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07/06/2019 | FRANCE | N°18NT03917

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 07 juin 2019, 18NT03917


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite du 19 juin 2018 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 3 avril 2018 de l'autorité consulaire à Conakry (Guinée) portant refus de délivrance d'un visa de court séjour pour visite familiale.

Par un jugement n° 1806258 du 19 octobre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Pr

océdure devant la cour :

Par une requête enregistrée devant la cour le 31 octobre 2018...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite du 19 juin 2018 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 3 avril 2018 de l'autorité consulaire à Conakry (Guinée) portant refus de délivrance d'un visa de court séjour pour visite familiale.

Par un jugement n° 1806258 du 19 octobre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée devant la cour le 31 octobre 2018, MmeB..., représentée par MeE..., demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 19 octobre 2018 ;

- d'annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 19 juin 2018 ;

- d'enjoindre au ministre de lui accorder un visa de court séjour ;

- de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- une erreur d'appréciation a été commise quant au lien de filiation avec son fils Hamdiate Diakite et méconnaît l'article 47 du code civil ;

- aucun risque de détournement de l'objet du visa n'existe ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 mars 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête en se référant à ses écritures de première instance

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009, modifié;

- le règlement (UE) 2016/399 du parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 ;

- le règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2019, le rapport de Mme Brisson.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., veuveC..., ressortissante guinéenne, née en 1936, a sollicité auprès de l'autorité consulaire de France à Conakry (Guinée) la délivrance d'un visa de court séjour pour visite familiale qui lui a été refusé le 3 avril 2018. Le recours formé devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France le 18 avril 2018, a été implicitement rejeté par le ministre de l'intérieur. Par un jugement du 19 octobre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Mme B...relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Pour refuser de délivrer le visa sollicité, la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a implicitement confirmé les motifs retenus par l'autorité consulaire tenant à l'absence d'établissement du lien de filiation entre Mme B...et M.C..., au risque de détournement de l'objet du visa et à l'insuffisance des ressources de son fils pour la prendre en charge.

3. Aux termes de l'article 6 du règlement (UE) n° 2016/399 du 9 mars 2016 : " I - Pour un séjour prévu sur le territoire des Etats membres, d'une durée n'excédant pas 90 jours (...) les conditions d'entrée sont les suivantes : / a) être en possession d'un document de voyage en cours de validité (...) / b) être en possession d'un visa en cours de validité si celui-ci est requis en vertu du règlement (CE) n° 539/2001 du Conseil sauf s'ils sont titulaires d'un titre de séjour ou d'un visa de long séjour en cours de validité ; / c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer de moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans leur pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ; (...) ".

4. Aux termes de l'article 21 du règlement du parlement et du conseil susvisé du 13 juillet 2009 : " Lors de l'examen d'une demande de visa uniforme, le respect par le demandeur des conditions d'entrée énoncées à l'article 5, paragraphe 1, point a), c) d) et e) du code frontière Schengen est vérifié et une attention particulière est accordée à l'évaluation du risque d'immigration illégale ou du risque pour la sécurité des Etats membres que présenterait le demandeur ainsi qu'à sa volonté de quitter le territoire des Etats membres avant la date d'expiration du visa demandé (...) / 3° Lorsqu'il contrôle si le demandeur remplit les conditions, le consulat vérifie : (...) b) la justification de l'objet et des conditions de séjour envisagé fournie par le demandeur et si celui-ci dispose de moyens de subsistance suffisants tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans son pays d'origine ou de résidence (...) 4°) le consulat vérifie, le cas échéant, la durée des séjours antérieurs et envisagés afin de s'assurer que l'intéressé n'a pas dépassé la durée maximale du séjour autorisé sur le territoire des Etats membres (...) ".

5. L'obtention d'un visa de court séjour est subordonnée à la condition que le demandeur justifie à la fois de sa capacité à retourner dans son pays d'origine et de moyens de subsistance suffisants pendant son séjour. Il appartient au demandeur de visa dont les ressources personnelles ne lui assurent pas ces moyens d'apporter la preuve que les ressources de la personne qui l'héberge et qui s'est engagée à prendre en charge ses frais de séjour au cas où il n'y pourvoirait pas sont suffisantes pour ce faire. Cette preuve peut résulter de la production d'une attestation d'accueil validée par l'autorité compétente et comportant l'engagement de l'hébergeant de prendre en charge les frais de séjour du demandeur, sauf pour l'administration à produire des éléments de nature à démontrer que l'hébergeant se trouverait dans l'incapacité d'assumer effectivement l'engagement qu'il a ainsi souscrit.

6. En l'espèce, si compte tenu en particulier de son âge, la requérante ne justifie pas disposer de revenus propres, il ressort toutefois des pièces du dossier que M.C..., son fils, fournit l'attestation d'accueil des articles L 211-2 et L 211-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, validée par le maire de la commune d'Issy-les-Moulineaux faisant en particulier ressortir qu'il dispose d'un logement de 94 m2 dans lequel vit sa famille composée de 4 personnes. Il justifie également disposer de revenus s'élevant à plus de 5 000 euros mensuels. Dans ces conditions, Mme B...est fondée à soutenir qu'en estimant qu'elle ne disposait pas de moyens de subsistance et de retour suffisants au sens de l'article 21 du règlement précité, le ministre a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

8. Toutefois alors que d'une part, la délivrance d'un visa de court séjour n'est pas subordonnée à l'établissement d'un lien de filiation entre le demandeur de visa et la personne chez qui il est reçu et que, d'autre part, l'âge de ce demandeur ne saurait à lui seul démontrer l'existence d'un risque de détournement de l'objet du visa, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur ces motifs.

9. Il résulte de ce qui précède, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique que la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France délivre le visa de court séjour sollicité par Mme B...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il y a lieu, par suite, d'adresser une injonction en ce sens à la commission.

Sur les frais liés au litige:

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 19 octobre 2018 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours contre la décision par laquelle les autorités consulaires françaises à Conakry ont refusé de délivrer à Mme B...un visa de court séjour est annulée.

Article 3 : Il est enjoint à la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France de délivrer un visa de court séjour à Mme B...dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2019, où siégeaient :

- M. Perez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M.A...'hirondel, premier conseiller.

.

Lu en audience publique, le 7 juin 2019.

Le rapporteur,

C. BRISSONLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 18NT03917


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03917
Date de la décision : 07/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : LEBRIQUIR

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-06-07;18nt03917 ?
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