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19/07/2019 | FRANCE | N°18NT02003

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 19 juillet 2019, 18NT02003


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 avril 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de visa de long séjour présentée pour ses deux fils allégués en qualité de membre de famille de réfugié.

Par un jugement n° 1507045 du 9 octobre 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1

8 mai 2018, Mme C..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 avril 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de visa de long séjour présentée pour ses deux fils allégués en qualité de membre de famille de réfugié.

Par un jugement n° 1507045 du 9 octobre 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mai 2018, Mme C..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 octobre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 30 avril 2015 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas demandés au bénéfice de A...et Davio Jacinto Pedro, dans un délai de vingt jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les documents d'état civil de ses enfants qu'elle a produits, s'ils ont la nature de " cedula pessoal ", constituent néanmoins des éléments concordants permettant d'établir l'identité de ses enfants Davio etA... ; ils sont confirmés par les actes légalisés produits en cours d'instance ;

- elle a toujours déclaré ces deux enfants comme étant les siens, auprès des services de l'OFPRA ; elle n'a plus revu ses enfants depuis son départ pour la France ; elle entretient des relations avec eux par la voie des réseaux sociaux et leur adresse de l'argent par l'intermédiaire de sa cousine et de son époux établis en République démocratique du Congo ; elle justifie ainsi d'une possession d'état ;

- la commission a ainsi entaché sa décision d'erreur d'appréciation et porté une atteinte disproportionnée à leur vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ainsi qu'à l'intérêt supérieur des enfants en violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2018, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il s'en rapporte à son mémoire en défense produit en première instance et soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Degommier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., qui a obtenu la qualité de réfugiée statutaire le 12 décembre 2005, relève appel du jugement du 9 octobre 2017 du tribunal administratif de Nantes qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 avril 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de visa de long séjour présentée pour ses deux fils allégués, A...et Davio Jacinto Pedro, nés respectivement le 1er septembre 1995 et le 17 mars 1997, en qualité de membre de famille de réfugié.

2. Il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer à l'enfant d'un réfugié statutaire le visa nécessaire afin de mener une vie familiale normale. Toutefois, la circonstance qu'une demande de visa de long séjour ait pour objet le rapprochement familial d'un enfant mineur d'une personne admise à la qualité de réfugié ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse la délivrance du visa sollicité en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public ; figure au nombre de ces motifs le défaut de valeur probante des documents destinés à établir la réalité du lien de filiation produits à l'appui de la demande de visa.

3. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

4. Il résulte des dispositions de l'article 47 du code civil que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un tel acte, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

5. Pour rejeter le recours de MmeC..., la commission s'est fondée sur les déclarations contradictoires de l'intéressée au sujet de la date de naissance de l'enfantA..., ainsi que sur le fait que l'intéressée n'a apporté aucun élément permettant d'établir qu'elle contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation des enfants A...et Davio Jacinto Pedro, ni qu'elle leur apporterait un soutien affectif et communiquerait régulièrement avec eux.

6. En premier lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le ministre a admis en défense que les déclarations contradictoires de la requérante en ce qui concerne le jeune A...ne pouvaient pas, à elles seules, fonder la décision de la commission, mais a invoqué un autre motif, tiré de ce que les documents produits lors des demandes de visa ne permettent pas d'établir le lien familial et l'identité des demandeurs. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que les seuls documents d'état civil produits pour établir le lien de filiation allégué sont des documents intitulés " Cédula pessoal ". Le ministre de l'intérieur a produit en défense une note du 10 juin 2003 de la direction générale des affaires juridiques, consulaires et contentieuses du Ministère des relations extérieures de la République d'Angola indiquant que le " Cedula Pessoal " est un document à usage interne et invitant toutes les représentations des États étrangers accréditées en Angola et autres autorités étrangères à les rejeter. Dans ces conditions, les actes produits par la requérante sont dépourvus de valeur probante et ne permettent pas d'établir la réalité des liens de filiation revendiqués. Aucun autre document d'identité n'a été produit. S'il est vrai que Mme C...avait mentionné ces deux enfants auprès des services de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, elle ne fournit cependant aucun document propre à établir leur identité et le lien de filiation qu'elle allègue. Il résulte de l'instruction que la commission de recours aurait pris la même décision si elle avait entendu se fonder initialement sur ce motif. C'est, par suite, à bon droit que les premiers juges ont procédé à la substitution de motifs demandée, laquelle n'a pas privé la requérante d'une garantie.

7. En deuxième lieu, si Mme C...fait valoir qu'elle justifie d'une situation de possession d'état, elle se borne à affirmer qu'elle entretient des relations avec ses enfants par la voie des réseaux sociaux et leur adresse de l'argent par l'intermédiaire de sa cousine et de son époux établis en République démocratique du Congo. Toutefois, elle ne produit aucune pièce, aucun document attestant du maintien de liens avec ses enfants allégués, qu'elle indique n'avoir pas revus depuis 2005. Il n'est pas davantage établi que l'intéressée communiquerait régulièrement avec eux. Si elle produit des justificatifs d'envoi d'argent datant de 2014 et 2015, elle n'apporte aucune précision sur le bénéficiaire de ces envois ni sur ses liens avec ses enfants allégués. Dès lors, Mme C...ne démontre pas l'existence d'une situation de possession d'état.

8. En dernier lieu, en l'absence d'établissement du lien de filiation l'unissant à A...et Davio Jacinto Pedro, Mme C...n'est pas fondée à invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées, de même que ses conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président,

- M. Mony, premier conseiller,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 juillet 2019.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

A. MONY

Le rapporteur,

S. DEGOMMIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT02003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02003
Date de la décision : 19/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : CHRISTOPHE-MONTAGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-07-19;18nt02003 ?
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