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20/09/2019 | FRANCE | N°18NT01910

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 20 septembre 2019, 18NT01910


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Almo a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2015 par lequel le maire de Trégastel a délivré à M. C... un permis de construire une maison d'habitation sur le terrain situé 37 rue du Haren.

Par un jugement n° 1504651 du 16 mars 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 14 mai 2018, 4 mars 2019 et 22 mars 2019, la SCI Almo, représentée pa

r Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Almo a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2015 par lequel le maire de Trégastel a délivré à M. C... un permis de construire une maison d'habitation sur le terrain situé 37 rue du Haren.

Par un jugement n° 1504651 du 16 mars 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 14 mai 2018, 4 mars 2019 et 22 mars 2019, la SCI Almo, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Trégastel une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les signataires des accords émis pour le ministre de la défense étaient incompétents ;

- l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et l'article UC 3 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) ont été méconnus ;

- l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et l'article UC 11 du règlement du POS ont été méconnus.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 février 2019, 13 mars 2019 et 27 mars 2019, la commune de Trégastel, représentée par la Selarl Le Roy, Gourvennec et Prieur, demande à la cour de rejeter la requête et de condamner la requérante au paiement d'une somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me A... représentant la SCI Almo, et de Me G..., représentant la commune de Trégastel.

Considérant ce qui suit :

1. Le 3 juillet 2015, M. C... a déposé en mairie de Trégastel une demande de permis de construire une maison d'habitation sur un terrain situé 37 rue du Haren, cadastré section AE n° 281 et n° 282. Par un arrêté du 16 septembre 2015, le maire de Trégastel a délivré le permis de construire sollicité. La SCI Almo, en qualité de propriétaire d'un terrain voisin, a demandé l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 16 mars 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. La SCI Almo fait appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 425-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur une construction située à proximité d'un ouvrage militaire, le permis de construire ou le permis d'aménager tient lieu de l'autorisation prévue par l'article L. 5112-2 du code de la défense dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord du ministre de la défense. " L'article L. 5112-2 du code de la défense dispose : " Dans l'étendue du champ de vue mentionné à l'article L. 5112-1 aucune construction ne peut être réalisée sans l'autorisation du ministre de la défense. ". Aux termes de l'article L. 5112-1 du même code : " Les postes électrosémaphoriques de la marine nationale et les postes militaires de défense des côtes et de sécurité de la navigation bénéficiant des servitudes définies au présent chapitre, ainsi que les limites de leur champ de vue, sont désignés par décret, pris après enquête conduite selon les modalités définies aux articles L. 1, L.110-1, L. 110-2 et L. 122-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. ". L'article D. 5131-12 du code de la défense, dans sa rédaction applicable à la date du permis de construire modificatif obtenu, dispose que : " Sous réserve des compétences dévolues en la matière aux états-majors, directions et services, le commandant de zone terre représente le ministre auprès des services déconcentrés de l'Etat et auprès des collectivités territoriales, dans les limites de la zone terre, pour les questions d'urbanisme intéressant le ministère de la défense. Il transmet au préfet les informations relatives aux installations de la défense ayant une incidence sur le territoire concerné, que l'Etat porte à la connaissance des communes ou de leurs groupements en application de l'article R. 132-1 du code de l'urbanisme. / Au titre de cette compétence, il a recours à l'établissement du service d'infrastructure de la défense territorialement compétent pour assurer l'instruction de ces dossiers et peut le solliciter pour assurer sa représentation auprès des services déconcentrés de l'Etat et des collectivités territoriales. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet litigieux se trouve impacté par une servitude AR 1 de protection du sémaphore de Ploumanac'h, l'accord du ministre de la défense étant donc nécessaire conformément aux dispositions précitées de l'article L. 5112-2 du code de la défense. Les dispositions précitées de l'article D. 5131-12 du code de la défense, qui donnent au commandant de zone terre un pouvoir de représentation du ministre auprès notamment des collectivités territoriales, lui permettent ainsi d'émettre, au nom du ministre, l'accord requis par les dispositions de l'article R. 425-7 du code de l'urbanisme. Ce commandant de zone terre peut également, sans qu'une délégation de compétence spécifique n'ait à être prise, confier cette compétence à l'établissement du service d'infrastructure de la défense de Brest. Si une délégation de la part du directeur de cet établissement serait impossible en matière d'urbanisme, au vu des dispositions présentant un caractère réglementaire de l'instruction ministérielle du 18 février 2011 relative à l'organisation, aux attributions et au fonctionnement des établissements du service d'infrastructure de la défense, le directeur adjoint peut suppléer le directeur en cas d'absence. L'avis du 11 juillet 2016, rendu s'agissant de la demande de permis de construire modificatif, a été émis pour le directeur de l'établissement du service d'infrastructure de la défense de Brest et par suppléance, par M. B..., ingénieur en chef de première classe. Il n'est ni établi ni même allégué que ce dernier ne serait pas directeur adjoint de l'établissement. Dès lors, le permis de construire modificatif du 18 juillet 2016, qui n'a pas été contesté, a régularisé le vice dont était entaché le permis de construire initial pour lequel avait été émis un avis du 9 juillet 2015 pris par délégation du directeur de l'établissement précité. Par conséquent, le moyen tiré de ce que l'avis émis pour le ministre de la défense était irrégulier doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC 3 du règlement du plan d'occupation des sols de Trégastel : " Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée ouverte à la circulation, soit directement, soit par l'intermédiaire d'une servitude de passage. L'accès doit présenter des caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de sécurité, de la défense contre l'incendie et aux impératifs de la protection civile. Les voies nouvelles se terminant en impasse devront comprendre en leur partie terminale une aire de retournement. ". Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que l'accès au projet s'effectue par une voie en impasse dont la largeur varie entre 3,97 mètres et 3,17 mètres dans son point le plus étroit, au niveau du poteau électrique. L'accès se poursuit ensuite par une servitude de passage, dont la largeur est au point le plus étroit de 2,97 m. Dès lors que cette voie ne dessert que six constructions, que le projet ne porte que sur une maison individuelle, ces dimensions sont suffisantes pour permettre une desserte répondant aux conditions fixées par les textes précités. La servitude de passage, qui existe déjà, ne peut être regardée comme une " voie nouvelle " au sens de l'article UC 3 du règlement du plan d'occupation des sols et n'avait donc pas à comporter de plate-forme de retournement. En outre, l'angle droit d'accès entre l'impasse et la servitude est suffisamment large pour qu'une voiture s'arrête sur le côté pour en laisser passer une autre en sens inverse.

