Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... E...et Mme D...E...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 5 août 2016 par lequel le préfet d'Indre-et-Loire a déclaré immédiatement cessible au profit de la commune de Huismes une fraction de la parcelle cadastrée B n° 781 leur appartenant.
Par un jugement n° 1603019 du 13 février 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 avril 2018, le 3 juillet 2018, le 10 décembre 2018 et le 7 janvier 2019, M. E... et MmeE..., représentés par Me C..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 février 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 août 2016 du préfet d'Indre-et-Loire ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Huismes une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse à leur moyen tiré de la violation de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme des libertés fondamentales ;
- le projet ayant été déclaré d'utilité publique ne répond pas à un besoin d'intérêt général, dès lors que le besoin d'un nouvel accès au centre bourg n'est pas établi ; 3 lotissements bénéficient déjà d'un accès vers les rues de la Tourette et de la Fontaine ; rien n'établit que les usagers pourront éviter cette dernière rue ; le nombre de personnes concernées par le nouveau chemin sera marginal ; aucune étude de circulation n'a été produite et la dangerosité des voies de circulation existantes n'est pas établie ;
- il existait des solutions alternatives satisfaisantes, notamment par des aménagements de sécurité sur la rue de La Fontaine ;
- l'atteinte portée à leur propriété est excessive au regard des faibles avantages du projet ; le cheminement piétonnier prévu conduit vers la rue de la Tourette en passant par un chemin sur lequel manoeuvrent des engins communaux ; le projet est de nature à causer des risques de troubles à l'ordre public ; le projet est ainsi dépourvu d'utilité publique ;
- ils sont seuls concernés par l'expropriation ; cette opération est uniquement motivée par la volonté des élus qui entretiennent un rapport conflictuel avec eux ;
- l'emprise à acquérir présentée dans le cadre de l'enquête conjointe, de 180 m², diffère de 8 m² par rapport à l'emprise de 188 m² figurant dans l'état parcellaire joint à l'arrêté préfectoral du 5 août 2016 ; l'autorité expropriante a ainsi augmenté l'emprise à acquérir de 8 m² sans en informer les expropriés et sans qu'aucun document ou tracé n'ait été établi et joint à l'arrêté de cessibilité ; cette situation d'insécurité et d'imprévisibilité méconnaît les stipulations l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme ;
- L'emprise à acquérir présentée dans le cadre de l'enquête publique conjointe diffère sensiblement de celle figurant dans l'état parcellaire joint à l'arrêté préfectoral du 5 août 2016 ; ni l'arrêté de cessibilité, ni le plan annexé ne fixent avec précision et exactitude les limites de cette nouvelle emprise augmentée de 8 m² ; aucun document d'arpentage n'a été établi alors que l'arrêté conduit à une expropriation partielle ; le plan parcellaire établi le 3 mars 2016 par un géomètre expert n'a pas été signé par eux et ils n'en ont pas eu connaissance lors de la notification de l'arrêté de cessibilité ; l'autorité expropriante a ainsi méconnu les dispositions des articles 132-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et 7 du décret du 4 janvier 1955.
Par un mémoire, enregistré le 15 mai 2018, la commune de Huismes, représentée par la SCP Cebron de Lisle - Benzekri, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge solidaire de M. E...et de Mme E...une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 novembre 2018 et le 21 décembre 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Degommier,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant M. E...et MmeE....
Une note en délibéré présentée pour M. E...et Mme E...a été enregistrée le 2 juillet 2019.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 5 août 2016, le préfet d'Indre-et-Loire a déclaré cessible au profit de la commune de Huismes, une fraction de la parcelle cadastrée B n° 781 appartenant à M. A...E...et Mme D...E...et dont l'acquisition est nécessaire à la réalisation d'une voie piétonne, opération déclarée d'utilité publique par arrêté préfectoral du 28 octobre 2012. M. E... et Mme E...relèvent appel du jugement du 13 février 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté de cessibilité du 5 août 2016.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Devant les premiers juges, M. E...et Mme E...ont invoqué notamment, dans leur mémoire enregistré le 19 juin 2017, le moyen tiré de ce que l'autorité expropriante a augmenté l'emprise à acquérir de 8 m² sans en informer les expropriés et sans qu'un document ou tracé n'ait été établi et joint à l'arrêté de cessibilité et qu'une telle situation d'insécurité et d'imprévisibilité méconnaît les stipulations de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme. En réponse à ce moyen, articulé en des termes précis et détaillés, le jugement attaqué s'est borné à indiquer que le moyen est dépourvu de précision suffisante pour permettre au juge d'en apprécier le bien fondé. Une telle motivation est, compte tenu de la teneur de l'argumentation invoquée devant le tribunal, insuffisante au regard des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative. Par suite, le jugement attaqué, insuffisamment motivé, doit être annulé.
