné par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rennes du 15 avril 2009, cet arrêté prescrivait notamment, d'une part, aux consorts A... de détruire " sans délai la dépendance côté C... ", tout en " reprenant l'ensemble du couvert afin de protéger le bâti des intrusions d'eau ". Il précisait, d'autre part, que, faute pour les consorts A... d'avoir déféré à cette injonction, la démolition serait réalisée d'office par la commune à leurs frais. Le 16 juin 2009, la dépendance " côté C... " a fait l'objet d'une démolition d'office en exécution de cet arrêté de péril imminent. Son pignon " côté C... " a, en particulier, été arasé à une hauteur d'environ 1,40 mètre.

2. L'arrêté de péril imminent a été annulé par un jugement, désormais définitif, du tribunal administratif de Rennes du 1er octobre 2009 au seul motif qu'il ne fixait pas aux consorts A... un délai pour l'exécution des mesures qu'il prévoyait et méconnaissait ainsi les dispositions de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation. Mme G... A... et Mme H... F... ont alors demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de La Ville-ès-Nonais à leur verser la somme de 220 000 euros en réparation du préjudice subi en raison de l'illégalité de cet arrêté de péril imminent du 25 mai 2009. Par un jugement du 22 juillet 2016, ce tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable en l'absence de liaison du contentieux. Ce jugement a été confirmé, sur un appel de Mme G... A... et Mme H... F..., par un arrêt de la cour du 20 octobre 2017, après le décès de Mme G... A... en février 2017. Cet arrêt a cependant été annulé par une décision du 4 février 2019 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, qui, par ailleurs, a renvoyé l'affaire devant la cour.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". L'action engagée par Mme G... A... et Mme H... F... devant le tribunal administratif tendait à la réparation des préjudices qu'elles estimaient avoir subis du fait de travaux de démolition exécutés d'office par l'administration sur leur propriété indivise. De tels travaux revêtant le caractère de travaux publics, la demande devait être regardée comme présentée " en matière de travaux publics " au sens des dispositions précitées. Ainsi, c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a jugé qu'il en allait autrement, au motif que les requérantes soutenaient que les travaux engageaient la responsabilité de la commune en raison de l'illégalité de l'arrêté ayant fait l'objet de l'exécution d'office et en a déduit que la demande était irrecevable faute d'avoir été précédée d'une réclamation ayant fait naître une décision de l'administration. Le jugement attaqué doit, pour ce motif, être annulé, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen tiré de son irrégularité.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes.

Sur la demande de première instance :

5. D'une part, aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé (...) de la police municipale (...) ". Aux termes de l'article L. 2212-2 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / (...) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux (...) de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure (...) ". L'article L. 2212-4 du même code dispose : " En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances (...) ".

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. / Si les mesures ont à la fois conjuré l'imminence du danger et mis fin durablement au péril, le maire, sur le rapport d'un homme de l'art, prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. / Si elles n'ont pas mis fin durablement au péril, le maire poursuit la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. ". Aux termes de ce dernier article, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- Le maire, à l'issue d'une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'Etat, met le propriétaire de l'immeuble menaçant ruine (...) en demeure de faire dans un délai déterminé, selon le cas, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou les travaux de démolition, ainsi que, s'il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les bâtiments contigus. (...) IV.- Lorsque l'arrêté de péril n'a pas été exécuté dans le délai fixé, le maire met en demeure le propriétaire d'y procéder dans un délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois. / A défaut de réalisation des travaux dans le délai imparti, le maire, par décision motivée, fait procéder d'office à leur exécution. Il peut également faire procéder à la démolition prescrite, sur ordonnance du juge statuant en la forme des référés, rendue à sa demande. (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, si le maire peut ordonner la démolition d'un immeuble en application des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, après accomplissement des formalités qu'il prévoit, il doit, lorsqu'il agit sur le fondement de l'article L. 511-3 afin de faire cesser un péril imminent, se borner à prescrire les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité. En présence d'une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent qui exige la mise en oeuvre immédiate d'une mesure de démolition, le maire ne peut l'ordonner que sur le fondement des pouvoirs de police générale qu'il tient des dispositions des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales. Un arrêté ordonnant la démolition d'un immeuble sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation est entaché d'une illégalité qui touche au champ d'application de la loi.

