Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M.A..., MmeB..., M. C...et M. et Mme I...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 12 mai 2017 par lequel le maire de la commune de Luisant a délivré à la SCI Luisant-Chalouzeau un permis de construire en vue de l'édification de 25 logements sociaux.
Par un jugement n° 1703260 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 septembre 2018, le 3 avril 2019, M. A..., MmeB..., M. C...et M. et MmeI..., représentés par MeK..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 juillet 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Luisant du 12 mai 2017 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Luisant une somme de 2 000 euros au profit de chacun des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A...et les autres requérants soutiennent que :
- le projet litigieux ne permet pas d'assurer le respect des prescriptions édictées par l'avis du service d'incendie et de secours (SDIS) d'Eure et Loir du 4 mai 2017 ;
- le SDIS n'aurait pas édicté ces prescriptions si le projet avait respecté les exigences minimales de sécurité et d'accessibilité ;
- le projet litigieux méconnaît les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-4 du code de l'urbanisme, ainsi que celles de l'article UR 3 du plan local d'urbanisme communal ;
- le projet litigieux ne respecte pas les dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l'incendie des bâtiments d'habitation ;
- les voies de desserte sont trop étroites et leur partie terminale ne permet pas le retournement des véhicules de secours ;
- le projet litigieux méconnaît les dispositions des articles R. 111-26 et R. 111-27 du code de l'urbanisme ;
- leur requête d'appel est recevable dès lors qu'elle comporte l'exposé de moyens d'annulation, lesquels peuvent être identiques à ceux déjà soulevés en première instance.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 14 janvier 2019 et le 20 mai 2019, la commune de Luisant, représentée par MeG..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit solidairement mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par les requérants n'est fondé.
Par deux mémoires en défense, enregistré le 27 février 2019 et le 17 mai 2019, la SCI Luisant-Chalouzeau, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise solidairement à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SCI fait valoir que la requête d'appel de M. A...et des autres requérants est irrecevable en ce que les requérants n'y développent aucun moyen d'appel et qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par les requérants n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mony,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de MeK..., représentant M. A...et les autres requérants, et de MeG..., représentant la commune de Luisant.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de la commune de Luisant (Eure et Loir) a délivré le 12 mai 2017 à la SCI Luisant-Chalouzeau un permis de construire autorisant cette dernière à réaliser un programme composé de 25 logements sociaux sur des parcelles cadastrées section AH n° 01 26 à 28, 39, 06 61 et 06 62. La légalité de cette autorisation de construire a été contestée par M.A..., MmeB..., M. C...et M. et MmeI.... Ces derniers relèvent appel du jugement du 5 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Sur la recevabilité de la requête d'appel :
2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête (...) Elle contient l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".
3. La requête d'appel de M. A...et des autres requérants, qui ne se limite pas à reproduire littéralement leurs écritures de première instance, mais énonce à nouveau de manière partiellement différente les moyens justifiant selon eux l'annulation demandée au tribunal administratif, ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article R. 411-1. La fin de non recevoir opposée par la SCI Luisant-Chalouzeau ne peut ainsi qu'être écartée.
Sur les conclusions en annulation :
4. Aux termes de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation et ses caractéristiques, à compromettre la conservation ou la mise en valeur d'un site ou de vestiges archéologiques "
5. Il ressort des pièces du dossier que la réalisation du projet litigieux est de nature à provoquer la disparition de plusieurs jardins potagers. Toutefois, M. A...et les autres requérants n'apportent aucun élément de nature à établir que ceux-ci doivent être assimilés à un site ou à des vestiges archéologiques au sens des dispositions précitées. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet litigieux méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme.
6. Aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme ; " Le permis ou la décision prise sur déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. ". Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ".
7. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet ne fait l'objet d'aucune protection environnementale particulière et s'insère dans un environnement bâti, au niveau de l'avenue de la République, qui ne présente aucun intérêt particulier. Si le tènement foncier servant d'assiette au projet litigieux occupe, en coeur d'îlot, un espace jusqu'alors dépourvu de constructions, aujourd'hui essentiellement composé de jardins potagers lui ayant permis de conserver son caractère naturel, cet îlot n'en présente pas moins le caractère d'un îlot urbain délimité par la rue du pressoir, l'avenue de la République et le sentier des vignes, seul côté à ne pas être bordé de constructions. Cet espace apparaît dépourvu de tout intérêt paysager notable, de tels jardins ne faisant l'objet d'aucune mesure de protection particulière. Il ne fait pas d'avantage l'objet d'une quelconque mesure de protection à titre patrimonial ou architectural. Le sentier des vignes ne présente pas lui-même un intérêt paysager ou environnemental particulier. Le projet litigieux, qui comporte lui-même un volet paysager caractérisé notamment par la présence de plusieurs espaces végétalisés, ne peut ainsi, dans un tel contexte être regardé comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles R. 111-26 et R. 111-27 précités du code de l'urbanisme.
8. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
9. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire, et en particulier du plan-B..., que la voie de desserte interne du projet litigieux, qui se termine en impasse, même si elle comporte effectivement dans sa partie terminale une aire de retournement, ne respecte pas l'exigence d'un rayon intérieur de braquage d'une longueur minimum de 11 mètres, telle que le prévoit l'arrêté du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l'incendie des bâtiments d'habitation, ce que rappelait d'ailleurs l'avis émis le 4 mai 2017 par le service d'incendie et de secours d'Eure et Loir. Comme le soutiennent les requérants, un tel avis, dès lors que ce point particulier, qui présente le caractère d'une prescription, n'est pas respecté, devait nécessairement donner lieu à la présentation d'un projet modifié permettant d'assurer la conformité du projet avec cette exigence particulière. Dès lors, le projet litigieux, qui ne permet pas dans son état actuel de respecter les exigences de sécurité minimale d'accessibilité permettant notamment aux véhicules d'incendie de faire demi-tour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
10. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
11. Il résulte de ce qui précède qu'il est possible de remédier à l'illégalité mentionnée au point 8 par un permis de régularisation portant sur le respect de la dimension minimum de l'aire de retournement. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt afin que, dans ce délai, la commune de Luisant procède à une régularisation et notifie à la cour le permis de construire ainsi délivré.
D E C I D E :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête présentée par M. A...et autres en tant qu'elle est dirigée contre le permis de construire, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, pour permettre à la commune de Luisant de notifier à la cour un permis de construire régularisant le vice tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., à Mme H...B..., à M. J... C..., à M. et Mme F...et Sylvie I..., à la commune de Luisant et à la SCI Luisant-Chalouzeau.
Délibéré après l'audience du 29 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président,
- M. Degommier, président assesseur,
- M. Mony, premier conseiller,
Lu en audience publique le 18 juin 2019.
Le rapporteur,
A. MONY
Le président,
J-P. DUSSUET
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées,
de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT03433 2