3. Il y a lieu pour la Cour de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation, sur les conclusions de la demande présentée par M. E...et Mme E...devant le tribunal administratif d'Orléans.
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 5 août 2016 :
En ce qui concerne la légalité externe :
4. En premier lieu, l'arrêté contesté a été signé par M. Lucbereilh, secrétaire général de la préfecture d'Indre-et-Loire, qui disposait d'une délégation de signature consentie à cet effet par arrêté du préfet du 7 septembre 2015, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture à la même date. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte en cause doit être écarté.
5. En deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 132-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Les propriétés déclarées cessibles sont désignées conformément aux prescriptions de l'article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière. L'identité des propriétaires est précisée conformément aux prescriptions du premier alinéa de l'article 5 ou du premier alinéa de l'article 6 de ce décret, sans préjudice des cas exceptionnels mentionnés à l'article 82 du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 pris pour l'application du décret du 4 janvier 1955. ". Aux termes de l'article 7 du décret du 4 janvier 1955 modifié : "Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit indiquer, pour chacun des immeubles qu'il concerne, la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale (section, numéro du plan et lieu-dit). Le lieu-dit est remplacé par l'indication de la rue et du numéro pour les immeubles situés dans les parties agglomérées des communes urbaines. Lorsqu'il réalise ou constate une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, l'acte ou la décision doit désigner l'immeuble tel qu'il existait avant la division et chacun des nouveaux immeubles résultant de cette division, sauf en cas de lotissement effectué dans le cadre de la législation sur les lotissements ou s'il s'agit d'immeubles situés dans les communes où le cadastre n'est pas rénové. La constitution sur une fraction de parcelle d'un droit d'usufruit, d'un droit de superficie ou d'un bail emphytéotique est considérée comme un changement de limite de propriété. (...) ". L'article 5 du même décret prévoit que : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit contenir les nom, prénoms dans l'ordre de l'état civil, domicile, date et lieu de naissance et profession des parties, ainsi que le nom de leur conjoint (...) ".
6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que l'état parcellaire annexé à l'arrêté de cessibilité mentionne les nom et prénoms des propriétaires et leur domicile, ainsi que les dates et lieux de naissance de certains d'entre eux. Si leur profession n'y a pas été précisée et si les dates et lieux de naissance de PaulE..., Catherine E...et de M. A...E...ne sont pas mentionnés, les deux premiers sont décédés et l'âge de ce dernier est néanmoins indiqué, de sorte que les indications figurant sur l'arrêté sont suffisantes pour permettre aux propriétaires de ladite parcelle de l'identifier. Cet état parcellaire mentionne également la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale et précise la superficie de l'emprise à acquérir, soit 188 m² ainsi que celle du surplus restant, soit 1 592 m². Par ailleurs, les dispositions précitées n'imposent pas qu'un plan parcellaire ou un plan cadastral soit joint à l'état parcellaire.
7. Il est vrai, d'autre part, qu'il résulte des dispositions combinées rappelées aux points précédents que lorsqu'un arrêté de cessibilité déclare cessibles des parties de parcelles, ce qui implique de modifier les limites des terrains concernés, un document d'arpentage doit être préalablement réalisé afin que l'arrêté de cessibilité désigne les parcelles concernées conformément à leur numérotation issue de ce document. Le défaut d'accomplissement de cette obligation, qui constitue alors une garantie pour les propriétaires concernés par la procédure d'expropriation, entache d'irrégularité l'arrêté de cessibilité. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'un tel document a été réalisé par M.B..., géomètre expert, qui a effectué une modification du parcellaire cadastral, établie le 3 mars 2016 sous le n° 654 K, soit avant l'arrêté de cessibilité. Il ressort du plan de division qui l'accompagne que sont identifiées sur le parcellaire cadastral les anciennes et nouvelles limites ainsi que la surface exacte, de 188 m², de la parcelle cadastrée B n° 1776 déclarée cessible, et sa nouvelle référence cadastrale. La circonstance que ce plan n'aurait pas été porté à la connaissance de M. E...et de Mme E..., pour regrettable qu'elle soit, n'entache pas d'irrégularité l'arrêté de cessibilité contesté.