8. Les pouvoirs de police générale reconnus au maire par les dispositions citées au point 5 ci-dessus des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, qui s'exercent dans l'hypothèse où le danger menaçant un immeuble résulte d'une cause qui lui est extérieure, sont distincts des pouvoirs qui lui sont conférés dans le cadre des procédures de péril ou de péril imminent régies par les articles L. 511-1 à L. 511-4 du code de la construction et de l'habitation, auxquels renvoie l'article L. 2213-24 du code général des collectivités territoriales, qui doivent être mis en oeuvre lorsque le danger provoqué par un immeuble provient à titre prépondérant de causes qui lui sont propres. Toutefois, en présence d'une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent, le maire peut, quelle que soit la cause du danger, faire légalement usage de ses pouvoirs de police générale, et notamment prescrire l'exécution des mesures de sécurité qui sont nécessaires et appropriées, y compris la démolition de l'immeuble.

En ce qui concerne l'engagement de la responsabilité de la commune et la faute exonératoire des consorts A... :

9. En premier lieu, après avoir réalisé des opérations de constat le 16 avril 2009, l'expert désigné par l'ordonnance du 15 avril 2009 a estimé, dans un rapport du 27 avril 2009, que la dépendance en cause " côté C... " était susceptible de s'écrouler à tout moment, et notamment au niveau du mur pignon bâti en limite de propriété. Il a ainsi conclu à l'existence d'un péril grave et imminent. Pour faire cesser ce péril, le maire de La Ville-ès-Nonais ne pouvait cependant prescrire, sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, des mesures définitives telles qu'une démolition, sans méconnaître le champ d'application de cet article. Il devait se contenter de l'édiction de mesures provisoires.

10. En second lieu, si ainsi qu'il vient d'être exposé au point 9, l'expert a reconnu l'imminence du risque d'écroulement du bâtiment en discussion, il ne résulte pas de l'instruction que le maire était en présence d'une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent, alors que la toiture de la construction était effondrée depuis 2003 et que la seule chute de pierre provenant de son pignon, dont il est fait état par des voisins, datait de 2005. Il en résulte que la situation de la dépendance, située sur la propriété des consorts A..., ne caractérisait pas un péril particulièrement grave et imminent, de nature à exiger la mise en oeuvre immédiate d'une mesure de démolition ordonnée par le maire sur le fondement de ses pouvoirs de police générale.

11. Il suit de là qu'en prescrivant, par l'arrêté de péril imminent du 25 mai 2009 pris sur le double fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation et des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, la démolition de la dépendance située sur le terrain appartenant aux consorts A..., le maire de La Ville-ès-Nonais a commis une faute qui engage la responsabilité de la commune.

12. Toutefois, en s'abstenant d'entretenir leur propriété alors même qu'ils avaient été invités à de multiples reprises, dès 2003, à procéder aux travaux de réparation nécessaires, les consorts A..., au nombre desquels figurent Mme G... A... et Mme H... F..., ont concouru à hauteur de 50 % aux préjudices susceptibles de résulter de cette démolition.

En ce qui concerne les préjudices :

13. En premier lieu, les requérantes soutiennent que, par la faute ainsi commise, l'indivision dont elles font partie devra engager des dépenses de reconstruction à neuf de la dépendance dont il s'agit. Elles se prévalent d'un unique devis établi le 26 décembre 2013 par une entreprise de maçonnerie, évaluant ces dépenses à la somme de 192 363,60 euros. Toutefois, il résulte de l'instruction que cette dépendance avait été laissée à l'abandon depuis plusieurs années, avant même l'effondrement total de sa toiture en 2003 qui n'a suscité aucune intervention de ses propriétaires. En outre, ainsi que le souligne la commune de La Ville-ès-Nonais, les consorts A... ont déposé le 20 mai 2009, auprès des services de la commune, une demande de permis de démolir concernant cette dépendance et ont d'ailleurs obtenu ce permis le 9 juin suivant. Dans ces conditions, le préjudice correspondant aux frais de reconstruction à neuf de la dépendance est dépourvu de lien direct et certain avec l'illégalité de l'arrêté de péril imminent.

14. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de constat dressé le 16 juin 2009, et dont les énonciations ne sont, sur ce point, pas sérieusement contestées, que, pour permettre le passage d'engins de chantier jusqu'à la dépendance à démolir, le grillage a été cisaillé, des arbres ont été arrachés, des branches ont été coupées et la pelouse a été abimée. Les requérantes estiment que les frais de remise en état de la propriété qu'elles détiennent en indivision doivent être évalués à la somme forfaitaire de 17 141,23 euros.

15. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, les indivisaires avaient, à la date de l'arrêté de péril imminent, entrepris les démarches nécessaires à la démolition, dans les conditions de droit commun, de la dépendance visée par cet arrêté. Cependant, il ne résulte pas de l'instruction qu'une démolition entreprise à l'initiative des consorts A... aurait causé, sur la propriété de ceux-ci, des dégâts analogues à ceux engendrés par celle réalisée d'office par application de l'arrêté de péril imminent du 25 mai 2009. Le préjudice dont les requérantes font état est donc justifié dans son principe. Toutefois, elles ne justifient pas du montant dont elles demandent le versement en réparation de ce préjudice. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi personnellement par Mme H... F..., membre de l'indivision propriétaire des lieux, au titre des travaux nécessaires à la réparation des abords de la dépendance en cause en le fixant à la somme de 1 000 euros. Le préjudice subi personnellement par Mme G... A... doit être également évalué à la somme de 1 000 euros.

16. En troisième lieu, il résulte de l'instruction qu'agissant en mandataire de l'indivision propriétaire de la dépendance visée par l'arrêté de péril imminent, Mme H... F... a demandé à un huissier de justice de réaliser un procès-verbal de constat le jour des opérations de démolition. La dépense correspondante, d'un montant de 495,17 euros, était utile à la préservation des droits de l'indivision et, en particulier, à la surveillance des opérations de démolition d'office. Par ailleurs, cette dépense aurait été épargnée en cas de démolition du bâti par ou pour le compte des consorts A.... Elle est donc liée directement à l'adoption de l'arrêté de péril imminent. Toutefois, le procès-verbal de constat ayant été dressé pour le compte de l'indivision dans son ensemble, il n'est pas établi que son coût n'ait pas été réparti entre les indivisaires à proportion de leurs droits indivis. Dans ces conditions, et dès lors qu'il n'est pas contesté que Mme H... F..., d'une part, et les ayants droits de Mme G... A..., sont, chacun, titulaires d'un quart des droits indivis, ils doivent être regardés comme ayant subi, chacun, un préjudice correspondant à un quart des frais de constat par huissier de justice, soit 123,79 euros.

17. En quatrième lieu, si la dépendance dont il s'agit n'était ni entretenue ni habitable, faute, notamment, de toiture, sa démolition d'office, et plus particulièrement l'atteinte à la propriété des consorts A... qu'elle a impliquée, a nécessairement causé à Mme H... F... et à Mme G... A... un préjudice moral. Il sera fait une exacte appréciation de celui-ci en le fixant, pour chacune des requérantes, à la somme de 2 000 euros.

18. Il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu de la part de responsabilité des consorts A... dans la survenance des préjudices dont les requérantes se prévalent, évaluée à 50 % au point 12 ci-dessus, la commune de La Ville-ès-Nonais doit être condamnée à verser à Mme H... F..., d'une part, et aux ayants droit de Mme G... A..., d'autre part, en réparation de leurs préjudices, une somme de 1 561,90 euros. Le surplus de la demande de première instance doit être rejeté.

Sur les frais liés au litige :

19. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions des parties présentées, en première instance comme en appel, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1305023 du tribunal administratif de Rennes du 22 juillet 2016 est annulé.

Article 2 : La commune de La Ville-ès-Nonais versera à Mme H... F..., d'une part, et aux ayants droit de Mme G... A..., d'autre part, une somme de 1 561,90 euros en réparation du préjudice résultant de la démolition, en application d'un arrêté du 25 mai 2009, d'un bâtiment situé 6 et 8 impasse des Petits Clos à La Ville-ès-Nonais (Ille-et-Vilaine).

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de La Ville-ès-Nonais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que le surplus des conclusions de première instance et d'appel de Mmes H... F... et G... A... sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... F..., aux ayants droit de Mme G... A... et à la commune de La Ville-ès-Nonais.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Rivas, président de la formation de jugement,

- Mme I..., première conseillère,

- M. Jouno, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 novembre 2019.

Le rapporteur,

T. JounoLe président,

C. Rivas

Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19NT00574

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00574
Date de la décision : 29/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: M. Thurian JOUNO
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : MARTIN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-11-29;19nt00574 ?
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