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19/07/2019 | FRANCE | N°18NT03472

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 19 juillet 2019, 18NT03472


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du préfet du Calvados du 19 décembre 2017 pris à son encontre portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1800353 du 4 mai 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 septembre 2018, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 mai

2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 19 décembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui dél...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du préfet du Calvados du 19 décembre 2017 pris à son encontre portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1800353 du 4 mai 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 septembre 2018, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 19 décembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 ou de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit de Me B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve pour celle-ci de renoncer à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

M. A...soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer en ce qui concerne le moyen tiré de l'absence d'examen de sa demande au regard du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer sur le moyen tiré de l'absence de base légale de la décision attaquée, le préfet s'étant fondé sur des critères étrangers aux dispositions du 2° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet n'a pas pris en compte l'ensemble des critères mentionnés au 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le fait qu'il ait toujours une famille au Mali ne peut suffire à l'exclure du bénéfice des dispositions du 2° bis du L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sa situation personnelle n'a pas été correctement appréciée et la décision de lui refuser le séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il n'entretient plus que de faibles rapports avec sa famille au Mali ;

- c'est à tort que le préfet a considéré qu'il n'entait pas dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-7 du code de justice administrative ;

- le refus de lui délivrer un titre de séjour emporte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- le refus de lui délivrer un titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire qui lui est faite méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est porté une atteinte excessive à sa situation personnelle ;

- l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire privent de base légale la décision fixant le pays de destination.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2019, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de M. A...ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 août 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-641 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Mony a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant malien, est entré en France en juin 2014, alors qu'il était encore mineur. Il a été pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance et scolarisé. Il a sollicité en août 2017 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 19 décembre 2017, le préfet du Calvados a refusé de faire droit à sa demande et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français. M. A...relève appel du jugement en date du 4 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la demande de titre de séjour formée par M. A...l'a été, ainsi que l'indique d'ailleurs l'intitulé de l'imprimé rempli par l'intéressé, en qualité " d'étranger confié à l'aide sociale à l'enfance ". Le moyen tiré de ce que la décision portant refus de séjour méconnaîtrait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que le préfet n'a pas examiné de sa propre initiative la demande de M. A...sur un tel fondement est ainsi inopérant. Par suite, le tribunal administratif n'a pas entaché sa décision d'une omission à statuer en s'abstenant d'y répondre.

3. Si M. A...soutient, en second lieu, que le jugement attaqué est également entaché d'une omission à statuer en ce que le tribunal administratif n'aurait pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort des pièces du dossier que ce moyen a été expressément écarté par le tribunal au point 2 de sa décision.

Sur le bien fondé du jugement :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, aux termes du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée ".

5. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", présentée sur le fondement des dispositions précitées, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle

6. Il ressort des pièces du dossier que le préfet du Calvados, pour rejeter la demande de titre de séjour de M.A..., s'est fondé, après avoir examiné l'âge, le parcours de l'intéressé depuis son entrée en France et la manière dont M. A...a suivi sa formation, fait référence au rapport social établi sur l'intéressé par la structure d'accueil le prenant en charge, sur le fait que l'intéressé disposait toujours d'une famille dans son pays d'origine, avec laquelle il conservait des contacts réguliers. En procédant ainsi, le préfet n'a pas, comme l'a à juste titre jugé le tribunal administratif, fait une inexacte application des dispositions précitées, qui ne sauraient être regardées comme limitant les refus opposés aux demandes de titres de séjour présentées sur leur fondement, aux seuls cas d'étrangers ne respectant aucun des critères posés. Le document daté du 5 juin 2018 produit par M.A..., est postérieur à la décision attaquée et n'est pas de nature à établir que le préfet n'aurait pas exactement apprécié la nature des liens conservés par M. A...avec sa famille au Mali et se serait mépris en estimant que l'intéressé se situait dans une perspective de retour à terme dans son pays.

7. En deuxième lieu, c'est sans erreur d'appréciation que le préfet, après avoir examiné d'office si M. A... pouvait être admis au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au titre l'enseignement que l'intéressé suit en France, a estimé que M. A...ne pouvait pas être admis au séjour sur ce fondement, l'intéressé ne disposant de ressources autonomes suffisantes pour suivre un tel enseignement. Le caractère réel et sérieux de l'enseignement suivi par M. A...est sans incidence sur la légalité d'une telle appréciation.

8. M. A...soutient, en troisième lieu, que le refus de lui délivrer un titre de séjour méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au respect du droit de chacun de mener une vie privée et familiale normale.

9. Il ressort toutefois des pièces du dossier des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, M. A...ne séjournait en France que depuis le mois de juin 2014. S'il a pu suivre une scolarité en formation professionnelle qui lui a permis d'obtenir un CAP, ses résultats scolaires étaient tout juste satisfaisants, et il ne faisait pas état, à la date de la décision attaquée, de véritables perspectives d'emploi, ayant poursuivi sa scolarité en seconde professionnelle. Par ailleurs, l'intéressé ne démontre pas, en dépit des relations amicales qu'il a nouées et de sa pratique du football dans un club local, une réelle intégration à la société française. De plus, il ne serait pas isolé en cas de retour dans son pays d'origine, où demeure sa famille, avec laquelle il a gardé le contact. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit de M. A...au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui la fondent. Le refus de titre de séjour opposé à M. A... n'est pas davantage, dans ces conditions, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

10. Si M. A...soulève à l'encontre de cette décision le moyen tiré de la méconnaissance de son droit au respect de la vie privée et familiale, il y a lieu d'écarter ce moyen pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent.

En ce qui concerne la fixation du pays de destination :

11. M. A...n'établit pas l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire et le moyen tiré de l'absence de base légale de la décision fixant le pays de destination également prise à son encontre ne peut ainsi qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 19 décembre 2017.

Sur les conclusions en injonction :

13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions en annulation de M.A..., n'appelle aucune mesure particulière en vue de son exécution. Les conclusions en injonction présentées par l'intéressé ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, verse à M. A... la somme que celui-ci réclame a titre des frais exposés non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président,

- M. Degommier, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller,

Lu en audience publique le 19 juillet 2019.

Le rapporteur,

A. MONY

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18NT03472 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03472
Date de la décision : 19/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : HOURMANT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-07-19;18nt03472 ?
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