Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 16 avril 2015 du préfet du Finistère portant création d'une zone de protection de biotope de la Baie de Kerogan sur les communes de Quimper et de Plomelin et la décision préfectorale du 13 août 2015 portant rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1504743 du 30 mars 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 juin 2018, l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 avril 2015 du préfet du Finistère et la décision préfectorale du 13 août 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les décisions litigieuses sont insuffisamment motivées ;
- la consultation des personnes associées et notamment celle de la chambre d'agriculture et de la commission départementale de la nature des paysages et des sites est irrégulière ; il n'est pas justifié que les personnes associées ont eu connaissance de ce dossier et qu'elles aient pu en discuter les conclusions ;
- l'arrêté du 16 avril 2015 a pour objet ou pour effet d'interdire la chasse ; cette interdiction pure et simple, par sa généralité dans le choix des périodes d'interdiction de circulation, est manifestement disproportionnée par rapport aux objectifs recherchés ;
- l'arrêté du 16 avril 2015 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation ;
- le dossier de l'association Bretagne Vivante est incomplet et ne présente aucun caractère scientifique ; une mesure de protection de biotope ne peut être mise en oeuvre que si l'espèce en vue d'être protégée a fait l'objet d'un inventaire, d'un dénombrement et d'une localisation au sein du site ; le préfet en a tiré des conséquences excessives ;
- l'arrêté contesté commet une erreur de droit en considérant que l'éventuel dérangement des animaux, qui est le seul cas visé, serait équivalent à une dégradation de l'habitat et du biotope.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- l'arrêté ministériel du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., pour l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 30 mars 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2015 du préfet du Finistère portant création d'une zone de protection de biotope de la Baie de Kerogan sur les communes de Quimper et de Plomelin
et la décision préfectorale du 13 août 2015 rejetant son recours gracieux. L'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Rennes, d'écarter les moyens tirés de ce que l'arrêté préfectoral du 16 avril 2015 n'est pas motivé et de ce qu'il serait fondé sur un dossier scientifique incomplet que l'association requérante réitère en appel sans apporter de précisions nouvelles.
3. En deuxième lieu, cette association soutient que la consultation des personnes associées est irrégulière en ce qu'il n'est pas justifié que celles-ci, notamment, la chambre d'agriculture et la commission départementale de la nature des paysages et des sites, ont eu connaissance du dossier scientifique établi par l'association Bretagne Vivante et qu'elles aient pu en discuter les conclusions. Toutefois, et alors qu'il n'est pas contesté que la chambre d'agriculture et la commission départementale de la nature des paysages et des sites ont été consultées sur le projet d'arrêté, il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est pas allégué que le défaut, à le supposer établi, de communication de cette étude dont la réalisation n'est prévue par aucun texte, les aurait privées d'une garantie ou aurait été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise. Par suite, ce moyen doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au présent litige : " - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier ou que les nécessités de la préservation du patrimoine biologique justifient la conservation d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) /3° La destruction, l'altération ou la dégradation du milieu particulier à ces espèces animales ou végétales. (...) ". Aux termes de l'article R. 411-1 de ce code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les listes des espèces animales non domestiques et des espèces végétales non cultivées faisant l'objet des interdictions définies par les articles L. 411-1 et L. 411-3 sont établies par arrêté (...) ". Aux termes de l'article R. 411-15 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Afin de prévenir la disparition d'espèces figurant sur la liste prévue à l'article R. 411-1, le préfet peut fixer, par arrêté, les mesures tendant à favoriser, sur tout ou partie du territoire d'un département à l'exclusion du domaine public maritime où les mesures relèvent du ministre chargé des pêches maritimes, la conservation des biotopes tels que mares, marécages, marais, haies, bosquets, landes, dunes, pelouses ou toutes autres formations naturelles, peu exploitées par l'homme, dans la mesure où ces biotopes ou formations sont nécessaires à l'alimentation, à la reproduction, au repos ou à la survie de ces espèces. ". Aux termes de l'article R. 411-17 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le préfet peut interdire, dans les mêmes conditions, les actions pouvant porter atteinte d'une manière indistincte à l'équilibre biologique des milieux (...)". Il résulte de ces dispositions que le préfet peut, dans le but de prévenir la disparition d'espèces figurant sur la liste prévue à l'article