6. D'autre part, comme le reconnaît la requérante elle-même, les dispositions du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie (RDDECI) des Côtes d'Armor ne sont pas directement opposables à l'autorisation d'urbanisme en litige. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux ne contient aucune prescription tirée d'un avis du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) reprenant les dispositions de ce règlement départemental. Il n'est pas établi qu'une largeur de 3 mètres ne pourrait pas permettre le passage des véhicules de lutte contre l'incendie. Une aire de retournement a été prévue par le projet et si la requérante soutient que ses dimensions, de 5,10 mètres par 5,10 mètres, sont insuffisantes, elle se borne à se référer aux dimensions du règlement départemental qui, comme il a été dit, n'est pas opposable en l'espèce. Il existe un poteau incendie à 418 mètres du projet. S'il ressort des pièces du dossier qu'il a été qualifié de non conforme par le SDIS, cette seule circonstance, alors que le projet n'est pas concerné par un risque particulier d'incendie déjà identifié et en l'absence de précision sur la nature de la non conformité en cause, ne suffit pas à écarter sa prise en compte.

7. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UC 3 du règlement du plan d'occupation des sols et de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.

8. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article UC 11 du règlement du plan d'occupation des sols, qui ne prévoit pas des exigences moindres que celles de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que celui du patrimoine sont d'intérêt public. (...) Toute clôture (grillage, muret ou autres) est strictement interdite sur le chaos. (...) ". Il ressort des pièces du dossier que le paysage urbain où se situe le projet se caractérise par une coexistence des chaos granitiques et des constructions. Si le projet litigieux tend à recouvrir, par des travaux de terrassement, la roche la plus basse, il n'est pas établi, au vu de sa faible hauteur, qu'elle pourrait être qualifiée de chaos. La construction litigieuse s'adosse aux deux autres chaos granitiques présents au Nord et à l'Est, ce qui n'est pas interdit par les dispositions précitées de l'article UC 11, et il ressort des pièces du que ces deux chaos ne sont ni visibles depuis la voie publique, ni protégés de manière spécifique par le document d'urbanisme en vigueur à la date du permis de construire en litige. Dès lors, le moyen doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Almo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. La commune de Trégastel n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à sa charge le versement de la somme demandée par la SCI Almo à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière la somme demandée sur le fondement des mêmes dispositions par la commune de Trégastel.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Almo est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Trégastel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Almo, à la commune de Trégastel et à M. F... C....

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, président assesseur,

- Mme E..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 septembre 2019.

Le rapporteur,

P. E...

Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°18NT01910


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01910
Date de la décision : 20/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SELARL LE ROY GOURVENNEC PRIEUR

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-09-20;18nt01910 ?
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