8. Enfin, il est constant que le tableau annexé au dossier d'enquête parcellaire faisait apparaître que l'emprise à acquérir de la parcelle cadastrée B n° 781 s'élevait à 180 m², les 1 600 m² restant la propriété des requérants, alors que le tableau joint à l'arrêté de cessibilité contesté mentionne, pour cette même parcelle, une emprise à acquérir de 188 m² et un surplus de 1 592 m², soit une augmentation de la surface à acquérir de 8 m². Toutefois, la différence constatée entre la surface mentionnée lors de l'enquête parcellaire et celle annexée à l'arrêté attaqué n'a pas été de nature, dans les circonstances de l'espèce, à induire les propriétaires en erreur quant à la nature et aux conséquences de l'opération, compte tenu de la faible différence de métrage et de l'indication exacte des références cadastrales indiquées.
9. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 132-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et 7 du décret du 4 janvier 1955 doit être écarté.
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la déclaration d'utilité publique :
10. En premier lieu, aux termes de l'article R. 11-8 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique alors en vigueur et désormais codifié à l'article L. 112-17 dudit code : "Pendant le délai fixé à l'article R. 11-4, les observations sur l'utilité publique de l'opération peuvent être consignées par les intéressés directement sur les registres d'enquête. Elles peuvent également être adressées par écrit, au lieu fixé par le préfet pour l'ouverture de l'enquête, au commissaire enquêteur ou au président de la commission d'enquête, lequel les annexe au registre mentionné à l'article précité. (...) Indépendamment des dispositions qui précèdent, les observations faites sur l'utilité publique de l'opération sont également reçues par le commissaire enquêteur ou par un des membres de la commission d'enquête aux lieu, jour et heure annoncés à l'avance, lorsque l'arrêté prévu à l'article R. 11-4 en a ainsi disposé" ;
11. Il ressort notamment du rapport d'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique, que figuraient dans le registre d'enquête l'ensemble des observations formulées par le public. En particulier, les observations de MmeE..., formulées par lettre du 24 octobre 2012, ont été annexées au registre de l'enquête relative à l'utilité publique, tandis que le courrier de M.E..., bien que parvenu postérieurement à la clôture de l'enquête, a été néanmoins consigné au registre d'enquête publique. Par ailleurs, le commissaire enquêteur a analysé dans son rapport et ses conclusions les observations produites par les requérants et a notamment estimé que la proposition de Mme E...de matérialiser sur les rues des Tourettes et de la Fontaine un espace réservé aux cyclistes était irréaliste compte tenu de l'étroitesse de ces rues. Enfin, si le rapport d'enquête publique relative à l'enquête parcellaire mentionne que " Le registre ne comporte aucune observation. En annexe, est joint un dossier qui m'a été adressé par Monsieur E...A.... Ce dossier contient les pièces demandées à l'intéressé conformément au décret n°55-22 du 4 janvier 1955 ", cette mention, dont l'inexactitude n'est pas alléguée, concerne l'enquête parcellaire. Ainsi, le moyen tiré de l'irrégularité de l'enquête publique doit être écarté comme manquant en fait.
12. En second lieu, il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.
13. D'une part, il ressort notamment de la notice explicative de la déclaration d'utilité publique que l'opération en litige a pour objet l'aménagement d'une liaison douce destinée aux piétons et aux cycles en continuité d'une chemin piétonnier existant entre les lotissements de la commune, notamment celui du Laré, et le centre-bourg de la commune de Huismes, en assurant un lien paysager entre le bourg ancien et les nouveaux quartiers. Cette voie doit permettre aux enfants et résidents du lotissement d'accéder de façon plus sécurisée au centre-bourg et particulièrement au groupe scolaire. Il ressort notamment des conclusions du commissaire enquêteur que l'accès actuel au bourg est possible par deux voies, la rue des Tourettes et la rue de la Fontaine qui sont dépourvues de trottoirs ou dont les trottoirs sont étroits, que ces voies, notamment la rue des Tourettes qui est une route départementale, sont très passantes, peu adaptées à un cheminement sécurisé des piétons et surtout des enfants et d'un calibre très insuffisant pour y aménager des trottoirs et des passages dédiés aux cyclistes. Si les requérants font valoir que les parents déposent leurs enfants à l'école en voiture, que la population de certains lotissements ne feront pas usage du nouveau chemin compte tenu de son éloignement et que les habitants de certains lotissements ne changeront pas leurs habitudes de déplacement, ces circonstances ne suffisent pas à remettre en cause la nécessité et la pertinence du chemin piétonnier litigieux, dont les plans produits montrent qu'il est en mesure de desservir plusieurs lotissements et, ainsi, d'assurer un lien entre le centre bourg et les nouveaux quartiers. Dans ces conditions, nonobstant l'absence d'étude de circulation, alors même que des travaux supplémentaires de sécurisation de la rue des Tourettes et de la rue de la Fontaine seraient également nécessaires et que le chemin piétonnier débouche sur la rue des Tourettes, l'opération envisagée, qui vise la protection des piétons, répond à une finalité d'intérêt général.
14. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les solutions préconisées par les requérants, à savoir des aménagements de sécurité sur la rue de La Fontaine, permettraient d'obtenir des conditions équivalentes à un chemin piétonnier, alors que le commissaire enquêteur a souligné que les rues de la Fontaine et des Tourettes sont étroites et qu'il est " irréaliste de penser pouvoir y créer des espaces spécifiques dédiés aux véhicules automobiles, aux cyclistes et aux piétons ". Au contraire, la création d'un chemin piétonnier présente plus de sécurité pour les piétons qu'une rue partagée entre voitures, cyclistes et piétons. Ainsi, il n'est pas établi le projet en litige ne pouvait être réalisé dans des conditions équivalentes sur d'autres terrains sans qu'il soit nécessaire de recourir à l'expropriation.
15. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'emprise de l'expropriation porte sur une bande de terrain d'une superficie de 188 m² sur les 1 700 m² que compte la parcelle de M. E... et MmeE.... Ainsi que le relève le jugement du 15 mai 2017 du juge de l'expropriation, cette bande de terrain est actuellement en friche, non entretenue par les requérants, présente des murs d'enceinte en partie écroulés qui ont, par le passé, pu favoriser une occupation illégale des lieux. Ce projet, au regard de l'état d'entretien du terrain en cause, ne peut être regardé comme diminuant la valeur vénale de la propriété des requérants qui conservent la propriété des 1 592 m² restants de leur parcelle. Contrairement à ce qui est soutenu, l'aménagement en cause ne facilitera pas les intrusions sur leur propriété, alors au contraire que le projet prévoit également la pose d'une clôture par la commune. Si ce chemin longe un terrain communal sur lequel stationnent des engins communaux, il n'en résulte pas pour autant un risque avéré pour la sécurité des usagers, compte tenu de la possibilité pour la commune d'y réaliser les aménagements qui s'imposent. Dès lors, les inconvénients que comporte l'opération pour la propriété privée ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.
16. Il résulte des points précédents que le projet d'aménagement d'une voie piétonne au sein de la commune de Huismes répond à une utilité publique, de sorte que le moyen doit être écarté.
En ce qui concerne le droit au respect des biens :
17. Aux termes de l'article 1er du protocole n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ". Il est soutenu que ces stipulations ont été méconnues dès lors que l'autorité expropriante a augmenté l'emprise à acquérir de 8 m² par rapport à la surface indiquée lors de l'enquête parcellaire sans en informer les expropriés, entraînant une situation d'insécurité et d'imprévisibilité. Toutefois, ainsi qu'il a été indiqué au point n°8, la différence constatée entre la surface mentionnée lors de l'enquête parcellaire et celle annexée à l'arrêté attaqué n'a pas été de nature à induire les propriétaires en erreur quant à la nature et aux conséquences de l'opération, compte tenu de la faible différence de métrage et de l'indication exacte des références cadastrales indiquées. Cette différence n'a dès lors pas été de nature à entraîner une situation d'insécurité et d'imprévisibilité contraire aux stipulations précitées.
En ce qui concerne le détournement de pouvoir :
18. Si les requérants font valoir qu'ils sont seuls concernés par l'expropriation et que cette opération est uniquement motivée par la volonté des élus qui entretiennent un rapport conflictuel avec eux, le détournement de pouvoir ainsi allégué ne ressort d'aucune pièce du dossier et n'est pas établi ;
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... et Mme E...ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté préfectoral du 5 août 2016.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Huismes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. E... et Mme E...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il a lieu, en revanche, de mettre à la charge les requérants une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 13 février 2018 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. E...et Mme E...devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de leur requête sont rejetés.
Article 3 : M. E... et Mme E...verseront à la commune de Huismes une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à Mme D...E..., au ministre de l'intérieur, à la commune de Huismes.
Une copie sera en outre adressée au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 28 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président,
- M. Degommier, président assesseur,
- M. Mony, premier conseiller.
Lu en audience publique le 19 juillet 2019.
Le rapporteur,
S. DEGOMMIER
Le président,
J-P. DUSSUET
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT01457