R. 411-1 du code de l'environnement, prendre des arrêtés afin d'assurer la conservation de certains biotopes.
5. L'arrêté préfectoral du 16 avril 2015 contesté, pris sur le fondement des dispositions précitées, délimite, dans son article 1er, la zone de protection du biotope dénommée " Baie de Kerogan ", située sur une partie du domaine public fluvial des communes de Quimper et de Plomelin, dans le bassin versant de l'Odet. Il interdit, dans son article 2, sous réserve de certaines exceptions au profit, notamment, des agents chargés de la sécurité publique ou de personnalités scientifiques autorisées ou mandatées dans le cadre de missions compatibles avec la préservation du biotope, la circulation des personnes et embarcations sur l'Ile-aux-Rats et dans les 50 mètres autour de cette île ainsi qu'à l'intérieur d'une bande de 150 mètres à partir de la berge, sur une partie des rives droite et gauche de la baie. Il édicte, dans ses articles 3 et 4, respectivement, une interdiction d'introduire des animaux domestiques dans les secteurs définis à l'article 2, et diverses mesures applicables dans l'ensemble de la zone, notamment, les interdictions d'entreposer ou d'abandonner des déchets, d'émettre des bruits susceptibles de troubler la quiétude des lieux nécessaires au repos et à l'alimentation des oiseaux, de s'adonner à la pratique de sports ou jeux utilisant des engins volants susceptibles de troubler la quiétude du milieu de vie aérien des oiseaux, bivouaquer, faire du feu et introduire des espèces invasives.
6. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que la baie de Kerogan est le plus important secteur de concentration d'oiseaux d'eau hivernant de la vallée de l'Odet, parmi lesquelles plusieurs espèces figurant sur la liste établie par l'arrêté ministériel du 29 octobre 2009 fixant, en application de l'article R. 411-1 du code de l'environnement, la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire national, notamment, l'avocette élégante, dont l'estuaire de l'Odet est un site d'importance nationale, le balbuzard pécheur et le faucon pélerin. Il n'est pas davantage contesté que la zone considérée est principalement formée de vasières, de roselières, d'estrans sablo-vaseux d'un grand intérêt pour l'avifaune en ce qu'elle constitue une zone d'alimentation et de repos. Dans ces conditions, l'arrêté, qui n'a pas pour objet, contrairement à ce que soutient l'association requérante, d'interdire la chasse, vise à assurer la préservation des biotopes nécessaires à l'alimentation, à la reproduction, au repos ou à la survie d'espèces protégées. Si l'association fait valoir que les mesures d'interdiction édictées par l'arrêté préfectoral, telle que l'interdiction de circulation, sont " disproportionnées ", il ressort des pièces du dossier, d'une part, que l'interdiction de circulation, est limitée à certains secteurs restreints représentant environ un tiers de la zone et ne vise ni le sentier qui longe le domaine public fluvial ni le chenal, d'autre part, que, compte tenu de l'objectif rappelé ci-dessus de préservation des biotopes, l'application de l'ensemble des mesures d'interdiction ne saurait être réduite à la période hivernale au cours de laquelle, selon elle, ces espèces protégées seraient, pour leur majorité, présentes sur le site. Enfin, et en tout état de cause, l'association requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que les activités faisant l'objet, par l'arrêté en litige, de mesures d'interdiction n'occasionneraient qu'un " dérangement " pour les oiseaux et non un risque de dégradation des milieux ou des habitats. Dès lors, le préfet du Finistère a pu légalement, par son arrêté du 16 avril 2015, édicter, en vertu de l'article R. 411-15 du code de l'environnement, les mesures d'interdiction mentionnées au point 5.
7. En dernier lieu, l'association requérante ne peut utilement invoquer les vices propres dont serait entachée la décision préfectorale du 13 août 2015 qui se borne à rejeter son recours gracieux contre cet arrêté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association départementale de chasse sur le domaine public maritime du Finistère et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme B..., présidente-assesseur,
- M. Bréchot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 octobre 2019.
Le rapporteur,
C. B...Le président,
T. CELERIER
La greffière,
C. POPSE
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT02186